mercredi 24 septembre 2025

Les dix meilleurs films politiques

 Le festival du cinéma méditerranéen d'Alexandrie se tiendra du jeudi 2 au lundi 6 octobre. Il est présidé par le critique de cinéma Al Amir Abaza.


A cette occasion, la direction du festival a demandé à 41 critiques d'Egypte et du monde arabe de dresser la liste des 100 meilleurs films politiques de l'histoire dun cinéma égyptien.

La direction du festival vient de divulguer les dix premiers films de ce classement. Un excellent choix ! 

Affiche d'Al Karnak


1) Al Karnak d'Ali Badrakhan (1975). 
Une dénonciation du recours systématique à la torture
 par le régime nassérien contre ses opposants.

Soad Hosny et Kamal Al Shennawi dans "Al Karnak"

2) L'Innocent d'Atef El Tayeb (Al Bari, 1986)
Une dénonciation des conditions carcérales dans l'Egypte des années 70

Mahmoud Abdel Aziz dans "L'Innocent"

3) Un Soupçon de Peur d'Hussein Kamal (Shai’ min Al-Khowf, 1969)
Une dénonciaition de la tyrannie exercée par 
les grands propriétaires terriens sur les petis paysans

Shadia dans "Un Soupçon de Peur"

4) Nous, ceux de l'autobus d'Hussein Kamal (Ehna Betoaa El Autobess, 1979) 
Une dénonciation de la justice qui broie sans pitié les simples citoyens. 

Adel Imam et Abdel Moneim Madbouli dans "Nous, ceux de l'autobus"

5) Un Homme dans notre Maison d'Henry Barakat (Fi Beitna Ragol, 1961)
Une évocation de la révolte des étudiants contre le pouvoir monarchique en 1946

Zahrat Al Oula et Rushdy Abaza dans "Un Homme dans Notre Maison"

6) Les Oiseaux des Ténèbres de Sherif Arafa (Toyour elzalam, 1995)
Une dénonciation de la corruption du pouvoir et de la montée de l'islamisme

Yousra et Adel Imam dans "Les Oiseaux des Ténèbres"

7) Terrorisme et Kebab de Sherif Arafa (Al-Irhab Wa Al-Kabab, 1992)
Une dénonciation de la bureaucratie 
qui rend insupportable le quotidien des Egyptiens

Yousra et Adel Imam dans "Terrorisme et Kebab"

8) Le Moineau de Youssef Chahine (Al Usfour, 1974)
Une dénonciation des travers de la société égyptienne 
au moment de la guerre des six jours en 1967 

Habiba et Saïf Abdul Rahman dans "Le Moineau"

9) Aube et crépuscule de Kamal El Sheikh (gheroub wa cherouk, 1970)
Une évocation des mouvements révolutionnaires 
qui en 1952 passent à l'action pour renverser la monarchie

Soad Hosny et Rushdy Abaza dans "Aube et Crépuscule"

10) Le Caire 30 de Salah Abou Seif ( al-kahira thalatin, 1966)
Une dénonciation de la corruption généralisée 
de la class dirigeante dans l'Egypte des années 30

Soad Hosny et Abdel Aziz Mikewi dans "Le Caire 30"





mardi 16 septembre 2025

A la télé : les films du jour (Rotana Classic du 16 au 30 septembre)

روتانا كلاسيك

Quels films peut-on voir sur la chaîne Rotana Classic ? Les horaires donnés sont ceux de l'après-midi ou de la soirée (heure de Paris). La plupart des films sont ensuite rediffusés le lendemain matin.
Rotana Classic a remplacé Rotana Zaman en 2012. Cette chaine fait partie du groupe Rotana basé en Arabie Saoudite et spécialisé dans le divertissement (télévision et musique). Celui-ci a été créé par le prince Al-Walid ben Talal ben Abdelaziz Al Saoud, membre de la dynastie Al Saoud et petit-fils du fondateur de l'Arabie Saoudite. Comme son nom l’indique, Rotana Classic diffuse essentiellement les grands classiques du cinéma égyptien. Disponible en France.


Mardi 30 septembre à 23h

Amour et Vengeance de Youssef Wahby (Gharam wa Intiqam, 1944)
avec Asmahan (Sohair), Anwar Wagdi (Wahid Ezzat), Youssef Wahby (Gamal Hamdy), Mahmoud El Meleigy (Safwat, le cousin de Wahid), Zouzou Madi (Inayat, l’amie de Sohair), Amina Sherif (Mounira, la sœur de Gamal), Beshara Wakim (le docteur Beshara), Fouad El Rashidi (le procureur), Menassa Fahmy ( le médecin de Gamal Hamdy), Gina (la danseuse), Mohamed Kamel (Oncle Rajab), Fakher Fakher, Soad Ahmed (la mère de Gamal Hamdy), Rashad Hamed (le chauffeur), Abbas Rahmy (un admirateur), Ibrahim Hechmat (expert dans la police scientifique)
Scénario : Youssef Wahby
Une histoire inspirée du Cid, la célèbre tragédie du dramaturge français Pierre Corneille (1606-1684)
Musique : Mohamed Al Qasabji, Ryad Al Sunbati, Mohammad Hassan Al Shugai et Farid Al Atrache
Textes des chansons : Ahmed Rami, Bayram El Tunsi, Mahmoud Al Sinnawi
Production : les Studios Misr
figure dans la liste des 100 films les plus importants de l'histoire du cinéma égyptien


Sohair, une chanteuse célèbre décide d’abandonner sa carrière pour épouser l’amour de sa vie, Wahid, un homme à la sulfureuse réputation, alcoolique et coureur de jupons. Malheureusement, celui-ci est tué la veille de la cérémonie. Le principal suspect est le compositeur Gamal Hamdy. Il est arrêté et interrogé par la police mais on ne trouve aucune preuve contre lui. Il est libéré. Sohair croise à nouveau la route du musicien lors d’une fête donnée par l’une de ses amies. Elle décide de faire semblant de tomber amoureuse de lui pour connaître toute la vérité et se venger…
Asmahan meurt accidentellement avant la fin du tournage de ce film, ce qui contraint Youssef Wahby à modifier le dénouement de son scénario.

Notre avis : ce second et dernier film tourné par Asmahan joua un rôle essentiel dans la construction du mythe qu’elle est devenue après sa mort. Son visage de tragédienne, sa voix profonde, son regard énigmatique et son port d’impératrice, tout cela est resté gravé dans la mémoire de plusieurs générations de spectateurs. Et puis, il y a les chansons parmi les plus émouvantes de tout son répertoire (Notre préférée est Emta Hate'ref composée par Mohamed Al Qasabji sur un poème de Mamoun El Shinnawy.). Bien sûr, on pourra relever certaines naïvetés du scénario ou certains effets un peu appuyés dans telle ou telle scène mais l’essentiel est ailleurs. Au-delà de ses qualités et de ses défauts, « Amour et Vengeance » restera comme l’une des plus belles pages de l’histoire de la culture égyptienne et comme l’ultime témoignage de l’une des plus grandes chanteuses arabes de tous les temps.


Lundi 29 septembre à 15h

Un Jour sans Lendemain d'Henry Barakat (Youm bela ghad, 1962)
avec Farid El Atrache (Mamdouh), Maryam Fakhr Eddin (Layla), Zizi El Badraoui (Souad), Youssef Fakhr El Din (Adel), Mohamed Sultan (Hussein, l’amoureux de Souad), Nahed Sabry (la danseuse), Zaki Rostom (Taher), Ahmed Loxer (Saleh), Abdel Khalek Saleh (le médecin)
Scénario : Henry Barakat
Dialogues : Youssef Issa
D’après la pièce du dramaturge germano-britannique Rudolf Wilhelm Besier (1878-1942), The Barretts Of Winpoile Street. Cette pièce qui raconte la vie de la poétesse et essayiste Elizabeth Barrett Browning (1806-1861) a été adaptée à deux reprises par le réalisateur américain Sidney Franklin, la première fois en 1934, la seconde en 1957.
Musique : Farid Al AtracheParoles des chansons : Fathy Qoura, Kamel Al Shennawi, Morsi Gamil Aziz
Production : Les films Farid Al Atrache


Layla est une jeune femme handicapée qui a perdu sa mère alors qu’elle était enfant. Son beau-père lui a toujours manifesté une grande affection. Il veille sans relâche sur sa santé et son bien-être. Layla est passionnée par l’écriture et elle compose des poèmes. Elle a envoyé certains d’entre eux à Mamdouh, un célèbre chanteur qui, impressionné par la beauté de ces textes, décide de les mettre en musique. Malgré les réticences de Layla, les deux artistes finissent par se rencontrer et ils tombent aussitôt amoureux l’un de l’autre. Cet amour a des effets bénéfiques sur l’état physique de Layla : elle commence à retrouver l’usage de ses jambes. Mais cette situation déplait fortement à son beau-père. On comprend que celui-ci est secrètement amoureux de Layla et qu’il entend repousser sans ménagement tout prétendant qui se présentera à son domicile…

Notre avis : Farid Al Atrache est le véritable maître d’œuvre de ce drame. Il en est à la fois l’acteur principal, le compositeur et le producteur. Pour la réalisation, il a fait appel à son ami, le grand cinéaste Henry Barakat avec qui il a déjà tant de fois travaillé et qui s’est toujours plié à ses exigences de star. Farid Al Atrache retrouve pour ce film une partenaire qu’il connaît bien, Miriam Fakhr Eddin. Comme dans d’autres productions similaires, elle joue la jeune fille pure et mélancolique qui aime éperdument le célèbre chanteur, évidemment incarné par Farid Al Atrache. Le film sombrerait dans l’académisme le plus pesant s’il n’y avait pas autour des deux héros des personnages beaucoup plus intéressants. Le premier est celui du beau-père. Ce monstre d’égoïsme, autoritaire et calculateur, est joué magistralement par Zaki Rostom. Lui aussi a souvent tourné avec Henry Barakat (Il était déjà à l’affiche de l’un des tout premiers films du cinéaste en 1942.) et ici il nous offre l’une de ses plus belles prestations. Le second personnage qui sauve le film, c’est la petite sœur de l’héroïne interprétée par Zizi El Badraoui. Par sa grâce et sa vivacité, la jeune actrice de dix-huit ans est une bouffée d’oxygène dans ce drame un peu convenu. Son personnage semble tout droit sorti d’un film de la Nouvelle Vague française, notamment dans ces très jolies scènes où elle retrouve son amoureux chez le disquaire de son quartier.


Dimanche 28 septembre à 23h

Dérive sur le Nil d'Hussein Kamal (Thartharah fawq al-Nil, 1971)
avec Adel Adham (Ali Al Saïd, le critique d’art), Mervat Amine (Sana, l’étudiante), Magda El-Khatib (Samara, la journaliste), Imad Hamdi (Anis Zaki, l’employé de bureau), Ahmed Ramzy (Ragab Al Qadi, le jeune acteur), Soheir Ramzy (Layla Zidane, la maîtresse de Khaled Azouz), Ahmed Tawfiq (Mustafa Rashid, l’avocat), Naemet Mokhtar (Sania Kamal, la femme infidèle), Salah Nazmy (Khaled Azouz, l’écrivain), Ahmed El Gezeiry (le domestique), Aïda El Shahir (chanteuse), Mahmoud Kamal (Abou Sarih), Zizi Farid (la paysanne)
Adaptation d’un roman de Naguib Mahfouz publié en 1966 (traduction française en 1989)
Scénario : Mamdouh El Leithy
Musique : Ali Ismaïl
Production : Gamal El Leithy
appréciation : 5/5


Nous sommes en 1967, pendant la guerre des Six Jours.
Anis Zaki est un vieux fonctionnaire qui travaille au Ministère de la Santé. Il ne supporte plus la société dans laquelle il vit. L’autoritarisme des uns, l’hypocrisie des autres, tout lui fait horreur. Il arpente les rues du Caire en ruminant à voix haute. Beaucoup le prennent pour un fou. C’est un vieux misanthrope solitaire et malheureux qui ne trouve l’apaisement que dans la consommation régulière de hachich.
Un jour par hasard, il rencontre Ragab El-Adi, un ancien voisin qui est devenu acteur de cinéma. Celui-ci l’invite dans son « Royaume » : c’est une péniche où avec des amis, ils se retrouvent le soir pour fumer le narguilé...

Notre avis : une radiographie implacable de l'âme égyptienne au lendemain de la défaite de 67. Parmi toutes les adaptations des romans de Naguib Mahfouz, sans doute la plus réussie, au point que l'on peut se demander si par certains côtés le film ne dépasse pas le texte original. « Dérive sur le Nil » rassemble une galerie incroyable d’actrices et d’acteurs de tout premier plan et offre à la majorité d’entre eux le plus beau rôle de leur riche carrière. Imad Hamdi s’affirme ici comme l’un des plus grands acteurs de son temps avec ce personnage de vieil employé lunaire, bien loin des rôles stéréotypés d’amoureux délicats et élégants qu’on lui confie d’ordinaire.


Vendredi 26 septembre à 23h

Le Rivage de la Gaieté d'Houssam Al Din Mustafa (Chatei el Marah, 1967)
avec Nagat El Saghera (Norah), Hassan Youssef (Houssam), Youssef Fakhr El Din (Hamada), Samia Shokri (Riri), Samir Ghanem (ami d’Houssam), George Sedhom (ami d’Houssam), El Deif Ahmed (ami d’Houssam), Abdel Moneim Madbouly (le professeur Raafat), Nahed Yousri (Nahed), Shahinaz Taha (Salli, la sœur de Norah), Sanaa Mazhar (Sanaa, l’amie d’Hamada), Mimi Chakib (Aziza, la femme du professeur), Adly Kasseb (le père d’Houssam)
Scénario et dialogues : Abdel Fattah El Sayed et Adli El Moled
Musique : Mohamed Abdel Wahab
Le Rivage de la Gaieté est une adaptation de La Stripteaseuse effarouchée (Girl Happy), un film américain réalisé en 1966 par Boris Sagal avec en vedette Elvis Presley.

Une curiosité : dans l’une de leurs chansons, les Trois Lumières du Théâtre (Samir Ghanem, George Sedhom, El Deif Ahmed) reprennent le refrain de Can’t Buy Me Love des Beatles.

Le film sort en avril 1967. La guerre des six jours éclate deux mois plus tard. En septembre, Ismalïa est soumise à des bombardements intensifs causant de lourdes pertes parmi la population civile. Le Rivage de la Gaieté est devenu le Rivage de la Mort.


Comédie musicale. Un professeur laisse ses deux grandes filles, Norah et Sally, partir seules pour quinze jours de vacances à Ismaïlia avec leur club. Craignant pour leur vertu, l’universitaire demande à Houssam, le fils de son meilleur ami, de les accompagner pour les surveiller discrètement. Le jeune homme qui est musicien accepte la mission. Il se rend à Ismaïlia avec les trois membres de son groupe. Le voyage est long et pénible car leur vieux tacot tombe constamment en panne. Une fois arrivés, les quatre garçons s’installent dans le même hôtel que Norah, Sally et leurs camarades. Ils ont obtenu un logement gratuit, en échange, ils doivent se produire en soirée devant les clients de l’établissement. Mais Houssam n’oublie pas sa mission. Avec ses camarades, il part aussitôt à la recherche des deux sœurs et il ne tarde pas à découvrir que Norah est courtisée par Hamada, un incorrigible coureur de jupons. Celui-ci est très vite parvenu à gagner l’amitié de la jeune fille…

Notre avis : un film à destination des adolescents. Dans une ambiance « yéyé », on flirte, on chante et on danse en maillot de bain sur la plage, loin des parents restés au Caire (à noter qu’on retrouve tous ces ingrédients ainsi qu’une partie des acteurs dans le film de Niazi Mustafa, « Une Jeunesse Très Folle », sorti la même année). Un divertissement bon enfant même si les gags des Trois Lumière du Théâtre nous semblent parfois bien laborieux. Mais ce qu’on retiendra de ce film ce sont avant tout les très belles chansons interprétées par Nagat El Saghira et composées par Mohamed Abdel Wahab. Rien que pour cela, ce « Rivage de la Gaieté » mérite d’être vu.


Jeudi 25 septembre à 15h

Moi et mes filles d'Hussein Helmy El Mohandes (Ana wa banati, 1961)

avec Abdel Moneim Ibrahim (Fahmy), Salah Zulficar (Samir), Zahrat Al Oula (Mervat), Nahed Sharif (Maysa), Fathia Chahine (propriétaire de la boutique de mode), Fayza Ahmed (Mahasin), Amal Farid (Mona), Zaki Rostom (Mahmoud Abdel Fatah), Samia Roshdy (la mère d’Hamza), Ali Kamal (Gaber), Ahmed Bali (un ami de Mahmoud), Abdel Ghani El Nagdi (Hamza)
Scénario : Hussein Helmy El Mohandes
Musique : Attya Sharara, Ibrahim Haggag, Mohamed Al Mogi


Drame. Mahmoud Abdel Fatah est veuf et il élève seul ses quatre grandes filles : Mervat, Maysa, Mahasin, Mona. Il leur a donné une excellente éducation mais il n’a pas les moyens de financer leur futur mariage. La situation se complique quand il est mis brutalement à la retraite. Sur les conseils d’une relation, il investit toutes ses économies dans une société qui pourra lui faire gagner beaucoup d’argent. Il voit enfin l’avenir avec un certain optimisme. Las ! En se rendant au siège de la société, il s’aperçoit qu’elle a déménagé sans laisser d’adresse : il a été joué par des escrocs qui ont disparu avec son argent ! Il a un malaise et chute dans l’escalier. Il est hospitalisé. Désormais, ses quatre filles devront affronter seules les difficultés de la vie…

Notre avis : la chronique familiale est dans le cinéma égyptien un genre en soi. Nous retrouvons dans « Moi et mes filles tous les ingrédients qui ont fait le succès de ces productions. Le fil narratif est toujours à peu près le même : une famille nombreuse qui autrefois a connu l’aisance doit affronter des difficultés de toutes sortes, ce qui conduit certains de ses membres à faire des choix malheureux. Comme toujours, Zaki Rostom excelle dans ces rôles de patriarches qui vacillent sous les coups du destin. Mais l’intérêt du film repose essentiellement sur le très attachant quatuor formé par les quatre filles. Les deux plus jeunes actrices, Nahed Sharif et Amal Farid, sont d’une spontanéité et d’une justesses rares (Nahed Sharif était une excellente actrice et il est tout à fait regrettable que les producteurs, les critiques et le public n’aient voulu voir en elle que la petite pin-up sexy pour comédies vulgaires.). En revanche, Fayza Ahmed constitue le « maillon faible » de « Moi et mes filles » : si elle sait chanter, elle ne sait absolument pas jouer la comédie. Ce n’est sans doute pas un hasard si ce film est le denier dans lequel on lui a confié un rôle. Dans les suivants, elle se contentera de chanter.


Mercredi 24 septembre à 15h

Le Soleil de Minuit d'Hussein Helmy El Mohandes (Shams La Tgheeb, 1959)
avec Zubaida Tharwat (Soha), Kamal El Shennawi (Salah, l’ophtalmologue), Hussein Riad (Ahmed, le père de Soha), Youssef Fakhr El Din (Essam), Aida Helal (Kawthar, la fiancée d’Ahmed), Nazim Shaarawy (le directeur de l’institut pour aveugle), Thuraya Fakhry (la nourrice), Mary Ezz El Din (la mère d’Essam), Ahmed Loxer (le premier médecin), Ahmed Farahat (Mohamed, le petit bédouin)
Scénario : Hussein Helmy El Mohandes
Production : Youssef Obaid


Soha est une jeune fille qui mène une existence heureuse auprès de son père et de son petit frère. Depuis la disparition de la mère, une nourrice affectueuse et dévouée veille sur toute la petite famille. Pour parfaire son bonheur, Sohah est amoureuse d’un jeune garçon avec qui elle projette de se marier. Ce sont les vacances et Ahmed, le père, a décidé de séjourner au Fayoum avec ses deux enfants. Il en profite pour leur présenter Kawthar, la jeune femme qu’il compte épouser. A l’hôtel, Soha fait la connaissance de Mohamed, un petit bédouin qui vit dans le désert avec sa famille. Ensemble, ils se promènent dans la nature environnante. Soha s’est prise d’affection pour son petit compagnon et quand celui-ci tombe malade, elle passe ses journées à son chevet pour lui apporter soin et réconfort. Malheureusement, l’état de l’enfant s’aggrave et il meurt subitement. Soha est effondrée. Elle quitte précipitamment la tente de la famille bédouine et se perd dans le désert. Soudain, elle aperçoit au loin son père qui était parti à sa recherche. En voulant le rejoindre, elle chute et sa tête heurte violemment une grosse pierre. Elle perd connaissance. Quand Soha revient à elle, elle est à l’hôpital entourée de son père, de son frère et de son fiancé. Mais elle découvre en même temps qu’elle a perdu la vue. Toute la famille est bouleversée. Quand elle retourne chez elle, son père et sa nourrice lui manifestent toute l’affection dont ils sont capables. Mais elle aimerait avoir aussi auprès d’elle son fiancé Essam. Elle téléphone chez ses parents mais elle comprend qu’il a décidé de rompre…

Notre avis : « Le Soleil de Minuit » est le premier film que réalise Hussein Helmy El Mohandes. Il a déjà 39 ans et une longue carrière de scénariste derrière lui. On dit qu’il fut le découvreur de Zubaïda Tharwat, l‘actrice principale de ce film. Celle-ci apparaît pour la première fois à l’écran en 1956 mais sa carrière débute vraiment en 1957, alors qu’elle a 17 ans. Les quatre films dans lesquels elle joue avant « Le Soleil de Minuit » ont tous été écrits par Hussein Helmy El Mohandes. Ce dernier serait-il passé à la réalisation pour sa petite protégée ? On peut légitimement se poser la question. Ce premier film est un mélodrame lacrymal qui accumule dans sa première partie tous les poncifs du genre. On constatera quelques similitudes avec « Le Petit Ange », écrit aussi par Hussein Helmy El Mohandes et réalisé par Kamal El Sheikh en 1957. Zubaïda Tharwat y joue déjà une jeune adolescente que le destin accable et qui bouleverse son entourage par son courage et sa générosité. Hussein Riad joue exactement le même rôle dans les deux films : dans celui de 1957, il est le grand-papa qui pleure et dans celui de 1959, il est le papa qui pleure (Hussein Riad a toujours eu la larme facile. Pourtant ce n’est pas dans ce registre qu’il est le meilleur, tant s’en faut.*). Si « Le Petit Ange » était d’une insupportable mièvrerie, ce « Soleil de Minuit » nous semble nettement plus réussi, notamment la seconde partie qui narre l’affrontement entre l’ancien fiancé de l’héroïne, violent et sans scrupule et le jeune médecin qui veut tout tenter pour qu’elle recouvre la vue. Ces deux personnages sont joués par deux grands acteurs terriblement doués, Youssef Fakh El Din et Kamal El Shennawi. A noter qu’en cette même année 1959, Kamal El Shennawi et Zubaïda Tharwat triomphent dans l’excellent « Elle vécut pour l’amour » d’El Sayed Bedeir.

* Dans ce style « larmes et reniflements », Hussein Riad se surpasse dans « Rendez-vous avec la vie » d’Ezzel Dine Zulficar (1953). Il y incarne un médecin dont la fille unique est atteinte d’une maladie incurable.


Mardi 23 septembre à 23h

Rendez-vous avec Satan de Kamel El Telmissani (Maw’id ma’ iblis, 1955)
avec Zaki Rostom (le docteur Ragab Ibrahim), Mahmoud El Meleigy (le docteur Nabil/Satan), Abdel Moneim Ibrahim (Hassan, l’assistant du docteur Ragab Ibrahim), Cariman (Nadia, la fille du docteur Ragab Ibrahim), Wedad Hamdy (la servante), Abdel Ghani El Nagdi (le concierge), Soleiman El Gendy (Adel, le fils du docteur Ragab), Mounir Mourad (Mounir, le neveu du docteur Ragab), Lotfi Al Hakim (le fabricant d’appareils médicaux), Mohamed Shawki (le vendeur de bicyclettes)
Scénario : Galil El Bendary, d'après Faust de Goethe.
Musique : Mahmoud Al Sharif et Mounir Mourad + Rossini, l’Ouverture de l’opéra Guillaume Tell
Production : Films Ahmed Darwish
appréciation : 4/5


Fantastique. Le docteur Ragab Ibrahim dirige une clinique privée dans le quartier de la mosquée Hussein. Les affaires ne vont pas bien, les patients aisés se font soigner dans d’autres établissements plus réputés. Les maigres honoraires du docteur suffisent à peine à payer les charges de la clinique. Ragab vit avec sa fille Nadia, son petit garçon, Adel et son neveu Mounir qui s’est installé chez eux depuis la mort de son père. Mounir rêve de devenir chanteur et il très amoureux de sa cousine. Le médecin a perdu sa femme il y a longtemps déjà et après son travail il se consacre tout entier à ses enfants qu’il ne peut gâter comme il le souhaiterait.
Un soir sa voiture tombe en panne sur une route isolée. Il est secouru par un certain docteur Nabil qui en réalité est Satan. La voiture redémarre et le docteur Ragab propose à son confrère de le ramener en ville. Pendant le trajet les deux hommes discutent et sympathisent. Ils promettent de se revoir.

Notre avis : en dépoussiérant le mythe de Faust et en mélangeant allègrement les genres et les registres, Kamel El-Telmissani a réussi à créer une œuvre unique, ne ressemblant à aucune autre. Il ne s’est pas laissé impressionner par l’ombre tétanisante de Goethe, le grand écrivain allemand du XIXe siècle dont les deux Faust constituent des œuvres majeures de la culture universelle. Contournant les références littéraires ou cinématographiques, Kamel El Telmissani a su s’approprier la légende germanique avec une totale liberté et une certaine impertinence pour nous offrir une œuvre pleine d’intelligence et d’humour. Ce «Rendez-vous avec Satan » constitue l’une des plus belles réussites d’un cinéaste égyptien dont la carrière a été gâchée par bien des vicissitudes.


Lundi 22 septembre à 15h

La Femme Inconnue de Mahmoud Zulficar (al-marʾa al-maghula, 1959)
avec Shadia (Fatima), Shoukry Sarhan (Samir, le fils de Fatima et d’Ahmed), Kamal Al-Shennawi (Abbas, le compagnon de Souad), Imad Hamdi (Docteur Ahmed), Zahrat El-Ola (Souad, l’amie de Fatima), Negma Ibrahim (Amina Hanem, la mère du Docteur Ahmed), Soher El Bably (Aida, la fiancée de Samir), Soraya Fakhri (Nanny), Katkota (la danseuse), Fifi Youssef (la propriétaire du cabaret), Abbas Al Daly (le médecin), George Yordanis (le barman)
Scénario : Mahmoud Zulfikar and Mohamedd Othman
D’après la pièce intitulée La Femme X du dramaturge français Alexandre Bisson (1908). C’est la seconde adaptation égyptienne de ce drame. La première a été réalisée en 1942 par Henry Barakat sous le titre L’Accusée (El Motahema)
Musique et chansons : Mohamed El Mougy, Fathy Koura, Mounir Mourad, Morsi Gameel Aziz
Production: Hassan Ramzy



Fatima vit avec son amie Souad dans un petit appartement. Elles sont toutes les deux d’origine très modeste et travaillent dans le même cabaret. C’est là que Fatima fait la connaissance du docteur Ahmed. Celui-ci a eu le coup de foudre pour la jeune femme. Bien qu’elle n’appartienne pas à son milieu et que sa mère s’oppose catégoriquement à cette union, Ahmed et Fatima se marient. Ils ont très vite un petit garçon qu’ils appellent Samir. De son côté, Souad a beaucoup moins de chance que son amie. Elle est devenue la compagne d’Abbas, un malfrat qui la maltraite et la trompe. Les années passent et un jour Abbas contacte Fatima. Il lui annonce que son amie est très malade et qu’elle va bientôt mourir. Fatima se rend aussitôt à son chevet. Mais c’est à ce moment-là que la police fait irruption dans l’appartement et arrête tout le monde, y compris Fatima. Elle est détenue au commissariat et quand enfin, elle est libérée, elle apprend que son mari a demandé le divorce. Elle se précipite chez elle où elle retrouve sa belle-mère. Cette dernière lui apprend qu’Ahmed est parti à l’étranger avec son fils…

Notre avis : un drame qui vaut surtout pour la performance de celle qui à l’époque est devenue l’une des plus grandes actrices du cinéma égyptien. En 1959, Shadia n’ a que vingt-huit ans mais elle a déjà tourné dans près de quatre-vingt films ! Son expérience et son talent lui permet de tout jouer et d’aborder avec une aisance incroyable des rôles aussi complexes que celui qui lui a confié Mahmoud Zulficar dans cette « Femme Inconnue ». Pendant les deux heures que dure le film, Shadia apparaît quasiment dans toutes les scènes, passant de la jeune chanteuse à la beauté éblouissante à la jeune mère de famille rayonnante puis à la femme désespérée et alcoolique et enfin à la vieille dame épuisée par les épreuves. Nous sommes tout de même un peu moins convaincu par ce dernier avatar : en cause sans doute, le maquillage très Grand Guignol dont on a recouvert son visage ainsi que l’air éploré et le ton geignard qu’elle croit bon d’adopter.
« La Femme Inconnue » est un film qui s’inscrit dans la grande tradition du mélodrame égyptien (même si c’est une adaptation d’une pièce française). Il ne réserve guère de surprises mais le spectateur sera néanmoins séduit par la qualité de la réalisation et de l’interprétation.


Dimanche 21 septembre à 15h

Le Haffir du Quartier de Togo Mizrahi (Kafir el Derk, 1936)
avec Ali Al Kassar (Othman), Zakeya Ibrahim (Oum Ibrahim, la femme d’Othman), Salah Kasin (la patronne d’Othman), Bahiga El Mahdy (la femme de ménage), Lutfya Nazmy (l’une des conquêtes d’Othman), Ahmed El Haddad (Abdo), Ibrahim Hechmat (le gardien de la paix), Hassan Saleh (Azouz), Zouzou Labib (Yasmina, la femme d’Azouz), Taheya Carioca (la danseuse du cabaret), Abdel Hamid El Sakhawy (Ibrahim, le propriétaire de la maison)
Scénario : Togo Mizrahi et Ali Al Kassar
Musique : Izzat El Gahely
Production : Max Harari


Comédie. Othman est un pauvre homme sans emploi. Il est naïf, gentil mais surtout terriblement paresseux. Son activité préférée est la sieste. Sa femme doit user de la manière forte pour qu’il daigne sortir du lit et chercher un travail. Il en trouve un chez une riche étrangère comme homme à tout faire. Ce jour-là, il doit aider à la cuisine car sa patronne reçoit des invités. Elle charge Othman de la cuisson du plat principal. Pour cela, il doit se rendre au four du village. Voilà notre héros cheminant par les rues, le plat sur la tête. Soudain, il est attaqué par des oiseaux qui s’emparent de tous les morceaux de viande du ragoût. Furieux, il va au commissariat. L’officier refuse d’enregistrer sa plainte et le chasse. Dans la bousculade, Othman fait tomber son plat et les pommes de terre qui restaient roulent sur le sol. L'employé malchanceux retourne chez sa patronne avec un frichti bien piteux. Evidemment, il est renvoyé. Deuxième tentative : il devient vendeur ambulant de hummus. Las ! Il s’endort au coin d’une rue et des poules dévorent toute sa marchandise. Sa femme est exaspérée par ce mari qui échoue tout ce qu’il entreprend. Elle va se plaindre au gardien de la paix de son quartier qui convoque aussitôt le mari. A la suite d’un malentendu, Othman est engagé comme gendarme…

Notre avis : Togo Mizrahi est un pionnier dont le rôle a été essentiel dans la naissance puis l’essor du cinéma égyptien. Il a réalisé « Le Haffir du Quartier » dans ses studios d’Alexandrie. Othman, le personnage principal est joué par le grand comédien Ali Al Kassar qui en fut aussi l’inventeur au théâtre. Avec cette comédie, nous sommes dans la grande tradition de la farce et du burlesque. L’attention portée aux conditions d’existence des plus humbles donne à ce film une tonalité chaplinesque. « Le Haffir du Quartier » conserve ce caractère "bricolé" ou "amateur" des productions du début des années trente. Ce sont les Studios Misr qui feront entrer le cinéma égyptien dans l’ère de la professionnalisation et de l’industrialisation.
Notons aussi que l’on retrouve dans ce film deux jeunes artistes qui sont au tout début de leur carrière : la chanteuse et actrice Zouzou Labib ainsi que la danseuse et actrice Taheya Carioca. Toutes les deux sont apparues pour la première fois à l’écran l’année précédente dans « Docteur Farahat » qui a aussi été réalisé par Togo Mizrahi.


Samedi 20 septembre à 23h

Ismaël Yassin dans la Police de Fateen Abdel Wahab (Ismaïl Yassin fel Police, 1956)
avec Ismail Yassin (Zaki), Hussein Qandil (un officier de police), Ellen Deatto (la voisine de Zaki), Zahrat Al Oula (Sania), Zinat Sedki (la mère de Gamala), Roshdy Abaza (Roshdy, le fiancé de Gamala), Sherifa Mahear (Gamala), Reyad El Kasabgy (un agent de police), Mohamed Shawki (un soldat), Hassan Hamed (un voleur), Mohsen Hassanein (un agent de police), Ali Rushdy (le père de Sania), Noura (la danseuse), Ali Abd El Al (le pharmacien), Salah Abdel Hamid (le chanteur)
Scénario : Fateen Abdel Wahab, El Sayed Bedeir, Mahmoud Sobhy
Musique : Fouad El Zahery
Production : Abbas Helmy


Zaki est un policier débutant, plein de bonne volonté mais très maladroit. Une nuit alors qu’il patrouille, il tombe sur deux malfrats en train de dévaliser l’appartement de madame Shamma. Il arrête l’un des voleurs mais son complice parvient à s’échapper. De retour au commissariat, Zaki conduit son homme en cellule puis accompagne au bureau de l’officier enquêteur un autre individu. Il ne sait pas que ce dernier qu’il prend pour un malfrat travaille en fait pour la police. Il est justement chargé d’infiltrer le gang auquel appartient le voleur que Zaki a arrêté. Epuisé par cette nuit bien remplie, notre policier débutant rentre chez lui. Dans son immeuble, il retrouve la jeune femme dont il est amoureux. L’entrevue tourne à la dispute : la demoiselle lui reproche ses horaires de travail et elle ne lui cache pas qu’elle est très attirée par un autre garçon qui habite l’immeuble. Zaki est évidemment très déçu. Sur le plan professionnel, la situation va aussi se dégrader : une nuit, il arrête l’homme rencontré au commissariat alors que celui-ci a pris en filature le chef du gang qui terrorise la ville. Par son intervention, Zaki fait échouer toute l’opération…

Notre avis : Fateen Abdel Wahab et Ismaël Yassin vont tourner entre 1955 et 1959, six films à la gloire de l’armée et de la police. Le premier, c’est en 1955, « Ismaël Yassin à l’armée ». Le deuxième, c’est celui-ci, « Ismaël Yassin dans la police ». Il débute par un texte dans lequel les producteurs remercient le ministère de l’intérieur de son aide et déclarent que leur principal objectif a été de changer l’image des policiers en montrant qu’ils sont des citoyens ordinaires, des êtres humains avec leurs soucis et leurs joies. Effectivement, ce qui est tout à fait étonnant dans ce film, c’est qu’on n’assiste pas à une « héroïsation » des forces de l’ordre. Bien au contraire, le personnage principal incarné par Ismaël Yassin est un policier au bas de l’échelle d’une incompétence absolue (même si le dénouement lui donnera l’occasion de se racheter). De sorte que la comédie ne cède jamais devant les exigences de la propagande et que l’on peut encore apprécier ce film de commande. Une autre singularité d’ « Ismaël Yassin dans la Police », c’est son rythme débonnaire. Pas d’actions d’éclat, pas de courses poursuites, pas de bagarres mais on nous montre des policiers paisibles, au travail et surtout dans leur vie quotidienne. Et c’est ainsi que l’œuvre de propagande annoncée devient une chronique attachante sur des hommes et des femmes d’un quartier populaire de la capitale.


Vendredi 19 septembre à 19h30

Trente Jours en Prison
de Niazi Mostafa (30 youm fil sign, 1966)
avec Abou Bakr Ezzat (Medhat), Farid Shawki (Amshir), Nawal Abou Al Foutouh (Azhar), Hassan Hamed (Ibn Al Janawi), Soheir El-Barouni (l’employée de maison), Mimi Chakib (la mère de Soheir), Mohamed Reda (Hangal le voleur), Ibrahim Saafan (l’avocat), Madiha Kamel (Soheir), Samir Ghanem (son propre rôle), Ahmed El Deif (son propre rôle), George Sedhom (son propre rôle)
D’après une histoire de Naguib El Rihani et de Badie’ Khairy
Scénario : Abdel Hay Adib et Niazi Mostafa
Musique : Hussein Al Saïd
Chansons : Samir Ghanem, Ahmed El Deif, George Sedhom
Production : Films Ihab Leithi


Medhat dirige le cabaret « le Trocadéro » qui appartient à Madame Fawzia. Il doit épouser la fille de cette dernière mais il entretient aussi une relation amoureuse avec Azhar, une jeune actrice très ambitieuse. Pour garantir la sécurité de l’établissement qu’il dirige, il a embauché Amshir, un hercule de foire. Ce dernier est un brave garçon mais il a tendance a abusé de sa force à contretemps. Justement, ce soir-là, un personnage important dîne au cabaret. Il travaille dans le cinéma et il pourrait jouer un rôle déterminant dans la carrière d’Azhar. Medhat se trouve à sa table et par inadvertance, il brûle la moustache de l’homme. Fureur du « brûlé » qui frappe Medhat. C’est à ce moment-là qu’intervient Amshir : il assomme l’agresseur de son patron mais les hommes de celui-ci répliquent à leur tour. La mêlée devient générale. La police puis la justice s’en mêlent. Un procès a lieu. Medhat est condamné à trente jours de prison. Contre de l’argent, Amshir accepte de purger la peine à la place de son patron. Il rejoint le centre pénitentiaire sous le nom de Medhat tandis que le vrai Medhat est parti en voyage au Liban.

Notre avis : une comédie avec dans l’un des rôles principaux Abou Bakr Ezzat, un excellent comédien généralement cantonné aux seconds rôles. Dans « Trente Jours en Prison », il incarne avec une belle énergie un gérant de cabaret particulièrement veule et mufle. Ce film est l’adaptation d’une pièce de théâtre écrite par deux artistes de talent Naguib El Rihani et Badie’ Khairy. Niazi Mostafa a su en faire une authentique comédie de cinéma où domine l’action et les effets visuels. Néanmoins, l’ensemble est un peu inégal. Les acteurs et actrices sont formidables, le charme ainsi que le talent des deux vedettes féminines, Nawal Abou Al Foutouh et Madiha Kamel sont indéniables. On rit parfois, on sourit souvent, même si certaines scènes auraient gagné en efficacité en étant plus concises. Je pense notamment à la scène où le directeur du Trocadero sélectionne son futur videur : laborieuse et pas très drôle. Mais la partie la plus faible du film, et aussi la plus longue, est sans conteste celle du séjour en prison d’Amshir. Il faut supporter pendant près d’une demi-heure un méli-mélo de gags puérils et de numéros de cabaret exécutés par Les Trois Lumières du Théâtre. Eprouvant !


Jeudi 18 septembre à 15h

Ali Baba et les quarante voleurs de Togo Mizrahi ( Ali Baba wel Arba'in Haramy, 1942)
avec Ali Al Kassar (Ali Baba), Layla Fawzi (Princesse Morgana), Mohamed Abdel Moteleb (Hassan, le fils d’Ali Baba), Ismael Yassin (Belout), Abdel Meguid Choukry (Barakat), Zakeya Ibrahim (femme d’Ali Baba), Reyad El Kasabgy (Hafez Shaalan, le chef du gang), Zaki Ibrahim (Prince Nasser), Abdel Halim Khattab (Prince Nazir), Hassan Baroudi (le frère d’Ali Baba), Rafia Al Shaal (la belle-sœur d’Ali Baba)
Scénario : Togo Mizrahi
Musique : Izzat El Gahely et Riad El Sonbati
Production : Bahna Films


L'adaptation cinématographique du célèbre conte tiré des Mille et Une Nuits.
A l’origine, Ali Baba et les quarante voleurs n’appartient pas au corpus des contes des Mille et une Nuits mais il y a été incorporé par Antoine Galland dans sa traduction française.
Togo Mizrahi prend beaucoup de liberté avec le conte original. Il a inventé la rivalité entre les princes Nasser et Nazir, il a transformé le personnage de Morgiane, une esclave au service du frère d’Ali Baba en une princesse enlevée par les quarante voleurs.

La capitale du royaume du prince Nasser est mise à sac par des bandits qui tuent, pillent, détruisent tout ce qui se trouve sur leur passage. Le prince Nasser connaît bien cette fameuse bande des quarante voleurs : quinze ans auparavant, ils s’étaient emparés de sa fille, la Princesse Morgana et on ne l’avait jamais revue. Cette fois-ci, le monarque est bien décidé à mettre hors d’état de nuire ces brigands et il promet une forte récompense à quiconque sera en mesure de donner des informations sur eux. Ce qu’il ne sait pas , c’est que celui qui a commandité l’enlèvement de sa fille, c’est son propre cousin, le prince Nazir qui rêve de lui ravir le trône. En faisant disparaître la princesse, il devient le seul héritier de la couronne. Morgana a été élevée par un membre du gang et sa femme, deux braves gens qu’elle a toujours considérée comme ses parents.
Parmi les sujets du Prince Nasser, il y a Ali Baba, un pauvre bûcheron qui mène une existence misérable avec sa femme, son fils Hassan et son fidèle employé Belout. Ce jour-là, le bûcheron et son commis sont revenus du marché sans un sou : ils se sont fait escroquer par un filou qui leur a pris des bûches sans rien payer. Pour aider son père, Hassan se rend seul dans la forêt afin d’y couper du bois. C’est là qu’il rencontre Morgana. Le coup de foudre est immédiat mais la jeune femme disparaît aussi vite qu’elle était apparue. Pendant ce temps-là, la femme d’Ali baba a demandé à son mari de se rendre chez son frère, le richissime Qassim pour obtenir quelques sous. Le vieux grigous est intraitable : il ne donnera rien. Mais le soir même, sa belle maison est incendiée par les quarante voleurs. Qassim et sa femme sont contraints de demander secours auprès d’Ali Baba qui les accueille chaleureusement dans sa pauvre mansarde…

Notre avis : cette adaptation du conte d’ « Ali Baba et les Quarante Voleurs » est la première réalisée en langue arabe. Elle séduit le spectateur par sa fraîcheur et une certaine forme de naïveté. Mizrahi a mis l’accent sur l’aspect farcesque du récit, il nous restitue ainsi tout l’univers des contes et fabliaux de la littérature populaire du temps des Abbassides. Mais la poésie est aussi présente, notamment lorsque le fils d’Ali Baba et la princesse Morgana se retrouvent la nuit dans la forêt : instants magiques magnifiés par le chant de Mohamed Abdel Moteleb. C’est le quatrième film que tourne Ismaïl Yassin. A trente ans passés, il a conservé la silhouette frêle d’un adolescent. Au fil des années, il va s’épaissir (son jeu aussi !) et sa carrière prendre son envol jusqu’à faire de lui le roi de la comédie qui régnera sans partage durant près de deux décennies.


Mercredi 17 septembre à 19h30

La Fin du Chemin de Kamal Attiya (Nihâyat al tariq, 1960)
avec Hoda Soltan (Sharbat), Rushdy Abaza (Hussein), Tawkik El Deken (Fathi), Wedad Hamdy (l’amie de Sharbat), Abbas Fares (Haj Abdo, le père de Fathi), Omar el Hariri (Fouad), Thuraya Fakhry (la mère de Sharbat), Adawy Gheith (le directeur de l’usine), Fawzia Mohamed (la danseuse), Hassan El Baroudi (le secrétaire du père de Fathi)
Scénario : Kamal El Hefnawi
Musique : Mohamed El Mogy et des emprunts divers. (La musique du générique est un enregistrement de Pérez Prado, le roi du Mambo et on entend dans quelques scènes, des extraits de la B.O.de Sueurs Froides d’Alfred Hitchcock, une B.O. composée par Bernard Herrmann.)
Musique de danse : Attia Sharara
Chansons : Mohamed Al Mogi
appréciation : 4/5


Drame. Sharbat, une jeune femme d’origine modeste vit seule avec sa mère dans un petit appartement. Elle est tombée amoureuse d’Hussein, un jeune ouvrier qui réside dans le même immeuble que le sien. Elle multiplie les occasions de rencontres et parvient à s’introduire dans le logement de son bien aimé. Celui-ci cède aux avances réitérées de Sharbat. Ils se marient. Au début, l’entente entre les deux jeunes mariés est totale. Fathi, un jeune étudiant riche, tourne autour de la jeune femme. Il n’hésite pas à venir la voir chez elle quand Hussein est à l’usine mais Sharbat reste insensible à ses propositions. Avec son mari, elle est heureuse, d’autant plus que celui-ci a repris des études à l’université : il veut devenir avocat...

Notre avis : un excellent film dans lequel le réalisateur raconte l’ascension chaotique puis la chute vertigineuse d’une jeune femme prête à tout pour échapper à la pauvreté. Hoda Soltan campe avec un naturel confondant une enjôleuse diabolique qui détruit tous les hommes de son entourage. Avec ce rôle, elle confirme son titre de la femme fatale la plus maléfique du cinéma arabe. Ses partenaires Rushdy Abaza et Tawfiq El Deken sont tout aussi épatants, l’un et l’autre dans deux registres radicalement différents. Dans ce film, le réalisateur a su magistralement concilier le drame social à l’égyptienne et l’esthétique du film noir américain.


Mardi 16 septembre à 15h

Nuits Chaudes d’Hassan Ramzy (Al-Layaly Al-dafe'a, 1961)
avec Sabah (la chanteuse Layla), Imad Hamdy (Dr Ahmed Badr Eddine), Zahrat Al Oula (Soad, la sœur d’Ahmed), Kamal El Shennawi (Dr Omar), Negma Ibrahim (la mère d’Ahmed), Raga Hussein (Darya, l’amie de Layla), Poussy (Hoda, la fille de Layla), Ali Rushdy (Rafaat), Thuraya Fakhry (la servante)
Musique : Farid Al Atrache (On entend aussi une version instrumentale de la chanson "Histoire d’un Amour" popularisée par Dalida.)
Scénario : Hassan Ramzy, Nairouz Abdel Malak
Production : Gerges Fawzi et Hassan Ramzy


Le Dr Ahmed Badr Eddine est un chirurgien et un professeur d’université, très célèbre pour ses travaux de recherche qui ont permis des avancées majeures en matière médicale. Il vit avec sa mère et sa sœur Soad dans l’immense demeure familiale. Pour ses multiples tâches, il est assisté par le docteur Omar dont le père fut autrefois l’intendant de ses parents. Omar et Soad sont tombés amoureux l’un de l’autre mais ils ont convenu de se marier quand la jeune femme aura terminé ses études. Un événement va bouleverser leur projet : le fils d’un pacha demande Soad en mariage et son frère Ahmed est enchanté de cette proposition. Soad parvient à prévenir Omar : il faut qu’il fasse sa demande au plus vite. Malheureusement l’entretien entre Ahmed et son assistant se passe très mal. Le premier rappelle au second qu’ils n’appartiennent pas à la même classe sociale et qu’il est donc hors de question qu’il épouse sa sœur. Et pour que les choses soient bien claires, il lui interdit désormais de se présenter à son domicile. Soad est atterrée. Puisqu’elle ne peut épouser celui qu’elle aime, elle refuse toute idée de mariage et restera célibataire. Peu après, le docteur Ahmed assiste à un concert organisé par l’université pour récolter des fonds afin d’aider les étudiants les plus pauvres. Pour cette soirée, les organisateurs ont fait appel à la grande chanteuse Layla. Le professeur de médecine tombe immédiatement sous le charme de l’artiste. Mais, à la fin du concert, le rideau est à peine tombé que Layla est terrassé par une douleur insupportable. Ahmed est conduit à son chevet. Il faut immédiatement la transporter à l’hôpital pour qu’il puisse l’opérer. Après l’intervention qui est un succès, Ahmed fera de fréquentes visites à sa patiente et Ils finissent par tomber amoureux l’un de l’autre. Mais Layla ne tarde pas à comprendre que le médecin fait tout pour que leur liaison reste secrète…

Notre avis : « Nuits Chaudes » (Quel drôle de titre !) est un drame prenant qui dénonce le caractère mortifère des valeurs traditionnelles et la grande hypocrisie de certains de leurs zélateurs. Imad Hamdi a rarement incarné un personnage aussi odieux : un médecin réputé qui sauve des vies mais qui dans la sphère privée se montre inflexible avec tout le monde, n’hésitant pas à détruire le bonheur de sa sœur, de sa femme et de sa fille pour préserver la réputation du nom qu’il porte. Imad Hamdi joue à merveille les différentes facettes de son personnage : le médecin admiré, l’amoureux transi, le despote domestique. Et on observe, médusé, les agissements misérables de ce monstre d’égoïsme, incapable de la moindre empathie envers ses proches. En revanche, le dénouement détonne par son happy end invraisemblable. On a du mal à croire que ce médecin d’une rigidité absolue sur tout ce qui touche la famille devienne brusquement le plus gentil des hommes.
Sabah se révèle excellente dans son rôle d’épouse se pliant tant bien que mal aux exigences de son « mari » jusqu’à ce qu’elle se révolte et affronte son bourreau. Elle chante deux chansons dans ce film : la première qu’elle interprète entourée de danseurs constitue l’une des séquences les plus marquantes de ces « Nuits Chaudes ».



samedi 6 septembre 2025

Danse : Kitty Fotsaty (Voutsaki), 1953 (2)

كيتى فوتساتى






Kitty joue et danse dans Fils d’Aristocrates, une comédie réalisée par Hassan El Seifi en 1953. Dans son précédent film, Vous êtes témoins, sorti la même année, Hassan El Seifi avait très mal exploité le talent de la danseuse d’origine grecque. Cette fois-ci, il lui a confié un véritable rôle et ses chorégraphies sont beaucoup plus élaborées (Elles rappellent en plus modeste celles des comédies musicales de Naima Akef.). Dans la première partie, le réalisateur lui dédie une très longue séquence où Kitty peut déployer toutes les facettes de son art, avec la vitalité et l’allégresse qui la caractérisent.

Kitty n'apparaitra que dans trois films d'Hassan El Seifi. Le plus réussi est sans nul doute le dernier réalisé en 1954, Le Fantôme d'Ismaïl Yassin.


lundi 1 septembre 2025

A la télé : les films du jour (Rotana Classic du 1er au 15 septembre)

روتانا كلاسيك

Quels films peut-on voir sur la chaîne Rotana Classic ? Les horaires donnés sont ceux de l'après-midi ou de la soirée (heure de Paris). La plupart des films sont ensuite rediffusés le lendemain matin.
Rotana Classic a remplacé Rotana Zaman en 2012. Cette chaine fait partie du groupe Rotana basé en Arabie Saoudite et spécialisé dans le divertissement (télévision et musique). Celui-ci a été créé par le prince Al-Walid ben Talal ben Abdelaziz Al Saoud, membre de la dynastie Al Saoud et petit-fils du fondateur de l'Arabie Saoudite. Comme son nom l’indique, Rotana Classic diffuse essentiellement les grands classiques du cinéma égyptien. Disponible en France.


Lundi 15 septembre à 15h

Je suis Innocente d'Houssam Al Din Mustafa (Ana Bariha, 1959)
avec Ahmed Mazhar (Fadel), Iman (Nahed), Roshdy Abaza (Ramzy, le cousin de Fadel), Hussein Asar (Idris, le serviteur de Fadel), Zaki Ibrahim (le père de Nahed), Sanaa Mazhar (Salwa), Ezza Ezzat (la fille de Nahed et de Fadel), Victoria Hobeika (la propriétaire de la pension), Mohamed El Dib (Shawky, l’ami de Ramzy), Karima (Sonia), Abou Bakr Ezzat (Sami)
Scénario : Mahmoud Samaha et Mahmoud Sobhy
Production : les films Samaha


Nahed est une jeune étudiante qui vit seule avec son vieux père. Elle vient d’acheter le dernier roman de son écrivain préféré et elle est vite rentrée chez elle pour le dévorer. Fadel, ce romancier que la jeune femme aime tant, est en fait un parent éloigné de leur famille et pour faire plaisir à sa fille, le vieux papa se rend chez celui-ci pour lui faire dédicacer l’ouvrage. En sortant de la demeure de l’écrivain, le père de Nahed est renversé par une voiture et décède peu après. Fadel recueille chez lui l’orpheline. Au fil du temps, Nahed retrouve progressivement goût à la vie et décide d’aider son protecteur dans son travail. Naturellement, cette cohabitation finit par un mariage, malgré la grande différence d’âge des deux époux. Les années passent, ils ont eu une petite fille. Un jour, un cousin de Fadel se présente à leur domicile. Il s’appelle Ramzy, il a travaillé à l’étranger pendant de longues années et il revient en Egypte. Il va s’installer quelque temps chez Fadel. Nahed sympathise immédiatement avec Ramzy : il est toujours gai et il aime s’amuser. Sa présence apporte beaucoup à la jeune femme qui souffrait de la solitude. En effet, son travail d’écrivain laisse peu de temps à Fadel pour s’occuper de sa famille. Malheureusement, Ramzy trouve de plus en plus désirable la femme de son cousin et un soir il n’y tient plus. Il entre dans la chambre de la jeune femme et tente de l’embrasser. Nahed hurle et se débat si bien que Fadel fait irruption dans la pièce. Il s’empare d’un révolver et pointe l’arme en direction de Ramzy. Nahed se jette sur son mari pour détourner le tir mais le coup part et la balle atteint l’épaule de Fadel qui s’effondre. Ramzy décide de fuir et entraîne avec lui Nahed …

Notre avis : le film commence en romance à l’eau de rose et finit en thriller. Il va sans dire que la seconde partie est plus convaincante que la première. Houssam Al Din Mustafa est le spécialiste du film d’action et on le sent un petit peu embarrassé à devoir évoquer les peines de cœur d’une toute jeune femme. A court d’inspiration sur ce plan, le réalisateur se contente de montrer à plusieurs reprises son héroïne pressant contre sa poitrine virginale le portrait du grand homme qu’elle aime… Tout change avec l’apparition de Rushdy Abaza qui dans le rôle du séducteur avide et vénal est tout à son affaire. A cause de lui, la jeune maman bien sage est devenue une fugitive qui doit partager une chambre d’hôtel avec celui qui se fait passer pour son mari et qui n’a pas abandonné l’idée de devenir son amant. Houssam Al Din Mustafa a toujours été très friand de ce genre de situations et le film retrouve enfin des couleurs.
A noter : à la fin des années cinquante, Iman et Karima, les deux vedettes féminines du film, sont deux jeunes actrices promises à une belle carrière. Elles quitteront brutalement le monde du cinéma pour cause de mariage, la première en 1961, à l’âge de vingt-trois ans, la seconde en 1960, à l’âge de vingt-six ans.


Dimanche 14 septembre à 23h

Monsieur Boulboul d'Hussein Fawzi (Bulbul Effendi, 1948)
avec Farid El Atrache (Monsieur Boulboul, le fiancé de Batah), Sabah (Kawakeb/Batah), Hassan Fayek (Muhibou Bey, le mari de Kawakeb), Mokhtar Othman (Mahrous, le réalisateur), Ismail Yassin (Bunduq), Stephan Rosti (Aziz, l’amant de Kawakeb), Samiha Tawfiq (Wafaa, la fille de Muhibou Bey), Kamal Hussein (Mounir, le fiancé de Wafaa), Fathya Mahmoud (la mère de Batah), Ali Abd El Al (un assistant du réalisateur), Ahmed El Haddad (un assistant du réalisateur), Edmond Tuema (réceptionniste de l’hôtel), Liz and Lynn (danseuses)
Scénario : Hassan Tawfiq et Hussein Fawzi
Musique : Farid Al Atrache
Production : Ramsès Naguib

Comédie musicale. Kawakeb est une jeune actrice égocentrique et méprisante. Elle a épousé un homme riche, beaucoup plus âgé qu’elle, qui supporte sans broncher tous ses caprices. Elle tourne un nouveau film mais elle se fâche avec le réalisateur et abandonne subitement toute l’équipe. Le metteur en scène est désespéré : il va devoir renoncer à terminer son film. Heureusement, l’un de ses assistants va trouver une solution. Il lui présente une jeune fille, Batah, qui est le sosie de Kawakeb. Batah est une jeune ouvrière qui vit avec sa mère et qui est fiancée à Monsieur Boulboul, un marchand ambulant. Le réalisateur et ses assistants découvrent qu’elle sait aussi jouer la comédie et chanter. On la coiffe, on la maquille et on l’habille. Le résultat laisse sans voix toute l’équipe : Batah est la doublure parfaite de leur ancienne vedette. Pendant ce temps-là, Kawakeb a décidé de quitter son mari pour s’enfuir à Louxor avec un amant…


Notre avis : à la fin des années quarante, Hussein Fawzi va réaliser un certain nombre de comédies musicales avec en vedette la chanteuse Sabah. La rencontre du cinéaste avec Naïma Akef mettra brutalement un terme à cette collaboration mais ceci est une autre histoire. « Monsieur Boulboul » est un excellent divertissement à la fois comédie musicale et film d’action. Les péripéties s’enchaînent tambour battant. Le duo comique que forment Farid Al Atrache et Ismaïl Yassin semble monter sur ressort et ne laisse aucun répit aux spectateurs. Sabah qui incarne deux personnages ne manifeste pas moins de fougue et de fantaisie que ses deux partenaires masculins. Pour ce film, Farid Al Atrache a composé l’une de ses plus belles partitions. La chanson « Ya Nagham » interprétée par Sabah et qui débute par un solo de clarinette est un petit chef d’œuvre.


Samedi 13 septembre à 15h

La Dame du Château de Kamal EL Sheikh (Sayyidat al-Qasr, 1958)
avec Faten Hamama (Sawsan), Omar Sharif (Adel), Ferdoos Mohamed (la tante de Sawsan), Stephan Rosty (Shafiq, l’intendant d’Adel), Zouzou Madi (Malik Hanem), Elham Zaki (Samar), Omar El Hariri (Docteur Mustafa, vétérinaire), Shafik Nour El Din (le Sheikh Abdoul Sattar), Eskandar Mansy (le directeur du domaine)
Scénario : Hussein Helmy Al Mohandes
Production : Hassan Ramzy et Les Films Misr International (Youssef Chahine)


Sawsan est une jeune orpheline qui travaille dans une entreprise d’import-export mais elle projette de faire des études de droit pour devenir avocate. Elle vit chez sa tante dans un modeste appartement. Un jour, de retour du bureau, elle casse une chaise du salon. Pour la remplacer, elle se rend à la salle des ventes où elle espère en trouver une à un prix raisonnable. Dans l’assistance, elle observe un jeune homme qui souhaite acheter un tableau en canevas représentant un paysage. Sawsan est tellement sidérée par la somme que l’inconnu a payée pour acquérir « l’œuvre d’art » qu’elle ne peut s’empêcher de faire un commentaire à haute voix. Le jeune homme l’ a entendue et lui demande de s’expliquer. Sawsan, nullement impressionnée, affirme que le tableau ne vaut pas le prix qu’il a atteint lors des enchères et qu’elle-même serait capable d’en réaliser un aussi bien pour un montant nettement moins élevé. Son interlocuteur lui donne dix jours pour réaliser un tableau en canevas qu’il s’engage à lui acheter. Au jour dit, Sawsan se présente chez l’inconnu avec son œuvre. Le jeune homme s’appelle Adel, il possède une immense fortune et habite dans un palace. C’est un Dom Juan qui aime s’amuser et multiplie les conquêtes féminines. Il est charmé par Sawsan et à sa seconde visite, il essaie de l’embrasser de force. La jeune orpheline s’enfuit, bien décidée à ne plus revoir son agresseur. Mais Adel est sincèrement tombé amoureux de Sawsan et il finit par la retrouver pour la demander en mariage. Les deux jeunes mariés passent leur voyage de noces à Alexandrie. A leur retour, Sawsan manifeste le désir de prendre en main la gestion de son foyer. Elle va vite déchanter : les « amis » de son mari ne tardent pas à reparaître et ils se comportent comme s’ils étaient chez eux…

Notre avis : dans les années cinquante, Omar Sharif et Faten Hamama sont devenus le couple mythique du cinéma égyptien. Ils se rencontrent en 1954 sur le tournage d’un film de Youssef Chahine, ils se marient et jouent ensemble dans de nombreux films. « La Dame du Château » est l’avant-dernier qu’ils tournent conjointement. Après une ultime collaboration artistique en 1960, Omar Sharif se consacrera à sa carrière internationale. Ce film reprend un thème fort prisé par le public populaire de l’époque : un jeune homme très riche s’éprend d’une jeune fille pauvre et pour la conquérir et la garder, il devra abandonner son existence dissolue et ses mauvaises fréquentations. Ce film ne fait pas partie des chefs d’œuvre de Kamal El Sheikh, l’un des plus grands réalisateurs du cinéma égyptien, même s’il a un charme indéniable du en grande partie à ses deux vedettes. Ce qui sauve aussi le film du cliché et du convenu, c’est le personnage incarné par Omar Sharif. Loin d’être un gentil prince charmant pour conte de fées moderne, il manifeste une personnalité complexe avec sa part d’ombre. C’est un être violent, impulsif, jouisseur, et au final assez inquiétant.


Vendredi 12 septembre à 19h30

Salama va bien de Niazi Mostafa (Salama fi Kheir, 1937)
avec Naguib al Rihani (Salama), Amina Zehni (la belle-mère de Salama), Raqiya Ibrahim (Jihan Rostom), Hussein Ryad (le Prince Kindahar), Menassa Fahmy (l’assistant du prince), Mohamed Kamel Al Morsi (Bayoumi Morgan, le voisin de Salama), Rawhiya Khaled (Nahid, la servante de Jihan), Hassan Fayek (Fayek Rostom), Stephan Rosty (Rostom Pacha), Fouad Shafik (Khalil Hindawi, le propriétaire du magasin de tissus), Ferdoos Mohamed (la femme de Salama), Omar El Hariri (l’enfant), Fouad Al Masry (le directeur de l’hôtel), Edmond Tuema (un vendeur de tissus), Emile Asahiso (le comptable), Madame Gerbis (la mère de famille nombreuse, voisine de Salama)
Scénario : Badie Khairy et Naguib Al Rihani, d’après la pièce de Sacha Guitry « Le Sosie »
Musique : Abdul Hamid Abdul Rahman et Mohamed Hassan Al Shugai
Production : les Studios Misr
figure dans la liste des 100 films les plus importants de l'histoire du cinéma égyptien


Comédie. Salama, employé dans un grand magasin de tissus, doit porter à la banque une grosse somme d’argent. Un incident sur le parcours le contraint à rester plusieurs heures au commissariat. Une fois libéré, il reprend sa course mais trop tard : la banque est déjà fermée. Il retourne au magasin et comble de malchance, la grille de l’entrée est baissée. Un panneau annonce une fermeture exceptionnelle en raison d’un heureux événement survenu dans la famille du directeur. Son domicile n’étant pas sûr, Salama décide de passer la nuit dans le luxueux Nefretiti Palace Hotel et de déposer sa précieuse sacoche dans le coffre de l’établissement. Mais à la suite d’un quiproquo, Salama est pris pour le richissime Prince Kindahar du Baloudestan qui doit séjourner lui aussi à l’hôtel. Loin de s’en offusquer l’éminent personnage propose au petit employé de le remplacer pendant quarante-huit heures. Il est curieux de savoir comment les gens se comportent à son égard sans son titre de prince et il veut tester les sentiments d’une jeune femme qui prétend l’aimer. Salama accepte la mission et c’est avec le plus grand sérieux qu’il accomplit les tâches officielles du monarque…

Notre avis : ce premier long métrage de Niazi Mostafa est devenu un classique. On est frappé par la grande maîtrise de leur art dont font preuve le jeune cinéaste et ses collaborateurs, tous Egyptiens (et c'est une première !). « Salama va bien » est l’une de ces oeuvres qui grâce aux studios Misr vont permettre au cinéma égyptien de s’aligner sur les standards internationaux. Cette adaptation d’une pièce de Sacha Guitry est une comédie brillante qui fustige allégrement la vanité de l’argent et du pouvoir ainsi que la servilité et l’hypocrisie de leurs courtisans. L’illustre comédien Naguib Al Rihani est tour à tour émouvant et désopilant dans ce rôle de petit employé qui devient un prince craint et admiré. A ses côtés, Raqiya Ibrahim subjugue par sa beauté et son maintien aristocratique alors qu’elle a à peine dix-huit ans. Et puis ce qui fait tout le prix de cette comédie, c’est sa subtilité et sone extrême élégance : les auteurs n’ont jamais recours aux facilités de la farce, la satire sociale ne tombe jamais dans la caricature grossière. On se demande encore comment de tels films peuvent rester ignorés de la plupart des cinéphiles occidentaux !


Jeudi 11 septembre à 23h

Une demi-heure de mariage de Fateen Abdel Wahab (Noss Saha Jawaz, 1969)
avec Rushdy Abaza (Docteur Hosny), Shadia (L'infirmière Fatima), Adel Imam (Sameh),Magda El-Khatib (Daliah), Hassan Mostafa (Saïd), Samir Sabri (Hamdi),Youssef Shabaan (dans son propre rôle), Nagla Fathy (dans son propre rôle), Abdel-Moneim Ibrahim (dans son propre rôle), Nahied Yousri (une patiente du docteur Hosny), Magie (l'amie italienne), Aleya Abdel Moneim (la soeur de Fatima)
Scénario et dialogues : Ahmed Ragab
Adaptation d'une pièce de théâtre française, Fleur de Cactus, écrite par Pierre Barillet et Jean-Pierre Grédy
Musique : Fouad El Zahry
appréciation : 3/5


Comédie. Le docteur Hosni est un dentiste célèbre pour sa vie amoureuse très agitée. Pour échapper au mariage, il prétend à toutes ses conquêtes qu’il est déjà marié et qu’il a des enfants. Fatma, son assistante, gère toutes ses affaires, aussi bien professionnelles que privées. Elle est secrètement amoureuse de son patron et les nombreuses aventures de celui-ci l’exaspèrent.
Un soir qu’il doit sortir avec Dalhia, sa maîtresse du moment, il reçoit à son cabinet la visite d’une amie italienne. Il décommande aussitôt son précédent engagement afin de passer la nuit avec elle. Pour faire avaler la pilule à Dalhia, il joint à son mot d’excuse, un gigantesque bouquet de fleurs. La jeune femme n’est pas dupe et ce désistement de dernière minute la rend folle de désespoir. Elle tente de se suicider par le gaz. Heureusement, elle est sauvée in extremis par un jeune voisin qui travaille comme doublure dans le cinéma. Le lendemain, le docteur Hosni à qui Dalhia avait envoyé un télégramme pour le prévenir de son geste fait irruption chez elle. Il tente de la réconforter et lui propose le mariage. Elle refuse puisqu’il est déjà marié. Hosni prétend alors qu’ils sont en instance de divorce car sa femme est amoureuse de son cousin. Pour avoir la certitude qu’il dit vrai, Dalhia veut rencontrer son épouse. Le docteur Hosni a une idée lumineuse : il demande à Fatma son assistante de se faire passer pour sa future ex-femme…

Notre avis :une comédie légère et pétillante signée Fateen Abdel Wahab, le réalisateur attitré d’Ismaïl Yassin dans les années cinquante. Pour ce film, il a invité un grand nombre de vedettes de l’époque. Ce casting prestigieux est au service d’un divertissement conçu selon les standards du cinéma commercial des années soixante. Fateen Abdel Wahab est un cinéaste prodigieusement doué et il en fait la démonstration dans cette comédie : un rythme trépidant, des situations rocambolesques et des personnages qui allient fantaisie et glamour. A maintes reprises, on pense au Billy Wilder de « La Garçonnière » ou de « Embrasse-moi, Idiot ». Peut-être pourrait-on trouver à certains gags, à certaines répliques ou au jeu de certains acteurs un caractère « too much » mais l’énergie qui se dégage de l’ensemble emporte tout.


Mercredi 10 septembre à 23h

La Danseuse et le Percussionniste d’Ashraf Fahmy (Al Raqissa w Al Tabbal, 1984)
avec Nabila Obeid (la danseuse Mabahij), Ahmed Zaki (Abdo), Zizi Moustafa (la danseuse Narcisse), Ahmed Ghanem (Abou Shafah, l’ami d’Abdo), Nabila El Sayed (Qamar, la sœur de Mabahij), Adel Adham (Naseh, le beau-frère de Mabahij), Qadria Kamel (la mère de Mabahij), Farouk Fathallah (Mounir, le propriétaire du cabaret), Mohamed Reda (Haridy)
Scénario : Mostafa Moharam et Bahgat Amar d’après une histoire d'Ihsan Abdul Quddus
Musique : Mohamed El Mougy et Ahmed Hamouda
Production : Sina Film, Farouk Fathallah


Abdo est un joueur de darbouka qui a une très haute idée de son art. Il est convaincu que dans un orchestre son instrument prime sur tous les autres. Un soir, dans le cabaret où il travaille, il veut le prouver de manière éclatante en imposant ses rythmes aux autres musiciens ainsi qu’à la danseuse que son orchestre accompagne. En quelques secondes, il se met tout le monde à dos et finit à l’hôpital après avoir été roué de coups par le videur du cabaret. Abou Shafah, son ami, l’engage à faire profil bas s’il veut continuer à travailler. Abdo ne veut rien entendre. Il veut trouver une danseuse de talent afin de monter un duo selon ses conceptions artistiques. Avec Abou Shafah, il part à la recherche de la perle rare en écumant les salles de spectacles et les festivals. Un soir, à Tanta, il découvre une jeune danseuse très douée qui le séduit immédiatement. Elle s’appelle Mabahij et vit avec sa sœur, son beau-frère et leurs cinq enfants. Le père est au chômage et toute la petite famille survit grâce aux cachets qu’elle touche pour ses prestations . Abdo promet à la sœur et à son mari de subvenir à tous leurs besoins s’ils acceptent de laisser Mabahij travailler avec lui. C’est ainsi qu’Abdo peut commencer à répéter avec sa danseuse. Malheureusement, sa rigueur excessive et son mauvais caractère rendent les séances de travail très pénibles pour sa partenaire. Les disputes se multiplient. Un jour, Mabahij s’effondre en hurlant de douleur. Elle doit être opérée de toute urgence mais le coût de l’intervention chirurgicale est considérable. Abdo va alors multiplier les participations à des fêtes familiales et vendre tout son mobilier pour pouvoir récolter l’argent nécessaire à la guérison de Mabahij. Désormais, la jeune femme considère Abdo comme son sauveur et elle tombe amoureuse de lui. Peu après, ils trouvent enfin un directeur de cabaret qui accepte de les engager. Leur spectacle obtient un immense succès et ils signent un contrat qui les délivre de la précarité. Ils ont désormais tout pour être heureux. Mais pour Mabahij, ce n’est pas suffisant, elle veut se marier et avoir des enfants. Abdo refuse de sacrifier sa carrière artistique pour fonder une famille…

Notre avis : Ashar Fahmy et Nabila Ebeid ont souvent travaillé ensemble. Le cinéaste a offert à l’actrice certains de ses rôles les plus marquants, ceux qui lui ont permis de rester en haut de l’affiche après plus de vingt ans de carrière. (Nabila Ebeid obtient son premier grand rôle en 1963, alors qu’elle n’a que dix-huit ans, dans un film de Niazi Mustafa, « Rabaa Al-Adawiya ».)
Quand elle tourne « La Danseuse et le Percussionniste », elle a près de quarante ans. Ce film, tout à sa gloire, multiplie de manière un peu complaisante les scènes de danse pour nous prouver qu’elle reste l’une des plus belles actrices de son temps. Elle a pour partenaire Ahmed Zaki, qui incarne un artiste écorché vif, sombrant progressivement dans la folie. L’acteur restitue, avec son talent habituel, toute l’ambivalence du personnage, à la fois attachant et insupportable, généreux et égocentrique. Le dénouement, malgré sa grandiloquence, met en parallèle de manière éloquente le triomphe de celle qui a su se plier aux règles du succès et la chute pathétique de celui qui refuse de s’y conformer, avec ce constat désespérant : en art, l'exigence est le chemin le plus sûr vers l’échec, la société se montrant  impitoyable à l’égard des artistes authentiques.


Mardi 9 septembre à 13h

Les Lunettes Noires de Houssam Al Din Mustafa (Al-Nazzara Sawdaa, 1963)
avec Nadia Lutfi (Madi), Ahmad Mazhar (Omar), Ahmad Ramzy (Aziz), Sanaa Mazhar (Mervat, la fille du patron), Abdel Khalek Saleh (le directeur de l’usine), Abu Bakr Ezzat (l’un des flirts de Madi), Karima El Sherif, Khalil Badr Eddin (Wali), Enayat Youssef, Fayek Bahgat (Mustafa, un ouvrier), Sayed Abdallah (un collègue d’Omar), Souad Abdullah
Scénario et dialogues : Lucien Lambert et Mohamed Kamel Abdel Salam
D’après une histoire d’Ihsan Abdel Quddus publiée en 1952 avec deux autres récits.
Musique : parmi de nombreux emprunts, on trouve un extrait des « Spirituals for Orchestra IV » de Morton Gould (générique de l’émission de la télévision française « Les Dossiers de l’Ecran»
Production : Abbas Helmy


Madi est une jeune aristocrate très fortunée qui mène une vie oisive. Elle porte en permanence des lunettes noires et parmi ses amis, elle jouit d’une grande popularité. Dans l’existence, elle n’a qu’un seul but : s’amuser. L’après-midi, elle retrouve toute sa bande autour de la piscine et le soir, on danse et on boit jusqu’au milieu de la nuit. La plupart du temps, elle rentre chez elle ivre morte. Madi a un petit ami attitré, Aziz mais celui-ci s’est lassé d’elle et a commencé à courtiser d’autres filles. Pour oublier sa peine, elle s’est mise à boire davantage et à flirter avec des garçons qu’elle connaît à peine. Un soir, elle rencontre un jeune homme différent de ceux qu’elle fréquente d’ordinaire. Il s’appelle Omar et il occupe un poste d’ingénieur dans une usine de textile. Ils vont sympathiser et Omar va tenter de faire partager à Madi sa conception de l’existence ainsi que son amour de la littérature et des arts. Pour la jeune aristocrate, c’est une révolution…

Notre avis : le récit du romancier Ihsan Abdel Quddus se déroule en 1947. Houssam Al Din Mustafa transpose l’action à son époque, ce qui lui permet de brosser un portrait à la fois éclatant et incisif de la société égyptienne des années soixante. Il est donc curieux de lire au début du film que l’intrigue se déroulerait toujours en 1947. Une erreur qui devient dès les premières images un contresens embarrassant.
Ces « Lunettes Noires » peuvent sembler un peu démonstratives voire moralisatrices mais le scénario évite habilement l’écueil du manichéisme : les deux personnages principaux occupent des positions qui s’inversent dans la dernière partie du film et cette inversion constitue l’un des intérêts majeurs de cette histoire. Nadia Lotfi est bouleversante en jeune femme déboussolée, bien loin des clichés de la jeune fille de bonne famille fraîche et ingénue, incarnée à la même époque par Soad Hosny. Ce personnage de « bad girl » constitue une première dans le cinéma égyptien de l’époque et confère au film une modernité singulière.
Sur le plan esthétique, le réalisateur semble vouloir s’aligner sur les standards du cinéma international : les personnages évoluent dans une atmosphère très Dolce Vita, la bande-son est exclusivement américaine, et Nadia Lotfi s’inspire visiblement de Monica Vitti pour composer son rôle. Malgré quelques maladresses, « Les Lunettes Noires » demeure l’un des meilleurs opus de Houssam Al Din Mustafa, cinéaste prolifique capable du meilleur — souvent — comme du pire — parfois.


Lundi 8 septembre à 15h

Un Bienfaiteur d'Helmy Rafla (Fa'el Kheir , 1953)
avec Mohamed Fawzy (Khaïry), Sabah (Soheir), Ismail Yassin (Afkar/Hamido), Zomoroda (Elham Anim), Abdel Ghany Kamar (Anis Effendi, le gérant de la société d’Elham), Menassa Fahmy (le père de Soheir), Zaki Ibrahim (le chirurgien), Abdel Aziz Ahmed (le père de Khaïry), Ferdoos Mohamed (la mère de Khaïry), Zeinat Elwy (la danseuse), Abdel Moneim Basiony (le directeur du théâtre), Anwar Zaky (un ami d’Elham), Aziza Badr (la mère de Sonia), Kawthar Shafik (une des amies d’Elham), Fawzya Ibrahim (Sonia), Alya Fawzy (la servante)
Scénario : Abou Al Seoud Al Ebiary
Musique et chansons : Mohamed Fawzy, Abdel Aziz Salam, Fathy Qoura, Saleh Gawdat, Mustafa Abdel Rahman
Production : Mohamed Fawzy


Comédie musicale. Khaïry vit avec ses parents dans un quartier populaire de la ville. Il est réparateur de vélos et il travaille dans un petit atelier avec un ouvrier du nom d’Hamido. Toutes les maisons du secteur appartiennent à une riche jeune femme, Elham Anim, qui a confié la gestion de ses affaires à un homme impitoyable. Khaïry, lui, a le cœur sur la main et il n’hésite pas à venir en aide aux gens du quartier tant et si bien qu’il lui arrive d’avoir les plus grandes difficultés à payer son loyer. Un soir, il trouve sur la route un bébé abandonné. Dans ses langes, il y a une lettre écrite par la mère de l’enfant : elle annonce qu’elle s’est suicidée. Son mari est mort et son père a refusé de la reprendre, elle et son enfant, car elle s’était mariée sans son consentement. Khaïry décide de se rendre chez le grand-père avec le bébé. Le jeune homme est impressionné par le luxe de la demeure. Il fait la connaissance de Soheir, la sœur de la suicidée avec qui il sympathise immédiatement. Puis arrive le maître des lieux. Celui-ci reste intraitable et il le chasse, lui et l’enfant, tandis que Soheir est terrassée par le chagrin. Khaïry et ses parents décident donc de s’occuper du nourrisson. Peu après, Soheir frappe à la porte de leur appartement. Elle veut contribuer à l’entretien et à l’éducation de l’enfant contre la volonté de son père. Elle est accueillie à bras ouverts mais on refuse son argent. Un peu plus tard, Khaïry chante dans un mariage. Depuis la rue, Elham Anim, l’héritière fortunée qui possède toutes les maisons du quartier, entend la voix de notre héros. Elle est immédiatement sous le charme. Elle parvient à entrer en contact avec le jeune homme qui, grâce à son soutien, va connaître la gloire et la fortune. Bien évidemment, Khaïry n’a pas pour autant oublié Soheir…

Notre avis : c’est la troisième fois qu’Helmy Rafla réunit Mohamed Fawzy et Sabah dans une comédie musicale. On notera que les trois films sont produits par Mohamed Fawzy et il ne faut donc pas s’étonner si les personnages qu’il incarne sont toujours parés de toutes les vertus. A chaque fois, on retrouve l’acteur-chanteur en garçon doux, sensible et spirituel. Séducteur malgré lui, il suscite l’amour de plusieurs femmes même si lui n’en aime vraiment qu’une (Il est formidable !). Dans « Un Bienfaiteur », le héros est aussi d’une générosité et d’une compassion sans borne. Il accepte sans hésiter d’élever un nourrisson que sa famille très aisée a rejeté (Chapeau !). Malgré cet aspect un peu ridicule de l’intrigue, le film n’est pas sans qualités. Helmy Rafla parvient à mêler habilement tous les genres : nous passons sans à coups du drame social à la farce en passant par le drame sentimental et la satire. La tonalité comique repose pour l’essentiel sur Ismaël Yassin qui joue deux personnages, un frère et sa sœur : une idée amusante qui tourne un peu court. Nous avons tout particulièrement apprécié le jeu de Zomoroda parfaite en grande bourgeoise possessive et cynique. Evidemment, comme toujours avec Mohamed Fawzy, dont le talent est strictement proportionnel à l’ego, les numéros chantés et dansés sont un régal pour l’ouïe et la vue !


Dimanche 7 septembre à 23h

Une Ville se déchaîne d'Helmy Rafla (Thawrat el madina,1955)

avec Sabah (Fatima), Mohamed Fawzi (Ahmed), Hussein Riad (le père de Fatima), Qadria Kamel (la tante de Fatima), Ahmed Allam (Haj Saber, le propriétaire de l’usine), Doha Amir (Fatima enfant), Wedad Hamdy (la servante), Suleiman al-Guindy (le petit garçon Al Wadi Galal), Abdel Moneim Ismail (le père de Al Wadi), Ragaa Youssef (la danseuse), Horeya Hassan (la chanteuse)
Scénario : Nairuz Abdel Malek
Musique : Mamoun Al Shinnawi, Fathy Qoura, Riad El Sonbati, Mohamed Fawzi, Ali Farraj
Production : les films du Lotus (Assia Dagher)


Mélodrame musical. La mère de Fatima est morte en lui donnant naissance. Sa tante et sa grand-mère avaient perdu la vie dans les mêmes circonstances. Depuis ce drame, Salim, son père, est convaincu que toutes les femmes de la famille sont condamnées à subir le même sort. Il a décidé que Fatima ne se marierait jamais et qu’elle n’aurait jamais d’enfant. Dès son plus jeune âge, il lui a interdit de fréquenter les garçons et lui a imposé une éducation d’une grande sévérité. Un jour, ils partent tous les deux pour une courte escapade au Caire. A leur retour, ils découvrent que leur maison et l’atelier de verrerie du père ont été totalement détruits par un incendie. Ils n’ont plus rien. Heureusement, le riche propriétaire d’une usine de verrerie propose à Salim une place comme contremaître dans son établissement et il lui offre même un logement dans son domaine. Le père de Fatima accepte le travail mais refuse le logement : il sait que l’industriel a un fils de l’âge de sa fille. Les années passent. Fatima est devenue une jeune femme et Ahmed, le fils du propriétaire de l’usine qui avait séjourné à l’étranger pour ses études, est de retour…

Notre avis : Helmy Rafla abandonne provisoirement la comédie, genre dans lequel il excelle, pour s’aventurer sur les terres plus arides du mélodrame. Disons-le clairement : ce n’est pas son meilleur film. Le scénario repose sur une idée saugrenue. Une terrible malédiction pèse sur toutes les femmes d’une même famille : elles meurent en donnant naissance à leur premier enfant. Le père de Fatima n’a donc qu’une obsession, protéger sa fille de l’amour qui lui serait fatal. On se doute qu’il va s’opposer à tous les prétendants qui osent approcher sa fille mais on devine aussi que l’amour finira tout de même par triompher. Une trame prévisible donc mais un entrelacement de thèmes qui se prêterait fort bien à une interprétation psychanalytique (la mort et l’amour) ou théologique (le destin et le libre arbitre).


Samedi 6 septembre à 19h30

Méfie-toi de Hawa de Fateen Abdel Wahab (Ah min Hawwa, 1962)
avec Rushdy Abaza (docteur Hassan), Madiha Salem (Nadia, la sœur d’Amira), Abdel Moneim Ibrahim (Limaï), Aziza Helmy, Awatif Tikla (Fatia, la servante), Hussein Riad (le grand-père d’Amira), Loubna Abdel Aziz (Amira), Hussein Ismaïl (l’assistant du docteur Hassan), Nahed Sabri (danseuse)
Scénario et dialogues : Mohamed Abou Youssef
Musique : Ali Ismaïl
Production : Ramses Naguib


Une adaptation moderne de la Mégère Apprivoisée de William Shakespeare. Docteur Hassan Shukri est un vétérinaire qui doit s’installer chez un riche propriétaire terrien pour soigner les animaux du domaine. Sur la route, il porte secours à une jeune femme dont la grosse voiture est tombée en panne. La conductrice se montre agressive, traitant le docteur Hassan comme un domestique. Celui-ci découvre peu après que cette charmante personne est Amira, la petite-fille de son employeur. Le vétérinaire fait aussi la connaissance de Nadia, la jeune sœur du dragon qui, contrairement à Amira, est une fille douce et agréable. Nadia a un petit ami mais son grand-père refuse qu’elle se marie tant qu’Amira n’a pas trouvé un époux. Malheureusement, le mauvais caractère d’Amira décourage tous les prétendants qui se présentent. Le docteur Hassan promet au grand-père de l’aider à dresser sa petite-fille. Il la traite tout de suite sans ménagement ce qui déconcerte Amira habituée à plus d’égards. L’attitude cavalière du vétérinaire finit même par l’exaspérer, à tel point qu’un soir elle accuse le docteur Hassan de l’avoir agressée et d’avoir tenté de la violer. Son grand-père sait que c’est faux. Avec le vétérinaire, il monte alors une petite comédie pour donner à la menteuse une bonne leçon : afin de laver l’honneur de la famille, Amira doit épouser son agresseur !

Notre avis : dans cette adaptation très libre de « la Mégère Apprivoisé »e de William Shakespeare, Fateen Abdel Wahab évite tous les pièges qu’un tel sujet pouvait comporter et se garde de toute misogynie grossière. Il nous conte avec élégance et ironie toutes les épreuves que s’imposent les deux héros et parvient à capter notre attention jusqu’à l’inévitable « happy end ». C’est une comédie à l’italienne dont la réussite repose en grande partie sur le talent de ses deux vedettes. Rushdy Abaza est toujours juste, sans rien d’affecté ni de forcé dans son jeu. Quant à Loubna Abdel Aziz, on se dit qu’elle avait bien du talent et que c’est vraiment dommage que sa carrière fût si courte. Fateen Abdel Wahab réunira à nouveau les deux acteurs l’année suivante dans « La Mariée du Nil ».
Dans ce film, la voiture de Rushdy Abaza est une 2 cv Citroën. Pour un homme qui était habitué dans la vie comme à l’écran aux grosses limousines américaines, l’expérience a dû sembler bien exotique !


Vendredi 5 septembre à 19h30


Le Taxi de l’Amour de Niazi Mustafa (Takisi alghiram, 1954)

avec Hoda Soltan (Elham), Zinat Sedqy (Kawakeb), Abdel Aziz Mahmoud (Abdo le chauffeur de taxi), Mahmoud El Meleigy (Fadel Amin), El Sayed Bedeir (Hamzawi, le prétendant d’Elham), Ellen Deatto (une danseuse), Khaireya Khairy (la mère d’Abdo), Hassan Fayek (le frère d’Abdo), Monir El Fangary (un employé du casino), Aly Abd El Al (le propriétaire du théâtre), Abdel Salam El Nabolsi (un chanteur), Saïd Abou Bakr (l’ami d’Abdo)
Scénario : Abou Al Seoud Al Ebiary, Niazi Mostafa
Musique : Abdel Aziz Mahmoud
Production : Abdel Aziz Mahmoud, Kamel Madkour


Abdo est un modeste chauffeur de taxi bien qu’il ait une voix exceptionnelle. Un jour, il rencontre Elham, une jeune fille très riche accompagnée de sa servante. Les deux femmes sont montées dans sa voiture pour fuir Fadel Amin, l'oncle et le tuteur d’Elham qui veut la marier à un homme laid et grossier. Elles lui demandent de les conduire au domicile d’une amie d’Elham qui acceptera de les héberger. Malheureusement, cette camarade n’est pas chez elle. La situation devient délicate pour les deux fugueuses. Elles ne savent plus où aller et elles n’ont pas le moindre sou pour régler le taxi. Elham décide de tout avouer au chauffeur. Ce dernier n’est pas insensible au récit de la jeune femme et il leur offre l’hospitalité pour cette nuit. Il vit dans un grand appartement avec sa mère et son frère Hassan. Malheureusement, Fadel Amin ne tarde pas à retrouver leurs traces. Il a fait publier une annonce dans le journal offrant cinquante guinées à quiconque pourra lui indiquer le lieu où se trouve sa nièce. Malheureusement, un ami d’Abdo est tombé sur cette annonce et s’est rendu aussitôt chez le tuteur pour lui indiquer la cachette d’ Elham. Avec ses hommes, il ramène de force sa nièce à son domicile. Au même moment, Abdo apprend la trahison de son ami et se précipite chez le tuteur pour libérer sa protégée. C’est alors que cette dernière a une idée : elle annonce à Fadel Amin qu’elle est déjà mariée à Abdo. Le vieil homme est obligé de les laisser partir même s’il ne renonce pas à récupérer sa pupille. Abdo accepte d’épouser Elham pour une durée d’un mois. Elle sera alors majeure, elle sera libérée de la tutelle de son oncle et elle pourra récupérer la fortune de ses parents. Mais Elham tombe vraiment amoureuse d’Abdo. Le modeste chauffeur de taxi lui aussi est épris de son « épouse » mais il préfère dissimuler ses sentiments : il est convaincu que leurs différences sociales rendent impossible leur union. C’est alors qu’il s’installe à Alexandrie pour devenir chanteur dans un cabaret. Elham décide de le suivre. Elle aussi sera chanteuse en faisant croire à Abdo qu’elle est Yasmina, sa sœur jumelle résidant à Alexandrie. Si elle vit pauvrement, loin des siens, c’est que sa famille l’a rejetée car elle voulait devenir artiste…

Notre avis : une comédie mièvre, indigne du talent du réalisateur Niazi Mustafa, de son scénariste Abou Al Seoud El Ebiary et de l’actrice principale Hoda Soltan. C’est peu dire que nous sommes restés de marbre devant cette histoire d’un chanteur qui tombe amoureux de la sœur jumelle de sa femme, parce qu’elle, au moins, est pauvre… avant qu’on ne découvre que les deux sœurs n’en font qu’une !
L’intrigue mollassonne repose sur un manichéisme caricatural : le chauffeur de taxi, pauvre mais honnête, affronte un tuteur cupide et prétendument violent (violence toute relative : les échanges entre les deux personnages se limitent à quelques menaces et quelques sourcils froncés.). L’apathie générale est à peine troublée par les séquences musicales : de gentilles chansons accompagnées de danses qui se distinguent par leur amateurisme et leur caractère scolaire.
En réalité, « Taxi de l’Amour » est avant tout un film d’Abdel Azouz Mahmoud, tout à la fois producteur, compositeur et héros de cette bluette pour mamies sentimentales. On peut lui reconnaître un certain talent de chanteur et de musicien. Mais comme acteur, il était nettement plus limité. Sympathique, certes, mais limité.


Jeudi 4 spetembre à 23h

Le Voyage sur la Lune d’Hamada Abdel Wahab (Rehla Ela Al Qamar, 1959)
avec Ismaël Yassin (Ismaïl, le chauffeur du minibus), Rushdy Abaza (l’ingénieur Ahmed Roshdy), Safia Tharwat (Stella), Edmond Tuema (le Professeur Charvin), Ibrahim Younes (le Professeur Cosmo), Soad Tharwat (Tula), Gihan (Dana), Hassan Ismaïl (Farid)
Scénario : Hamada Abdel Wahab
Production : Delta Film Productions (Hamada Abdel Wahab)


Le Professeur Charvin a terminé la construction de sa fusée. Tout est prêt pour ce grand voyage vers la Lune dont il rêve depuis si longtemps. Il compte bien être le premier homme à s’y poser et à l’explorer. Apprenant l’imminence du décollage de la fusée, l’ingénieur Ahmed Roshdy se rend au centre spatial de Monsieur Charvin afin de récolter un maximum d’informations sur ce qui s’annonce comme une avancée majeure dans la conquête de l’espace. Il est accompagné de journalistes du quotidien Al Akbar al Youm et de leur chauffeur Ismaïl. Sur la base, ils sont accueillis par le Professeur Charvin lui-même qui ne veut absolument pas qu’on photographie son invention. Seul, Ahmed l’ingénieur est autorisé à le suivre et à monter dans la fusée. Mais Ismaïl le chauffeur a réussi à échapper à la surveillance des gardiens et il entre lui aussi dans l’engin. Sa présence est aussitôt repérée. Monsieur Charvin le prenant pour un espion, brandit un revolver et s’apprête à tirer. En voulant lui échapper, Ismaïl actionne par inadvertance des manettes du tableau de bord. Catastrophe ! Il vient d’allumer les moteurs. La fusée décolle. Ses trois passagers perdent connaissance. Quand ils recouvrent leurs esprits, la Terre est déjà loin. A leur arrivée sur la lune, Monsieur Charvin et ses deux compagnons sont accueillis par un robot qui les conduit sur une base spatiale. Celle-ci est dirigée par le Professeur Cosmo, l’ancien directeur d’un centre de recherche sur l’énergie atomique. Il raconte à ses visiteurs que la Lune a été le théâtre d’un conflit nucléaire il y a une quinzaine d’années. Il avait réussi à trouver refuge à l’intérieur de cette base avec sa fille et six autres jeunes filles. Malheureusement son épouse n’a pas survécu à cette guerre. Depuis, lui et sa petite communauté survivent grâce à des pilules qui leur assurent l’essentiel de leur subsistance.

Notre avis : un film qui mériterait de devenir culte. Nous sommes très proche de l’esthétique des nanards d’Ed Wood : des décors en carton-pâte, une fusée et des robots tout droit sortis d’un dessin d’enfant, des effets spéciaux « faits maison ». Bref, de la science-fiction considérée comme un art naïf et dans son genre, « Le Voyage sur la Lune » constitue une réussite éclatante. Les auteurs se sont visiblement inspirés du film américain « Fusée pour la Lune » (Missile to the Moon) de Richard Cunha sorti l’année précédente. Il n’empêche que la « copie » égyptienne nous semble bien supérieure à son modèle en raison de son absence totale d’esprit de sérieux. Le réalisateur nous convie à une escapade cosmique pleine de fantaisie, un peu dans l’esprit du grand Georges Méliès qui réalisa en 1902 le tout premier « Voyage sur la Lune » du septième art..
Et pour ne rien gâcher, les sept actrices qui incarnent les jeunes femmes qui entourent le Professeur Cosmo sont d’une beauté à couper le souffle. Dans l’une des séquences du film, cinq d’entre elles exécutent une danse incroyable, très loin du style oriental habituel. La jeune femme au corps de déesse qui joue Stella, l’amoureuse de l’ingénieur Ahmed Rushdy, s’appelle Safia Tharwat. Elle fera une carrière d’actrice très brève car elle était avant tout une sportive de premier plan. Elle sera notamment à l’origine du développement en Egypte de la nage synchronisée. Tant pis pour le cinéma…


Mercredi 3 septembre à 19h30

Rendez-vous avec un inconnu d'Atef Salem (Maweed maa maghoul, 1959)
avec Omar Sharif (Magdi), Samia Gamal (Nana, auxiliaire de police), Hala Shawkat (Nadia), Fakher Fakher (Soubhy), Youssef Fakhr El Din (Rachad), Omar Al Hariri (officier de police), Reyad El Kasabgy (le gardien de l'usine), Kamal Hussein (Amin), Thuraya Fakhry (mère de Rachad), Salah Nazmi (le médecin)
Scénario : Youssef Issa
Musique : Mohamed Abdel Wahab
Production : les Films Mohamed Abdel Wahab et les Films Barakat
appréciation : 3/5


Amin est un industriel. Depuis qu’il a constaté que son entreprise était l’objet d’importants détournements de fonds, il reçoit des lettres anonymes lui enjoignant de garder le silence. Amin veut lui-même enquêter avant de prévenir la police. Il convoque Rachad, son jeune comptable. Lors de leur entretien, Amin explique à son interlocuteur qu’il est certain de son innocence mais que quelqu’un a tenté de le faire accuser en falsifiant ses livres de comptes. Tandis qu’ils discutent, un homme s’est introduit dans la voiture de Rachad pour se saisir du revolver qui se trouve dans la boîte à gants. L’inconnu pénètre dans les locaux de l’entreprise et tire sur Amin qui s’effondre mortellement blessé. Poursuivi par le gardien, Rachad se sauve. Sur la route il est arrêté par un étrange personnage qui lui garantit l’impunité bien que tout l’accuse. Il doit disparaître et garder le silence sur tout ce dont il a été le témoin. Après avoir fait ses adieux à sa mère et à sa sœur, Rachad s’envole pour le Soudan. La police a pris l’affaire en main mais elle ne parvient pas à identifier un coupable. Magdi est le jeune frère d’Amin qui fait des études à l’étranger. Il rentre en Egypte pour mener sa propre enquête.

Notre avis : bien que le scénario comporte des facilités, des contradictions et des invraisemblances (oui, ça fait beaucoup !), « Rendez-vous avec un inconnu » est un thriller qui emporte quand même l’adhésion grâce à son atmosphère de roman noir, ses personnages énigmatiques et surtout grâce à la relation incandescente qui unit Omar Sharif et Samia Gamal, ou du moins leurs personnages. Le premier est magistral en héros d’une beauté sombre et altière qui voit avec effroi la réalité se dérober sous ses pas. Et la seconde incarne avec maestria un Dom Juan féminin d’une sensualité diabolique. La beauté des images d’Alexandrie et de ses environs ravira les nostalgiques d’une époque et d’un art de vivre à jamais révolus.


Mardi 2 septembre à 17h

Filles d'aujourd'hui d'Henry Barakat (Banat Al Youm, 1956)
avec Ahmed Ramzy (Fathi), Abdel Halim Hafez (Khaled), Magda Al Sabahi (Salwa), Serag Mounir (le docteur Lotfi), Amal Farid (Layla), Cariman (Buthaïna, la meilleure amie de Layla), Thuraya Fakhry (la mère de Buthaïna), Nawal Mustafa (Najwa), Ellen Diato (Sonia)
Scénario : Henry Barakat et Youssef Issa
Musique : Mohamed Abdel Wahab
Production : les Films Mohamed Abdel Wahab

L’une des scènes du film reprend à l’identique des éléments du chef d’œuvre du cinéma américain, Une Place au Soleil de George Stevens (1951). Même cadre : une fête dans une grande maison de maître ; même musique : Barakat utilise le thème du film américain composé par Franz Waxman ; mêmes costumes : les deux sœurs Salwa et Layla portent une robe identique, copiée sur celle que porte Liz Taylor dans le film de George Stevens ; et même coiffure : Amal Farid a été coiffée pour ressembler au plus près à la jeune actrice américaine. Hommage ou plagiat ?


Comédie musicale. Suleiman Lotfi est un gynécologue qui a trois filles. Salwa est l’aînée, c’est une fille douce et raisonnable qui depuis la mort de leur mère s’occupe de ses deux sœurs plus jeunes, Layla et Najwa. Si la seconde est encore une enfant, la première est une jeune fille insouciante et frivole qui ne pense qu’à s’amuser avec Buthaïna, sa meilleure amie. Fathi, un artiste peintre, est tombé amoureux de Salwa et son ami Khaled veut l’aider à conquérir la jeune fille. Celui-ci est d’autant mieux placé pour le faire qu’il connaît personnellement le docteur et que tous les deux fréquentent le même club. Khaled va sympathiser avec Salwa et provoquer une rencontre avec Fathi. De son côté, il n’est pas insensible au charme de Layla, la deuxième fille du docteur Lotfi. Ils finissent par sortir ensemble et échafaudent des projets communs. Mais les événements à venir vont révéler que Khaled et Salwa sont irrésistiblement attirés l’un vers l’autre…

Notre avis : une très belle comédie musicale avec en vedette celui qui s’apprête à détrôner Farid Al Atrache, le tout jeune Abdel Halim Hafez (aucune rivalité entre les deux hommes qui étaient amis). Les cinq chansons qu’il interprète dans ce film ont été composées par Mohamed Abdel Wahab et parmi elles, figure « Awak » (Je vous Adore), l’un des plus grands « tubes » du chanteur. Henry Barakat peint avec sensibilité et subtilité la naissance de l’amour qui provoque la plus grande confusion dans les cœurs de ses jeunes héros. Amal Farid et Cariman jouent avec un naturel sidérant les jeunes filles complices et insouciantes (destins parallèles de ces deux actrices : elles débutent en même temps et mettent brutalement un terme à leur carrière l’une en 1967 et l’autre en 1968, alors qu’elles ont à peine trente ans.)


Lundi 1er septembre à 17h

La Mariée du Nil de Fateen Abdel Wahab (A'roos El Nil, 1963)
avec Loubna Abdel Aziz (Hamis, la mariée du Nil), Rushdy Abaza (le géologue Sami Fouad), Shweikar (Didi, la fiancée de Sami), Abdel Moneim Ibrahim (Fathy, le collègue de Sami), Fouad Shafik (Docteur Hassan, inspecteur des Antiquités), Abdel Khalek Salah (le président de la société pétrolière), Esmat Mahmoud (Layla, l’assistante du docteur Hassan), Hussein Ismaïl (Rashwan, le chef de chantier), Farhat Omar (Docteur Chedid)
Scénario : Kamel Youssef et Saad Eddin Wahba
Sur une idée de Loubna Abdel Aziz
Musique : Ali Ismaïl, Abdul Hamid Abdul Rahman, Ahmed Shafek Abou Auf 
Production : Ramsès Naguib


Comédie. Sami est un géologue qui s’installe pour quelque temps à Louxor afin de superviser le forage d’un puits de pétrole en plein milieu d’un site archéologique. Dès sa première journée de travail, il doit affronter le Docteur Hassan, inspecteur des Antiquités ainsi que son assistante. Les deux personnages tentent de dissuader Sami d’entamer son œuvre de destruction et le menacent d’en informer le ministère. Le lendemain, un autre souci attend le géologue : les ouvriers refusent de continuer à creuser ; ils craignent d’abîmer les tombes qui sont dans le sous-sol et d’être ensuite frappés par la malédiction du Pharaon. Et dernier désagrément : une femme du temps des Pharaons apparaît au milieu des ruines. Seul, Sami peut la voir. Cette séduisante personne est venue du monde des morts pour empêcher tout forage sur le prestigieux domaine construit par ses ancêtres. Elle entreprend de rendre la vie impossible au géologue…

Notre avis : on trouvera bien des analogies entre cette mariée du Nil et la comédie musicale d’Henry Barakat « Mademoiselle Diablesse » qui date de 1949. Dans ces deux films, un fantôme féminin ayant vécu à une époque très reculée s’amuse à perturber l’existence d’un homme d’aujourd’hui. Si « Mademoiselle Diablesse » est un chef d’œuvre, il n’en est pas de même pour le film de Fateen Abdel Wahab qui reste néanmoins un agréable divertissement avec un message estimable : l’Egypte ne doit pas sacrifier son patrimoine exceptionnel au nom d’impératifs économiques et industriels. Les cinéphiles apprécieront dans la scène du mariage, la référence évidente au film d’Henry Barakat qui lui-même s’inspirait de la comédie américaine de René Clair « J’ai épousé une sorcière » datant de 1942. Dans les trois films, l’héroïne use de pouvoirs surnaturels pour perturber la cérémonie qui doit unir celui qu’elle aime avec une rivale. Cette « Mariée du Nil » offrit à l’actrice Loubna Abdel Aziz l’un des rôles les plus marquants de sa trop courte carrière.