lundi 30 décembre 2019

Les réalisateurs : Sherif Arafa (né en 1960)

شريف عرفة

Sherif Arafa est l’un des cinéastes les plus importants d'aujourd’hui. 
Il est le fils du réalisateur Saad Arafa (dont il sera l’assistant à ses débuts) et le frère aîné du réalisateur Amr Arafa. 
Il réalise son premier film Les Nains Arrivent en 1987. 
Au début des années 90, il s’associe avec le scénariste Wahid Ahmed et la star Adel Imam, pour tourner cinq films qui comptent parmi les œuvres importantes de l’histoire du cinéma égyptien : Jouer dans la Cour des Grands (Allaeb ma'a alkebar, 1991), Terrorisme et Kebab (Al-irhab wal kabab, 1992), L'Oublié (El Mansy, 1993), Les Oiseaux des Ténèbres (Toyour elzalam, 1995), Sommeil dans du Miel (El Noom fi el Asal, 1996) 
A partir des années deux mille, il travaille aussi pour la télévision comme producteur et comme réalisateur.


Trois films de Sherif Arafa ont fait l'objet d'une présentation dans ce blog :


Jouer dans la Cour des Grands (Allaeb ma'a alkebar, 1991)
avec Adel Imam, Hussein Fahmy, Mahmoud El Gendy, Abdulhadi Anwar, Saïd Al Saleh, Zayed Fouad, Ahmed El Boraei, Abu Al Futouh Om, Adel Khalaf, Hamdy Salem, Ezzat Al Mashad, Hassan Al Dib, Tawfiq Al Kurdi, Ahmad Kamali, Wahid Hamed, Hendeya, Abdel Jawad Metwalli, Hussein Arar, Adel Hilal, Sayed Hatem, Mustafa Metwalli, Abdel Hafiz El Tetawy, Ahmed Loxer
Scénario : Wahid Ahmed
Musique : Moudy Al Imam


Hassan Bahloul est un égyptien ordinaire. Il est au chômage et mène une existence morose. Sans ressources, il lui est impossible d’épouser la femme qu’il aime et il doit vivre chez son père qui est coiffeur. Hassan Bahloul est un fervent patriote et un matin, alors qu’il se trouve dans le café où il a ses habitudes, il téléphone au bureau de la sécurité civile pour annoncer un incendie qui aura lieu le lendemain dans une usine de la ville. Tous les clients de l’établissement sont ébahis par ce qu’ils entendent. Quelques instants après, deux agents viennent chercher Hassan. Il va être interrogé par un officier. Quand celui-ci lui demande comment il a appris une telle nouvelle, il prétend qu’il a tout vu dans un rêve. Et la prédiction d’Hassan va s’avérer exacte. C’est ainsi qu’entre les deux hommes va débuter une collaboration spéciale mais fructueuse…

Notre avis : dans les années 90, Sherif Arafa tournera cinq films avec en vedette Adel Imam. Le scénario de chacun de ces films est signé Wahid Hamed, l’un des scénaristes les plus réputés de sa génération. « Jouer dans la Cour des Grands » est le tout premier de la série et il n’a pas les qualités du deuxième, « Terrorisme Et kebab », que tout le monde considère comme le plus réussi des cinq (Il figure sur la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps). Certes, on apprécie ce personnage cynique et provocateur incarné par Adel Imam qui ment comme il respire, s’invite à des mariages pour se goinfrer sans mesure et semble dénué de la moindre compassion pour autrui (même sa fiancée en fera la douloureuses expérience). Le film s’ouvre sur le réveil de notre héros dans sa chambre et c’est sans doute la meilleure scène : en quelques plans, on découvre la personnalité complexe de celui-ci ainsi que son goût pour le kitsch et l’extravagance. Autre qualité du film, l’amitié improbable qu’Hassan (Adel Imam) noue avec Moatasem, l’officier de police (Hussein Fahmy). Ensemble ils lutteront contre les collègues corrompus de Moatasem (La corruption des institutions est un thème récurrent de la filmographie de Sherif Arafa.) Cela dit, l’intrigue aurait gagné à être plus resserrée : elle se perd parfois dans des épisodes inutiles ou trop longs. Et puis le film souffre du manque de personnages féminins. On a uniquement la fiancée d’Hassan incarnée par la peu inspirée et peu inspirante Ayda Ryad, ce qui nous donne ce personnage insipide et sans grande consistance.


Chut, on écoute (Samaa Hos, 1991)
avec Layla Alwi (Alwi), Mamdouh Abdel Alim (Homs), Hassan Kamy (le chanteur Khandour), Soheir El Barouni (la propriétaire de l’hôtel), Ahmad Bedir, Mohamed El Shewihi
Scénario : Maher Awad
Musique : Moudi Al Emam et Baha Jahin
figure dans la liste des 100 films les plus importants de l'histoire du cinéma égyptien.


Homs et sa compagne, Alwi, sont des artistes pauvres. Ils vivent dans la rue et passent leurs journées à composer des chansons. Grâce à la complicité d’un producteur, un célèbre chanteur leur vole une de leurs compositions. La chanson connaît un succès considérable. Le couple retrouve des documents qui prouvent qu’ils sont bien les auteurs de ce tube. Ils portent plainte. Malheureusement les juges ont été achetés et rendent un jugement en faveur du chanteur célèbre. Homs et sa femme ne se découragent pas et poursuivent leur combat…


Terrorisme et Kebab  (Al-Irhab Wa Al-Kabab, 1992)
avec Adel Imam (Ahmed Fatah Al Bab), Kamal Al Shennawi (ministre de l’intérieur), Nagy Saad (le général adjoint du ministre de l’intérieur), Yousra (Hind), Ahmed Rateb (Shalabi), Mohamed Youssef (un employé), Ashraf Abdel Baky (Hilal), Alaa Wali El Din (Samir), Hamdi Youssef (le premier ministre), Nasser Chahine (un militaire), Alaa Morsi (un militaire), Mohamed Sabri (l’enfant), Enam Salosa (un agent administratif), Magda Zaki (Mounira, la femme d’Ahmed), Aïcha El Kilany (la mère de l’enfant), Fouad Farghaly (le directeur de la sécurité), Gamal Hussein (un agent de sécurité) 
Scénario : Wahid Ahmed 
Musique : Modi El Emam 
Production : Essam Imam (le frère d’Adel Imam) 
appréciation : 4/5


Ahmed, un citoyen ordinaire souhaite que ses enfants change d’école. Pour cela, il doit se rendre au Mogamma, le bâtiment qui regroupe tous les services administratifs du Caire. Malheureusement, l’employé chargé des inscriptions scolaires est absent. Ahmed revient le lendemain mais le fonctionnaire n’est toujours pas à son poste. Prenant son mal en patience, le brave citoyen se présentera au bureau le jour suivant puis les autres jours. En vain. Les collègues de l’employé lui donnent à chaque fois une explication différente à ces absences répétées : tantôt, il est en vacances, tantôt il est aux toilettes. En errant dans les couloirs encombrés du Mogamma, Ahmed fait la connaissance d’un cireur de chaussures qui lui révèle que l’employé qu’il recherche est souvent absent car il a pris pour habitude de se rendre aux toilettes dans un autre établissement gouvernemental. Ahmed commence à avoir des soucis avec son patron qui lui reproche son manque d’assiduité. Ahmed essaie de lui expliquer la situation. L’homme ne veut rien savoir. Ahmed n’en peut plus. Il se rend encore une fois au Mogamma et constatant à nouveau l’absence de l’employé il s’en prend violemment à ses deux collègues. Les gardes interviennent. Dans la confusion, Ahmed s’est emparé de l’arme de l’un d’eux . Par inadvertance, un coup part. Personne n’est blessé mais la panique est générale. . A l’étage où se trouve notre héros, les personnes présentes sont convaincues que celui-ci est un terroriste et qu’il les a prises en otage. Tous les autres étages de l’établissement sont évacués et les gardes ont fui. Peu après, les forces de police encerclent le bâtiment.


Notre avis : « Terrorisme et Kebab » connut un immense succès à sa sortie et il figure dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps. Pour réaliser cette comédie politiquement très engagée*, Sherif Arafa et son scénariste Wahid Ahmed semblent avoir joui d’une totale liberté et ils s’en donnent à cœur joie. La satire ne s’embarrasse d’aucune nuance, la caricature est sans merci. Aucune complaisance, aucune autocensure. Et le caractère sympathique du film vient du ton libertaire adopté par les auteurs, un ton assez proche de celui cultivé par les réalisateurs de comédies italiennes dans les années soixante-dix. Les acteurs sont tous excellents et le duo Yousra -Adel Imam nous offre ici l’une de ses prestations les plus mémorables.

· *Paradoxe : dans les années qui vont suivre, Adel Imam et Sherif Arafa compteront parmi les plus fidèles soutiens du Raïs Hosny Moubarak.

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