dimanche 13 août 2017

Rendez-vous avec Satan (Maw’id ma’ iblis, 1955)


 موعد مع إبليس
ﺇﺧﺮاﺝ: كامل التلمساني 


Kamel El-Telmissani a réalisé Rendez-Vous avec Satan en 1955.
Distribution :Zaki Rostom, Mahmoud El Meleigy, Abdel Moneim Ibrahim, Cariman, Mounir Mourad, Wedad Hamdy, Soliman El Gendy
Scénario : Galil El Bendary, d'après Faust de Goethe.
Musique : Mounir Mourad


Mahmoud El Meleigy

Mounir Mourad

Zaki Rostom

Cariman et Zaki Rostom

Zaki Rostom et Mahmoud El Meleigy

Soliman El Gendy

Mounir Mourad et Cariman

Abdel Moneim Ibrahim et Zaki Rostom

Mounir Mourad, Wedad Hamdy et Mahmoud El Meleigy

Cariman et Mahmoud El Meleigy





Résumé


Le docteur Ragab Ibrahim dirige une clinique privée dans le quartier de la mosquée Hussein. Les affaires ne vont pas bien, les patients aisés se font soigner dans d’autres établissements plus réputés. Les maigres honoraires du docteur suffisent à peine à payer les charges de la clinique. Ragab vit avec sa fille Nadia, son petit garçon, Adel et son neveu Mounir qui s’est installé chez eux depuis la mort de son père. Mounir rêve de devenir chanteur et il très amoureux de sa cousine. Le médecin a perdu sa femme il y a longtemps déjà et après son travail il se consacre tout entier à ses enfants qu’il ne peut gâter comme il le souhaiterait. 
Un soir sa voiture tombe en panne sur une route isolée. Il est secouru par un certain docteur Nabil qui en réalité est Satan. La voiture redémarre et le docteur Ragab propose à son confrère de le ramener en ville. Pendant le trajet les deux hommes discutent et sympathisent. Ils promettent de se revoir. Le docteur Ragab se rend chez son nouvel ami. Ce dernier lui fait entrevoir les pouvoirs extraordinaires dont il dispose. A son tour, Nabil est reçu dans la maison de Ragab. Il fait la connaissance de toute la famille. Nadia est tout de suite attirée par la personnalité mystérieuse de leur invité. Elle ne tardera pas à avouer qu’elle est amoureuse de lui. Mais Satan ne perd pas de vue son objectif : faire signer un contrat à Ragab. Il parvient à ses fins en assurant sa victime qu’elle deviendra ainsi riche et célèbre. Dès que le médecin trop naïf a signé, Nabil révèle sa véritable identité. A partir de ce moment, tout change dans la vie du docteur : la clientèle de sa clinique ne cesse de croître, il peut offrir à son fils la bicyclette dont celui-ci rêvait depuis si longtemps, il achète une grosse voiture et il pense agrandir sa clinique. Cette réussite soudaine fait oublier au docteur à qui il la doit : lui et les siens sont enfin heureux et cela lui suffit. Pourtant, ce « bonheur » apparaît tout de suite bien fragile. Nadia, sa fille, revient traumatisée d’une soirée passée chez Nabil. Elle délire toute la nuit. Heureusement, elle se remet vite grâce à son père et à son cousin. Le coup de grâce arrive avec Adel : il tombe gravement malade et il est condamné. Ragab comprend que c’est le prix à payer pour sa fortune soudaine. Mais il ne capitule pas. Il décide de combattre Satan et grâce à Dieu, il finit par le vaincre : son fils est sauvé.


Critique

Nous avions un Faust expressionniste -le Faust de Murnau (1926)-, un Faust fantastico-poétique-La Beauté du Diable de René Clair (1950)- voici le Faust patchwork égyptien.
Ce Rendez-Vous avec Satan, c’est plusieurs films en un :
C’est d’abord une chronique sociale proche du néo réalisme italien avec ce gentil médecin qui soigne les pauvres gratuitement et qui n’a pas les moyens d’offrir à son fils le vélo dont il rêve. 
C’est aussi un mélodrame avec un petit enfant gravement malade condamné à une mort certaine et son père qui perd la vue en luttant de toutes ses forces pour le sauver.
La comédie n’est pas non plus oubliée avec le personnage du neveu, un artiste de cabaret qui semble tout droit sorti des Branquignols de Robert Dhery 
Mais bien sûr, c’est avant tout une fable fantastique avec notamment le château du Diable, décor en carton-pâte dans la grande tradition des films d’horreur de série B et un dénouement qui vire au grand-guignol en multipliant les trucages simplistes et les gros plans sur des visages grimaçants.
Et on termine par la touche de glamour hollywoodien avec l’actrice Cariman qui arbore tous les attributs de la pin-up pour GI’s, notamment la poitrine généreuse magnifiée par ce soutien-gorge conique en forme d’obus inventé par le milliardaire Howard Hugues pour l’actrice Jane Russell.
Avec tout ça, on se dit qu’il va être bien difficile de faire un bon film et on aura raison. Sans doute le projet de Kamel El-Telmissani était de réaliser une œuvre ambitieuse en s’emparant d’un des grands mythes de la culture universelle. Malheureusement, n’est pas Goethe qui veut, et il y a loin entre son petit médecin et l’éminent savant de l’auteur allemand comme il y a loin entre sa morale pour classes primaires et la philosophie aux mille arcanes du maître de Weimar. Nous avons ici une version « médiocre » du drame de Faust. Tout sue la médiocrité : les personnages, leurs caractères, leurs mobiles, leurs passions. Même le diable fait preuve d’une certaine pusillanimité dans son entreprise de destruction, c’est dire ! En fait, ce qui manque, c’est la démesure du drame original.
Autre grande faiblesse du film : les personnages n’évoluent pas. Leur comportement n’est nullement modifié par ce qui leur arrive. Pauvre puis riche, heureux puis malheureux, le brave docteur reste le brave docteur et ce, jusqu’à la fin (Dans ce film, Zaki Rostom surjoue le veuf doux et attentionné. On le préfère dans les rôles de méchants, sa vraie spécialité !). Cette sclérose est le lot de tous les personnages, à une exception près : le diable lui-même. Et c’est peut-être en cela que réside l’élément original de cette adaptation de Faust. Il nous montre un tentateur qui va lui-même connaître la tentation, en la personne de la fille du docteur. Les scènes les plus réussies du film car les moins convenues sont celles où la jeune fille et Satan se retrouvent dans un café au bord du Nil. Oubliant tous les autres clients de l’établissement, ils sont l’un contre l’autre, la jeune femme écrasant sa poitrine contre le torse de son séducteur. La première donne tous les signes de l’abandon imminent tandis que le second, frémissant de désir, contemple avec ravissement la créature qui par sa beauté et sa sensualité lui fait perdre tout contrôle de lui-même. Méphistophélès vaincu par Marguerite !
Comment conclure ?
Si on reste indulgent : un film par certains côtés divertissant voire amusant, même si on se doute que ce n’était pas l’intention première de Kamel El-Telmissani. 
Si on est plus sévère : au départ, un projet sérieux à forte teneur culturelle ; au final, une œuvre impersonnelle sans envergure.

Appréciation : 2/5
**
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

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