Affichage des articles dont le libellé est Kamel El-Telmissani. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Kamel El-Telmissani. Afficher tous les articles

dimanche 13 janvier 2019

Les réalisateurs : Kamel El Telmissani (1915-1972)

كامل التلمساني

Passionné par tous les arts, esthète et érudit, Kamel El Telmissany s’intéresse tout d’abord à la photographie et surtout à la peinture. Dès les années trente, il organise des expositions consacrées aux tendances les plus modernes de l’art et il y présente ses propres œuvres. A la veille de la seconde guerre mondiale, il fonde avec le poète Georges Henein (1914-1973), le groupe surréaliste égyptien « Art et Liberté ». Il est l’un des signataires du manifeste « Vive l’Art dégénéré ! », rédigé en arabe et en français et distribué dans les rues du Caire en décembre 1938. A cette époque, Kamel El Telmissany est un militant trotskiste, antifasciste et son œuvre picturale dénonce la misère dans laquelle est maintenue l’écrasante majorité du peuple égyptien. Il constate très vite que ses toiles n’ont aucun écho auprès des classes laborieuses alors qu’elles ont un très grand succès auprès de tous ces nantis qu’il méprise. Il renonce à la peinture et se tourne vers le cinéma qui lui semble un art authentiquement populaire. 
En 1943, il rejoint les studios Misr. Il est à la fois assistant, monteur, producteur. 
En 1945, il réalise Le Marché Noir, un film considéré aujourd’hui comme un classique. Malheureusement, ce film n’aura aucun succès à sa sortie et par la suite, Kamel El Telmissany sera contraint de tourner des œuvres beaucoup plus commerciales mais dénouées d'intérêt.
En 1961, il doit s'exiler et s’installe au Liban où il écrit pour la radio et la télévision. Il collabore notamment avec les frères Rahbani et leur protégée, la grande chanteuse Fayrouz. 
Il a écrit deux livres sur le cinéma. 


Trois films de Kamel El Telmissani ont été mentionnées dans ce blog :


Le Marché Noir (Al-Souq Al-Sawdaa, 1945)
avec Imad Hamdi (Hamed), Aqila Ratib (Nagiah), Zaki Rostom (Abu Mahmoud, le père de Nagiah), Thuraya Fakhry (la mère de Nagiah), Mohamed Kamal Al Masry (Hashem, le coiffeur), Thuraya Helmy (Naïma), Ferdoos Hassan (la seconde épouse d’Abu Mahmoud), El Sayed Bedeir (le boulanger), Abd El Fattah El Kossary (l’épicier), Abdel Hamid Zaki (le boucher), Hassan Kamel (le tailleur), Aziza Mohamed (la femme du coiffeur), Abdel Moneim Ismaïl, Abdel Meguid Choukry (le vendeur de cigarettes), Salha Kasin, Nagma Hussein
Scénario : Kamel El Telmissany
Musique : Mohammad Hassan Al Shugai, Abdel Halim Noweira, Abdul Hamid Hosman, Bayram El Tunsi
Production : les Studios Misr
figure dans la liste des 100 films les plus importants de l'histoire du cinéma égyptien


Classique. Nous sommes au Caire durant la seconde guerre mondiale. Hamed est un jeune homme qui vit dans un petit appartement sur le toit d’un immeuble qui appartient à Abu Mahmoud. La principale qualité d’Ahmed est sa générosité. Il a toujours à cœur de venir en aide à tous ceux qui autour de lui en ont besoin. Ahmed file le parfait amour avec Nagiah, la fille de son propriétaire. Ils veulent se marier. Mais entre temps la situation économique du pays se complique à cause de la guerre. Avec d’autres commerçants du quartier, Abu Mahmoud se lance dans le marché noir, profitant sans scrupules des difficultés d’approvisionnement que connaissent les habitants de la capitale. Quand Ahmed s’en aperçoit, il n’hésite pas à s’opposer au vieil homme…
Considéré comme l'un des premiers films politiques du cinéma égyptien. Il a été réalisé en 1943 mais à cause de la censure du roi Farouk et des Anglais, il ne sortira en salle que deux ans plus tard.


L'Ecole des Filles  (Madrasat Al Banat, 1955)
avec Zeinat Olwi, Serag Mounir, Kwathar Shafik, Aziza Helmy, Abdel Salam Al Nabulsi, Kamal Al Shennawi, Zinat Sedki, Reyad El Kasabgy, Safa El Gamil, Thuraya Fakhry, Aziza Helmy, Abdel Ghani El Nagdi, Layla Hamdy
Scénario : Ali El Zorkani et Helmy Halim
Musique : Mounir Mourad, Kamal El Tawil, Saïd Mostafa, Fathy Qoura
appréciation : 2/5


Kamal est un jeune homme qui mène une vie de Dom Juan multipliant les conquêtes. Il doit épouser sa cousine et malgré l’empressement de son oncle, il n’est pas disposé à s’assagir. Le jour même de son mariage alors que tout le monde l’attend, il préfère passer du bon temps dans son appartement avec une maîtresse. Et c’est son meilleur ami qui a la mission délicate de calmer la fureur de l’oncle et le dépit de la fiancée. La cérémonie est annulée. Un jour, Kamal fait la rencontre de Nadia. Elle est étudiante dans un pensionnat de jeunes filles où l’on enseigne le chant et la danse. Les deux jeunes gens sont séduits l’un par l’autre. Le bourreau des coeurs éprouve pour la première fois le véritable amour. Malheureusement, tout s’oppose à leur union. Si Kamal est déjà engagé auprès de sa cousine, Nadia doit aussi épouser un cousin resté au village avec toute sa famille.


Rendez-vous avec Satan (Maw’id ma’ iblis, 1955)
avec Zaki Rostom (le docteur Ragab Ibrahim), Mahmoud El Meleigy (le docteur Nabil/Satan), Abdel Moneim Ibrahim (Hassan, l’assistant du docteur Ragab Ibrahim), Cariman (Nadia, la fille du docteur Ragab Ibrahim), Wedad Hamdy (la servante), Abdel Ghani El Nagdi (le concierge), Soleiman El Gendy (Adel, le fils du docteur Ragab), Mounir Mourad (Mounir, le neveu du docteur Ragab), Lotfi Al Hakim (le fabricant d’appareils médicaux), Mohamed Shawki (le vendeur de bicyclettes)
Scénario : Galil El Bendary, d'après Faust de Goethe.
Musique : Mahmoud Al Sharif et Mounir Mourad + Rossini, l’Ouverture de l’opéra Guillaume Tell
Production : Films Ahmed Darwish
appréciation : 4/5

Fantastique. Le docteur Ragab Ibrahim dirige une clinique privée dans le quartier de la mosquée Hussein. Les affaires ne vont pas bien, les patients aisés se font soigner dans d’autres établissements plus réputés. Les maigres honoraires du docteur suffisent à peine à payer les charges de la clinique. Ragab vit avec sa fille Nadia, son petit garçon, Adel et son neveu Mounir qui s’est installé chez eux depuis la mort de son père. Mounir rêve de devenir chanteur et il très amoureux de sa cousine. Le médecin a perdu sa femme il y a longtemps déjà et après son travail il se consacre tout entier à ses enfants qu’il ne peut gâter comme il le souhaiterait. 
Un soir sa voiture tombe en panne sur une route isolée. Il est secouru par un certain docteur Nabil qui en réalité est Satan. La voiture redémarre et le docteur Ragab propose à son confrère de le ramener en ville. Pendant le trajet les deux hommes discutent et sympathisent. Ils promettent de se revoir.


Notre avis : en dépoussiérant le mythe de Faust et en mélangeant allègrement les genres et les registres, Kamel El-Telmissani a réussi à créer une œuvre unique, ne ressemblant à aucune autre. Il ne s’est pas laissé impressionner par l’ombre tétanisante de Goethe, le grand écrivain allemand du XIXe siècle dont les deux Faust constituent des œuvres majeures de la culture universelle. Contournant les références littéraires ou cinématographiques, Kamel El Telmissani a su s’approprier la légende germanique avec une totale liberté et une certaine impertinence pour nous offrir une œuvre pleine d’intelligence et d’humour. Ce «Rendez-vous avec Satan » constitue l’une des plus belles réussites d’un cinéaste égyptien dont la carrière a été gâchée par bien des vicissitudes.

dimanche 13 août 2017

Rendez-vous avec Satan (Maw’id ma’ iblis, 1955)


 موعد مع إبليس
ﺇﺧﺮاﺝ: كامل التلمساني 


Rendez-vous avec Satan de Kamel El Telmissany (Maw’id ma’ iblis, 1955)
avec Zaki Rostom (le docteur Ragab Ibrahim), Mahmoud El Meleigy (le docteur Nabil/Satan), Abdel Moneim Ibrahim (Hassan, l’assistant du docteur Ragab Ibrahim), Cariman (Nadia, la fille du docteur Ragab Ibrahim), Wedad Hamdy (la servante), Abdel Ghani El Nagdi (le concierge), Soleiman El Gendy (Adel, le fils du docteur Ragab), Mounir Mourad (Mounir, le neveu du docteur Ragab), Lotfi Al Hakim (le fabricant d’appareils médicaux), Mohamed Shawki (le vendeur de bicyclettes)
Scénario : Galil El Bendary, d'après Faust de Goethe.
Musique : Mahmoud Al Sharif et Mounir Mourad + Rossini, l’Ouverture de l’opéra Guillaume Tell
Production : Films Ahmed Darwish
 
Mahmoud El Meleigy

Mounir Mourad

Zaki Rostom

Cariman et Zaki Rostom

Zaki Rostom et Mahmoud El Meleigy

Soliman El Gendy

Mounir Mourad et Cariman

Abdel Moneim Ibrahim et Zaki Rostom

Mounir Mourad, Wedad Hamdy et Mahmoud El Meleigy

Cariman et Mahmoud El Meleigy





Résumé


Le docteur Ragab Ibrahim dirige une clinique privée dans le quartier de la mosquée Hussein. Les affaires ne vont pas bien, les patients aisés se font soigner dans d’autres établissements plus réputés. Les maigres honoraires du docteur suffisent à peine à payer les charges de la clinique. Ragab vit avec sa fille Nadia, son petit garçon, Adel et son neveu Mounir qui s’est installé chez eux depuis la mort de son père. Mounir rêve de devenir chanteur et il très amoureux de sa cousine. Le médecin a perdu sa femme il y a longtemps déjà et après son travail il se consacre tout entier à ses enfants qu’il ne peut gâter comme il le souhaiterait. 
Un soir sa voiture tombe en panne sur une route isolée. Il est secouru par un certain docteur Nabil qui en réalité est Satan. La voiture redémarre et le docteur Ragab propose à son confrère de le ramener en ville. Pendant le trajet les deux hommes discutent et sympathisent. Ils promettent de se revoir. Le docteur Ragab se rend chez son nouvel ami. Ce dernier lui fait entrevoir les pouvoirs extraordinaires dont il dispose. A son tour, Nabil est reçu dans la maison de Ragab. Il fait la connaissance de toute la famille. Nadia est tout de suite attirée par la personnalité mystérieuse de leur invité. Elle ne tardera pas à avouer qu’elle est amoureuse de lui. Mais Satan ne perd pas de vue son objectif : faire signer un contrat à Ragab. Il parvient à ses fins en assurant sa victime qu’elle deviendra ainsi riche et célèbre. Dès que le médecin trop naïf a signé, Nabil révèle sa véritable identité. A partir de ce moment, tout change dans la vie du docteur : la clientèle de sa clinique ne cesse de croître, il peut offrir à son fils la bicyclette dont celui-ci rêvait depuis si longtemps, il achète une grosse voiture et il pense agrandir sa clinique. Cette réussite soudaine fait oublier au docteur à qui il la doit : lui et les siens sont enfin heureux et cela lui suffit. Pourtant, ce « bonheur » apparaît tout de suite bien fragile. Nadia, sa fille, revient traumatisée d’une soirée passée chez Nabil. Elle délire toute la nuit. Heureusement, elle se remet vite grâce à son père et à son cousin. Le coup de grâce arrive avec Adel : il tombe gravement malade et il est condamné. Ragab comprend que c’est le prix à payer pour sa fortune soudaine. Mais il ne capitule pas. Il décide de combattre Satan et grâce à Dieu, il finit par le vaincre : son fils est sauvé.


Critique

Nous avions un Faust expressionniste -le Faust de Murnau (1926)-, un Faust dans un style réaliste poétique-La Beauté du Diable de René Clair (1950)- voici le Faust patchwork égyptien.

Ce Rendez-Vous avec Satan, c’est plusieurs films en un :

C’est d’abord une chronique sociale proche du néo réalisme italien avec ce médecin généreux qui soigne les pauvres gratuitement et qui n’a pas les moyens d’offrir à son fils le vélo dont il rêve.
C’est aussi un mélodrame avec un petit enfant, gravement malade et condamné à une mort certaine, dont le père devient aveugle en luttant de toutes ses forces pour le sauver.
La comédie n’est pas non plus oubliée avec le personnage du neveu, un artiste de cabaret qui semble tout droit sorti des Branquignols de Robert Dhery
Mais bien sûr, c’est avant tout une fable fantastique avec notamment le château du Diable, décor en carton-pâte dans la grande tradition des films d’horreur de série B et un dénouement qui vire au grand-guignol en multipliant les trucages simplistes et les gros plans sur des visages grimaçants. Evidemment, tout cela n’est pas à prendre au premier degré : l’intention parodique est évidente et les nombreuses séquences chantées et dansées nous rappellent qu’il ne faut pas prendre trop au sérieux ce Rendez-vous avec Satan.
Et on termine par la touche de glamour hollywoodien avec l’actrice Cariman qui arbore tous les attributs de la pin-up pour GI’s, notamment la poitrine généreuse magnifiée par ce soutien-gorge conique en forme d’obus inventé par le milliardaire Howard Hugues pour Jane Russell. Le cinéaste, un peu espiègle, nous montre Satan le Tentateur lui-même très tenté par les charmes de Nadia, la fille du docteur incarnée par Cariman. Parmi les scènes les plus audacieuses du film, on trouve celles où la jeune femme et Satan se retrouvent dans un café au bord du Nil. Oubliant tous les autres clients de l’établissement, ils sont l’un contre l’autre, Nadia écrasant sa poitrine contre le torse de son séducteur. La première donne tous les signes de l’abandon imminent tandis que le second, frémissant de désir, contemple avec ravissement la créature qui par sa beauté et sa sensualité lui fait perdre tout contrôle de lui-même. Méphistophélès vaincu par Marguerite ?

En dépoussiérant le mythe de Faust et en mélangeant les genres et les registres, Kamel El-Telmissani a réussi à créer une œuvre unique, ne ressemblant à aucune autre. Il ne s’est pas laissé impressionner par l’ombre tétanisante de Goethe, le grand écrivain allemand du XIXe siècle dont les deux Faust constituent des œuvres majeures de la culture universelle. Contournant les références littéraires ou cinématographiques, Kamel El Telmissani a su s’approprier la légende germanique avec une totale liberté et une certaine impertinence pour nous offrir une œuvre pleine d’intelligence et d’humour. Ce Rendez-vous avec Satan constitue l’une des plus belles réussites d’un cinéaste égyptien dont la carrière a été gâchée par bien des vicissitudes.
Appréciation : 4/5
****
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

dimanche 26 mars 2017

L'Ecole des Filles (Madrasat Al Banat, 1955)


مدرسة البنات
ﺇﺧﺮاﺝ: كامل التلمساني


Kamel El Telmissany a réalisé L'Ecole des Filles en 1955. 
Distribution : Naïma Akef, Zeinat Olwi, Serag Mounir, Kwathar Shafik, Aziza Helmy, Abdel Salam Al Nabulsi, Kamal Al Shennawi, Zinat Sedki, Reyad El Kasabgy, Safa El Gamil, Thuraya Fakhry,  Aziza Helmy, Abdel Ghani El Nagdi, Layla Hamdy
Scénario : Ali El Zorkani et Helmy Halim
Musique : Mounir Mourad, Kamal El Tawil, Saïd Mostafa, Fathy Qoura


Serag Mounir et Kwathar Shafik



Abdel Salam El Nabulsi et Kamal Shennawi


Kamal Al Shennawi


Aziza Helmy


Abdel Salam El Nabulsi


Zinat Sedky et Reyad El Kasabgy



















Abdel Salam El Nabulsi et Naïma Akef


















Résumé

Kamal est un jeune homme qui mène une vie de Dom Juan multipliant les conquêtes. Il doit épouser sa cousine et malgré l’empressement de son oncle, il n’est pas disposé à s’assagir. Le jour même de son mariage alors que tout le monde l’attend, il préfère passer du bon temps dans son appartement avec une maîtresse. Et c’est son meilleur ami qui a la mission délicate de calmer la fureur de l’oncle et le dépit de la fiancée. La cérémonie est annulée. Un jour, Kamal fait la rencontre de Nadia. Elle est étudiante dans un pensionnat de jeunes filles où l’on enseigne le chant et la danse. Les deux jeunes gens sont séduits l’un par l’autre. Le bourreau des coeurs éprouve pour la première fois le véritable amour. Malheureusement, tout  s’oppose à leur union. Si Kamal est déjà engagé auprès de sa cousine, Nadia doit aussi épouser un cousin resté au village avec toute sa famille. Ce cousin est un gentil demeuré au physique repoussant. Jamais elle ne pourra l’aimer mais son oncle est un homme brutal dont on ne peut discuter les décisions. Elle doit se soumettre. Le jour des noces est arrivé. Alors que Nadia s’apprête à signer l’acte de mariage, ses amies de pensionnat, entraînées par Kamal et la directrice de l’école, font irruption dans la salle. Une bagarre s’ensuit. Heureusement, l’oncle de notre héroïne n’est pas un mauvais bougre et il  finit par renoncer à son projet insensé. Kamal et Nadia peuvent se marier.


Critique
 
Dans ce film nous retrouvons Naima Akef dans l’un de ses rôles de prédilection : la jeune orpheline au passé douloureux mais dont le dynamisme et la joie de vivre finissent toujours par triompher des épreuves. Cette Ecole des Filles exploite le filon que représente à l’époque la danseuse. Elle a été découverte en 1949 par Hussein Fawzi. Ce dernier l’a aussitôt épousée pour la faire tourner chaque année dans une nouvelle production qui à chaque fois devient un gros succès commercial. Ce film de Kamel El Telmissany est en fait un intermède entre deux réalisations du mari mais il aurait très bien pu être tourné par celui-ci : même style, mêmes personnages, même univers…
Si comme danseuse, Naima a un talent incontestable, avec une sensualité qui se manifeste dans chacun de ses gestes, en revanche, comme actrice, elle est beaucoup plus limitée. On sent chez elle un désir de bien faire mais son jeu est plus celui d’une meneuse de revue avec des effets un peu grossiers que celui d’une comédienne capable d’exprimer toute la gamme des sentiments avec naturel et sincérité. Et il faut bien admettre que le jeu de Naima Akef n’est jamais sincère et n’est jamais naturel. Mais sans doute n’a-t-elle pas appris. Elle vient du cirque et du cabaret, c’est là qu’elle s’est formée et dans ces deux arts du spectacle, l’énergie compte davantage que l’émotion.
Ce film a eu comme scénariste Ali El Zorkani. Ce n’est pas le premier venu : il apparaît au générique de très grands films et il a été professeur de scénario à l’Institut Supérieur du Cinéma du Caire. Et peut-être est-il bon de rappeler que Kamel El Telmissany, le réalisateur, n’est pas n’importe qui non plus : il a réalisé en 1945 le Marché Noir qui figure dans la liste des quinze plus grands films égyptiens de tous les temps).
Ce prestigieux tandem n’a pourtant pas brillé avec cette comédie musicale. Même Naima Akef a été mieux servie dans d’autres films. Ici elle est réduite à jouer la petite demoiselle qui cabotine sans cesse et que l’on voit danser avec ses amies de pensionnat dans de gentilles fêtes réunissant élèves et parents. On avait déjà assisté à ces mêmes scènes dans Aziza réalisé l’année précédente par Hussein Fawzi mais au moins, grâce à sa double identité, Naima Akef avait eu la possibilité d’exprimer toute la sensualité dont je parlais plus haut, notamment dans les séquences se déroulant au cabaret. Dans ce nouveau film, on ne quitte pas l’école et c’est bien triste.
Ce qui sauve en partie cette petite comédie, c’est la prestation d’Abdel Salam Al Nabulsi. Il a un rôle secondaire, comme d’habitude, mais quel talent ! Il joue un personnage qui est depuis longtemps secrètement amoureux de l’héroïne. Il la présente à Kamal, son meilleur ami, et c’est donc lui qui est à l’origine de leur amour. Il devra, désespoir au cœur mais en ami fidèle, œuvrer pour le bonheur de Kamal et de Nadia, sans jamais rien dire de ses affres. Un personnage comique mais infiniment malheureux qu’Abdel Salam Al Nabulsi incarne avec une telle conviction qu’il le hisse au niveau des types créés par Molière dans ses grandes comédies.

Appréciation : 2/5
**
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

vendredi 29 novembre 2013

Les 100 films les plus importants (2) Les années quarante

En 2006, la bibliothèque d’Alexandrie forme un comité de trois spécialistes (Ahmed El-Hadari, Samir Farid et Kamal Ramzi) afin de dresser la liste des 100 films les plus importants de l’histoire du  cinéma égyptien.


Les Années Quarante 


7) Gharam wa Intiqam (Amour et Vengeance, 1944, Youssef Wahby)
غرام و إنتقام
 

Avec Asmahan, Anwar Wagdi, Youssef Wahby
Musique : Farid Al Atrache
Une chanteuse égyptienne célèbre fait ses adieux à la scène à la veille de son mariage avec un homme riche et vaniteux. Mais peu après, ce dernier est tué par balle. Sa veuve décide de se venger de celui qu’elle croit être l’assassin et que la justice a relâché faute de preuve. Son arme: la séduction… mais elle tombera amoureuse elle aussi. Ce film rencontra un succès considérable en partie provoqué par la mort brutale de sa vedette féminine, Asmahan (sœur de Farid Al-Atrache), en plein tournage.  Le 14 juillet 1944,  sa Rolls Royce tombe dans les eaux du Nil. Elle et sa confidente meurent noyées. Asmahan n’avait que 26 ans.
En raison de la personnalité de la chanteuse et de sa vie tumultueuse, les rumeurs les plus folles ont couru sur les circonstances de cet accident (On accusa les services secrets britanniques). Les Studios Misr n’hésitèrent pas à  exploiter ce drame pour lancer leur film. 


8) Al-Souq Al-Sawdaa (Le Marché Noir, 1945, Kamel El-Telmissani)
السوق السوداء


Avec Imad Hamdi, Aqila Ratib, Zaki Rostom
Considéré comme l'un des premiers films politiques du cinéma égyptien. Il a été réalisé en 1943 mais à cause de la censure du roi Farouk et des Anglais, il ne sortira en salle que deux ans plus tard. Le film dénonce ceux qui profitent de la guerre pour spéculer sur les produits de première nécessité.


9) Antar wi Abla (Antar et Abla, 1945, Niazi Mostafa)
عنتر وعبلة

Avec Kouka et Seraj Munir
Niazi Mostafa inaugure la série des Antar et Abla , films d'aventures bédouines qui remporteront tous un gros succès commercial. C'est l'adaptation d’un récit de chevalerie qui a pour héros le poète anté-islamique Antar, fils de l’Émir de la tribu des Bani Abs et d’une esclave noire, qui vécut au VIe siècle. Antar tombe amoureux de sa cousine Abla. Mais à cause de ses origines et de la couleur de sa peau, le père de Abla refuse leur union.
Kouka, qui incarne Abla est la femme de Niazi Mostafa.



 10)  Li'bat al Sitt (La femme et le pantin, 1946, Wali Eddine Sameh)
لعبة الست


Avec Taheya Carioca et Naguib al Rihani
Adaptation du roman de Pierre Louÿs. L'action se déroule pendant la seconde guerre mondiale.
Hassan travaille dans un grand magasin du Caire, propriété du richissime Isaac. Quand sa femme devient une vedette de cinéma, les parents de celle-ci exigent qu’elle divorce pour épouser un riche libanais. Pendant ce temps-là, l’Egypte est envahie par les forces allemandes conduites par Rommel. Isaac, le propriétaire du grand magasin doit quitter la capitale…


11)  Al-Na’ib Al-’Aam (Le Procureur Général, 1946, Ahmed Kamel Morsi) 
النائب العام


avec Abbas Fares, Seraj Munir, Saïd Abou Bakr, Zaki Rostom, Madiha Yousri, Zouzou Hamdi El Hakim, Mahmoud El Meleigy, Abdel-Wareth Asar, Ibrahim Omara et Hussein Riad
Scénario : Ahmed Shokry
Le fils d'un procureur général est inculpé pour le meurtre de sa maîtresse. Pour sauver l'honneur de la famille, son père lui demande de se suicider mais il n'en a pas le courage. Lors du procès, l'avocat du jeune meurtrier plaidera les circonstances atténuantes en soulignant la rudesse de l'éducation qu'il avait reçue d'un père incapable de la moindre compassion....


12) Ghazal Al-Banat (Flirt de Jeunes Filles, 1949, Anwar Wagdi)  
غزل البنات

  

Une comédie musicale avec Leila Mourad et Anwar Wagdi
Le scénario est de Naguib al Rihani et la musique de Mohamed Abdel Wahab.
Himam, un instituteur sans le sou, est engagé par un homme richissime pour donner des leçons particulières à sa fille. Il tombe amoureux de la jeune fille mais lui cache ses sentiments.
Apparaît à la dixième place dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps.