avec Nabila Obeid (la danseuse Mabahij), Ahmed Zaki (Abdo), Zizi Moustafa (la danseuse Narcisse), Ahmed Ghanem (Abou Shafah, l’ami d’Abdo), Nabila El Sayed (Qamar, la sœur de Mabahij), Adel Adham (Naseh, le beau-frère de Mabahij), Qadria Kamel (la mère de Mabahij), Farouk Fathallah (Mounir, le propriétaire du cabaret), Mohamed Reda (Haridy)
Scénario : Mostafa Moharam et Bahgat Amar d’après une histoire d'Ihsan Abdul Quddus
Abdo est un joueur de darbouka qui a une très haute idée de son art. Il est convaincu que dans un orchestre son instrument prime sur tous les autres. Un soir, dans le cabaret où il travaille, il veut le prouver de manière éclatante en imposant ses rythmes aux autres musiciens ainsi qu’à la danseuse que son orchestre accompagne. En quelques secondes, il se met tout le monde à dos et finit à l’hôpital après avoir été roué de coups par le videur du cabaret. Abou Shafah, son ami, l’engage à faire profil bas s’il veut continuer à travailler. Abdo ne veut rien entendre. Il veut trouver une danseuse de talent afin de monter un duo selon ses conceptions artistiques. Avec Abou Shafah, il part à la recherche de la perle rare en écumant les salles de spectacles et les festivals. Un soir, à Tanta, il découvre une jeune danseuse très douée qui le séduit immédiatement. Elle s’appelle Mabahij et vit avec sa sœur, son beau-frère et leurs cinq enfants. Le père est au chômage et toute la petite famille survit grâce aux cachets qu’elle touche pour ses prestations . Abdo promet à la sœur et à son mari de subvenir à tous leurs besoins s’ils acceptent de laisser Mabahij travailler avec lui. C’est ainsi qu’Abdo peut commencer à répéter avec sa danseuse. Malheureusement, sa rigueur excessive et son mauvais caractère rendent les séances de travail très pénibles pour sa partenaire. Les disputes se multiplient. Un jour, Mabahij s’effondre en hurlant de douleur. Elle doit être opérée de toute urgence mais le coût de l’intervention chirurgicale est considérable. Abdo va alors multiplier les participations à des fêtes familiales et vendre tout son mobilier pour pouvoir récolter l’argent nécessaire à la guérison de Mabahij. Désormais, la jeune femme considère Abdo comme son sauveur et elle tombe amoureuse de lui. Peu après, ils trouvent enfin un directeur de cabaret qui accepte de les engager. Leur spectacle obtient un immense succès et ils signent un contrat qui les délivre de la précarité. Ils ont désormais tout pour être heureux. Mais pour Mabahij, ce n’est pas suffisant, elle veut se marier et avoir des enfants. Abdo refuse de sacrifier sa carrière artistique pour fonder une famille…
Notre avis : Ashar Fahmy et Nabila Ebeid ont souvent travaillé ensemble. Le cinéaste a offert à l’actrice certains de ses rôles les plus marquants, ceux qui lui ont permis de rester en haut de l’affiche après plus de vingt ans de carrière. (Nabila Ebeid obtient son premier grand rôle en 1963, alors qu’elle n’a que dix-huit ans, dans un film de Niazi Mustafa, « Rabaa Al-Adawiya ».)
Quand elle tourne « La Danseuse et le Percussionniste », elle a près de quarante ans. Ce film, tout à sa gloire, multiplie de manière un peu complaisante les scènes de danse pour nous prouver qu’elle reste l’une des plus belles actrices de son temps. Elle a pour partenaire Ahmed Zaki, qui incarne un artiste écorché vif, sombrant progressivement dans la folie. L’acteur restitue, avec son talent habituel, toute l’ambivalence du personnage, à la fois attachant et insupportable, généreux et égocentrique. Le dénouement, malgré sa grandiloquence, met en parallèle de manière éloquente le triomphe de celle qui a su se plier aux règles du succès et la chute pathétique de celui qui refuse de s’y conformer, avec ce constat désespérant : en art, l'exigence est le chemin le plus sûr vers l’échec, la société se montrant impitoyable à l’égard des artistes authentiques.
Mardi 9 septembre à 13h
Les Lunettes Noires de Houssam Al Din Mustafa (Al-Nazzara Sawdaa, 1963)
avec Nadia Lutfi (Madi), Ahmad Mazhar (Omar), Ahmad Ramzy (Aziz), Sanaa Mazhar (Mervat, la fille du patron), Abdel Khalek Saleh (le directeur de l’usine), Abu Bakr Ezzat (l’un des flirts de Madi), Karima El Sherif, Khalil Badr Eddin (Wali), Enayat Youssef, Fayek Bahgat (Mustafa, un ouvrier), Sayed Abdallah (un collègue d’Omar), Souad Abdullah
Scénario et dialogues : Lucien Lambert et Mohamed Kamel Abdel Salam
D’après une histoire d’Ihsan Abdel Quddus publiée en 1952 avec deux autres récits.
Musique : parmi de nombreux emprunts, on trouve un extrait des « Spirituals for Orchestra IV » de Morton Gould (générique de l’émission de la télévision française « Les Dossiers de l’Ecran»
Production : Abbas Helmy

Madi est une jeune aristocrate très fortunée qui mène une vie oisive. Elle porte en permanence des lunettes noires et parmi ses amis, elle jouit d’une grande popularité. Dans l’existence, elle n’a qu’un seul but : s’amuser. L’après-midi, elle retrouve toute sa bande autour de la piscine et le soir, on danse et on boit jusqu’au milieu de la nuit. La plupart du temps, elle rentre chez elle ivre morte. Madi a un petit ami attitré, Aziz mais celui-ci s’est lassé d’elle et a commencé à courtiser d’autres filles. Pour oublier sa peine, elle s’est mise à boire davantage et à flirter avec des garçons qu’elle connaît à peine. Un soir, elle rencontre un jeune homme différent de ceux qu’elle fréquente d’ordinaire. Il s’appelle Omar et il occupe un poste d’ingénieur dans une usine de textile. Ils vont sympathiser et Omar va tenter de faire partager à Madi sa conception de l’existence ainsi que son amour de la littérature et des arts. Pour la jeune aristocrate, c’est une révolution…
Notre avis : le récit du romancier Ihsan Abdel Quddus se déroule en 1947. Houssam Al Din Mustafa transpose l’action à son époque, ce qui lui permet de brosser un portrait à la fois éclatant et incisif de la société égyptienne des années soixante. Il est donc curieux de lire au début du film que l’intrigue se déroulerait toujours en 1947. Une erreur qui devient dès les premières images un contresens embarrassant.
Ces « Lunettes Noires » peuvent sembler un peu démonstratives voire moralisatrices mais le scénario évite habilement l’écueil du manichéisme : les deux personnages principaux occupent des positions qui s’inversent dans la dernière partie du film et cette inversion constitue l’un des intérêts majeurs de cette histoire. Nadia Lotfi est bouleversante en jeune femme déboussolée, bien loin des clichés de la jeune fille de bonne famille fraîche et ingénue, incarnée à la même époque par Soad Hosny. Ce personnage de « bad girl » constitue une première dans le cinéma égyptien de l’époque et confère au film une modernité singulière.
Sur le plan esthétique, le réalisateur semble vouloir s’aligner sur les standards du cinéma international : les personnages évoluent dans une atmosphère très Dolce Vita, la bande-son est exclusivement américaine, et Nadia Lotfi s’inspire visiblement de Monica Vitti pour composer son rôle. Malgré quelques maladresses, « Les Lunettes Noires » demeure l’un des meilleurs opus de Houssam Al Din Mustafa, cinéaste prolifique capable du meilleur — souvent — comme du pire — parfois.
Lundi 8 septembre à 15h
Un Bienfaiteur d'Helmy Rafla (Fa'el Kheir , 1953)
avec Mohamed Fawzy (Khaïry), Sabah (Soheir), Ismail Yassin (Afkar/Hamido), Zomoroda (Elham Anim), Abdel Ghany Kamar (Anis Effendi, le gérant de la société d’Elham), Menassa Fahmy (le père de Soheir), Zaki Ibrahim (le chirurgien), Abdel Aziz Ahmed (le père de Khaïry), Ferdoos Mohamed (la mère de Khaïry), Zeinat Elwy (la danseuse), Abdel Moneim Basiony (le directeur du théâtre), Anwar Zaky (un ami d’Elham), Aziza Badr (la mère de Sonia), Kawthar Shafik (une des amies d’Elham), Fawzya Ibrahim (Sonia), Alya Fawzy (la servante)
Scénario : Abou Al Seoud Al Ebiary
Musique et chansons : Mohamed Fawzy, Abdel Aziz Salam, Fathy Qoura, Saleh Gawdat, Mustafa Abdel Rahman
Production : Mohamed Fawzy
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Comédie musicale. Khaïry vit avec ses parents dans un quartier populaire de la ville. Il est réparateur de vélos et il travaille dans un petit atelier avec un ouvrier du nom d’Hamido. Toutes les maisons du secteur appartiennent à une riche jeune femme, Elham Anim, qui a confié la gestion de ses affaires à un homme impitoyable. Khaïry, lui, a le cœur sur la main et il n’hésite pas à venir en aide aux gens du quartier tant et si bien qu’il lui arrive d’avoir les plus grandes difficultés à payer son loyer. Un soir, il trouve sur la route un bébé abandonné. Dans ses langes, il y a une lettre écrite par la mère de l’enfant : elle annonce qu’elle s’est suicidée. Son mari est mort et son père a refusé de la reprendre, elle et son enfant, car elle s’était mariée sans son consentement. Khaïry décide de se rendre chez le grand-père avec le bébé. Le jeune homme est impressionné par le luxe de la demeure. Il fait la connaissance de Soheir, la sœur de la suicidée avec qui il sympathise immédiatement. Puis arrive le maître des lieux. Celui-ci reste intraitable et il le chasse, lui et l’enfant, tandis que Soheir est terrassée par le chagrin. Khaïry et ses parents décident donc de s’occuper du nourrisson. Peu après, Soheir frappe à la porte de leur appartement. Elle veut contribuer à l’entretien et à l’éducation de l’enfant contre la volonté de son père. Elle est accueillie à bras ouverts mais on refuse son argent. Un peu plus tard, Khaïry chante dans un mariage. Depuis la rue, Elham Anim, l’héritière fortunée qui possède toutes les maisons du quartier, entend la voix de notre héros. Elle est immédiatement sous le charme. Elle parvient à entrer en contact avec le jeune homme qui, grâce à son soutien, va connaître la gloire et la fortune. Bien évidemment, Khaïry n’a pas pour autant oublié Soheir…
Notre avis : c’est la troisième fois qu’Helmy Rafla réunit Mohamed Fawzy et Sabah dans une comédie musicale. On notera que les trois films sont produits par Mohamed Fawzy et il ne faut donc pas s’étonner si les personnages qu’il incarne sont toujours parés de toutes les vertus. A chaque fois, on retrouve l’acteur-chanteur en garçon doux, sensible et spirituel. Séducteur malgré lui, il suscite l’amour de plusieurs femmes même si lui n’en aime vraiment qu’une (Il est formidable !). Dans « Un Bienfaiteur », le héros est aussi d’une générosité et d’une compassion sans borne. Il accepte sans hésiter d’élever un nourrisson que sa famille très aisée a rejeté (Chapeau !). Malgré cet aspect un peu ridicule de l’intrigue, le film n’est pas sans qualités. Helmy Rafla parvient à mêler habilement tous les genres : nous passons sans à coups du drame social à la farce en passant par le drame sentimental et la satire. La tonalité comique repose pour l’essentiel sur Ismaël Yassin qui joue deux personnages, un frère et sa sœur : une idée amusante qui tourne un peu court. Nous avons tout particulièrement apprécié le jeu de Zomoroda parfaite en grande bourgeoise possessive et cynique. Evidemment, comme toujours avec Mohamed Fawzy, dont le talent est strictement proportionnel à l’ego, les numéros chantés et dansés sont un régal pour l’ouïe et la vue !
Dimanche 7 septembre à 23h
Une Ville se déchaîne d'Helmy Rafla (Thawrat el madina,1955) avec Sabah (Fatima), Mohamed Fawzi (Ahmed), Hussein Riad (le père de Fatima), Qadria Kamel (la tante de Fatima), Ahmed Allam (Haj Saber, le propriétaire de l’usine), Doha Amir (Fatima enfant), Wedad Hamdy (la servante), Suleiman al-Guindy (le petit garçon Al Wadi Galal), Abdel Moneim Ismail (le père de Al Wadi), Ragaa Youssef (la danseuse), Horeya Hassan (la chanteuse)
Scénario : Nairuz Abdel Malek
Musique : Mamoun Al Shinnawi, Fathy Qoura, Riad El Sonbati, Mohamed Fawzi, Ali Farraj
Production : les films du Lotus (Assia Dagher)

Mélodrame musical. La mère de Fatima est morte en lui donnant naissance. Sa tante et sa grand-mère avaient perdu la vie dans les mêmes circonstances. Depuis ce drame, Salim, son père, est convaincu que toutes les femmes de la famille sont condamnées à subir le même sort. Il a décidé que Fatima ne se marierait jamais et qu’elle n’aurait jamais d’enfant. Dès son plus jeune âge, il lui a interdit de fréquenter les garçons et lui a imposé une éducation d’une grande sévérité. Un jour, ils partent tous les deux pour une courte escapade au Caire. A leur retour, ils découvrent que leur maison et l’atelier de verrerie du père ont été totalement détruits par un incendie. Ils n’ont plus rien. Heureusement, le riche propriétaire d’une usine de verrerie propose à Salim une place comme contremaître dans son établissement et il lui offre même un logement dans son domaine. Le père de Fatima accepte le travail mais refuse le logement : il sait que l’industriel a un fils de l’âge de sa fille. Les années passent. Fatima est devenue une jeune femme et Ahmed, le fils du propriétaire de l’usine qui avait séjourné à l’étranger pour ses études, est de retour…
Notre avis : Helmy Rafla abandonne provisoirement la comédie, genre dans lequel il excelle, pour s’aventurer sur les terres plus arides du mélodrame. Disons-le clairement : ce n’est pas son meilleur film. Le scénario repose sur une idée saugrenue. Une terrible malédiction pèse sur toutes les femmes d’une même famille : elles meurent en donnant naissance à leur premier enfant. Le père de Fatima n’a donc qu’une obsession, protéger sa fille de l’amour qui lui serait fatal. On se doute qu’il va s’opposer à tous les prétendants qui osent approcher sa fille mais on devine aussi que l’amour finira tout de même par triompher. Une trame prévisible donc mais un entrelacement de thèmes qui se prêterait fort bien à une interprétation psychanalytique (la mort et l’amour) ou théologique (le destin et le libre arbitre).
Samedi 6 septembre à 19h30
Méfie-toi de Hawa de Fateen Abdel Wahab (Ah min Hawwa, 1962)avec Rushdy Abaza (docteur Hassan), Madiha Salem (Nadia, la sœur d’Amira), Abdel Moneim Ibrahim (Limaï), Aziza Helmy, Awatif Tikla (Fatia, la servante), Hussein Riad (le grand-père d’Amira), Loubna Abdel Aziz (Amira), Hussein Ismaïl (l’assistant du docteur Hassan), Nahed Sabri (danseuse)
Scénario et dialogues : Mohamed Abou Youssef
Musique : Ali Ismaïl
Production : Ramses Naguib
Une adaptation moderne de la Mégère Apprivoisée de William Shakespeare. Docteur Hassan Shukri est un vétérinaire qui doit s’installer chez un riche propriétaire terrien pour soigner les animaux du domaine. Sur la route, il porte secours à une jeune femme dont la grosse voiture est tombée en panne. La conductrice se montre agressive, traitant le docteur Hassan comme un domestique. Celui-ci découvre peu après que cette charmante personne est Amira, la petite-fille de son employeur. Le vétérinaire fait aussi la connaissance de Nadia, la jeune sœur du dragon qui, contrairement à Amira, est une fille douce et agréable. Nadia a un petit ami mais son grand-père refuse qu’elle se marie tant qu’Amira n’a pas trouvé un époux. Malheureusement, le mauvais caractère d’Amira décourage tous les prétendants qui se présentent. Le docteur Hassan promet au grand-père de l’aider à dresser sa petite-fille. Il la traite tout de suite sans ménagement ce qui déconcerte Amira habituée à plus d’égards. L’attitude cavalière du vétérinaire finit même par l’exaspérer, à tel point qu’un soir elle accuse le docteur Hassan de l’avoir agressée et d’avoir tenté de la violer. Son grand-père sait que c’est faux. Avec le vétérinaire, il monte alors une petite comédie pour donner à la menteuse une bonne leçon : afin de laver l’honneur de la famille, Amira doit épouser son agresseur !
Notre avis : dans cette adaptation très libre de « la Mégère Apprivoisé »e de William Shakespeare, Fateen Abdel Wahab évite tous les pièges qu’un tel sujet pouvait comporter et se garde de toute misogynie grossière. Il nous conte avec élégance et ironie toutes les épreuves que s’imposent les deux héros et parvient à capter notre attention jusqu’à l’inévitable « happy end ». C’est une comédie à l’italienne dont la réussite repose en grande partie sur le talent de ses deux vedettes. Rushdy Abaza est toujours juste, sans rien d’affecté ni de forcé dans son jeu. Quant à Loubna Abdel Aziz, on se dit qu’elle avait bien du talent et que c’est vraiment dommage que sa carrière fût si courte. Fateen Abdel Wahab réunira à nouveau les deux acteurs l’année suivante dans « La Mariée du Nil ».
Dans ce film, la voiture de Rushdy Abaza est une 2 cv Citroën. Pour un homme qui était habitué dans la vie comme à l’écran aux grosses limousines américaines, l’expérience a dû sembler bien exotique !
Vendredi 5 septembre à 19h30
Le Taxi de l’Amour de Niazi Mustafa (Takisi alghiram, 1954) avec Hoda Soltan (Elham), Zinat Sedqy (Kawakeb), Abdel Aziz Mahmoud (Abdo le chauffeur de taxi), Mahmoud El Meleigy (Fadel Amin), El Sayed Bedeir (Hamzawi, le prétendant d’Elham), Ellen Deatto (une danseuse), Khaireya Khairy (la mère d’Abdo), Hassan Fayek (le frère d’Abdo), Monir El Fangary (un employé du casino), Aly Abd El Al (le propriétaire du théâtre), Abdel Salam El Nabolsi (un chanteur), Saïd Abou Bakr (l’ami d’Abdo)
Scénario : Abou Al Seoud Al Ebiary, Niazi Mostafa
Musique : Abdel Aziz Mahmoud
Production : Abdel Aziz Mahmoud, Kamel Madkour

Abdo est un modeste chauffeur de taxi bien qu’il ait une voix exceptionnelle. Un jour, il rencontre Elham, une jeune fille très riche accompagnée de sa servante. Les deux femmes sont montées dans sa voiture pour fuir Fadel Amin, l'oncle et le tuteur d’Elham qui veut la marier à un homme laid et grossier. Elles lui demandent de les conduire au domicile d’une amie d’Elham qui acceptera de les héberger. Malheureusement, cette camarade n’est pas chez elle. La situation devient délicate pour les deux fugueuses. Elles ne savent plus où aller et elles n’ont pas le moindre sou pour régler le taxi. Elham décide de tout avouer au chauffeur. Ce dernier n’est pas insensible au récit de la jeune femme et il leur offre l’hospitalité pour cette nuit. Il vit dans un grand appartement avec sa mère et son frère Hassan. Malheureusement, Fadel Amin ne tarde pas à retrouver leurs traces. Il a fait publier une annonce dans le journal offrant cinquante guinées à quiconque pourra lui indiquer le lieu où se trouve sa nièce. Malheureusement, un ami d’Abdo est tombé sur cette annonce et s’est rendu aussitôt chez le tuteur pour lui indiquer la cachette d’ Elham. Avec ses hommes, il ramène de force sa nièce à son domicile. Au même moment, Abdo apprend la trahison de son ami et se précipite chez le tuteur pour libérer sa protégée. C’est alors que cette dernière a une idée : elle annonce à Fadel Amin qu’elle est déjà mariée à Abdo. Le vieil homme est obligé de les laisser partir même s’il ne renonce pas à récupérer sa pupille. Abdo accepte d’épouser Elham pour une durée d’un mois. Elle sera alors majeure, elle sera libérée de la tutelle de son oncle et elle pourra récupérer la fortune de ses parents. Mais Elham tombe vraiment amoureuse d’Abdo. Le modeste chauffeur de taxi lui aussi est épris de son « épouse » mais il préfère dissimuler ses sentiments : il est convaincu que leurs différences sociales rendent impossible leur union. C’est alors qu’il s’installe à Alexandrie pour devenir chanteur dans un cabaret. Elham décide de le suivre. Elle aussi sera chanteuse en faisant croire à Abdo qu’elle est Yasmina, sa sœur jumelle résidant à Alexandrie. Si elle vit pauvrement, loin des siens, c’est que sa famille l’a rejetée car elle voulait devenir artiste…
Notre avis : une comédie mièvre, indigne du talent du réalisateur Niazi Mustafa, de son scénariste Abou Al Seoud El Ebiary et de l’actrice principale Hoda Soltan. C’est peu dire que nous sommes restés de marbre devant cette histoire d’un chanteur qui tombe amoureux de la sœur jumelle de sa femme, parce qu’elle, au moins, est pauvre… avant qu’on ne découvre que les deux sœurs n’en font qu’une !
L’intrigue mollassonne repose sur un manichéisme caricatural : le chauffeur de taxi, pauvre mais honnête, affronte un tuteur cupide et prétendument violent (violence toute relative : les échanges entre les deux personnages se limitent à quelques menaces et quelques sourcils froncés.). L’apathie générale est à peine troublée par les séquences musicales : de gentilles chansons accompagnées de danses qui se distinguent par leur amateurisme et leur caractère scolaire.
En réalité, « Taxi de l’Amour » est avant tout un film d’Abdel Azouz Mahmoud, tout à la fois producteur, compositeur et héros de cette bluette pour mamies sentimentales. On peut lui reconnaître un certain talent de chanteur et de musicien. Mais comme acteur, il était nettement plus limité. Sympathique, certes, mais limité.
Jeudi 4 spetembre à 23h
Le Voyage sur la Lune d’Hamada Abdel Wahab (Rehla Ela Al Qamar, 1959)
avec Ismaël Yassin (Ismaïl, le chauffeur du minibus), Rushdy Abaza (l’ingénieur Ahmed Roshdy), Safia Tharwat (Stella), Edmond Tuema (le Professeur Charvin), Ibrahim Younes (le Professeur Cosmo), Soad Tharwat (Tula), Gihan (Dana), Hassan Ismaïl (Farid)
Scénario : Hamada Abdel Wahab
Production : Delta Film Productions (Hamada Abdel Wahab)

Le Professeur Charvin a terminé la construction de sa fusée. Tout est prêt pour ce grand voyage vers la Lune dont il rêve depuis si longtemps. Il compte bien être le premier homme à s’y poser et à l’explorer. Apprenant l’imminence du décollage de la fusée, l’ingénieur Ahmed Roshdy se rend au centre spatial de Monsieur Charvin afin de récolter un maximum d’informations sur ce qui s’annonce comme une avancée majeure dans la conquête de l’espace. Il est accompagné de journalistes du quotidien Al Akbar al Youm et de leur chauffeur Ismaïl. Sur la base, ils sont accueillis par le Professeur Charvin lui-même qui ne veut absolument pas qu’on photographie son invention. Seul, Ahmed l’ingénieur est autorisé à le suivre et à monter dans la fusée. Mais Ismaïl le chauffeur a réussi à échapper à la surveillance des gardiens et il entre lui aussi dans l’engin. Sa présence est aussitôt repérée. Monsieur Charvin le prenant pour un espion, brandit un revolver et s’apprête à tirer. En voulant lui échapper, Ismaïl actionne par inadvertance des manettes du tableau de bord. Catastrophe ! Il vient d’allumer les moteurs. La fusée décolle. Ses trois passagers perdent connaissance. Quand ils recouvrent leurs esprits, la Terre est déjà loin. A leur arrivée sur la lune, Monsieur Charvin et ses deux compagnons sont accueillis par un robot qui les conduit sur une base spatiale. Celle-ci est dirigée par le Professeur Cosmo, l’ancien directeur d’un centre de recherche sur l’énergie atomique. Il raconte à ses visiteurs que la Lune a été le théâtre d’un conflit nucléaire il y a une quinzaine d’années. Il avait réussi à trouver refuge à l’intérieur de cette base avec sa fille et six autres jeunes filles. Malheureusement son épouse n’a pas survécu à cette guerre. Depuis, lui et sa petite communauté survivent grâce à des pilules qui leur assurent l’essentiel de leur subsistance.
Notre avis : un film qui mériterait de devenir culte. Nous sommes très proche de l’esthétique des nanards d’Ed Wood : des décors en carton-pâte, une fusée et des robots tout droit sortis d’un dessin d’enfant, des effets spéciaux « faits maison ». Bref, de la science-fiction considérée comme un art naïf et dans son genre, « Le Voyage sur la Lune » constitue une réussite éclatante. Les auteurs se sont visiblement inspirés du film américain « Fusée pour la Lune » (Missile to the Moon) de Richard Cunha sorti l’année précédente. Il n’empêche que la « copie » égyptienne nous semble bien supérieure à son modèle en raison de son absence totale d’esprit de sérieux. Le réalisateur nous convie à une escapade cosmique pleine de fantaisie, un peu dans l’esprit du grand Georges Méliès qui réalisa en 1902 le tout premier « Voyage sur la Lune » du septième art..
Et pour ne rien gâcher, les sept actrices qui incarnent les jeunes femmes qui entourent le Professeur Cosmo sont d’une beauté à couper le souffle. Dans l’une des séquences du film, cinq d’entre elles exécutent une danse incroyable, très loin du style oriental habituel. La jeune femme au corps de déesse qui joue Stella, l’amoureuse de l’ingénieur Ahmed Rushdy, s’appelle Safia Tharwat. Elle fera une carrière d’actrice très brève car elle était avant tout une sportive de premier plan. Elle sera notamment à l’origine du développement en Egypte de la nage synchronisée. Tant pis pour le cinéma…
Mercredi 3 septembre à 19h30
Rendez-vous avec un inconnu d'Atef Salem (Maweed maa maghoul, 1959)
avec Omar Sharif (Magdi), Samia Gamal (Nana, auxiliaire de police), Hala Shawkat (Nadia), Fakher Fakher (Soubhy), Youssef Fakhr El Din (Rachad), Omar Al Hariri (officier de police), Reyad El Kasabgy (le gardien de l'usine), Kamal Hussein (Amin), Thuraya Fakhry (mère de Rachad), Salah Nazmi (le médecin)
Scénario : Youssef Issa
Musique : Mohamed Abdel Wahab
Production : les Films Mohamed Abdel Wahab et les Films Barakat
appréciation : 3/5

Amin est un industriel. Depuis qu’il a constaté que son entreprise était l’objet d’importants détournements de fonds, il reçoit des lettres anonymes lui enjoignant de garder le silence. Amin veut lui-même enquêter avant de prévenir la police. Il convoque Rachad, son jeune comptable. Lors de leur entretien, Amin explique à son interlocuteur qu’il est certain de son innocence mais que quelqu’un a tenté de le faire accuser en falsifiant ses livres de comptes. Tandis qu’ils discutent, un homme s’est introduit dans la voiture de Rachad pour se saisir du revolver qui se trouve dans la boîte à gants. L’inconnu pénètre dans les locaux de l’entreprise et tire sur Amin qui s’effondre mortellement blessé. Poursuivi par le gardien, Rachad se sauve. Sur la route il est arrêté par un étrange personnage qui lui garantit l’impunité bien que tout l’accuse. Il doit disparaître et garder le silence sur tout ce dont il a été le témoin. Après avoir fait ses adieux à sa mère et à sa sœur, Rachad s’envole pour le Soudan. La police a pris l’affaire en main mais elle ne parvient pas à identifier un coupable. Magdi est le jeune frère d’Amin qui fait des études à l’étranger. Il rentre en Egypte pour mener sa propre enquête.
Notre avis : bien que le scénario comporte des facilités, des contradictions et des invraisemblances (oui, ça fait beaucoup !), « Rendez-vous avec un inconnu » est un thriller qui emporte quand même l’adhésion grâce à son atmosphère de roman noir, ses personnages énigmatiques et surtout grâce à la relation incandescente qui unit Omar Sharif et Samia Gamal, ou du moins leurs personnages. Le premier est magistral en héros d’une beauté sombre et altière qui voit avec effroi la réalité se dérober sous ses pas. Et la seconde incarne avec maestria un Dom Juan féminin d’une sensualité diabolique. La beauté des images d’Alexandrie et de ses environs ravira les nostalgiques d’une époque et d’un art de vivre à jamais révolus.
Mardi 2 septembre à 17h
Filles d'aujourd'hui d'Henry Barakat (Banat Al Youm, 1956)
avec Ahmed Ramzy (Fathi), Abdel Halim Hafez (Khaled), Magda Al Sabahi (Salwa), Serag Mounir (le docteur Lotfi), Amal Farid (Layla), Cariman (Buthaïna, la meilleure amie de Layla), Thuraya Fakhry (la mère de Buthaïna), Nawal Mustafa (Najwa), Ellen Diato (Sonia)
Scénario : Henry Barakat et Youssef Issa
Musique : Mohamed Abdel Wahab
Production : les Films Mohamed Abdel Wahab
L’une des scènes du film reprend à l’identique des éléments du chef d’œuvre du cinéma américain, Une Place au Soleil de George Stevens (1951). Même cadre : une fête dans une grande maison de maître ; même musique : Barakat utilise le thème du film américain composé par Franz Waxman ; mêmes costumes : les deux sœurs Salwa et Layla portent une robe identique, copiée sur celle que porte Liz Taylor dans le film de George Stevens ; et même coiffure : Amal Farid a été coiffée pour ressembler au plus près à la jeune actrice américaine. Hommage ou plagiat ?

Comédie musicale. Suleiman Lotfi est un gynécologue qui a trois filles. Salwa est l’aînée, c’est une fille douce et raisonnable qui depuis la mort de leur mère s’occupe de ses deux sœurs plus jeunes, Layla et Najwa. Si la seconde est encore une enfant, la première est une jeune fille insouciante et frivole qui ne pense qu’à s’amuser avec Buthaïna, sa meilleure amie. Fathi, un artiste peintre, est tombé amoureux de Salwa et son ami Khaled veut l’aider à conquérir la jeune fille. Celui-ci est d’autant mieux placé pour le faire qu’il connaît personnellement le docteur et que tous les deux fréquentent le même club. Khaled va sympathiser avec Salwa et provoquer une rencontre avec Fathi. De son côté, il n’est pas insensible au charme de Layla, la deuxième fille du docteur Lotfi. Ils finissent par sortir ensemble et échafaudent des projets communs. Mais les événements à venir vont révéler que Khaled et Salwa sont irrésistiblement attirés l’un vers l’autre…
Notre avis : une très belle comédie musicale avec en vedette celui qui s’apprête à détrôner Farid Al Atrache, le tout jeune Abdel Halim Hafez (aucune rivalité entre les deux hommes qui étaient amis). Les cinq chansons qu’il interprète dans ce film ont été composées par Mohamed Abdel Wahab et parmi elles, figure « Awak » (Je vous Adore), l’un des plus grands « tubes » du chanteur. Henry Barakat peint avec sensibilité et subtilité la naissance de l’amour qui provoque la plus grande confusion dans les cœurs de ses jeunes héros. Amal Farid et Cariman jouent avec un naturel sidérant les jeunes filles complices et insouciantes (destins parallèles de ces deux actrices : elles débutent en même temps et mettent brutalement un terme à leur carrière l’une en 1967 et l’autre en 1968, alors qu’elles ont à peine trente ans.)
Lundi 1er septembre à 17h
La Mariée du Nil de Fateen Abdel Wahab (A'roos El Nil, 1963)
avec Loubna Abdel Aziz (Hamis, la mariée du Nil), Rushdy Abaza (le géologue Sami Fouad), Shweikar (Didi, la fiancée de Sami), Abdel Moneim Ibrahim (Fathy, le collègue de Sami), Fouad Shafik (Docteur Hassan, inspecteur des Antiquités), Abdel Khalek Salah (le président de la société pétrolière), Esmat Mahmoud (Layla, l’assistante du docteur Hassan), Hussein Ismaïl (Rashwan, le chef de chantier), Farhat Omar (Docteur Chedid)
Scénario : Kamel Youssef et Saad Eddin Wahba
Sur une idée de Loubna Abdel Aziz
Musique : Ali Ismaïl, Abdul Hamid Abdul Rahman, Ahmed Shafek Abou Auf
Production : Ramsès Naguib
Comédie. Sami est un géologue qui s’installe pour quelque temps à Louxor afin de superviser le forage d’un puits de pétrole en plein milieu d’un site archéologique. Dès sa première journée de travail, il doit affronter le Docteur Hassan, inspecteur des Antiquités ainsi que son assistante. Les deux personnages tentent de dissuader Sami d’entamer son œuvre de destruction et le menacent d’en informer le ministère. Le lendemain, un autre souci attend le géologue : les ouvriers refusent de continuer à creuser ; ils craignent d’abîmer les tombes qui sont dans le sous-sol et d’être ensuite frappés par la malédiction du Pharaon. Et dernier désagrément : une femme du temps des Pharaons apparaît au milieu des ruines. Seul, Sami peut la voir. Cette séduisante personne est venue du monde des morts pour empêcher tout forage sur le prestigieux domaine construit par ses ancêtres. Elle entreprend de rendre la vie impossible au géologue…
Notre avis : on trouvera bien des analogies entre cette mariée du Nil et la comédie musicale d’Henry Barakat « Mademoiselle Diablesse » qui date de 1949. Dans ces deux films, un fantôme féminin ayant vécu à une époque très reculée s’amuse à perturber l’existence d’un homme d’aujourd’hui. Si « Mademoiselle Diablesse » est un chef d’œuvre, il n’en est pas de même pour le film de Fateen Abdel Wahab qui reste néanmoins un agréable divertissement avec un message estimable : l’Egypte ne doit pas sacrifier son patrimoine exceptionnel au nom d’impératifs économiques et industriels. Les cinéphiles apprécieront dans la scène du mariage, la référence évidente au film d’Henry Barakat qui lui-même s’inspirait de la comédie américaine de René Clair « J’ai épousé une sorcière » datant de 1942. Dans les trois films, l’héroïne use de pouvoirs surnaturels pour perturber la cérémonie qui doit unir celui qu’elle aime avec une rivale. Cette « Mariée du Nil » offrit à l’actrice Loubna Abdel Aziz l’un des rôles les plus marquants de sa trop courte carrière.