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lundi 12 février 2024

Je m'en vais ('Iiniy rahila, 1955)

إني راحلة
إخراج : عز الدين ذو الفقار


Ezzel Dine Zulficar a réalisé Je m'en Vais en 1955.

Distribution : Imad Hamdi (Ahmed), Madiha Yousri (Aïda), Serag Mounir (le père d’Aïda), Zinat Sedqy (la nourrice), Zeinab Sedky (la grand-mère d’Aïda), Mahmoud Azmy (Ali, le frère d’Aïda), Rushdy Abaza (Toto, le fils de Zaki Pacha), Ibrahim Hechmat (Zaki Pacha, le premier ministre), Abdel Aziz Ahmed (Fayek Bey, le confident de Aïda), Salah Nazmi (Houda, l’ami de Toto), Ellen Deatto (Tamtam, la maîtresse de Toto et la femme de Houda), Ibrahim Hechmat (Zaki Pacha, le premier ministre)
Scénario : Youssef El Sebai
Production : Madiha Yousri

Madiha Yousri et Serag Mounir


Imad Hamdi et Madiha Yousri


Zinat Sedki


Madiha Yousri et Mahmoud Azmy


Abdel Aziz Ahmed


Rushdy Abaza et Ellen Deatto



















Résumé

Aïda est la fille de Mostafa Pacha Abdul Rahman. Elle vit avec son père, sa grand-mère et son frère. Leur mère est partie alors qu’elle était enfant pour vivre avec un autre homme. Son père a voulu la préserver en lui donnant une éducation rude qui n’accordait aucune place à l’amour et à la sensibilité. Régulièrement, ils avaient la visite d’Ahmed, leur cousin. Aïda aimait jouer et se chamailler avec lui.

Les années ont passé. Aïda est devenue une jeune femme. Un jour, Ahmed qui avait disparu pour se consacrer à ses études refait son apparition. Il porte l’uniforme d’officier de cavalerie. Les deux jeunes gens reprennent leurs conversations aigres douces d’autrefois mais ils finissent par reconnaître l’un l’autre qu’ils s’aiment. Mostafa Pacha voit d’un très mauvais œil cette idylle naissante et il exige de sa fille qu’elle rompe immédiatement avec son cousin. Mais Aïda ne peut y consentir. Les jours suivants, Ahmed ne donne plus signe de vie et Aïda tombe gravement malade. Enfin Ahmed reparaît, il était parti en voyage. Tous les deux sont heureux de se retrouver et la jeune fille se rétablit aussitôt. Ils reprennent leurs promenades et leurs discussions. Enfin, ils échangent leur premier baiser.

Ahmed décide d’affronter son oncle pour lui demander la main de sa cousine mais celui-ci refuse tout net de la lui donner. Mostafa Pacha Abdul Rahman considère que la situation de son neveu est trop modeste et il souhaite pour sa fille un mariage avec un garçon fortuné. Pour lui, c’est une nécessité pressante : il a été imprudent en bourse et il a perdu une grande partie de sa fortune. Son salut viendra de son ami Zaki Pacha qui s’apprête à devenir premier ministre. Cet éminent personnage a un fils Toto et il serait tout à fait favorable à ce que celui-ci épouse Aïda.

Les premières rencontres entre les deux promis sont désastreuses. Tout les sépare. Toto est un jeune homme superficiel qui ne pense qu’â s’amuser. Ahmed partage le jugement sévère d’Aïda mais l’un et l’autre ne peuvent rien contre la volonté du père. D’autant plus que Mostafa Pacha a menacé de s’en prendre à Ahmed si sa fille n’acceptait pas le mari qu’on lui imposait. Contre son gré, Aïda épouse donc Toto. De son côté, Ahmed se marie avec une voisine.

Aïda ne va pas bien. Son existence de femme mariée est triste à mourir. Son mari n’a aucune attention pour elle et elle apprend très vite qu’il entretient une relation adultère avec la femme de son meilleur ami. Ce dernier lui propose même de devenir son amant à titre de compensation. La corruption de ce milieu la dégoûte. Un soir elle se rend là où elle avait coutume d’aller avec Ahmed, un lieu retiré plein de souvenirs heureux. Et comme par miracle, elle y retrouve l’officier de cavalerie qui avait eu la même idée qu’elle. Il lui apprend que sa femme est morte en accouchant d’un enfant mort né.

Ils décident de ne plus jamais se quitter. Ils trouvent refuge dans un chalet près de la mer mais leur bonheur sera bien court. Le lendemain, Ahmed est pris de vives douleurs à l’abdomen et il meurt. Aïda n’accepte pas que la mort les sépare. Elle répand de l’essence dans tout le chalet et provoque un incendie dans lequel elle périra auprès de celui qu’elle aime.


Critique

« Je m’en vais » est un drame réalisé par le spécialiste du genre, Ezzel Din Zulficar. On retrouve dans ce film, ce romantisme sombre qu’il affectionne, avec ces paysages tourmentés et ces personnages hors du temps que le destin emporte avant de les briser.

Plus qu’un mélodrame, c’est une tragédie : l’histoire nous conte l’amour impossible entre deux êtres qui ne pourront s’unir que dans la mort. On pense bien sûr à "Roméo et Juliette" même si la situation des deux personnage d’Ezzel Din Zulficar n’a pas grand-chose à voir avec celle des deux héros shakespeariens. Notons au passage que si la pièce du dramaturge anglais a servi de modèle à bien des œuvres théâtrales ou cinématographiques en occident, il n’en est pas de même dans le théâtre ou le cinéma égyptien : l’amour exclusif et absolu qui conduit à rompre tous les liens sociaux puis à rompre avec la vie elle-même n’est pas dans leur ADN !

La tonalité de ce film est singulière et n’a pas vraiment d’équivalent dans le cinéma de cette époque. Les auteurs font un usage homéopathique du pathétique. Peu de larmes, peu de cris, beaucoup de silences. Et pourtant, dès le début, le spectateur est plongé dans une atmosphère très sombre, presque funèbre. La plupart des scènes se passent la nuit et les personnages semblent se mouvoir en permanence dans les ténèbres. Il y a quelque chose d’étrange dans cet univers : les deux héros sont comme des fantômes évoluant dans un univers parallèle à celui des autres personnages. Tous les êtres qui les entourent semblent très lointains, presque abstraits. Bien des scènes nous ont rappelé "Peter Ibbetson", ce roman britannique dans lequel deux êtres ne peuvent se rejoindre et vivre leur amour qu’en rêve.

Les deux acteurs, Imad Hamdi et surtout Madiha Yousri (ce n’est pas la première fois qu’ils sont réunis à l’écran) parviennent à transmettre la passion qui anime leurs deux personnages avec une justesse constante, faisant naître l’émotion d’un simple geste ou d’un simple regard. Ce film, qui compte l’une scènes de baiser les plus bouleversantes du cinéma égyptien, va grandement contribuer à faire d’Imad Hamdi et de sa partenaire un couple mythique du grand écran. Il faudrait aussi évoquer la beauté troublante de Madiha Yousri qui joue un rôle déterminant dans la magie particulière de ce drame.

L’intérêt du film repose aussi sur la peinture par petites touches d’un certain milieu où toutes les turpitudes sont permises à condition que les apparences soient sauves. Roshdy Abaza joue à merveille l’antithèse du héros : un jeune homme uniquement soucieux de ses plaisirs mais qui respecte les règles de sa classe sociale. Il se mariera avec qui on veut du moment qu’il peut poursuivre sa relation explosive avec sa maîtresse. Après avoir épousé Aïda, il ne lui prêtera aucune attention et la laissera libre de faire ce qu’elle veut.

« Je m’en vais » est un film étonnant dont le pouvoir d’envoûtement n’a pas faibli avec les années. Bien au contraire…

Appréciation : 4/5
****

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

mercredi 31 mai 2023

La Rue du Polichinelle (Share'e Al-Bahlawan, 1949)

شارع البهلوان
إخراج : صلاح ابو سيف


Salah Abou Seif a réalisé La Rue du Polichinelle en 1949.

Distribution : Camilia (Amina Shawkat), Kamal El Shennawi (Saïd), Lola Sedky (Mervat), Hassan Fayek (Kamel), Ismail Yassin (Khamis), Zinat Sedki (Zahira), Abdel Hamid Zaki (Ibrahim), Elias Moadab (le propriétaire de l’appartement), Hassan Kamel (le médecin), Gracia Qassin (la tante de Saïd), Mohamed Abu El Saoud (le chef cuisinier), Abdel Moneim Ismail (le policier), Hosna Solomon (la servante), Aly Abd El Al (l’amoureux d’Amina)
Scénario : Salah Abou Seif, Ali El-Zorkani, Abdel Halim Morsy
Musique : Fathy Qoura, Mohamed Hassan Al Shugai
Production : les films Gabriel Talhami

Lola Sedky



Kamal Al Shennawi et Camilia



Kamal Al Shennawi et Camilia



Kamal Al Shennawi et Hassan Fayek



Zinat Sedky et Shafiq Nour El Din



Ali Abd El Al et Kamal Al Shennawi



Abdel Hamid Zaki et Hassan Fayek



Gracia Qassin



Ismaïl Yassin et Hosna Suliman

















Résumé

   Saïd, Kamel et Ibrahim sont trois amis qui dirigent ensemble une grande entreprise. L’histoire commence le jour du mariage d’Ibrahim avec une jeune femme prénommée Mervat. Saïd et sa jeune épouse Amina se préparent pour la cérémonie. Comme d’habitude, la tension est extrême entre les deux époux à cause de la jalousie féroce du mari. Ce dernier reproche à sa femme de tout faire pour susciter le désir des autres hommes en portant des tenues provocantes. Pour ne rien arranger, la vieille tante de Saïd vit avec eux et celle-ci n’a qu’un objectif : inciter son neveu à divorcer pour qu’il épouse sa fille.

Pendant ce temps là, la cérémonie nuptiale a commencé. Kamel est déjà là avec sa femme Zahira, une artiste peintre au caractère bien trempé. Quand il découvre Mervat, l’épouse de son ami Ibrahim, il en tombe instantanément amoureux et ne s’en cache pas, mettant dans l’embarras la jeune femme. Arrivent enfin Saïd et Amina. Immédiatement, cette dernière attire le regard des hommes présents et suscite leurs commentaires flatteurs. Très vite, un certain nombre d’invités fait cercle autour d’elle. Saïd, fou de rage, se jette sur les admirateurs de sa femme. La bagarre est générale.

Peu de temps après, Saïd pense avoir trouvé le moyen infaillible de surveiller sa femme. Kamel a des dons d’hypnotiseur et il a plongé dans un sommeil profond un acolyte qui ainsi peut suivre en esprit les faits et gestes d’Amina. Le compte-rendu de l’hypnotisé est sans ambiguïté : Saïd a un rival ! Sans attendre, l’infortuné rentre chez lui et évidemment Amina ne s’y trouve pas. Quand elle rentre, la crise est terrible mais Saïd finira par comprendre qu’il s’est trompé. Malheureusement le jaloux devra affronter une autre épreuve : encouragée par Zahira et Mervat, Amina se présentera à un concours de beauté et sera élue reine de l’année. Un magazine publiera même sa photo en première page !

Mais revenons aux deux autres couples. Les nouveaux mariés se sont rendus chez Kamel et Zahira car Ibrahim souhaite que la femme de son ami fasse un portrait de Mervat. Quand Kamel découvre celle-ci posant en maillot de bain dans l’atelier de sa femme, il n’y tient plus : il faut qu’elle devienne sa maîtresse. Pour cela, il a une idée : il va lui envoyer une lettre d’amour mais pour ne pas être démasqué, il demande à Saïd de la recopier et de la signer sous un faux nom sans lui révéler que c’est pour la femme de leur ami. Saïd entrevoit une nouvelle occasion de tester sa propre femme : il lui enverra la lettre originale écrite de la main de Kamel. Pour parfaire leur plan, les deux amis décident de louer un appartement qui sera l’adresse d’Hassan Al-Muhallab, l’auteur fictif de la double déclaration d’amour. 

Comme Kamel l’espérait, Mervat est touchée par la lettre et elle accepte un rendez-vous dans l’appartement. En revanche, Amina n’est pas du tout séduite et elle n’hésite pas à se confier à Zahira en lui montrant ce qu’elle reçoit. L’artiste peintre reconnaît l’écriture de son mari. Elle veut le confondre et demande à Amina de l’accompagner à l’adresse indiquée sur la lettre.

C’est ainsi que tout le monde va se retrouver dans l’appartement, soit pour y débuter une relation adultère, soit pour y surprendre les conjoints infidèles. Pour Ibrahim qui est venu comme témoin à la requête de Saïd, la découverte de sa femme dans cette garçonnière est une cruelle désillusion, lui qui croyait avoir une épouse soumise et vertueuse. Kamel qui était arrivé les bras chargé de cadeaux peut difficilement cacher la raison véritable de sa présence ici et il va lui falloir subir l’ire de sa femme. En revanche, tout est bien qui finit bien pour Saïd et Amina : Saïd est définitivement convaincu de l’amour et de la fidélité de celle qui partage sa vie.

............

A propos du tournage de ce film, on retrouve dans moult publications, une anecdote très célèbre impliquant Camilia et Kamal Al Shennawi, les deux vedettes de cette comédie. Ce serait le réalisateur lui-même qui l’aurait révélé dans un entretien ou peut-être dans un récit (Je n’ai pas pu vérifier.) Salah Abou Seif raconte qu’il s’apprête à tourner une scène dans laquelle les deux acteurs doivent s’embrasser de manière passionnée. Malheureusement, Kamal Al Shennawi refuse de jouer car c’est le mois du Ramadan et il est impensable pour lui d’embrasser sa partenaire, du moins avant l’iftar. Salah Abou Seif devra déployer des trésors de diplomatie pour convaincre le jeune premier de tourner la scène. Entretemps, Camilia a appris que Kamal Al Shennawi ne veut pas l’embrasser et elle le prend très mal, refusant à son tour de jouer. La scène se fait enfin et, aux dires du réalisateur lui-même, ce baiser fut l’un des plus beaux qu’il ait tourné, un baiser d’une telle fougue et d’une telle sensualité que les censeurs ne manquèrent pas de s’en émouvoir.




Critique

Salah Abou Seif est surtout connu pour ses drames réalistes. Cette Rue du Polichinelle est l’une de ses rares comédies parmi lesquelles on trouve tout de même l’un de ses chefs d’œuvre Entre Ciel et Terre qui date de 1959.

Ce film de 1949 est bien dans l’air du temps . A la fin de ces années 40, la mode est à la comédie légère et brillante à la manière du grand maître du genre, Helmy Rafla. Et l’une des vedettes que l’on retrouve dans bon nombre de ces productions, c’est la délicieuse Camilia. Cette dernière fait ses premiers pas au cinéma en 1947 et elle devient une star en 1949, un statut dont elle jouira très brièvement puisqu’elle mourra tragiquement en 1950 dans un accident d’avion. En quelques années, elle va tourner avec les cinéastes les plus renommés : Hussein Fawzi, Niazi Mostafa, Helmy Rafla, Ezzel Dine Zulficar et donc Salah Abou Seif. Une question nous vient à l’esprit : ce dernier a-t-il choisi Camilia parce qu’il allait tourner une comédie ou choisit-il de faire une comédie parce qu’il veut (doit ?) tourner avec Camilia ? Dans tous les cas il se lance dans l’aventure avec la détermination et avec la rigueur qui le caractérise.

Salah Abou Seif et ses scénaristes ont certainement beaucoup étudié les vaudevilles français du XIXe siècle où se succèdent les quiproquos et les situations les plus farfelus. Cette dimension théâtrale est clairement revendiquée : ce film a été tourné exclusivement en intérieur à l’exception d’une scène. Aucun procédé du vaudeville n’est oublié : on retrouve le rythme effréné des actions, les traditionnels jeux de cache-cache d’une pièce à l’autre, la minutie dans le réglage du mouvement afin que tous les effets fassent mouche. On retrouve aussi la satire du monde bourgeois avec sa galerie de personnages haut en couleur, maîtres ou valets. Certains se livrent avec plus ou moins de succès à l’adultère (dans le rôle du bourgeois à la recherche d’une bonne fortune, Hassan Fayek est inégalable.), d’autres défendent sans relâche la vertu assiégée de leurs épouses (l’excellent Kamal Al Shennawi qui d’ordinaire joue plutôt les amants.). Et comme il se doit, un personnage féminin en dessous affriolants sera surpris dans une situation très compromettante (Ici, c’est Lola Sedki qui s’y colle et elle est épatante !). En fait cette Rue du Polichinelle se présente comme l’équivalent égyptien de l’Hôtel du Libre Echange de Georges Feydeau. On notera enfin le caractère très féministe du film : tous les hommes sont dépeints de manière ridicule et ceux qui ont voulu attenter à la liberté de leurs femmes sont sévèrement punis.

Bref, La Rue du Polichinelle est une comédie irrésistible qui n’a aucunement vieilli.

Appréciation : 5/5
*****

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

mercredi 15 septembre 2021

Ismaël Yassin chez les fous (Ismael Yassin fi mostashfa el maganen, 1958)

إسماعيل يس في مستشفى المجانين
ﺇﺧﺮاﺝ : عيسى كرامة



Issa Karama a réalisé Ismaël Yassin chez les fous en 1958.
Distribution : Ismaël Yassin (Hassouna), Hind Rostom (Tema), Zinat Sedki (la mère de Tema), Abd El Fatah El Kosary (le père de Tema), Reyad El Kasabgy (Aliwa, le principal rival d’Hassouna), Hassan Atla (un fou), Fouad Ratab (un fou), Farhat Omar (un fou), Abdel Moneim Ibrahim (un fou), Abdel Moneim Ismaïl (le marchand de légumes), Hussein Ismaïl (le boucher), Hussein Asar (Zaki Al-Qahwaji), Mohsen Hassanein, Kitty (la danseuse), Helen (la folle qui fait un strip-tease), Salha Kasin, Abdel Hamid Zaki (le propriétaire de la pâtisserie), Ezzedin Islam (le directeur de l’hôpital), Abdel Ghany Kamar (l’astrologue)
Scénario : Abbas Kamel, Abdel Fattah El Sayed
Musique : Attya Sharara


Abd El Fatah El Kosary et Reyad El Kasabgy





Zinat Sedki et Abdel Moneim Ibrahim



Zinat Sedki et Abd El Fatah El Kosary



Kitty et Abd El Fatah El Kosary



Ismaël Yassin et Abd El Fatah El Kosary


Hind Rostom



Fouad Ratab et Farhat Omar



Helen



Helen et Ismaël Yassin



Résumé

Comédie. Tout le monde dans le quartier veut épouser Tema. Son père a emprunté de l’argent aux uns et aux autres en leur promettant à chaque fois de leur donner la main de sa fille. Tema est amoureuses de Hassouna, le pâtissier. Malheureusement, Aliwa, un prétendant qui travaille à l’hôpital psychiatrique s’engage à éponger toutes les dettes du père si celui-ci consent à faire de lui son gendre. Les deux hommes font affaire mais il faut se débarrasser d’Hassouna. Ils décident de le faire passer pour fou. C’est ainsi que le pauvre pâtissier se retrouve interné à l’hôpital psychiatrique. Aliwa invite Tema et sa mère à se rendre à l’asile pour vérifier par elles-mêmes qu’Hassouna est bien devenu fou. Cette visite permet à ce dernier de s’évader. Il s’est emparé du châle de la mère de Tema pour s’en revêtir. Ainsi, il a pu déjouer la surveillance des infirmiers et recouvrer la liberté. Hassouna va pouvoir contrattaquer. En se faisant passer pour un astrologue, il apprend que le père de Tema courtise la danseuse d’un cabaret où il se rend régulièrement. Grâce à la complicité de la jeune femme, Hassouna permet à la mère de Tema de prendre son mari en flagrant délit de tentative d’adultère. Pour échapper au courroux de sa femme, l’homme fait croire qu’il est tombé soudainement fou. Il se retrouve à son tour à l’hôpital psychiatrique. Hassouna peut enfin annoncer une bonne nouvelle à Tema : il est parvenu à rassembler la somme réclamée par les créanciers de son père. Ils vont pouvoir se marier. Las ! Aliwa les surprend en pleine conversation. Il s’empare de l’argent d’Hassouna et reconduit celui-ci à l’hôpital psychiatrique. Le père et l’amoureux de Tema se retrouvent ensemble. Grâce à leur complicité, ils parviennent à s’évader en suscitant une révolte parmi tous les aliénés de l’asile. L’acte final de la comédie se déroule lors des noces d’Aliwa et de Tema. Hassouna parvient à voler les habits du futur marié, forçant celui-ci à paraître quasi nu devant toute l’assemblée qui compte en son sein le directeur de l’hôpital psychiatrique. Ce dernier fait aussitôt interner son employé. C’est donc Hassouna qui prend la place de l’époux auprès de la femme qu’il aime.


Critique

En 1958, le réalisateur Issa Karama et l’acteur Ismaïl Yassin sont déjà de vieux compagnons de route. Ils travaillent ensemble depuis le tout premier film d’Issa Karama en 1952, Tu le mérites bien. 1958, c’est l’année où Ismaïl Yassin est au faîte de sa gloire (le déclin s’amorcera peu après.) et il enchaîne les tournages avec les cinéastes les plus importants de l’époque. Pour mesurer la popularité de l’acteur, il suffit de compter le nombre de films qui comportent dans leur titre le nom « Ismaïl Yassin ». Rien que pour cette année 1958, il y en a cinq : Ismaïl Yassin est à vendre (réalisateur : Houssam Al Din Mustafa), Ismaïl Yassin à Damas (réalisateur : Helmy Rafla), Ismaïl Yassin Tarzan (réalisateur : Niazi Mostafa), Ismaïl Yassin dans la police militaire (réalisateur : Fateen Abdel Wahab) et, enfin, cet Ismaïl Yassin chez les fous qui fait l’objet de cette chronique.

Ce film, archi rediffusé sur les chaînes de télévision fait partie du patrimoine de la culture populaire arabe. C’est une comédie type des années cinquante qui mêle le burlesque et le glamour avec un seul objectif : plaire au plus grand nombre. On y retrouve certaines des plus grandes vedettes de l’époque et elles font le « job » avec un professionnalisme jamais pris en défaut. Comme leurs confrères et consoeurs d’ Hollywood, les acteurs et les actrices égyptiens des années cinquante mettaient tout leur talent au service des studios et des réalisateurs sans jamais laisser paraître ni fatigue ni lassitude malgré le rythme infernal des tournages. Dans Ismaïl Yassin chez les fous, tout le monde semble s’amuser beaucoup : on se déguise, on se déshabille, on se rhabille, on se cache, on danse, on crie, on grimace, on s’embrasse. Pas un seul temps mort, tout va très vite jusqu’au happy end obligé : le triomphe de l’amour véritable et le mariage des deux héros.

Mais l’intérêt majeur de ce divertissement familial réside sans aucun doute dans sa critique virulente de la famille traditionnelle et de la condition faite aux femmes. On voit un père, cynique et sans scrupule, promettre sa fille à qui voudra bien rembourser ses dettes et on voit aussi d’honnêtes artisans ou commerçants proposer « généreusement » leur aide au papa contre les faveurs de la belle Tema. Celle-ci, incarnée avec brio par l’affriolante Hind Rostom, est condamnée à la passivité, recluse dans l’appartement familial, en attendant que son père veuille bien la vendre au plus offrant. Issa Karama montre bien que dans la famille traditionnelle, les filles constituent avant tout un investissement qui peut rapporter gros. Le héros est bien obligé de se soumettre à cette règle du jeu et il devra se démener pour rassembler la somme demandée par les parents s’il veut épouser sa bien-aimée. Par cette dimension satirique, Ismaïl Yassin chez les fous se hisse au niveau des meilleures productions de Fateen Abdel Wahab, autre pourfendeur de la morale traditionnelle dissimulé sous les oripeaux de l’amuseur inoffensif.

Cela étant dit, Ismaïl Yassin chez les fous comporte quelques faiblesses. Une grande partie de l’intrigue se déroule au sein d’un hôpital psychiatrique et cela nous vaut des scènes interminables avec des « fous » se livrant à des pitreries puériles et répétitives. Les situations et les gags peuvent à la rigueur amuser les enfants. Mais si le spectateur a plus de dix ans, il regardera avec une certaine lassitude, voire une certaine exaspération, cette accumulation d’effets comiques mille fois vus. On regrettera enfin que la participation de la danseuse Kittie soit si brève : les deux scènes où elle apparaît sont parmi les plus mémorables du film.

Appréciation : 3/5
***

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin




vendredi 24 avril 2020

La Veuve Joyeuse (El armala el tarub, 1956)

الأرملة الطروب
إخراج : حلمى رفلة



Helmy Rafla a réalisé La Veuve Joyeuse en 1956.
Distribution : Leila Fawzi (Samira, la fille d’Abdel Aal), Kamal Al Shennawi (Magdy), Abdel Salam Al Nabulsi (Asim Bey Kayamakli), Zinat Sedki (la femme de chambre de Samira), Hassan Fayek (Abdel Aal, le père de Samira), Adly Kasseb (Mahdi Effendi), Mohamed Gamal (Hechmat), Zeinat Olwi (danseuse), Kitty (danseuse), Victoria Hobeika (la mère d’Hechmat)
Scénario : Aboul Seoud Al Ibiary, Helmy Rafla, Mustafa El Sayed, Fathy Qoura
Musique : Mohamed Gamal et Mahmoud El Sherif

Hassan Fayek et Kamal Al Shennawi

Leila Fawzi

Mohamed Gamal

Leila Fawzi et Kamal Al Shennawi

Hassan Fayek

Kamal Al Shennawi et Mohamed Gamal

Abdel Salam Al Nabulsi et Leila Fawzi

Zinat Sedki et Leila Fawzi

Kitty




Résumé

Abdel Aal aime l’argent et la bonne chère. Il a forcé sa fille Samira à épouser Rostom Bey Kayamakli, un riche turc de quarante ans son aîné. Samira s’est installée dans le pays de son mari et a mené une vie luxueuse mais sans amour. 
Au bout de cinq ans de vie commune, son mari meurt. Toute la famille est réunie pour entendre les dernières volonté du défunt : sa veuve jouira de sa fortune tant qu’elle restera seule. Si elle se remariait, l’héritage reviendrait à sa famille. Au cas où elle mourrait, en étant restée célibataire, c’est son père qui récupérerait l’argent de Rostom. Asim Bey Kayamakli, le frère du défunt, est prêt à tout pour que cette fortune reste dans leur famille. Il a trouvé la solution : il va épouser Samira. Quand cette dernière lui signifie son refus d’un tel « arrangement », il menace de la tuer. Elle est obligée d’accepter. Mais profitant de l’absence de son beau-frère, elle fuit en compagnie de Lawahiz, sa servante et rentre en Egypte. 
 Asim Bey constatant le départ de sa « future femme », contacte un parent résidant en Egypte, Mahdi Effendi, un haut fonctionnaire, sous-secrétaire d’état. Celui-ci a une idée : il convoque Magdy, un parent lui aussi, qui travaille dans l’administration et qui est célèbre pour ses conquêtes féminines. Il lui donne une mission : il sera généreusement récompensé s’il parvient à séduire Samira et à l’épouser. Magdy se présente au domicile de l’héritière tant convoitée. Dans le jardin, il voit une femme courir après une poule : c’est Samira. Il est frappé par sa beauté et il est très étonné d’apprendre pas la bouche de celle-ci qu’elle n’est qu’une simple servante. Elle le devance dans la maison pour prévenir sa maîtresse, dit-elle. Samira demande à sa femme de chambre de se faire passer pour elle. Lawahiz reçoit avec rudesse le visiteur qui est interloqué par cet accueil. Ils sont rejoints peu après par le père de Samira qui lui aussi est mis dans la confidence. Il est enchanté de ce tour, ne souhaitant évidemment pas que sa fille se marie et que son héritage tombe dans l’escarcelle d’Asim Bey Kayamakli. 
La difficulté, c’est que Magdy est tombé amoureux de Samira, toute servante qu’elle prétend être et Samira, elle aussi finit par succomber au charme du nouveau venu. Naturellement, Magdy refuse de rester le complice d’Asim er de Mahdy et quand le frère du défunt arrive en Egypte pour vérifier le bon déroulement des opérations, le jeune homme lui annonce qu’il est désormais impossible pour lui d’épouser Samira. Heureusement, le remplaçant est tout trouvé : c’est Hechmat, un jeune collègue de Magdy qui accepte la mission. Le lendemain, Asim, déguisé en vieille femme et accompagné d’Hechmat, rencontre le père de Samira. Il prétend être la mère du garçon et il vient demander en son nom la main de la jeune fille. Il précise que la dot sera importante. Abdel Aal, sachant qu’il n’est pas question de sa fille mais de Lawahiz, accepte volontiers ce projet d’union. 
Une réception est organisée pour officialiser les fiançailles. Asim Bey Kayamakli y paraît, toujours déguisée en vieille femme. Malheureusement pour lui, la véritable mère d’Hechmat fait son apparition et le démasque. C’est alors que tous les masques tombent. Magdy comprend que la femme qu’il aime est bien Samira, l’héritière de Rostom, Abdel Aal découvre que sa fille est amoureuse de Magdy, ce qui compromet leur chance de conserver l’héritage. Abdel Aal chasse Magdy de chez lui et enferme sa fille dans sa chambre. Pendant ce temps-là, Asim Bey Kayamakli ne s’avoue pas vaincu. Il enlève Samira mais celle-ci parvient à s’échapper. Elle se rend aussitôt chez Magdy pour tenter de s’expliquer sur les raisons qui l’ont poussé à lui cacher son identité. Son bien-aimé n’ a guère apprécié d’avoir été ainsi trompé et il lui marque une très grande froideur. Tous les autres protagonistes de l’histoire font leur apparition et chacun veut faire valoir ses revendications à l’imam qui les a accompagnés. Il faut que Samira menace de se jeter dans le vide pour qu’enfin on accepte de prendre en compte ses propres désirs et volontés.


Critique

Cette Veuve Joyeuse est un petit chef d’œuvre, une comédie brillante qui illustre admirablement ce que l’âge d’or du cinéma égyptien fut capable de produire grâce aux talents conjoints de ses acteurs, de ses réalisateurs et de ses scénaristes. Pendant une vingtaine d’années, ces artistes offrirent au public d’innombrables films qui sont aujourd’hui devenus des classiques, aussi bien dans le drame que dans la comédie. La formule « Hollywood sur le Nil »n’ était alors nullement galvaudée. A partir des années soixante-dix, le secret de ce savoir-faire semble progressivement se perdre et dans les années quatre-vingt, le cinéma égyptien n’est plus que l’ombre de lui-même, tentant de survivre en proposant des films dont on dissimulait la médiocrité par un discours prétendument « engagé ». Evidemment, il y eut des exceptions mais trop peu nombreuses pour influer en quoi que ce soit sur une tendance bien regrettable. 
Revenons donc à notre Veuve Joyeuse, paradigme de la comédie pétillante de ces années cinquante. C’est un divertissement, certes mais un divertissement haut de gamme. Nous avons d’abord une intrigue à la Marivaux : la servante et la maîtresse qui échangent leur rôle, un séducteur cynique qui découvre soudain l’amour véritable. Le scénariste, Aboul Seoud Al Ibiary (ici, au zénith de son talent) multiplie les rebondissements, sans tordre le cou à la vraisemblance mais sans rien s’interdire : les deux héros font connaissance en poursuivant une poule ! Nous avons aussi un réalisateur, Helmy Rafla, qui filme cette histoire, avec une légèreté, une élégance hors pair, ce qui permet à cette Veuve Joyeuse de rivaliser avec les meilleures comédies d’Hollywood. On pense plus d’une fois à Howard Hawks, le réalisateur de Chéri, je me sens rajeunir ou des Hommes préfèrent les Blondes. Autre qualité du film : Helmy Rafla parvient à faire rire son public tout en veillant à garder une touche romantique à son histoire et certaines scènes sont d’une grande beauté comme celle du baiser dans l’arbre ou bien celle de l’héroïne au bain entourée de ses servantes. 
Si l’intention première des auteurs de ce film est d’amuser le public, ils ne s’interdisent pas d’évoquer des sujets graves, comme celui de la condition féminine dans la société musulmane. En effet, cette Veuve joyeuse est tout sauf joyeuse. Non seulement, elle a été « vendue » par son père à un homme qui a quarante ans de plus qu’elle, mais celui-ci mort, il lui est interdit de refaire sa vie comme elle l’entend et elle retombe sous l’autorité d’un beau-frère et d’un père qui ont pour seul souci, non son bonheur mais leur intérêt personnel. Et l’un comme l’autre n’hésite pas à la menacer d’une arme pour obtenir de sa part soumission et obéissance. Pour l’héroïne, la situation devient insupportable et elle devra menacer à son tour de se suicider pour qu’on daigne enfin l’entendre. 
Enfin, la grande réussite de ce film tient aussi à la qualité de l’interprétation et notamment à la prestation époustouflante de Leila Fawzi dont le naturel, la sensibilité et bien sûr la beauté en font l’égale de Katharine Hepburn. 
A propos d’interprétation, on notera l'absence d’Ismaïl Yassin au générique. A l’époque, c'est tout à fait exceptionnel car cet acteur règne sans partage sur la comédie populaire. Helmy Rafla tournera avec lui 22 films et, rien qu'en 1956, année de la sortie de La Veuve Joyeuse, Ismaïl Yassin est présent sur les écrans de cinéma égyptiens avec pas moins de neuf films ! Une omniprésence qui finira d’ailleurs par lasser son public. Sans vouloir offenser quiconque, on peut supposer que cette absence a sans doute contribué à la qualité de notre comédie : si Ismaïl Yassin y avait participé, nul doute que l'atmosphère et l'esprit en eussent été radicalement changés, la vedette comique y aurait imposé son style, celui de la farce parfois un peu grossière, à mille lieues donc de cette Veuve Joyeuse (Même si on peut considérer le travestissement d'Abdel Salam Al Nabulsi dans la dernière partie du film comme un hommage à l'interprète de Mademoiselle Hanafi !) .

Appréciation : 5/5
*****

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

jeudi 18 juillet 2019

Flirt de jeunes filles (Ghazal Al-Banat, 1949)

غزل البنات
إخراج :أنور وجدي




Anwar Wagdi a réalisé Flirt de jeunes filles en 1949.
Distribution : Layla Mourad (Layla), Anwar Wagdi (Wahid, le pilote d’avion), Youssef Wahby (lui-même), Naguib Al Rihani (Hamam), Stephan Rosti (le directeur du cabaret), Ferdoos Mohamed (la gouvernante), Soliman Naguib (le père de Layla), Mahmoud El Meleigy (Anwar, le séducteur malhonnête), Abdel Wareth Asr (le secrétaire du père de Layla), Abdel Meguid Choukry (un domestique), Saïd Abou Bakr (le serviteur de Youssef Wahbi), Abdel Hamid Zaki (le directeur de l’école), Zinat Sedki (l’ex-petite amie d’Anwar), Mohamed Abdel Wahab (lui-même), Farid Shawki (un client du cabaret), Nabila El Sayed (une écolière)
Première apparition à l’écran d’Hind Rostom comme figurante. Elle joue dans la première scène du film, le retour d’une promenade à cheval, et elle se tient à la droite de Layla Mourad.
Scénario : Anwar Wagdi
Dialogues : Naguib Al Rihani, Badie Khairy
Musique : Mohamed Abdel Wahab, Layla Mourad, Naguib Al Rihani 
Production : Anwar Wagdi
figure dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps

Abdel Wareth Asr et Naguib Al Rihani

Naguib Al Rihani et Fouad Al Rachidi

Layla Mourad et Naguib Al Rihani

Layla Mourad

Naguib Al Rihani et Layla Mourad

Layla Mourad, Naguib Al Rihani, Mahmoud El Meleigy

Anwar Wagdi et Naguib Al Rihani

Stephan Rosti et Zinat Sedki

Youssef Wahby

Mahmoud El Meleigy et Layla Mourad

Mohamed Abdel Wahab

Soliman Naguib


Résumé

Hamam est un vieux professeur d’arabe. Il enseigne dans une institution pour jeunes filles mais son absence totale d’autorité conduit le directeur de l’établissement à le licencier. Heureusement, le secrétaire d’un très riche pacha lui propose aussitôt un emploi : son patron a une fille qui vient d’échouer à un examen et Hamam sera chargé de lui donner des cours afin qu’elle puisse le repasser avec succès. Le vieux professeur accepte. Il découvre un monde dont il ignorait tout. Même les domestiques se comportent en aristocrates aux manières raffinées. Layla, son élève, est une ravissante jeune femme qui passe ses journées à chanter, danser et se promener à cheval. D’emblée, elle manifeste à l’égard de son nouveau professeur une sympathie et une affection auxquelles celui-ci n’est guère accoutumé. Troublé par tant de sollicitude, Hanam tombe amoureux de son élève mais fait tout pour le cacher. La complicité entre le vieil homme et la jeune femme atteint un tel degré qu’une nuit, la gouvernante surprend le premier en pyjama dans la chambre de la seconde. Pour ne pas provoquer la colère du pacha, la domestique décide de ne rien dire mais il s’en est fallu de peu que le scandale éclate aux yeux de tous les habitants du palais. . 
Layla considère son professeur un peu comme son confident. C’est ainsi que celui-ci apprend qu’elle est amoureuse d’un jeune homme. Un soir, il l’accompagne dans un cabaret. Il découvre que son élève doit y retrouver le garçon qu’elle aime. Hamam laisse les deux tourtereaux et s’installe au bar. En surprenant la conversation d’un couple, il comprend que l’homme dont s’est entichée Layla est un séducteur sans scrupule. Il veut aussitôt intervenir et forcer sa protégée à quitter immédiatement ce lieu mais des serveurs du cabaret s’emparent de lui et le chassent. Il retourne aussitôt à l’intérieur mais il est à nouveau jeté dans la rue. Apparaît un pilote en uniforme. Hamam le supplie de l’accompagner dans le cabaret pour l’aider à récupérer Layla. Quand les deux hommes arrivent dans la grande salle de l’établissement, la jeune fille danse avec son « amoureux ». L’officier est ébloui par sa beauté. A la fin de la danse, une femme en colère se rue sur le partenaire de Layla : c’est son ex-maîtresse qui est folle de rage d’avoir été abandonnée alors que, dit-elle, il lui doit tout. Pour le pilote, tout est clair : il doit sauver Layla. Après quelques échanges de coups, les voilà tous les trois dehors. L’officier fait monter dans sa voiture Layla et son professeur mais ce dernier a compris qu’entre les deux jeunes gens un sentiment très fort était en train de naître. Ne voulant pas révéler leur adresse véritable, il fait arrêter le véhicule devant une maison inconnue. Mais le pilote attend qu’ils disparaissent à l’intérieur pour repartir, alors Hamam est bien obligé de sonner à la porte. Un domestique leur ouvre. Après quelques explications, l’homme les fait entrer. Sans le savoir, ils viennent de pénétrer dans la demeure du grand acteur Youssef Wahbi. Ce dernier les reçoit chaleureusement et les invite à prendre place dans les fauteuils du salon. Au fil de la conversation, l’artiste devine la nature des sentiments qu’Hamam éprouve pour son élève mais il lui fait comprendre qu’ elle ne l’aime pas de la même manière. Il lui conseille de renoncer à satisfaire sa passion et de laisser sa protégée libre d’aimer qui bon lui semble. Quand ils quittent la maison de leur hôte, le pilote les attend toujours, pour le plus grand bonheur de Layla. Cette fois-ci, ils prennent la direction du palais du pacha. Le dernier plan du film nous montre le visage d’Hamam traversé par des sentiments contraires.


Critique

Anwar Wagdi réalise sept films* avec en vedette sa femme Layla Mourad. Ils se sont mariés en 1945 et leur collaboration artistique prendra fin avec leur divorce en 1953. « Flirt de Jeunes Filles » est le cinquième film qu’ils tournent ensemble et c’est sans doute le plus célèbre. A cela, plusieurs raisons mais la principale est qu’on y voit pour la dernière fois à l’écran l’immense acteur Naguib Al Rihani qui meurt à peine le tournage terminé. Il joue un vieux professeur qui au soir de sa vie est touché par l’amour. Ce personnage à la fois ridicule et pathétique constitue le testament artistique de Naguib Al Rihani et l’inscrit à tout jamais parmi les légendes du cinéma égyptien.
Sur le film lui-même, ce qui nous frappe, c’est sa grande modernité. La logique du récit est celle du rêve, notamment dans la dernière partie. Les personnages semblent évoluer, comme en apesanteur, dans un univers onirique libéré de toutes les lois qui régissent notre monde. Les événements s’enchainent de manière improbable au fil de rencontres aussi hétéroclites que miraculeuses. A cet égard, la séquence au domicile du grand écrivain prend une dimension quasi surréaliste. Et pour finir, dans la scène du cabaret, le caractère ouvertement fantasmatique des danses n'échappera à personne !

*Layla, fille de Pauvres (1945), Layla, fille de Riches (1946), Mon Cœur me Guide (1947), Anbar (1948), Flirt de Jeunes Filles (1949), L’Amour de mon Cœur (1951), La Fille des Aristocrates (1953)

Appréciation : 4/5
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Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin