إخراج : كمال سليم
Distribution : Farid Al Atrache (Farid), Taheya Carioca (la danseuse Bahiya
Shakashak), Madiha Yousri (Ilham), Mary Moneib (Falah Hanim, la tante
d’Elham), Bishara Wakim (Ghadban Al Absi), Abbas Fares (Basiouni, l’oncle
d’Elham), Mohamed Kamal El Masry (le vendeur de cigarettes), Hassan Fayek
(Wagdi), Abd El Fatah El Kosary (le garde du corps de Ghadban), Sayed
Suleiman (le serviteur de Farid), Fouad Fahim (le comptable de Farid), Abdel
Halim Morsy (le médecin), Hassan Kamel (le propriétaire du cabaret), Gina
(une danseuse du cabaret)
Scénario : Youssef Wahby et Kamal Selim
Dialogues : Badie' Khairy
Paroles des chansons : Ahmed Rami, Youssef Badrous, Aboul Seoud Al Ibiary,
Bayram Al-Tunsy
Musique : Farid Al Atrache
Production : les films du Nil
Farid A Atrache et Taheya Carioca |
Taheya Carioca et Bishara Wakim |
Hassan Fayek |
Madiha Yousri et Farid Al Atrache |
Abd El Fatah El Kosary et Bishara Wakim |
Farid Al Atrache et Mary Moneib |
Abbas Fares et Mary Moneib |
Madiha Yousri et Mohamed Kamel El Masry |
Résumé
Farid est un jeune homme riche et insouciant. Il a une passion : la musique et la chanson. Il passe l’essentiel de son temps à sortir et à courtiser les femmes. Il est un habitué du cabaret le Salon de la Gazelle Rouge et il est devenu l’amant de la danseuse Bahia, une personne au caractère bien trempé et à la jalousie féroce. Sa vie dissolue l’entraîne parfois dans des situations périlleuses. Un soir qu’il doit fuir au plus vite un appartement, il tombe du balcon et termine sa chute dans le salon du voisin du dessous, non sans avoir brisé en mille morceaux la grande fenêtre de la pièce. Ce voisin, c’est le marchand Basiouni. Il était en train de dîner avec sa femme et sa nièce qu’il a recueillie depuis qu’elle est orpheline. Pour expliquer cette arrivée spectaculaire, Farid prétend qu’il est atteint de somnambulisme. Son pied le fait atrocement souffrir. On fait venir le docteur Metwalli qui habite l’immeuble. Celui-ci impose à Farid une immobilité totale. Basiouni accepte de le garder à son domicile jusqu’à son rétablissement. Et comme Farid a prétendu qu’il était au chômage, il lui propose de donner des cours de piano à sa nièce. La jeune fille qui se prénomme Ilham n’est pas insensible au charme de leur invité surprise et ce n’est pas sans tristesse qu’elle le voit repartir chez lui, une fois qu’il peut à nouveau poser le pied à terre. Dans son hôtel particulier, Farid tombe nez à nez sur son comptable qui une nouvelle fois veut l’alerter sur sa situation financière très inquiétante. Le jeune homme n’écoute que d’une oreille car il n’a qu’une seule idée en tête rejoindre Bahia au Salon de la Gazelle Rouge.
On découvre que Bahia est aussi courtisée par un très riche marchand, Ghadban Al Absi, qui la couvre de cadeaux et celui-ci n’apprécie guère la présence de Farid. Et quand il surprend les deux amants en train de s’embrasser, il veut aussitôt tuer son rival. Bahia lui fait croire qu’ils étaient en train de répéter un numéro pour le spectacle. C’est ainsi que Farid chante pour la première fois devant un public. Il suscite l’admiration de tous les spectateurs et le directeur du cabaret lui propose un contrat qu’il refuse.
Le lendemain, Farid se rend chez Ilham mais il y retrouve Ghadban Al Absi et son fidèle garde du corps. Basiouni, l’oncle d’Ilham et l’amoureux fortuné de Bahia avaient un rendez-vous d’affaires. Ce dernier révèle à toue la famille que Farid est un chanteur de cabaret. Cette nouvelle n’est pas du tout du goût de Basiouni qui chasse aussitôt le jeune homme. Mais Ilham ne veut pas renoncer à celui qu’elle aime passionnément. Elle se rend au Salon de la Gazelle Rouge et découvre Farid en train de sabler le champagne avec des femmes. Ilham décide de rompre.
Pour ne rien arranger, les créanciers du jeune homme ont perdu patience. Ils s’emparent de tous ce qui lui appartenait : son hôtel particulier, ses meubles et même sa voiture. Il ne lui reste plus rien. Quand Ilham apprend la nouvelle, elle rejoint Farid pour le soutenir. Ce dernier lui offre la dernière chose qu’il possède encore : un titre de propriété sur des terres que son grand-père avait achetées dans le désert pensant y trouver des gisements d’hydrocarbures. Pour vivre, Farid accepte la proposition du directeur du Salon de la Gazelle Rouge et il devient le partenaire de scène de la volcanique Bahia. Ghadban Al Absi a enfin compris que Farid n’est plus un rival car il aime ailleurs. Il va même intervenir pour que Basiouni accepte de marier sa nièce à son amoureux. Las ! la cérémonie est gâchée par un fâcheux contretemps. La danseuse invitée n’est autre que Bahia et quand celle-ci découvre que le fiancé est Farid elle entre dans une rage folle, apostrophant son ex-amant et cassant tout ce qui se trouve à sa portée. Devant un tel scandale, Ilham s’évanouit. Basiouni chasse Farid pour la seconde fois.
Ghabdban Al Absi décide de donner une leçon à Bahia. Avec des complices, il perturbe sa prestation sur la scène du cabaret et tout se termine par une bagarre générale. Face à ce déchaînement de violence, Bahia s’évanouit et elle est secourue par Farid. Elle comprend alors qu’elle avait été trop loin lors du mariage. Le lendemain, elle se rend chez Ilham pour s’excuser. Entretemps, la jeune orpheline et son oncle ont découvert que les terres du grand-père de Farid recèlent effectivement des gisements importants d’hydrocarbures. Farid est donc riche. Basiouni se rend lui-même au cabaret pour restituer au chanteur ses actes de propriété. Farid refuse de les reprendre. Alors Basiouni accepte de lui donner la main d’Ilham.
Critique
Rêves de jeunesse est d’abord le film d’une génération. Il réunit un petit groupe de jeunes artistes très talentueux. Le metteur en scène , Kamel Selim, n’a pas encore trente ans (Il mourra à trente-deux ans en 1945) et il a attribué tous les rôles principaux de son film à des acteurs de son âge. A part Taheya Carioca qui a déjà une solide expérience du cinéma bien qu’elle n’ait que 27 ans, tous les autres sont des débutants. Farid Al Atrache a commencé sa carrière cinématographique l’année précédente et c’est son deuxième film. Madiha Yousri a vingt-quatre ans. Elle a été découverte par Mohamed Karim cette même année et comme pour Farid Al Atrache, c’est son deuxième film.
Cette comédie musicale s’intitule Rêves de Jeunesse, un titre à la Charles Trenet et, effectivement, on retrouve dans ce film la légèreté et la fantaisie de l’univers du chanteur français. Dans ce monde, rien n’est grave, rien ne pèse, même la mort est envisagée avec une certaine désinvolture. Le personnage incarné par Farid Al Atrache aurait fort bien pu reprendre à son compte l’un des premiers succès du fou chantant « Je chante » , enregistré en 1937 : "Je chante/Je chante!/Je chante soir et matin,/Je chante sur mon chemin,/Je chante, je vais de ferme en château/Je chante pour du pain je chante pour de l'eau"
Le héros de Kamel Selim connaît des revers de fortune sans en être réellement affecté et pour survivre il devra chanter, comprenant alors que la chanson est sa seule raison de vivre.
On notera que ce personnage est ouvertement inspiré de la propre vie de Farid Al Atrache. A cette époque, le chanteur syrien est devenu une vedette grâce à la radio mais aussi grâce à son premier film, Victoire de la Jeunesse d’Ahmed Badrakhan. . Comme le héros de Rêves de Jeunesse, Farid Al Atrache passe ses nuits dans les cabarets, collectionne les conquêtes féminines et accumule les dettes (il était un joueur impénitent !)
Le héros de Rêves de Jeunesse se montre léger, frivole et parfois très maladroit , mais en toutes circonstances il garde son optimisme et surtout sa générosité. Il n’hésite pas à venir en aide à une maîtresse qui pourtant a fait échouer son mariage et il refuse qu’on lui restitue un acte de propriété qui ferait de lui un homme riche. D’ailleurs dans ce film même les méchants ont un cœur : ils sont capables de pleurer au spectacle de deux êtres qui s’aiment ! Et comme dans les contes de fées, on assiste dans le dénouement à une réconciliation générale faisant le bonheur de tous les personnages.
L’interprétation est bien sûr excellente, aussi bien pour les rôles principaux que pour les secondaires. Farid Al Atrache manifeste une agilité et une exubérance qu’il perdra au fil des années. Bishara Wakim et Abd El Fatah El Kosary forment un duo comique plein de saveur : les deux acteurs semblent beaucoup s’amuser à jouer les méchants d’opérette. Mais c’est Taheya Carioca qui emporte tout : son immense talent et sa sensualité explosive sont les atouts majeurs du film. Pour que le plaisir du spectateur soit complet, elle arbore des costumes qui ne cachent rien de sa plastique impressionnante.
Avec la Volonté sortie en 1939, Kamel Selim avait réalisé le premier film réaliste égyptien. Il y affichait ses préoccupations sociales à travers l’évocation d’un quartier populaire du Caire touché par la crise économique. Avec Rêves de Jeunesse, il prouve qu’il est tout aussi talentueux dans la comédie et il ouvre la voie à d’autres cinéastes comme Abbas Kamel ou Helmy Rafla. Ces deux réalisateurs plus âgés que lui ne tourneront leurs premiers films qu’après sa mort. A la fin des années quarante, ils offriront au public arabe des comédies spirituelles et brillantes, dans le même esprit que Rêves de Jeunesse, avant que ne s’impose sur les écrans un comique plus farcesque et plus populaire avec le règne sans partage d’Ismaïl Yassin.
Appréciation : 4/5
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Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin