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jeudi 13 octobre 2016

La Ruelle de l'Amour (Darb al Hawa, 1983)

درب الهوى
إخراج : حسام الدي مصطفى



Houssam Al-Din Mustafa a réalisé La Ruelle de l'Amour en 1983.
Distribution : Ahmed Zaki (Abdel Aziz), Madiha Kamel (Samiah), Mahmoud Abdel Aziz (Saleh), Hassan Abdin (Pacha Abdel Hafez), Farouk El Feshawi (Mourad), Shwikar (Madame Hosnia), Farouk Falawkas (Souksouk), Yousra (Elham), Ibrahim Abdelrazek (le frère d'Elham), Qadria Kamel (la mère d'Elham), Salwa Khattab (Safinaz)

Ahmed Zaki

Madiha Kamel

Mahmoud Abdel Aziz

Hassan Abdin et Farouk El Feshawi,

Shwikar et Farouk Falawkas,

Mahmoud Abdel Aziz et Shwikar

Yousra

Madiha Kamel

Yousra et Ahmed Zaki

Ibrahim Abdelrazek et Qadria Kamel

Salwa Khattab

Farouk El Feshawi et Madiha Kamel


Résumé

Dans les années trente la prostitution est légale en Egypte. Madme Hosnia tient un établissement appelé Hôtel des Princesses, rue de l’Amour. Saleh proxénète et amant de Madame Hosnia dirige la petite entreprise d’une main de fer.
Parmi les pensionnaires, on découvre :
Zinat qui a cinq enfants et un mari malade ;
Elham dont le père est mort et le frère emprisonné pour drogue. Elle doit donc subvenir au besoin de sa mère et de sa sœur. Elle a commencé comme couturière, femme de chambre puis a terminé comme prostituée.
Enfin, Samia qui a fui les mauvais traitements que lui infligeait sa belle-mère. Elle est entrée à l’hôtel comme femme de chambre puis est devenue elle aussi prostituée. Samia est l’objet des assiduités de Saleh mais elle a toujours refusé de coucher avec lui.
Au service des filles de l’hôtel, il y a un garçon efféminé Souksouk.
Parmi ses clients les plus importants, Madame Hosnia est fière de compter le pacha Abdel Hafez, dirigeant du parti au pouvoir, amateur de pratiques masochistes. Il se rend régulièrement à l’hôtel des Princesses pour se faire insulter par les prostituées. Zinat est sa fille préférée. A l’extérieur, le pacha Abdel Hafez se présente comme un homme de morale et de principes. Sa devise est « Vertu et Honneur ». Dans ses meetings, il exige l’interdiction de la prostitution en Egypte.
Abdel Hafez a un neveu, Abdel Aziz. Il est professeur de philosophie à l’université. Dans ses cours, il montre que le criminel ne naît pas criminel mais que le milieu joue un rôle majeur dans son évolution. Abdel Aziz doit épouser sa cousine Safinaz. Celle-ci est une jeune femme frivole et délurée qui entretient en secret une relation amoureuse avec Mourad, un ami d’Abdel Aziz. Mourad est un jeune homme pauvre, très ambitieux. Il souhaiterait entrer au service du Pacha et compte bien profiter de l’amitié d’Abel Aziz pour y arriver. En attendant, il se fait entretenir par Safinaz.
Un jour, Abdel Aziz et Mourad se rendent à l’Hôtel des Princesses. Le professeur de philosophie y rencontre Elham dont il tombe aussitôt amoureux. Il retrouve régulièrement la jeune femme pour parler. C’est lors de l’une de ses visites, qu’il découvre que son oncle est un habitué de l’établissement. Abdel Aziz veut épouser la jeune prostituée et décide de rompre avec sa cousine, Safinaz ce qui lui attire la colère de tous ses proches. De son côté, Mourad fait la connaissance de Samia. Il lui promet le mariage mais voilà, il est pauvre. Samia a une idée : elle fait croire à Saleh qu’elle lui accordera tout ce qu’il désire s’il vole les bijoux d’Hosnia. Mais une fois le trésor entre ses mains, Samia retrouve Mourad, celui qu’elle aime vraiment pour le lui confier. Découvrant la trahison de Samia, Saleh fait irruption chez Mourad et menace les deux tourtereaux d’un long poignard. Mourad parvient à désarmer Saleh. Renversement des alliances : Mourad décide de lâcher Samia pour fuir seul avec l’argent. La jeune femme est folle de rage. Profitant d’une chute de Mourad, Samia le poignarde. Hagarde, elle se laisse entraîner par Saleh hors de l’appartement. Le proxénète veut fuir avec elle et les bijoux, loin du Caire.
Pendant ce temps-là, Abdel Aziz se marie. Il a dû céder à la pression familiale. Mais lors de la cérémonie, il comprend qu’il est en train de faire une erreur. Soudain, il se lève et s’en prend à son oncle. Il révèle publiquement sa fréquentation régulière de l’établissement d’Hosnia. Après avoir provoqué ce scandale, il court rejoindre Elham. Malheureusement, le frère de celle-ci est sorti de prison et a retrouvé sa trace. Il s’est fait passer pour un client de la maison et quand il se retrouve face à sa sœur, il l’égorge. Abdel Aziz arrive trop tard.


Critique

Houssam El Din Mostafa signe ce film resté célèbre pour avoir été interdit à sa sortie. La censure a réclamé que certaines scènes soient supprimées. Une fois les suppressions effectuées, on a trouvé en haut lieu que les scènes de sexe étaient encore trop nombreuses et l’interdiction fut maintenue. Il fallut au producteur une action en justice pour qu’enfin le film put être projeté en salle. 
Madame Anastasie a toujours conféré aux œuvres qu’elle poursuit un prestige considérable, aussi bien auprès du public, ainsi alléché, qu’auprès de la postérité. Grâce à son zèle un peu brouillon, elle a sauvé bien des œuvres dont les qualités seules n’auraient pas suffi à leur éviter le bannissement éternel dans les ténèbres de l’oubli. Alors qu’en est-il de cette Ruelle de l’Amour ? Est-elle digne de l’honneur que lui fit en son temps la censure ? 
Ce film a bien des atouts. C’est l’adaptation d’un roman d’Ismaïl Wali El Din. Ce dernier est connu pour aborder dans ses oeuvres des thèmes sulfureux. Il est notamment l’auteur du Bain de Malatili adapté au cinéma par Salah Abou Seif, roman qui évoque de manière explicite l’homosexualité masculine. Dans La Ruelle de l’Amour, l’écrivain veut dénoncer la manière dont sont considérées les prostituées dans la société égyptienne. Il s’en prend notamment à ces hommes politiques réactionnaires qui face à leurs électeurs se font les chantres de la rigueur morale et qui ensuite vont passer leurs soirées dans les maisons closes les plus huppées de la capitale. Houssam El Din Mostafa ne gomme rien de la virulence de l’œuvre originale et sa satire de la classe politique à travers le personnage du pacha Abdel Hafez joué par Hassan Abdin est tout à fait réjouissante. 
Autre qualité : pour son film, le réalisateur a convoqué les plus grands acteurs du moment. On a loué à juste titre la prestation de Mahmoud Abdel Aziz en maquereau cynique et brutal et celle de Yousra en prostituée au grand cœur (un rôle qui sera déterminant pour sa carrière.) mais celle de Shwikar en tenancière de bordel est tout aussi digne d’éloges. 
Enfin, et le contraire aurait été étonnant de la part de Houssam El Din Mostafa, la satire sociale n’a pas étouffé le sens du spectacle dont a toujours fait preuve celui-ci. La reconstitution de toute une époque à travers les décors et les costumes a été réalisée avec soin. On a privilégié les couleurs criardes et les matières satinées si bien que l’ensemble baigne dans une vulgarité chatoyante qui sied bien au propos. 
Néanmoins, cette Ruelle de l’Amour comporte aussi bien des défauts : la caricature est parfois outrancière et l’intrigue comporte quelques invraisemblances un peu gênantes. L’auteur du roman n’a pas du tout apprécié cette adaptation de son œuvre (Il le rappelait encore dans un entretien de 2015). Pourtant je ne suis pas sûr que le roman soit totalement exempt des faiblesses constatées dans le film. Prenons par exemple la satire sociale qui reste toujours dans des limites « acceptables » par le plus grand nombre. Dans le cinéma égyptien, il y a une règle intangible : une femme qui s’est livrée à la prostitution est condamnée à mourir. Quelles que soient les raisons qui l’ont poussée à ce métier, quelles que soient les qualités morales dont elle a fait preuve, elle ne peut espérer un retour à l’existence banale de la femme honnête, mariée et mère de famille. On feint de s’apitoyer sur le sort de ces travailleuses du sexe exploitées par les hommes mais on finit toujours par légitimer l’opprobre dont elles sont l’objet. Pour ces femmes, pas de rédemption sinon par la mort. Cette Ruelle de l’Amour n’échappe pas à cette règle. Là encore, il s’agit sans doute de ne pas heurter l’hypocrisie du grand public en cette matière. 

Appréciation : 3/5
***
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

jeudi 11 septembre 2014

Le Marché aux Poissons (Shader Essamak, 1986)

شادر السمك
على عبدالخالق : إخراج


 

Ali Abdel Khalek a réalisé Le Marché aux Poissons en 1986.
Distribution : Ahmed Zaki, Nabila Ebeid, Mohamed Reda, Khloud, Ali El Sherif, Mohamed Abou Achich, Ahmed Abou Abeya
Une histoire de Nabil Nasar
Scénario : Abdel Gawad Youssef
Musique : Hassan Abo El Saoud et Yahya Al Muji 

Ahmed Zaki

Nabila Ebeid et Ahmed Zaki

Mohamed Reda


Mohamed Abou Achich

Khloud et Ahmed Zaki

Ahmed Abou Abeya



Résumé

Le mari de Gamalat travaille au marché aux poissons. Il meurt brutalement. Pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa fille, Gamalat veut reprendre l’activité de son mari. Les négociants du marché s’y opposent. Ahmad prend sa défense et se met à son service.   Grâce à leur association, leur affaire se développe très rapidement. Ils se marient et Gamalat abandonne leur commerce pour s’occuper de son foyer. Malgré la rivalité des autres marchands, Ahmad devient l’un des plus gros commerçants du marché. Il roule en Mercédès et fréquente les milieux aisés de la capitale. Il rencontre une jeune fille, riche héritière, et en tombe amoureux. Il décide de l’épouser après avoir divorcé de sa première femme. Gamalat est folle de rage. Ahmad n’en a cure car il nage en plein bonheur. Pendant ce temps-là les autres marchands se regroupent pour lutter contre Ahmad dont ils ne supportent plus la réussite insolente. Ils décident de l’éliminer. Un matin, Ahmad entre dans le marché aux poissons. Il meurt sous les balles de tueurs postés à l’étage.


Critique

 En 1956, Salah Abou Seif réalise Le Costaud. C’est l’histoire d’Haridi, un jeune villageois qui trouve un emploi dans le marché central des fruits et légumes du Caire. Il va prendre la tête de la rébellion contre le vieil Abou Zeid, le roi du marché qui imposait des règles injustes à tous les autres marchands. Celui-ci sera emprisonné et Haridi prendra sa place, usant des mêmes méthodes que son prédécesseur pour asseoir son pouvoir.
Trente ans plus tard, Ali Abdel Khalek reprend le sujet et il ya bien des similitudes entre le destin d’Ahmad, le héros du Marché aux Poissons et celui du Costaud. Mais les temps ont changé. Au début du film de Salah Abou Seif, Haridi veut donner à son combat une dimension collective. Ahmad, lui, reste seul dans sa lutte contre les autres marchands. Il ne veut pas abolir un ordre injuste mais s’y intégrer et en profiter. De même, en 1986, ce ne sont plus les faibles qui s’insurgent contre un système imposé par les puissants mais les puissants qui se liguent contre un petit nouveau qui veut devenir plus puissants qu’eux. Le Marché aux Poissons est donc une fable politique sur la société égyptienne des années 80. Ce film montre comment le libéralisme économique a conduit les gens du peuple à considérer la  réussite personnelle comme la seule issue possible. Et pour réussir, il faut s’endurcir. Au début du film, c’est un mouvement de compassion qui pousse Ahmad  à prendre la défense de la veuve sans ressource. Fortune faite, il s’en débarrasse sans aucun regret. Avec ses concurrents, même attitude et il n’hésite pas à les rudoyer s’ils osent se plaindre.
Au final, le propos d’Ali Abdel Khalek est encore plus pessimiste que celui de Salah Abou Seif. 
Le Marché aux Poissons ne fait pas trop pâle figure à côté de son prestigieux modèle. Ali Abdel Khalek l’a tourné comme un western. Les nombreuses scènes de bagarre sont toujours impressionnantes. La fin est digne d’un film de Sergio Leone : le marché est brusquement déserté par tous les employés ; les marchands baissent les uns après les autres le rideau métallique de leur  boutique ; le héros vêtu d’un impeccable costume blanc,  reste seul ; les armes des tueurs embusqués entrent en action ;  le corps d’Ahmad est déchiqueté par les balles ; les marchands relèvent leur rideau métallique, ils sourient. Durant toute la scène, pas un mot, pas un cri.
Dans cette oeuvre d'Ali Abdel Khalek, Ahmed Zaki et Nabila Ebeid dominent l’interprétation de tout leur exceptionnel talent.

appréciation : 4/5
****

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin