samedi 16 août 2025

Le Voyage des Merveilles (rihlat aleagayib, 1974)

رحلة العجائب
إخراج : حسن الصيفي






















Hassan El Seifi a réalisé Le Voyage des Merveilles en 1974.
Distribution : Mohamed Awad (Abbas Al -Masry), Nabila Ebeid (Awarah, la femme d'Abbas), Saif Allah (Mukhtar Hussein, le collègue d'Abbas dans l'usine), Wahd Seif (Massoud, le chauffeur de taxi), Nabil Al Hagrasi (Kamel Naguib, l’avocat), Simone (Susan, la cousine d'Abbas), Mohamed Taha (le chanteur)
Scénario : Sabri Ezzat et Hassan El Seifi
Musique : Omar Khorsheid
Production : Hassan El Seifi

Nabila Ebeid et Mohamed Awad















Nabil Al Nagrasi















Simone et Mohamed Awad















Mohamed Awad
















Résumé

Abbas El-Masry travaille comme technicien dans une usine automobile. Il est marié à Awarah qui perçoit quelques revenus d’un taxi dont elle est propriétaire. Un jour, ils reçoivent un télégramme en provenance des Etats-Unis. Le message est rédigé en anglais et Awarah demande à la fille de leur voisine de le traduire. C’est ainsi qu’ils apprennent la mort de Shaker El-Masry, l'oncle d'Abbas, qui avait émigré aux Etats-Unis. L’auteur du message, l'avocat Kamel Naguib, demande à Abbas de venir à Los Angeles pour qu’il puisse lui remettre sa part d’héritage. Un billet d’avion est à retirer dans l’agence d’une compagnie aérienne du Caire. Abbas et Awarah se précipitent à l’adresse indiquée. L’héritier récupère son billet mais sa femme insiste pour en acheter un second : elle souhaite accompagner son mari aux Etats-Unis. C’est l’avocat Kamel Naguib qui vient les chercher à l’aéroport pour les conduire à leur luxueux hôtel, la résidence préférée des stars du show-biz, le fameux Continental Hyatt House. Abbas et Awarah sont à la fois émerveillés et déconcertés par tout ce qu’ils découvrent. Abbas laisse sa femme à l’hôtel et repart en compagnie de son avocat. Ce dernier l’emmène à la villa de son oncle où réside toujours Suzan, la fille du défunt.

Quand ils arrivent, les deux hommes se retrouvent au milieu d’une fête organisée par la jeune femme. Elle a invité une quinzaine d’amis qui dansent autour de la piscine de la propriété. Suzan est une jolie blonde, très sympathique, qui accueille chaleureusement ce cousin venu d’Egypte. Très à l’aise, Abbas se mêle à la fête et sa fantaisie séduit tous les convives. Pendant ce temps-là, Awarah elle aussi prend du bon temps avec des résidents de l’hôtel. Accompagnée de l’orchestre de l’établissement, elle fait une démonstration de danse orientale pour ses nouveaux amis.

Le lendemain, Suzan et Abbas se retrouvent dans le bureau de l’avocat pour l’ouverture du testament. Ils découvrent que leur père et oncle a laissé une importante somme d'argent à son petit chien « Antar « et qu’Il a légué le reste de sa fortune à parts égales entre sa fille, Susan, et son neveu, Abbas, à la condition qu’ils se marient. Les deux héritiers rejettent cette condition qu’ils jugent inacceptable. Mais de retour à son hôtel, Abbas réfléchit. En fait, il suffit de se marier et de divorcer aussitôt après pour satisfaire les dernières volontés de l’oncle. Il se rend aussitôt chez Suzan en compagnie de l’avocat mais la jeune femme est sortie avec ses amis pour une virée au bord de la mer. Les deux hommes se lancent à sa poursuite et finissent par la retrouver. Dans un premier temps, l’ambiance est tendue entre Abbas et Suzan. Les amis de cette dernière s’en prennent physiquement à son cousin qui s’effondre inconscient. Mais Suzan n’accepte pas cette violence et porte secours à Abbas. Les deux parents se réconcilient et la jeune femme accepte l’idée du mariage.

Ils se marient peu après mais le problème, c’est que Suzan est réellement tombée amoureuse de son cousin et a bien l’intention de passer avec lui une véritable nuit de noces. Après avoir dîné dans un cabaret, Suzan entraîne Abbas dans la villa. Le jeune homme a toutes les peines du monde à résister aux ardeurs de sa nouvelle épouse mais il finit par lui échapper et rentre à l’hôtel pour retrouver Awarah. Las ! Le lendemain matin, Suzan se présente à l’hôtel pour récupérer son mari. S’engage alors un combat impitoyable entre les deux femmes. Mais rien n’y fera : Abbas veut rester avec Awarah et Suzan finira par accepter la situation et les laissera repartir en Egypte.


Critique

Dans les années soixante-dix, Mohamed Awad est devenu l’acteur comique le plus populaire de sa génération. C’est lui qui a repris à Ismaïl Yassin la couronne du roi de la comédie, hélas, et on lui doit un certain nombre de « navets rigolos » de l’ère post nassérienne.
 
Son style très particulier lui vient de sa formation théâtrale. Il a acquis sa notoriété sur les planches et quand il passe au cinéma, il conserve tous les tics de l’artiste de théâtre de boulevard avec une voix nasillarde qui porte loin et un jeu outré tout en grimaces et contorsions. De film en film, il incarne le même personnage loufoque, très agité et doté de la sensibilité et du QI d’un enfant de dix ans. Ce qui ne l’empêche nullement d’être toujours entouré de jeunes actrices courtement vêtues. A cet égard, il nous rappelle parfois le regretté comique britannique Benny Hill.
 
Ce Voyage des Merveilles nous permet de vérifier tous ces éléments et d’apprécier l’art de Mohamed Awad. Cet art est celui de la saturation : on ne laisse aucun répit au spectateur et tout est fait pour provoquer le rire. Chaque situation -l’achat du billet d’avion, le voyage en avion, la découverte de la chambre d’hôtel etc.-est exploitée au maximum de ses potentialités comiques ce qui nous vaut des rafales de gags laborieux. Les scènes grotesques s’enchaînent comme celle où le personnage joué par Mohamed Awad, vêtu d’un unique caleçon, tente d’échapper aux ardeurs de sa jeune épouse et se retrouve en pleine nuit sur le capot d’une voiture. Dans la dernière partie notre héros se déguise en cow-boy alors qu’il rejoint sa cousine et sa bande de hippies sur la plage. C’est incohérent mais les auteurs ont dû se dire que ça pouvait toujours amuser les enfants.

Bref, ce film accumule tant de naïvetés et de balourdises que le spectateur oscille sans cesse entre l’indulgence apitoyée et la consternation.

Malgré cela, nous avons bien aimé la manière dont cette comédie opère une inversion du regard : ici, c’est l’Egypte qui observe les Etats-Unis et on s’aperçoit que cette vision est tout aussi stéréotypée que la représentation du monde arabe en Occident. En fait, ce que reproduit le réalisateur, c’est l’univers rutilant des séries américaines : les grosses voitures décapotables, les hôtels de luxe, les filles qui dansent en maillot de bain, les hippies qui ne font rien. À tout moment, on s’attend à voir surgir Starsky et Hutch ! Et pour l’ambiance, on a même droit à un extrait du fameux « Theme from Shaft d’Isaac Hayes !

La partenaire féminine de Mohamed Awad, c’est Nabilla Ebeid. Elle joue l’épouse du héros, un personnage très en retrait, sans grand intérêt. On se demande ce qui a pu inciter l’une des plus belles et talentueuses actrices de son temps à participer au tournage d’un film pareil pour un rôle si peu valorisant.

Appréciation : 2/5
**

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

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