jeudi 30 juin 2016

la Danseuse et le Politicien (Al-raqissa wa-l-siyasi, 1990)

الراقصة والسياسي
إخراج : سمير سيف


La Danseuse et le Politicien a été réalisé par Samir Seif en 1990.
Adapté d’un roman d'Ihsan Abdul Quddus
Distribution : Nabila Ebeid , Salah Kabil, Mostafa Metwali, Farouk Falawkas, Roshdy El Mahdy, Mohamed El Tagy, Mostafa Hachem, Ezzat Al Mashad
Scénario : Wahid Hamid
Musique : Mohamed Sultan, Farouk Salamah, Khaled El Amir


Salah Kabil

Nabila Ebeid et Farouk Falawkas

Salah Kabil et Nabila Ebeid

Roshdy El Mahdy et Moustafa Ashem

Nabila Ebeid

Nabila Ebeid et Salah Kabil


Résumé

Sonia Salim est une célèbre danseuse. Un jour elle voit à la télévision un ministre qui lui rappelle une ancienne relation. En effet c’est Abdel Hamid Rafat qu’elle a connu il y a une dizaine d’années. Il était venu la voir dans le cabaret où elle travaillait. Il lui avait demandé de danser pour un homme politique important lors d’une soirée privée. Elle serait très bien payée. Elle avait accepté. Après sa prestation, il l’avait raccompagnée à son domicile et ils avaient passé la nuit ensemble. Elle ne reçut jamais la somme promise et puis elle avait fini par oublier totalement cet amant d’un soir. Le revoir soudain à la télévision dans les habits de ministre l’a totalement bouleversée. Sonia veut reprendre contact avec lui. Grâce à son assistant, elle obtient ses coordonnées. Abdel accepte un rendez-vous. Ils couchent à nouveau ensemble. Mais Abdel comprend que cette liaison peut lui porter préjudice. Les élections approchent et un scandale aurait de fâcheuses conséquences pour lui et son parti. Il décide de rompre définitivement. Il donne des consignes très strictes à son équipe pour que tous les appels de Sonia soient impitoyablement rejetés. Quelque temps après, la danseuse délaissée fait un malaise. Elle est hospitalisée quelques jours. Personne ne vient la voir. Cette expérience la transforme complètement. Elle souhaite désormais se consacrer aux enfants. Grâce à sa fortune, elle veut fonder un orphelinat. Malheureusement, l’administration ne lui donne pas les autorisations nécessaires. Sa condition de « femme de mauvaise vie » lui ferme toutes les portes. Elle décide de contacter une dernière fois son ancien amant pour qu’il l’aide dans son projet. Il refuse d’intervenir. Folle de rage, Sonia convoque la presse pour annoncer la parution prochaine de ses mémoires dans lesquels elle fera des révélations fracassantes sur ses amours. Dans le camp d'Abdel Hamid Rafat, c’est la panique. Le ministre n’a plus le choix : il lève tous les obstacles qui se dressaient sur la route de la danseuse. La construction de l’orphelinat peut commencer.


Critique

Ce n’est pas la première fois que Nabilla Ebeid apparaît dans une adaptation d’une oeuvre d’Ihsan Abdul Quddus. La star apprécie les portraits de femmes que l’écrivain égyptien brosse roman après roman. Ce ne sont jamais des militantes révolutionnaires mais souvent des femmes modernes déterminées à vivre comme elles l’entendent dans la société telle qu’elle est. (Ihsan Abdul Quddus a écrit soixante romans, tous des best-sellers dans son pays. Près de cinquante d'entre eux ont fait l’objet d’une adaptation cinématographique. Aucun n’a été traduit en français.)
Dans La Danseuse et le Politicien, on suit le combat d’une femme qui ose s’en prendre à un ministre pour réaliser un projet cher à son cœur : la construction d’un orphelinat. 
Le film dénonce les préjugés qui ont toujours cours à l’encontre des danseuses ravalées au rang de prostituées. On les emploie volontiers pour agrémenter une manifestation officielle mais on leur voue un mépris absolu. C’est ce que montre l’une des scènes les plus réussies du film : après sa prestation lors d’un mariage où ont été conviés plusieurs membres du gouvernement, Sonia doit défendre son art face à des femmes qui n’ont que sarcasmes à la bouche. Malgré sa force de caractère, elle doit battre en retraite devant toutes ces harpies respectables. 
La cible principale du film est cette classe politique qui profite du système mis en place par Moubarak. Si au début des années quatre-vingt-dix, le Raïs reste populaire, il n’en est pas de même pour ses ministres qui sont unanimement critiqués pour leur corruption et leur hypocrisie. Comme le Abdel Hamid Rafat du film, bien des responsables politiques profitent de leur position pour séduire des femmes « de mauvaise vie ». Et ensuite ils redoublent d’ingéniosité pour que leurs frasques restent à jamais ignorées de leurs électeurs (Même si nous sommes dans un régime de parti unique, il faut quand même sauver les apparences !). 
Dans la Danseuse et la Politicien, on peut saluer la performance de Nabila Ebeid, qui à quarante-cinq ans passés, exécute plusieurs danses et joue dans des scènes d’amour assez osées. Elle qui fut l’une des actrices les plus populaires du cinéma égyptien tient à dire à son public qu’elle est toujours à la hauteur de sa réputation et qu’on aurait tort de la considérer comme une has been. Soit. 
Il n’empêche que les bons sentiments ne font pas les bons films. Et si certains en doutaient encore, la Danseuse et le Politicien est la preuve qu’il leur manquait. 
C’est filmé avec une rare platitude et on a bien du mal à compatir au destin de cette danseuse d’âge mur. Certes, l’héroïne a souvent les yeux baignés de larmes mais cela ne marche pas. Le réalisateur est incapable de faire naître une véritable émotion car il est clair que lui même en filmant ne ressent rien. 
Quant au caractère engagé de l’œuvre, il n’est pas d’une folle originalité ni d’une grande hardiesse : le portrait du ministre corrompu est un poncif du cinéma égyptien, un poncif qui dominera les années quatre-vingt (En revanche, il est quasi impossible de trouver un seul film de la même période s’en prenant, même de manière voilée, au Raïs lui-même.). 
Et le plus gênant, c’est le caractère hypocrite du film car au final, il partage les préjugés qu’il prétend dénoncer : la danse reste un art immoral, et pour se racheter, Sonia emploie toute sa fortune mal acquise pour le bonheur des enfants abandonnés. La morale est claire : le salut passe forcément par l’abandon du métier de danseuse.

Appréciation : 2/5
**
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

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