Ibrahim Zalata, pour échapper aux exigences de ses ex-femmes, s’est installé à Texico, une ville située à la frontière des Etats-Unis et du Mexique. Il est devenu Signor Zalata et il a réussi à prendre le contrôle de l’ensemble de la ville. Il a épousé une indienne qui lui donne une fille, Nagma. Mais un jour, Zalata décide de quitter Texico pour partir à l’aventure avec ses hommes. Quinze ans plus tard, il fait son retour. Il découvre que Texico est tombée entre les mains des Trickers, un gang très dangereux. Zalata se rend avec ses hommes dans le saloon de la ville dirigée par une amie de longue date. Il est tout à la joie de ces retrouvailles quand soudain King Size, le chef des Trickers fait irruption dans l’établissement. La confrontation est inévitable. Zalata tire le premier et King Size s’effondre, raide mort. A cette nouvelle, le shérif se rend au saloon et nomme Zalata gouverneur de la ville. Peu après, c’est au tour de Nagma de faire son apparition : elle est devenue une ravissante demoiselle mais elle a perdu l’usage de la parole depuis que sa mère a été tuée par les Trickers. Pendant ce temps-là, dans son repaire, le fils de King Size décide de se venger…
7 heures de Togo Mizrahi (El sa'a saba, 1937)
avec Ali Al Kassar (Othman), Bahiga El Mahdy (la femme d’Othman), Zakia Ibrahim (la belle-mère d’Othman), Ibrahim Arafa (le muet de la banque), Ali Abd El Al (le voisin d’Othman), Hassan Rashid (Hassan Bey)
Scénario : Togo Mizrahi et Ali Al Kassar
Production : Togo Mizrahi
appréciation : 4/5
Othman est employé de banque : il s’occupe du courrier, renseigne les clients et fait le coursier quand il faut remettre ou récupérer des fonds de manière urgente. Pour cette dernière fonction, il a une magnifique bicyclette qui lui permet de se déplacer très rapidement par les rues d'Alexandrie. Il est marié à une couturière. La mère de cette dernière vit avec eux et elle est la propriétaire de l’atelier de couture. Le naturel autoritaire de sa belle-mère déplaît à Othman.
Ce jour-là commence comme tous les autres jours : il trie le courrier reçu, aide un jeune domestique muet à effectuer une démarche à l’un des guichets de l’établissement puis enfourche son vélo pour faire ses premières courses. Hélas ! à peine est-il entré dans une banque où il avait affaire qu’un voleur s’empare de sa bicyclette et disparaît. Quand Othman s’en aperçoit, il court à travers la ville pour la retrouver. Il finira par la récupérer grâce à l’imprudence de son voleur.
A la fin de sa journée, il rentre chez lui où il retrouve son épouse et son insupportable belle-mère. Il décide de sortir avec son voisin. Ils se rendent dans un café pour boire de la bière. Ils rentrent chez eux au milieu de la nuit totalement ivres. Tandis qu’Othman erre encore dans la rue, son voisin s’est installé dans sa chambre. Il faudra s’y reprendre plusieurs fois pour que celui-ci regagne son domicile et qu’Othman retrouve son lit. Avant de s’endormir, l’employé modèle cache en lieu sûr l’argent de la banque qu’il n’avait pas encore livré et met la sonnerie de son réveil à sept heures. Othman s’endort profondément. Dans la nuit deux voleurs s’introduisent dans sa chambre et lui dérobent l’argent de la banque. Quand le lendemain, il découvre le vol, Othman en informe aussitôt la banque. Le directeur refuse quelque arrangement que ce soit et porte plainte.
Le pauvre employé s’enfuit à Assouan , sa ville natale car son oncle qui est le maire de la ville lui doit de l’argent. Quand Othman arrive chez son parent, celui-ci est en train de marier sa fille.
Notre avis : cette comédie est l’une des œuvres majeures des années trente. On la doit à la collaboration d’Ali Al Kassar et de Togo Mizrahi qui travailleront ensemble pendant une dizaine d’années. Ce que nous aimons par-dessus tout dans « 7 Heures », c’est l’art avec lequel ces deux grands artistes mêlent la tradition et la modernité. La tradition avec les emprunts à la farce théâtrale mais aussi avec l’enregistrement sur un mode quasi ethnographique des chants et des danses lors d’un mariage paysan ; et puis la modernité avec le portrait du petit peuple des villes mais surtout avec la multiplication de ces situations immorales que permet le travestissement du héros. En revêtant des habits de femme, Othman rend d’un coup la morale traditionnelle inopérante et tout devient ainsi possible ! On comprend qu’il s’agit pour Togo Mizrahi d’inscrire son travail dans un cadre national tout en adoptant la liberté de ton revendiquée en cette première moitié du XXe siècle par tous les artistes à travers le monde. Un cinéma à la fois égyptien et moderne.
L’influence de ce film sera considérable. Il inspirera notamment ceux qui domineront la comédie dans les années cinquante et soixante : l’acteur Ismaïl Yassin et le réalisateur Fateen Abdel Wahab (voir le film «Mademoiselle Hanafi» en 1954)
Lundi 25 août à 15h
Nous ne sommes pas des anges de Mahmoud Farid (Lasna Mala'eka, 1970)
avec George Sedhom (Ragab), El Deif Ahmed (Ramadan), Samir Ghanem (Sha’aban), Abbas Fares (Hajj Yassin), Shahinaz Taha (Mona, fille de Hajj Yassin), Hassan Mostafa (le gardien chef), Abdel Alim Khattab (l’oncle de Sami), Samir Sabri (Sami, le prétendant de Mona), Nagwa Fouad (la danseuse Elham), Ashraf Abdel Ghafour (Mourad, le neveu de Hajj Yassin, amoureux de Mona), Zakaria Mowafi (le gardien de prison Abdel Hafez), Aleya Abdel Moneim (la femme de Hajj Yassin)
Scénario : Farouk Sabry
D’après la pièce du dramaturge français Albert Husson, La Cuisine des Anges (1952). Cette comédie avait déjà fait l’objet d’une adaptation réalisée en 1955 par le cinéaste américain Michael Curtiz. En 1989, sortira une deuxième adaptation américaine signée Neil Jordan et portant le même titre que le film de Mahmoud Farid. A noter que celui-ci n’est pas la première version égyptienne de l’œuvre d’Albert Husson. En 1964, Hassan Abdulsalam la monte au théâtre avec déjà George Sedhom, El Deif Ahmed et Samir Ghanem.
Musique et chansons : Fouad El Zahry, Mohamed Al Mogy, Hussein El Sayed, Abdelazim Abdelhaqq
Dans cette liste, il y a un absent (un compositeur non crédité au générique mais dont l’une des œuvres est utilisée) : Nino Ferrer. On connaît l’amour de l’acteur Sami Sabri pour la musique pop occidentale et on pourrait citer un très grand nombre de comédies dans lesquelles il interprète des adaptations de tubes européens ou américains. Pour Nous ne sommes pas des Anges, il a choisi Les Cornichons de Nino Ferrer, une chanson de 1966. Certes, ce n’est pas un mauvais choix mais on n’est quand même un peu gêné par le fait que Samir Sabri se contente d’un play-back très approximatif sur l’enregistrement original du chanteur français. Sur le plan artistique, c’est d’un amateurisme absolu, sur le plan éthique, ce n’est pas très élégant.

Comédie musicale. Sha’aban, Ragab et Ramadan sont trois prisonniers particulièrement indisciplinés. Excédée par leurs frasques continuelles, la direction de l’établissement décide de leur transfert à la prison Abou Zaabel. Le véhicule pénitentiaire qui doit les emmener dans leur nouvelle demeure tombe en panne au milieu de nulle part. Une voiture surgit et s’arrête à leur hauteur. L’automobiliste est un vieil homme qui les invite à se rendre chez lui pour attendre les secours. Leur hôte, Hajj Yassin, vit dans une grande demeure avec sa femme et ses deux filles. Contre toute attente, les trois prisonniers et leurs deux gardiens sont accueillis à bras ouverts. Tout le monde sympathise et on improvise une petite fête où chacun chante et danse avant de passer à table. En fait, les trois amis ne tarderont pas à comprendre que derrière cette joie et cette convivialité, la famille est confrontée à de graves problèmes financiers…
Notre avis : c'est le dernier film des Trois Lumières du Théâtre, ce trio d'artistes comiques qui s'était formé en 1966. L'un de ses membres, El Deif Ahmed, est mort brutalement à la fin du tournage et il sera remplacé par une doublure lors de la course poursuite qui clôt le film. Dans la dernière scène, George Sedhom, un autre membre du trio, lui rend hommage par quelques mots d'adieu. Soyons francs : ce dernier opus n’est pas le plus réussi dans une filmographie qui pourtant ne compte pas que des chefs d’œuvre. On retrouve un grand nombre de situations et de procédés déjà exploités dans leurs films précédents au point que l’on pourrait ici parler d’auto-plagiat. L’exemple le plus criant : la première partie qui se passe en prison s’inspire très fortement (et c’est un euphémisme !) de l’une des séquences de la première comédie qu’ils tournent ensemble « Trente Jours en Prison » de Niazi Mostafa. Bref, on a l’impression qu’ils tournent en rond et la participation quelque peu désinvolte de Samir Sabri ne leur est pas d’un grand secours ! L’interminable course poursuite de la fin exaspérera le spectateur le plus bienveillant.
Dimanche 24 août à 23h
Vacances forcées de Nagdy Hafez (Agaza Belafya, 1966)
avec Fouad El-Mohandes (Hussein), Mohamed Awad (Salem), Shweikar (Dounia), Nawal Abou El Fotouh (Amina, la collègue de Dounia), Kawthar El Assal (Sharifa, la complice de Kamal), Hassan Hamed (Kamal, l’escroc), Zouzou Chakib (la tante de Dounia), Adel Imam (un espion), Lebleba (chanteuse), Salama Elias (le directeur du journal), Adel Awad (un enfant), Abdel Ghani El Nagdi (un espion), Fouad Rateb (le bijoutier)
Scénario : Abdel Ghani El Nagdi, Ahmed Al Mula et Hassan Ahmed
Musique : Munir El Meiligy et Fathi Qoura
Production : Alflam Al Nasr Al Arabi
Comédie. Salem et Hussein sont deux amis qui travaillent dans la même administration. En jouant à un concours organisé par un journal, ils gagnent deux semaines de vacances à Alexandrie. Ce prix ne les emballe guère : ils tentent de l’échanger puis de le revendre en vain. Ils ne leur restent plus qu’à partir pour la station balnéaire. Le directeur du journal charge deux de ses reporters, Amina et Dounia, de s’installer dans le même hôtel que les deux gagnants du concours afin de réaliser un reportage. L’une des deux journalistes, Dounia, est une très riche héritière et sa tante craint qu’elle tombe amoureuse de Salem ou de Hussein. La parente confie à deux hommes la tâche de surveiller de près sa nièce. A l’hôtel, se trouvent également un escroc et sa complice en quête de nouvelles victimes à dépouiller. Ils sont très intéressés par la magnifique bague que porte Dounia…
Notre avis : « Vacances Forées » appartient à ce genre très prisé dans les années soixante, celui de la « comédie de plage » avec jeunes gens en maillot de bain jouant et dansant sur le sable. C’est un film construit autour de quatre duos qui se croisent à l’hôtel ou à la plage : Fouad El Mohandès/Mohamed Awad ; Shweikar/Nawal Abou El Fotouh ; Kawthar El Assal/Hassan Hamed ; Adel Imam/Abdel Ghani El Nagdi. Le scénario a été écrit par deux des acteurs principaux du film et on sent dans sa composition le souci des auteurs de mettre en valeur tous leurs partenaires. Le résultat est assez sympathique et l’on suit sans déplaisir les péripéties auxquelles sont confrontés tous les personnages. Bien sûr, il y a des facilités et des naïvetés inhérentes à ce type de productions grand public, mais la réalisation est très soignée et les acteurs en grande forme ! Contre toute attente, le jeu de Mohamed Awad reste supportable. C’est la première fois que celui-ci joue en duo avec Fouad El Mohandes et il faut reconnaître que leur collaboration fonctionne fort bien.
Samedi 23 août à 15h
Poursuite amoureuse de Nagdy Hafez (Moutarada gharamia, 1968)
avec Fouad El-Mohandes (Mounir), Shweikar (Mona), Madiha Kamel (Maria, l’hôtesse italienne), Hassan Mostafa (Fantomas, le maître d’hôtel de Mounir), Abdel Moneim Madbouly (le psychiatre), Camelia (l’hôtesse française), Shahinaz Taha (l’hôtesse américaine), Kawthar Shafiq (l’hôtesse japonaise), Thérèse (l’hôtesse anglaise), Mahmoud Azmy (Sami)
Scénario : Farouk Sabry
Directeur de production : Kamal Hussein
Comédie. Adaptation de la comédie à succès « Boeing Boeing » de Marc Camoletti. Mounir travaille comme contrôleur aérien et c’est un dom juan impénitent qui entretient une relation amoureuse avec cinq hôtesses en même temps, toutes les cinq de nationalités différentes. Pour le soutenir dans ses entreprises amoureuses, Fantômas, son maître d’hôtel fait croire à toutes ses conquêtes que Mounir doit prochainement hériter de puits de pétrole qui feront de lui un homme immensément riche. Sur le plan fantasmatique, Mounir a développé une manie un peu singulière : il est obsédé par les chaussures de femmes qu’il collectionne chez lui. En plus de ses « liaisons internationales », il a une fiancée officielle, Mona, une hôtesse égyptienne. Cette dernière menace de le quitter s’il ne renonce pas à sa vie de play-boy et à sa collection de chaussures. Mounir, plein de bonne volonté, demande de l’aide à un psychiatre...
Notre avis : une adaptation très (ou trop) libre de la comédie de Marc Camoletti. Le scénariste a cru bon d’y ajouter des éléments pour étoffer son scénario. Il a notamment créé un personnage supplémentaire avec le psychiatre que consulte le héros (une idée elle-même empruntée au film américain « Quoi de Neuf, Pussycat ?» réalisé par Clive Donner en 1965 sur un scénario de Woody Allen). On ne peut pas dire que cet ajout fut bénéfique. Cela nous vaut deux séquences interminables dans lesquelles Fouad El Mohandes le héros, et Abdel Moneim Madbouly le psychiatre rivalisent de mimiques et de grimaces dont l’accumulation a mis à rude épreuve notre bienveillance naturelle. La seconde avec les deux compères ivres morts est particulièrement exaspérante. Fouad El Mohandes et Abdel Moneim Madbouly ont souvent joué ensemble au théâtre et cela se sent : on a l’impression d’assister à des numéros de vieux comédiens qui cabotinent à qui mieux mieux pour faire rire leur cher public. Le problème, c’est qu’on est au cinéma, pas au théâtre. Les danses et les chansons avec les hôtesses de l’air portant le costume traditionnel de leur pays n’améliorent pas l’ensemble, bien au contraire. Cette comédie est un festival de gags balourds et de plaisanteries de mauvais goût.
Vendredi 22 août à 23h
L'Appel du Courlis ou La Prière du Rossignol d'Henry Barakat (Doa al karawan, 1959)
avec Ahmed Mazhar (l’ingénieur), Zaki Ibrahim (le père de l’ingénieur), Faten Hamama (Amina), Zahrat Al Oula (Hanadi), Amina Rizq (Zarah), Edmond Tuema (le professeur de français), Ragaa El Geddawy (la fille du commissaire), Hussein Asar (le commissaire de la ville), Nahed Samir (la femme du commissaire), Abdel Halim Khattab (l’oncle), Mimi Chakib (Zenouba)
Adaptation du roman de Taha Hussein, L'Appel du Courlis (1934)
Scénario : Henry Barakat et Youssef Gohar
Musique : André Ryder
Production : les films Barakat
Figure dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps.
appréciation : 5/5

Drame. Bani Warkan est une petite ville au cœur des montagnes où vit Amina avec sa sœur Hanadi et ses parents, Khader et Zarah. Cette famille de bédouins mène une existence laborieuse mais les trois femmes sont courageuses. Malheureusement, le père est un débauché qui dépense tout son argent dans les plaisirs. Un jour, c'est le drame : il est assassiné. L'oncle Khal Jaber ordonne à sa sœur et à ses nièces de quitter le pays, le temps que les gens oublient le scandale. Les trois femmes se lancent dans un long périple qui les mène dans une ville. Elles louent une petite maison mais il faut trouver du travail au plus vite. Grâce à un intermédiaire, les deux filles sont embauchées comme femme de chambre.. Hanadi doit travailler chez l’ingénieur en charge de l’irrigation tandis qu’Amina entre au service du commissaire de la ville, de sa femme et de sa fille Khadija. Cette dernière a le même âge qu’Amina. Entre les deux jeunes filles, la complicité est totale. Khadija apprend à Amina la lecture et l’ouvre à la culture. Le sort d’Hanadi est moins heureux. Son maître est célibataire et il a profité de son inexpérience pour abuser d’elle.
Notre avis : un chef d’œuvre à voir absolument. Dans ce film, tout est admirable : le scénario, la photo, l’interprétation et puis cette inoubliable voix off, celle de Faten Hamama qui tout à la fois nous émeut et nous enchante. Dans le style sobre et rigoureux qui sied aux classiques, Henri Barakat nous raconte une tragédie qui se déroule dans l’Egypte de l’intérieur, loin du Caire et de la vie citadine. Cette société aux mœurs archaïques voue les femmes au malheur et ne leur laisse d’autre choix que la soumission. Le cinéaste restitue scrupuleusement le constat très sévère de l’écrivain Taha Hussein : la campagne égyptienne est un univers faussement paisible, la violence y est omniprésente, notamment celle exercée par les hommes contre les femmes maintenues dans l’asservissement et l’ignorance. L’Appel du Courlis est une œuvre majeure du cinéma mondial injustement méconnu en Occident.
Jeudi 21 août à 15h
Je veux me marier d'Ahmed Badrakhan (Aiza atgawiz, 1952)
avec Nour Al Hoda (Farhana), Farid Al Atrache (Farid), Soliman Naguib (Wagdi Cristal), Abdel Salam Al Nabolsi (Wagy Cristal, le neveu de Wagdi), Zinat Sedki (la femme de chambre de Farhana), Serag Mounir (Taher Al-Anfoushi), Kawthar Shafiq (la fille de Taher), Saïd Abou Bakr (cousin de Farhana), Leila al Jazairia (la danseuse Leila), Sayed Suleiman (le domestique des Cristal), Abdel Nabi Mohamed (un soldat), Mohamed Zayed (chauffer de taxi), Abdel Ghani El Nagdi (cousin de Farhana), Thuraya Fakhry (la femme de Taher), Abbas Rahmi (le directeur de la salle de spectacles)
Leila Al Jazairia (photo) est une danseuse algérienne née en 1927. Farid Al Atrache l’avait choisie pour remplacer Samia Gamal dont il venait de se séparer.
Histoire et dialogues : Abou Al Seoud Al Ebiary
Musique : Farid Al Atrache

Comédie musicale. Farhana quitte sa ville natale pour commencer une carrière de chanteuse au Caire. Elle a changé de nom et désormais elle se fait appeler Nour Al Ayin. Pour rassurer sa famille, il lui faut épouser au plus vite un homme fortuné. Elle rencontre un vieil industriel très riche qu’elle entreprend de séduire. Mais peu après, elle fait la connaissance du neveu de celui-ci, un neveu qui est aussi son seul héritier. Les deux hommes rivalisent d’attentions à son égard mais Nour finit par comprendre que ni l’un ni l’autre ne souhaite l’épouser avec un véritable contrat et en respectant toutes les conventions d’usage. Elle chasse l’oncle et le neveu de chez elle. Pour se venger, elle décide de se marier avec un homme pauvre. Le hasard fait bien les choses car le soir même, elle rencontre dans un jardin public un jeune inconnu qui chante divinement en s’accompagnant de son oud…
Notre avis : « Je veux me marier » compte parmi les grandes réussites du réalisateur Ahmed Badrakhan. C’est la première comédie musicale de Farid Al Atrache après sa rupture avec Samia Gamal. Quelques mois plus tôt, on les avait vus une dernière fois ensemble dans « Ne le Dites à Personne » d’Henry Barakat. Pour réaliser « Je veux me marier », on a reconstitué une partie de l’équipe du film précèdent : Farid Al Atrache a de nouveau pour partenaire féminine la chanteuse libanaise Nour El Hoda, on retrouve dans un second rôle, Abdel Salam Al Nabolsi et le scénario est aussi signé Abou Al Seoud Al Ebiary. Enfin, pour remplacer Samia, Farid Al Atrache a découvert une jeune danseuse algérienne très talentueuse, Layla Al Jazairia. Le résultat est tout aussi enthousiasmant que pour l’opus précédent. La fantaisie et l’entrain ne se relâchent à aucun moment ; les chansons s’insèrent naturellement à l’histoire ; Zinat Sedky et Abdel Salam Al Nabolsi, en seconds rôles comiques, sont, comme toujours, épatants. Et puis, la « petite nouvelle » fait des débuts très prometteurs dans la comédie et parvient à nous faire oublier l’immense Samia Gamal. Hélas, il n’y aura pas de suite : Layla Al Jazairia tournera dans trois films puis quittera l’Egypte définitivement.
Mercredi 20 août à 15h
Le Fantôme de ma femme de Fateen Abdel Wahab (Ifrit meraty, 1968)
avec Shadia (Aïda), Salah Zulficar (Salah, un employé de banque, mari d’Aïda), Imad Hamdy (Raef), Adel Imam (un collègue de Salah), Hassan Hussein (un collègue de Salah), Amal Zayed (la mère d’Aïda), Hassan Mostafa (le directeur de la banque), Hala Fakher (Inayat, la sœur de Salah), Hussein Ismaïl (le serviteur de Raef), Nabila El Sayed (Anisa), Soheir Reda (la femme du directeur de banque), Ibrahim Safaan (un client d’Irma la Douce), Sayed Abdallah Hafez (Docteur Sami)
D’après une histoire de Lucien Lambert
Scénario et dialogues : Ali El-Zorkani
Musique : Mounir Mourad, Michel Youssef, Hussein El Sayed
Comédie. Le bonheur conjugal d’un jeune couple est mis à rude épreuve à cause d’une étrange maladie qu’a contractée la femme. A chaque fois qu’elle va au cinéma voir un film, elle rentre chez elle convaincue d’être l’incarnation de l’un des personnages dont elle vient de suivre les aventures. Les médecins ont averti le mari qu’il ne doit en aucun cas s’opposer au comportement délirant de sa compagne. Au contraire, il lui faut collaborer en jouant les rôles que dans ses divagations elle lui aura attribués. Tout se gâte quand elle se prend pour Irma la douce (célèbre personnage de prostituée) alors qu’elle et son mari reçoivent des invités…
Notre avis : dans cette comédie enlevée, Fateen Abdel Wahab s'intéresse à un cas très curieux de bovarysme moderne avec dans les rôles principaux une Shadia déchainée et un Salah Zulficar volcanique. Le cinéaste les avait déjà réunis, l’année précédente pour « l’Honneur de ma Femme » et deux ans auparavant pour le célèbre « ma Femme est PDG. ». C’est ainsi que les deux acteurs sont devenus les emblèmes du couple de la classe moyenne dans l’Egypte des années soixante. Ils représentent le couple libre et moderne que le public de l’époque a plaisir à retrouver épisode après épisode. (Shadia et Salah Zulficar étaient mariés à la ville. Ils se sépareront en 1969 et tourneront ensemble un dernier film en 1971.)
On peut aussi voir cette comédie de Fateen Abdel Wahab comme un hommage au cinéma grâce à l’insertion de longs extraits de « Raya et Sakina » de Salah Abou Seif (1952) et d’ « Une Histoire d’Amour » d’Helmy Halim (1959) ainsi qu’aux références à « Irma la Douce », film américain de Billy Wylder (1963).
Mardi 19 août à 15h
La Branche de l’Olivier d’El Sayed Bedeir (Ghosn el zaytoun, 1962)
avec Ahmed Mazhar (Abdo), Soad Hosny (Atteya), Ahmed Abaza (Sheikh Al Bahbhani, un collègue d’Abdo), Omar El-Hariri (Jamal, le rival d’Abdo), Abdel Waress Asr (Khalil Effendi, le père d’Atteya), Abdel Moneim Ibrahim (Hamouda, un collègue d’Abdo), Samia Rushdy (la mère d’Atteya), Kamal Anwar, Shokoko El Soghayar (Rushdy, le frère d’Atteya), Houda Shams El Din (la danseuse)
Scénario : El Sayed Bedeir et Mohamed Mostafa Samy
D’après un récit de l’écrivain Mohamed Abdel Halim Abdallah
Production : Films de l'Union (Abbas Helmy)

Drame. Nous sommes en juin 1945, à la veille des grandes vacances. Le professeur Abdo enseigne dans un lycée de filles au Caire. Il vit seul et souhaiterait se marier. Il est tombé amoureux d’une élève, Atteya, qu’il n’a pas en classe. Mais des rumeurs qui courent dans tout le lycée évoquent une relation amoureuse entre elle et un autre enseignant, Jamal. Ce dernier est le professeur d’arabe de la jeune fille et il ne cache pas toute la sympathie qu’elle lui inspire. Atteya est une élève brillante qui manifeste des dons remarquables en composition. Jamal s’installe pour les vacances à Alexandrie et Atteya convainc ses parents d’y séjourner aussi. Apprenant cette destination commune, Abdo est submergé par l’angoisse. Mais à la rentrée, une heureuse nouvelle l’attend : Jamal quitte l’établissement pour prendre un poste à Alexandrie et le directeur a décidé que ce serait lui, Abdo qui pour le remplacer serait chargé de la classe d’Atteya. Le professeur amoureux est aux anges : il a désormais toutes les cartes en main! Entre lui et la jeune fille, les liens ne cessent de se resserrer mais Abdo continue à être tourmenté par cette question qui l’obsède : Atteya a-telle eu une aventure avec Jamal ? Malgré ses doutes et ses hésitations, le professeur finit par demander la main de son élève. Malheureusement, le mariage n’apaise en rien les soupçons d’Abdo. Il se persuade que sa jeune épouse continue à voir Jamal en secret et sa jalousie délirante transforme leur vie commune en enfer…
Notre avis : El Sayed Bedeir se livre à une véritable étude psychologique d’un individu ordinaire atteint d’une jalousie maladive. Il montre comment le moindre événement vient alimenter les doutes et les soupçons de l’homme et comment le ressassement infini des mêmes interrogations et des mêmes reproches détruit irrémédiablement son couple. Dans cette étude, le réalisateur et ses auteurs font preuve d’une grande finesse, refusant tout recours aux effets grossiers de la caricature. On pourra néanmoins leur reprocher de s’en tenir à un compte-rendu un peu monotone des tourments de leur héros. Il manque une progression dramatique qui capterait l’attention du public. De même, le dénouement ne nous a guère convaincu. Pour clore sur un happy end, on nous révèle que le rival du héros est impuissant ! Les inquiétudes d’Abdo étaient donc sans fondement ! Mouais… En fait, les auteurs ont botté en touche car rien n’est réglé. Il est évident que la jalousie du héros renaitra à la moindre occasion. Enfin, on retiendra surtout l’excellente prestation de Soad Hosny et d’Ahmed Mazhar , ce dernier magistral en amoureux maladroit rongé par ses obsessions morbides.
Lundi 18 août à 19h30
La Matrone d'Hassan Reda (El moallema, 1958)
avec Taheya Carioca (Tuha), Yahia Chahine (Maître Abbas), Mahmoud El Meleigy (Maître Hafez), Omar El-Hariri (Fathi, le jeune comptable de Tuha), Wedad Hamdy (la servante de Tuha), Mohamed Tawfik (Madbouly), Nagwa Fouad (la fille de la patronne de la maison close), Rafia Al Shal (la patronne de la maison close), Roheya Jamal (une prostituée), Nawal Attia (une prostituée), Suzi Khairy (la danseuse)
Scénario : El Sayed Bedeir et Hassan Reda (d’après Othello de William Shakespeare)
Musique : Fouad El Zahry, Ahmed Fouad Hassan, Saïd Morsi
Production : les films Taheya Carioca

Hafez est un commerçant véreux qui se livre au trafic de drogue. Il est amoureux de Tuha, une commerçante elle aussi. C'est une femme d'âge mûr au caractère bien trempé. Elle dirige la petite boutique d’épices que son père avait fondée. Ses affaires sont prospères et elle a toute confiance en Fathi, son jeune comptable honnête et dévoué. Hafez lui a manifesté sa flamme de manière insistante mais, malheureusement pour lui, le cœur de Tuha est déjà pris : elle aime Abbas, un bel homme qui travaille avec elle. Hafez ne renonce pas : le jour de leur mariage, il provoque une bagarre qui se conclut par l’arrestation d’Abbas et sa condamnation à deux ans de prison. Pendant l’absence du mari de sa bien-aimée, Hafez va multiplier les tentatives de séduction, en vain. Tuha reste une femme fidèle. Quand Abbas est enfin libéré, Hafez change de stratégie. Feignant d’être son ami, il fait croire à Abbas que sa femme le trompe avec leur jeune comptable. Sous son influence pernicieuse, le mari de Tuha devient alcoolique, violent et infidèle…
Notre avis : un drame de la jalousie avec trois monstres sacrés du cinéma des années cinquante : Taheya Carioca dans un rôle de femme puissante, un peu semblable à ceux qu’elle incarne dans d’autres films de la même époque (ex : la Sangsue se Salah Abou Seif, 1956), Mahmoud El Meleigy en méchant qu’on adore détester et Yahia Chahine en brave homme crédule. Certes, on retrouve dans ce film un certain nombre de stéréotypes mais la réalisation et l’interprétation impressionnent par leur justesse et leur vigueur. Et puis, on aime tout particulièrement la reconstitution très soignée d’un quartier populaire avec ses commerçants, ses employés, ses drogués et ses prostituées, un univers très proche de celui de certains romans de Naguib Mahfouz.
Dimanche 17 août à 17h
Et l’Enquête Continue d’Ashraf Fahmy (Wala yazal altahqiq mustamirran, 1979)avec Mahmoud Yassin (Hussein), Nabila Ebeid (Zeinab, la femme d’Hussein), Mahmoud Abdel Aziz (Medhat), Layla Hamada (Mervat, la sœur de Hussein), Tawfiq El Deqen (le beau-frère de Zeinab), Malak El Gamal (la mère de Zeinab), Nawal Fahmy (la mère de l’élève)
Scénario : Ihsan Abdul Quddus, Mostafa Moharam, Bashir El Dik
Musique : Gamal Salamah
Producteur : Gerges Fawzi et Les Films Ashraf Fahmy

Drame. Hussein est professeur d’anglais et il vit avec Zeinab, sa femme, et Mervat, sa petite sœur qui est étudiante aux Beaux-Arts. Hussein aime son métier. L’argent ne l’intéresse pas. Ce qui compte pour lui, c’est sa mission éducative auprès de ses élèves. Zeinab ne partage absolument pas les conceptions de son mari. Elle enrage de vivre chichement alors que sa sœur vit dans l’opulence grâce au salaire élevé de son époux. Un jour, Hussein a la visite d’un inconnu dans son lycée. Cet inconnu, c’est en fait Medhat, un ami d’enfance, qui s’était installé en Europe et qui y a fait fortune. Heureux de ces retrouvailles, Hussein invite à déjeuner Medhat. Ce dernier retrouve Mervat qui l’impressionne par sa beauté et il fait la connaissance de Zeinab. La petite famille boit les paroles de leur invité surprise qui évoque avec une certaine autosatisfaction sa réussite professionnelle dans le bâtiment. Quand il apprend que Mervat fait des études d’architecture d’intérieur, il lui propose de travailler à l’agencement de ses nouveaux bureaux. Après le départ de Medhat, Zeinab ne peut contenir sa colère contre son mari qui n’a à lui offrir qu’une petite existence médiocre. Et le jour où elle apprend que Hussein donne des cours particuliers sans demander d’argent en contrepartie, elle décide de rompre et retourne chez sa mère. Pour tenter d’arranger les choses entre les deux époux, Medhat décide de rencontrer Zeinab…
Notre avis : pour ce drame, Ashraf Fahmy retrouve son actrice fétiche du moment, Nabila Ebeid qu’on a déjà vue dans trois des quatre films qu’il a tournés l’année précédente ( « Et le Troisième est Satan », « Un Voyage à l’Intérieur d’Une Femme », « Une Autre Femme »). Pour son rôle dans « Et L’Enquête Continue », Nabila Ebeid obtiendra le prix de la meilleure actrice au Festival international du film d’Alexandrie. Un prix amplement mérité ! Grâce à son immense talent, elle a su restituer toute la complexité de son personnage, cette femme mariée que le malheur et la frustration conduisent à se révolter, quitte à se montrer injuste et à humilier son mari, joué par l’excellent Mahmoud Yassin. Et quand celle-ci croit enfin avoir trouvé le bonheur dans les bras de son amant, tout s’effondre : l’homme aime ailleurs et il lui conseille de retourner gentiment chez son mari. Evidemment la vengeance sera terrible. L’amant est incarné par Mahmoud Abdel Aziz. C’est un personnage aussi intéressant que celui de Nabila Ebeid car il demeure insaisissable jusqu’à la fin. Pourquoi a-t-il souhaité renouer avec son ancien ami après tant d’années ? Quelles sont ses intentions réelles en s’introduisant dans cette famille ? Derrière le masque du sympathique camarade, semble se cacher un homme égoïste et manipulateur qui détruit tous ceux qu’il approche. Bref, un très bon film d’après un récit d’ Ihsan Abdul Quddus, le grand spécialiste de la psyché féminine.
Samedi 16 août à 19h30
Ashour, Coeur de Lion de Hussein Fawzi (Ashour Qalb Al Assad, 1961)
avec Abdel Salam Al Nabulsi (Ashour), Zahrat Al Oula (Nadia), Abdel Moneim Ibrahim (Abdo, l’ami d’Ashour), Taheya Carioca (la propriétaire du café), Nagwa Fouad (Amal), Samir Shedid (Fathi), Nahed Samir (la mère de Nadia), Rushdy Abaza (lui-même), Thuraya Fakhry (la mère d’Amal), Abdel Ghani El Nagdi, Kanaan Wasfy, Ibrahim Kadri, Samiha Mohamed
sur une idée de Rushdy Abaza
Scénario : Ahmed Kamel Hefnawi
Musique : Ali Ismaïl
Production : les films Rushdy Abaza
Ashour est étudiant à l’institut du sport. C’est un garçon fluet qui ne peut rivaliser avec les athlètes qu’il côtoie chaque jour. Pourtant il rêve de remporter les tournois dans lesquels s’affrontent les étudiants de l’école. Ainsi il pourrait séduire la jolie fille dont il est tombé amoureux. Un jour, il fait la connaissance d’un savant qui lui dit avoir inventé un sérum qui décuple les forces. Ashour accepte de le tester. Et ça marche ! Il va devenir un champion !
Notre avis : un film curieux ! Le réalisateur Hussein Fawzi et l'acteur Abdel Salam Al Nabulsi sont deux artistes au crépuscule l'un et l'autre d'une très belle carrière, et ils se retrouvent pour tourner un gentil nanar qui se passe dans le monde des universités. Plus étonnant encore, Abdel Salam Al Nabulsi a décidé à plus de 62 ans d'incarner un jeune étudiant qui rêve exploits sportifs et records pour séduire la jeune femme incarnée par Nagwa Fouad qui dans la vraie vie a 40 ans de moins que lui ! Autre bizarrerie, le film est produit par l'acteur Rushdy Abaza et c'est aussi lui qui aurait eu l'idée de son intrigue assez simplette. Il apparaît même dans une scène de combat, plutôt ratée d'ailleurs. Bref, que de talents réunis pour ce joli fiasco ! Dans « Ashour, Cœur de Lion », Abdel Salam Al Nabulsi confirme ce que nous savions depuis « Coiffeur pour Dames » de Fateen Abdel Wahab : il est l'un des meilleurs seconds rôles comiques de toute l'histoire du cinéma égyptien mais lui confier le premier rôle dans un film est une regrettable erreur.