L'actrice égyptienne Ragaa El Geddawy est morte ce matin au Caire des suites du Coronavirus. Comme me l'a signalé Meritaton, un lecteur attentif de ce blog, Ragaa El Geddawy n'est pas née comme on le pensait en 1938 mais en 1934 : la carte d'identité de l'artiste a été publiée dans les médias au lendemain de sa mort. Elle avait donc 85 ans. La photo ci-dessus est extraite de son tout premier film : "Ghariba" d'Ahmed Badrakhan (1958).

Histoire du cinéma égyptien par les films. Les chefs d'oeuvre, les succès populaires, les navets. Les stars, les cinéastes, les danseuses, les chanteurs de l'âge d'or du cinéma égyptien. Histoire des studios Misr. La comédie des années trente aux années soixante-dix. Le cinéma égyptien dans les festivals.
Affichage des articles dont le libellé est Ragaa El Geddawy. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Ragaa El Geddawy. Afficher tous les articles
dimanche 5 juillet 2020
samedi 12 novembre 2016
L'Appel du Courlis (Doa al karawan, 1959)
دعاء الكروان
إخراج : هنري بركات
Henry Barakat a réalisé L'Appel du Courlis (ou La Prière du Rossignol) en 1959.
Distribution : Ahmed Mazhar, Hussein Ismail, Faten Hamama, Edmond Tuema, Ragaa El Geddawy, Hussein Asar, Nahed Samir, Abdelalim Khattab, Mimi Shakib
Adaptation du roman de Taha Hussein, L'Appel du Courlis (1934)
Scénario : Henry Barakat et Youssef Gohar
Musique : André Ryder
Appréciation : 5/5
*****
إخراج : هنري بركات
Henry Barakat a réalisé L'Appel du Courlis (ou La Prière du Rossignol) en 1959.
Distribution : Ahmed Mazhar, Hussein Ismail, Faten Hamama, Edmond Tuema, Ragaa El Geddawy, Hussein Asar, Nahed Samir, Abdelalim Khattab, Mimi Shakib
Adaptation du roman de Taha Hussein, L'Appel du Courlis (1934)
Scénario : Henry Barakat et Youssef Gohar
Musique : André Ryder
![]() |
Ahmed Mazhar |
![]() |
Faten Hamama et Hussein Ismail |
![]() |
Edmond Tuema |
![]() |
Faten Hamama |
![]() |
Faten Hamama |
![]() |
Ragaa El Geddawy et Faten Hamama |
![]() |
Faten Hamama |
![]() |
Faten Hamama et Zahrat Al Oula |
![]() |
Nahed Samir, Ragaa El Geddawy, Hussein Asar |
![]() |
Faten Hamama |
![]() |
Ahmed Mazhar et Faten Hamama |
![]() |
à droite, Abdelalim Khattab |
![]() |
Faten Hamama, Mimi Shakib |
Résumé
Drame. Bani Warkan est une petite ville au cœur des montagnes où vit Amina avec sa sœur Hanadi et ses parents, Khader et Zarah. Cette famille de bédouins mène une existence laborieuse mais les trois femmes sont courageuses. Malheureusement, le père est un débauché qui dépense tout son argent dans les plaisirs. Un jour, c'est le drame : il est assassiné. L'oncle Khal Jaber ordonne à sa sœur et à ses nièces de quitter le pays, le temps que les gens oublient le scandale. Les trois femmes se lancent dans un long périple qui les mène dans une ville. Elles louent une petite maison mais il faut trouver du travail au plus vite. Grâce à un intermédiaire, les deux filles sont embauchées comme femme de chambre.. Hanadi doit travailler chez l’ingénieur en charge de l’irrigation tandis qu’Amina entre au service du commissaire de la ville, de sa femme et de sa fille Khadija. Cette dernière a le même âge qu’Amina. Entre les deux jeunes filles, la complicité est totale. Khadija apprend à Amina la lecture et l’ouvre à la culture. Le sort d’Hanadi est moins heureux. Son maître est célibataire et il a profité de son inexpérience pour abuser d’elle. Zarah l’apprend et réagit aussitôt de peur que le déshonneur retombe sur toute la famille. Elle envoie une lettre à son frère pour l’informer qu’elles doivent impérativement revenir au village. En attendant, elles ont trouvé refuge pas très loin de la ville, chez Zanouba. Quelque temps plus tard Khal Jaber vient les chercher. Sur le chemin, il tue Hanadi et l’enterre. On fera croire qu’elle est morte de la peste. Amina est désespérée. De retour à Bani Warkan, la jeune femme ne supporte plus de vivre avec sa mère et son oncle. Elle fuit et retrouve sa place chez le commissaire de la ville. Pendant ce temps-là, Zarah est devenue folle et erre dans le pays à la recherche de ses deux filles. Amina a décidé de venger sa sœur. Les événements à venir vont lui en donner l’occasion. L’ingénieur souhaite épouser la fille du commissaire. Cette demande enchante toute la famille et on parle déjà de fiançailles. Mais Amina informe ses maîtres du comportement passé de leur futur gendre. Le commissaire rompt les fiançailles et demande son transfert dans une autre ville. Une fois la famille partie, Amina demande à Zanouba de la placer chez l’ingénieur. Ce dernier est tout de suite séduit par la beauté de la jeune femme. Il tente de l’agresser plusieurs fois mais il ne parvient jamais à ses fins. Un soir, elle verse du poison dans son vin mais, soudain pris de remords, elle empêche in extremis son maître de le boire. Elle abandonne l’idée de tuer son maître. Elle va voir Zanouba pour qu’elle lui trouve une autre place. Elle prétend ne plus supporter les avances de l’ingénieur. La vieille femme lui fait remarquer que l’attirance qu’éprouve l’ingénieur pour elle lui permettra d’obtenir tout ce qu’elle veut. Amina comprend qu’elle tient sa vengeance et qu’elle pourra le torturer sans commettre un homicide. Elle retourne chez son maître qui se montre de plus en plus gentil à son égard. Et progressivement, elle aussi tombe amoureuse de lui. Mais Hanadi reste une barrière infranchissable entre eux. Le jour où il lui demande de l’épouser, elle lui révèle enfin qu’elle est la sœur d’Hanadi. Jamais elle ne pourra devenir sa femme. Amina décide de quitter définitivement la maison de celui qu’elle aime malgré elle. Le couple a une dernière discussion dans le jardin. Soudain, l’oncle d’Amina surgit. Il est armé et tire sur l’ingénieur qui meurt aussitôt. Sur le dernier plan du film, on entend la voix de l’écrivain Taha Hussein.
Critique
L’Appel du Courlis est un bel exemple de l’injustice dont est victime le cinéma égyptien ignoré ou méprisé par la critique occidentale . Voilà un film qui tourné partout ailleurs dans le monde ferait les beaux jours des ciné-clubs et des cinémathèques. Il serait étudié dans les universités des cinq continents de la planète, on lui consacrerait d’innombrables thèses dans toutes les langues parlées sur cette terre. Mais, c’est un film égyptien, un film arabe. Alors peu importe qu’il ait été réalisé par un très grand cinéaste, Henri Barakat, peu importe qu’il soit l’adaptation d’un classique de la littérature arabe dont l’auteur est Taha Hussein, l’une des figures marquantes de la culture du XXe siècle, peu importe enfin, que le rôle principal soit tenu par l’une des actrices les plus talentueuses de son temps. Le verdict a été rendu sans qu’on ait cru bon de consulter les pièces du dossier : L’Appel du Courlis ne rejoindra jamais la liste des chefs d’œuvre du cinéma mondial en compagnie de Citizen Kane d’Orson Welles ou des Fraises Sauvages d’Ingmar Bergman. Inutile de préciser qu’il n’existe pas non plus de version DVD sous-titrée en français, ce qui, en passant, est bien mal récompenser la francophilie des trois principaux protagonistes de l’œuvre : Taha Hussein a fait une partie de ses études en France et a épousé une Française, Henry Barakat s’est formé à la réalisation dans notre pays et Faten Hamama parlait couramment le français. Navrant.
Dans le style sobre et rigoureux qui sied aux classiques, Henri Barakat nous raconte une tragédie qui se déroule dans l’Egypte de l’intérieur, loin du Caire et de la vie citadine. Cette société aux mœurs archaïques voue les femmes au malheur et ne leur laisse d’autre choix que la soumission. Et malheur à elles si leur père et mari disparaît brutalement ! Qu’elles n’attendent aucune compassion des voisins, des amis ou des parents. Dans l’Appel du Courlis, après le décès du chef de famille, la mère et ses deux filles devront quitter leur village pour tenter de trouver un logement et un emploi dans la ville voisine. Elles pensent ainsi pouvoir commencer une nouvelle vie mais c’est le malheur qui les attend. Henri Barakat restitue scrupuleusement le constat très sévère de Taha Hussein : la campagne égyptienne est un univers faussement paisible, la violence y est omniprésente, notamment celle exercée par les hommes contre les femmes maintenues dans l’asservissement et l’ignorance. Au moindre « écart de conduite », c’est la mort qui attend la fille, la mère ou l’épouse car on ne badine pas avec l’honneur de la famille. Ainsi la sœur aînée sera violée par son maître et assassinée par son oncle pour avoir été violée.
Quand les deux sœurs s’installent dans la petite ville, elles rencontrent des femmes qui s’affranchissent de cette condition misérable : la jeune fille de la famille bourgeoise chez qui travaille Amna prend des cours de français et apprend la musique. Et il y a aussi Zanouba (excellemment jouée par Mimi Chakib), la femme qui dirige le bureau de placement pour les domestiques : elle est la patronne et n’a de comptes à rendre à personne, elle fume, elle danse et s’habille comme elle l’entend. Au début, les deux petites campagnardes illettrées espèrent pouvoir elle aussi gagner enfin leur indépendance mais la tragédie ne tardera pas à les rattraper.
Ce récit est aussi une histoire d’amour et le portrait d’une femme qui s’interroge sur ses propres sentiments. Au début, elle n’est mue que par une seule idée : venger sa sœur mais progressivement, elle comprend qu’elle est tombée amoureuse de celui qui a plongé elle et sa mère dans le malheur. Le talent de Barakat, c’est d’avoir su représenter toute la complexité du personnage tiraillé entre son désir de vengeance et l’amour qui en son cœur croît jour après jour.
Outre le scénario, dans ce film, tout est admirable : la photo, l’interprétation et puis cette inoubliable voix off, celle de Faten Hamama qui tout à la fois nous émeut et nous enchante. Un chef d’œuvre à voir absolument.
Appréciation : 5/5
*****
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin
dimanche 18 septembre 2016
L'Honneur de ma Femme (Karamet Zawgaty, 1967)
كرامة زوجتى
إخراج : فطين عبد الوهاب
إخراج : فطين عبد الوهاب

Fateen Abdel Wahab a réalisé L'Honneur de ma Femme en 1967.
Distribution : Adel Imam, George Sedhom, Sherifa Mahear, Shadia, Mahmoud Rashad, Salah Zulficar, Camilia, Ragaa El Geddawy, Thoraya Helmy
Scénario et dialogues : Mohamed Abou Youssef et Mohamed Mostafa Samy
Appréciation : 3/5
***
Adaptation d'un roman d'Ihsan Abdul Quddus
Musique : Fouad El Zahiri
Production : Ramsès Naguib![]() |
Adel Imam et George Sedhom |
![]() |
Sherifa Mahear |
![]() |
Mahmoud Rashad et Shadia |
![]() |
Salah Zulficar et Shadia |
![]() |
Shadia |
![]() |
Salah Zulficar et Adel Imam |
![]() |
Ragaa El Geddawy et Salah Zulficar |
![]() |
Camilia |
Résumé
Mahmoud est un riche avocat qui multiplie les conquêtes amoureuses mais qui se refuse à envisager le mariage. Ses proies, il les déniche dans le club privé qu’il fréquente. C’est là qu’il retrouve Layla, une artiste peintre qui a toujours résisté à ses avances. Pourtant, elle n’est pas insensible au charme du jeune avocat mais elle refuse de nouer toute relation en dehors des liens du mariage. Mahmoud est obligé de s’avouer qu’il est vraiment tombé amoureux de Layla et finit par lui demander sa main. La jeune femme met une dernière condition à leur union : si elle apprenait qu’il l’avait trompée, il devrait accepter qu’elle agisse de la même manière. Mahmoud, sûr de son amour, y consent. Au début tout se passe au mieux pour les deux jeunes mariés. Mais un jour, une cliente au physique avantageux se présente au cabinet de l’avocat. Elle reviendra plusieurs fois et n’aura de cesse de provoquer Mahmoud. Ce dernier tente de résister puis cède. Cette liaison ne reste pas longtemps secrète : Layla découvre dans la poche du pantalon de son mari un mouchoir maculé de rouge à lèvres. Elle décide de passer à l’action. Avec la complicité de l’assistant de son mari, elle fait croire à celui-ci qu’elle a un amant avec qui elle échange des lettres enflammées. Pour Mahmoud, la situation devient vite insupportable, la jalousie le torture. Heureusement, il finit par apprendre la vérité : sa femme n’a jamais été infidèle mais elle a voulu lui donner une bonne leçon. Mahmoud lui promet de ne plus jamais la tromper.
Critique
Fateen Abdel Wahab est sans doute le meilleur auteur de comédies du cinéma égyptien. Même si cet Honneur de ma Femme ne fait pas partie de ses œuvres les plus marquantes, on retrouve la patte d’un cinéaste qui a toujours voulu parler de l’Egypte de son temps aux Egyptiens de son temps. Dans le monde un peu conformiste du divertissement, Fateen Abdel Wahab fut un moderne. On peut même affirmer qu’en matière de libération des moeurs, il fut aux avant-postes et cela sans jamais se couper du public populaire (sans doute moins conservateur que celui d’aujourd’hui). Dans ses comédies, il osait aborder des questions taboues comme celles de la liberté sexuelle, de l’homosexualité ou du transgenre. Evidemment, il était assez fin pour ne pas heurter frontalement les convictions rétrogrades d’une partie non négligeable du public, mais, par le rire, il parvenait à faire passer des idées qui aujourd’hui lui vaudraient un déluge d’anathèmes et de menaces.
Dans l’Honneur de ma Femme Fateen Abdel Wahab et de Ehsan Abd El Kodos partent d’un constat : en ce milieu des années soixante, les relations entre hommes et femmes ne sont plus régies par la tradition ou la religion, du moins dans les classes aisées. La femme revendique les mêmes droits et les mêmes libertés que ceux dont jouit l’homme. Et ce dernier voit avec une certaine angoisse vaciller l’état ancien qui lui garantissait tous les privilèges.
Dans ce film, la femme est artiste peintre, elle vit de manière totalement indépendante et n’attend pas du mariage un confort et une aisance financière qu’elle possède déjà. Si bien qu’elle peut imposer ses conditions à son soupirant. Notamment cette clause proprement révolutionnaire : toute infidélité de la part de son futur mari sera payé de la même infidélité de sa part. L’homme accepte le contrat. Mais après une courte période de félicité conjugale, il ne résiste pas longtemps à la tentation et ce sera le début de ses tourments. La femme inflexible le soumet à des épreuves terribles comme celle qui consiste à faire poser devant elle un homme à la musculature de gladiateur pour réaliser un tableau. Le modèle porte pour tout vêtement un slip très moulant et passe ainsi accoutré des journées entières avec l’épouse trompée sans que le mari ne puisse protester.
Ici comme dans d’autres scènes, Fateen Abdel Wahab a réussi à faire rire sans rien concéder à la morale traditionnelle. La femme est seule juge de ses actes et de ses choix et si l’homme en souffre, il doit s’en prendre à lui-même. D’ailleurs, à la fin, le héros de l’Honneur de ma femme capitule et accepte le nouveau rapport de forces qui régit la vie du couple. Ce film aurait pu s’intituler «La Défaite du Mâle Egyptien ».
Le caractère progressiste de la fable est tout de même tempéré par le fait que si le mari trompe effectivement sa femme, en revanche l’épouse se contente de faire croire à son infidélité selon une conviction bien ancrée que l’infidélité de l’homme est forcément une faute mineure alors que celle de la femme constitue toujours un crime irrémédiable.
Une comédie somme toute sympathique, jamais stupide, mais qui manque d’un grain de folie pour être une totale réussite.
Note : les deux acteurs principaux, Shadia et Salah Zulficar, se connaissent bien : ils sont mari et femme dans la vie et ils ont eu souvent l'occasion de jouer ensemble.
***
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin
Libellés :
adaptations,
Adel Imam,
années soixante,
comédie,
critiques,
Fateen Abdel Wahab,
films 3 étoiles,
George Sedhom,
Ihsan Abdul Quddus,
Ragaa El Geddawy,
Salah Zulficar,
Shadia,
Sherifa Mahear
Inscription à :
Articles (Atom)