jeudi 11 septembre 2014

Le Marché aux Poissons (Shader Essamak, 1986)

شادر السمك
على عبدالخالق : إخراج


 

Ali Abdel Khalek a réalisé Le Marché aux Poissons en 1986.
Distribution : Ahmed Zaki, Nabila Ebeid, Mohamed Reda, Khloud, Ali El Sherif, Mohamed Abou Achich, Ahmed Abou Abeya
Une histoire de Nabil Nasar
Scénario : Abdel Gawad Youssef
Musique : Hassan Abo El Saoud et Yahya Al Muji 

Ahmed Zaki

Nabila Ebeid et Ahmed Zaki

Mohamed Reda


Mohamed Abou Achich

Khloud et Ahmed Zaki

Ahmed Abou Abeya



Résumé

Le mari de Gamalat travaille au marché aux poissons. Il meurt brutalement. Pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa fille, Gamalat veut reprendre l’activité de son mari. Les négociants du marché s’y opposent. Ahmad prend sa défense et se met à son service.   Grâce à leur association, leur affaire se développe très rapidement. Ils se marient et Gamalat abandonne leur commerce pour s’occuper de son foyer. Malgré la rivalité des autres marchands, Ahmad devient l’un des plus gros commerçants du marché. Il roule en Mercédès et fréquente les milieux aisés de la capitale. Il rencontre une jeune fille, riche héritière, et en tombe amoureux. Il décide de l’épouser après avoir divorcé de sa première femme. Gamalat est folle de rage. Ahmad n’en a cure car il nage en plein bonheur. Pendant ce temps-là les autres marchands se regroupent pour lutter contre Ahmad dont ils ne supportent plus la réussite insolente. Ils décident de l’éliminer. Un matin, Ahmad entre dans le marché aux poissons. Il meurt sous les balles de tueurs postés à l’étage.


Critique

 En 1956, Salah Abou Seif réalise Le Costaud. C’est l’histoire d’Haridi, un jeune villageois qui trouve un emploi dans le marché central des fruits et légumes du Caire. Il va prendre la tête de la rébellion contre le vieil Abou Zeid, le roi du marché qui imposait des règles injustes à tous les autres marchands. Celui-ci sera emprisonné et Haridi prendra sa place, usant des mêmes méthodes que son prédécesseur pour asseoir son pouvoir.
Trente ans plus tard, Ali Abdel Khalek reprend le sujet et il ya bien des similitudes entre le destin d’Ahmad, le héros du Marché aux Poissons et celui du Costaud. Mais les temps ont changé. Au début du film de Salah Abou Seif, Haridi veut donner à son combat une dimension collective. Ahmad, lui, reste seul dans sa lutte contre les autres marchands. Il ne veut pas abolir un ordre injuste mais s’y intégrer et en profiter. De même, en 1986, ce ne sont plus les faibles qui s’insurgent contre un système imposé par les puissants mais les puissants qui se liguent contre un petit nouveau qui veut devenir plus puissants qu’eux. Le Marché aux Poissons est donc une fable politique sur la société égyptienne des années 80. Ce film montre comment le libéralisme économique a conduit les gens du peuple à considérer la  réussite personnelle comme la seule issue possible. Et pour réussir, il faut s’endurcir. Au début du film, c’est un mouvement de compassion qui pousse Ahmad  à prendre la défense de la veuve sans ressource. Fortune faite, il s’en débarrasse sans aucun regret. Avec ses concurrents, même attitude et il n’hésite pas à les rudoyer s’ils osent se plaindre.
Au final, le propos d’Ali Abdel Khalek est encore plus pessimiste que celui de Salah Abou Seif. 
Le Marché aux Poissons ne fait pas trop pâle figure à côté de son prestigieux modèle. Ali Abdel Khalek l’a tourné comme un western. Les nombreuses scènes de bagarre sont toujours impressionnantes. La fin est digne d’un film de Sergio Leone : le marché est brusquement déserté par tous les employés ; les marchands baissent les uns après les autres le rideau métallique de leur  boutique ; le héros vêtu d’un impeccable costume blanc,  reste seul ; les armes des tueurs embusqués entrent en action ;  le corps d’Ahmad est déchiqueté par les balles ; les marchands relèvent leur rideau métallique, ils sourient. Durant toute la scène, pas un mot, pas un cri.
Dans cette oeuvre d'Ali Abdel Khalek, Ahmed Zaki et Nabila Ebeid dominent l’interprétation de tout leur exceptionnel talent.

appréciation : 4/5
****

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

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