mercredi 16 juillet 2025

A la télé : les films du jour (Rotana Classic du 16 au 24 juillet)

روتانا كلاسيك

Quels films peut-on voir sur la chaîne Rotana Classic ? Les horaires donnés sont ceux de l'après-midi ou de la soirée (heure de Paris). La plupart des films sont ensuite rediffusés le lendemain matin.
Rotana Classic a remplacé Rotana Zaman en 2012. Cette chaine fait partie du groupe Rotana basé en Arabie Saoudite et spécialisé dans le divertissement (télévision et musique). Celui-ci a été créé par le prince Al-Walid ben Talal ben Abdelaziz Al Saoud, membre de la dynastie Al Saoud et petit-fils du fondateur de l'Arabie Saoudite. Comme son nom l’indique, Rotana Classic diffuse essentiellement les grands classiques du cinéma égyptien. Disponible en France.


Jeudi 24 juillet à 15h

Lettre d’Amour d'Henry Barakat (Risalat Gharam, 1954)
avec Farid Al Atrache (Wahid), Maryam Fakhr Eddine (Elham/Widad), Kamal Al Shennawi (Rafaat), Hussein Riad (Professeur Sami), Abdel Salam El Nabolsi (Dabour), Omar El-Hariri (Samir), Zomoroda (Mimi), Thuraya Fakhry (Anayat Haneim), Abdel Aziz Hamdy (le père d’Ilham), Hind Rostom (Latifa), Aly Abd El Al (oncle de Wahid), Abbas Rahmy (le bijoutier)
Scénario : Youssef Issa et Henry Barakat
D’après un roman de l’écrivain français, Alphonse Karr, Sous les Tilleuls (1832)
Musique : Farid Al Atrache, Mamoun Al Shinnawi, Saleh Gawdat
Production : Films Farid Al Atrache


Wahid, un vieux chanteur couvert de gloire, se souvient de sa jeunesse et de son seul amour : la jeune femme s’appelait Elham et ils étaient follement amoureux l’un de l’autre. Ils s’étaient juré une fidélité éternelle et rêvaient de se marier. Wahid fit sa demande en mariage au père de sa bien aimée mais celui-ci s’opposa catégoriquement à ce projet : Wahid, qui rêvait de faire carrière dans la chanson, était trop pauvre. Il décida alors de se consacrer entièrement à son art pour gagner la gloire et la fortune et ainsi obtenir la main d’Elham. Malheureusement, l’un de ses amis, profitant de son retrait parvint à conquérir la jeune femme et à l’épouser…

Notre avis : on est un peu étonné d’apprendre que ce drame sentimental est inspiré d’une œuvre d’un écrivain français du XIXe siècle complétement oublié aujourd’hui. Alphonse Karr (1808-1890) a écrit un nombre considérable de romans évoquant des histoires d’amour compliquées avec des héros et surtout des héroïnes à la sensibilité exacerbée. Les auteurs de « Lettre d’Amour » ont trouvé dans « Sous les Tilleuls » tous les ingrédients d’un bon mélodrame. Le sentimentalisme du film a certes un peu vieilli mais le personnage du « méchant » incarné par l’impeccable Kamel Al Shennawi retient l’attention du spectateur jusqu’à la fin. Cet « ami » du héros qui détruit tout autour de lui avec un cynisme ahurissant fait partie de la grande famille des « monstres » qu’on adore détester. On peut voir aussi dans l’une des scènes du film, la toute jeune Hind Rostom qui ne parvient pas à troubler le héros malgré sa manière très suggestive d’enfiler ses bas !


Mercredi 23 juillet à 15h

Monsieur Bahbouh de Youssef Maalouf (Bahbouh Efendi, 1954)
avec Ismail Yassin (Monsieur Bahbouh), Zahrat Al Oula (Namat), Mohamed El Dib (Hosni), Fouad Shafik (le médecin), Reyad El Kasabgy (Eways Al Ajali), Gawaher (la danseuse), Rafeaa El Shal (Hosnia), Samia Roshdi (Oum Samir), Abd El Nabi Mohamed (le serveur), Mary Ezz El Din (Ratiba), Edmond Tuema (le pharmacien), Abdel Ghani El Nagdi (Mahrous le barbier), Mahasen Morsi (la danseuse acrobatique), Saïd Khalil (vendeur de lait), Abdel Moneim Basioni (le pompiste)
Scénario : William Basily
Production : les films du Soleil


Monsieur Babouh et son partenaire Eways Al Ajali sont des marchands de bestiaux installés dans un petit village. Ils décident de prendre quelques jours de vacances pour se rendre au Caire. Depuis longtemps, ils rêvent de rencontrer des jeunes et jolies jeunes femmes comme ils en voient dans les magazines. Les voilà partis dans une vieille voiture branlante, direction la capitale. Ils arrivent à la nuit tombée et leur première visite est pour un cabaret qu’on leur a conseillé. Ils s’installent à une table et assistent au spectacle donné par les danseuses de l’établissement. Ils sont ravis. A côté d’eux, il y a une femme seule assise à une table. Elle semble mal à l’aise. Elle est rejointe par une danseuse qui peu après invite Monsieur Babouh et Eways à partager un verre avec elles. La première jeune femme s’appelle Namat. Elle est veuve et élève seule son fils. Elle a des problèmes d’argent et elle ne peut plus payer son loyer. La danseuse est sa voisine et c’est elle qui lui a trouvé ce travail d’entraîneuse. Monsieur Babouh et Eways sont ses premiers clients…

Notre avis : une comédie très courte dont l’histoire se déroule en vingt-quatre heures. La majeure partie du film a pour cadre la boîte de nuit où les deux héros sont venus se distraire et nous assistons avec eux aux différents numéros présentés par l’établissement. Malheureusement, ceux-ci n’ont vraiment rien d’exceptionnel (la prestation de la « danseuse acrobatique » nous a laissé perplexe). Le ressort comique de « Monsieur Bahbouh » repose sur l’opposition entre le monde rural et celui de la ville. Le pauvre paysan qui découvre la capitale et ses plaisirs est une grande source d’inspiration pour certains réalisateurs des années quarante et cinquante en manque d’imagination. Ce film de Youssef Maalouf s’inscrit dans cette « tradition », sans originalité aucune.


Mardi 22 juillet à 17h

La Femme de la Maison de Kamal El Sheikh (Sayyidat al-Qasr, 1958)
avec Faten Hamama (Sawsan), Omar Sharif (Adel), Ferdoos Mohamed (la tante de Sawsan), Stephan Rosty (Shafiq, l’intendant d’Adel), Zouzou Madi (Malik Hanem), Elham Zaki (Samar), Omar El Hariri (Docteur Mustafa, vétérinaire), Shafik Nour El Din (le Sheikh Abdoul Sattar), Eskandar Mansy (le directeur du domaine)
Scénario : Hussein Helmy Al Mohandes
Production : Hassan Ramzy et Les Films Misr International (Youssef Chahine)


Sawsan est une jeune orpheline qui travaille dans une entreprise d’import-export mais elle projette de faire des études de droit pour devenir avocate. Elle vit chez sa tante dans un modeste appartement. Un jour, de retour du bureau, elle casse une chaise du salon. Pour la remplacer, elle se rend à la salle des ventes où elle espère en trouver une à un prix raisonnable. Dans l’assistance, elle observe un jeune homme qui souhaite acheter un tableau en canevas représentant un paysage. Sawsan est tellement sidérée par la somme que l’inconnu a payée pour acquérir « l’œuvre d’art » qu’elle ne peut s’empêcher de faire un commentaire à haute voix. Le jeune homme l’ a entendue et lui demande de s’expliquer. Sawsan, nullement impressionnée, affirme que le tableau ne vaut pas le prix qu’il a atteint lors des enchères et qu’elle-même serait capable d’en réaliser un aussi bien pour un montant nettement moins élevé. Son interlocuteur lui donne dix jours pour réaliser un tableau en canevas qu’il s’engage à lui acheter. Au jour dit, Sawsan se présente chez l’inconnu avec son œuvre. Le jeune homme s’appelle Adel, il possède une immense fortune et habite dans un palace. C’est un Dom Juan qui aime s’amuser et multiplie les conquêtes féminines. Il est charmé par Sawsan et à sa seconde visite, il essaie de l’embrasser de force. La jeune orpheline s’enfuit, bien décidée à ne plus revoir son agresseur. Mais Adel est sincèrement tombé amoureux de Sawsan et il finit par la retrouver pour la demander en mariage. Les deux jeunes mariés passent leur voyage de noces à Alexandrie. A leur retour, Sawsan manifeste le désir de prendre en main la gestion de son foyer. Elle va vite déchanter : les « amis » de son mari ne tardent pas à reparaître et ils se comportent comme s’ils étaient chez eux…

Notre avis : dans les années cinquante, Omar Sharif et Faten Hamama sont devenus le couple mythique du cinéma égyptien. Ils se rencontrent en 1954 sur le tournage d’un film de Youssef Chahine, ils se marient et jouent ensemble dans de nombreux films. « La Femme de la Maison » est l’avant-dernier qu’ils tournent conjointement. Après une ultime collaboration artistique en 1960, Omar Sharif se consacrera à sa carrière internationale. Ce film reprend un thème fort prisé par le public populaire de l’époque : un jeune homme très riche s’éprend d’une jeune fille pauvre et pour la conquérir et la garder, il devra abandonner son existence dissolue et ses mauvaises fréquentations. Ce film ne fait pas partie des chefs d’œuvre de Kamal El Sheikh, l’un des plus grands réalisateurs du cinéma égyptien, même s’il a un charme indéniable du en grande partie à ses deux vedettes. Ce qui sauve aussi le film du cliché et du convenu, c’est le personnage incarné par Omar Sharif. Loin d’être un gentil prince charmant pour conte de fées moderne, il manifeste une personnalité complexe avec sa part d’ombre. C’est un être violent, impulsif, jouisseur, et au final assez inquiétant.


Lundi 21 juillet à 19h30

Ismaïl Yassin dans l'aviation de Fateen Abdel Wahab (Ismaïl Yassine fil tayyaran, 1959)
avec Ismaïl Yassin (Ismaïl/Hussein), Amal Farid (Nawal), Nagwa Fouad (Soheir, la danseuse), Youssef Chahine (le réalisateur), Abdel Moneim Ibrahim (Abdel Moneim, un mécanicien chargé de l’entretien des avions au sol), Reyad El Kasabgy (Al-Shawish Attia, un collègue de Hussein), Gamalat Zayed (la femme d’Al Shawish Attia), Mahmoud El Meleigy (son propre rôle), Zaharat Al Oula (son propre rôle), El Sayed Bedeir (son propre rôle), Mohamed Shawky (son propre rôle)
Scénario et dialogues : Abou Al Seoud Al Ebiary
Production : Ramses Naguib


Comédie. Ismaël et Hussein sont frères jumeaux et vivent ensemble. Ismaël travaille dans le cinéma comme doublure. C’est un métier difficile. En ce moment, il travaille pour Youssef Chahine qui lui fait tourner à plusieurs reprises une scène dans laquelle il doit tomber du haut d’un escalier. Heureusement, Soheir, une danseuse qui a aussi été embauchée pour le film, s’est prise de sympathie pour lui et ils passent beaucoup de temps ensemble. Ismaël aimerait bien la demander en mariage mais elle lui a avoué qu’elle rêve d’épouser un pilote d’avion. Justement, Hussein, le frère d’Ismaël, travaille dans l’armée de l’air comme mécanicien. Il est fiancé à Nawal, une jeune fille d’Alexandrie. Il a demandé à son administration une semaine de congé pour se rendre dans la station balnéaire afin de s’y marier avec l’élue de son cœur. Ismaël profite de l’absence de son frère pour revêtir son uniforme et se présente ainsi accoutré devant Soheir. Il dit être le frère d’Ismaël et prétend être pilote d’avion. La jeune femme est aussitôt conquise et accepte de l’épouser…

Notre avis : après « Ismaïl Yassin à l’armée » (1955), « Ismaïl Yassin dans la police » (1956), « Ismaïl Yassin dans la marine » (1957), « Ismaïl Yassin dans la police militaire » (1958), voici « Ismaïl Yassin dans l’aviation » ! A chaque fois l’objectif est double : divertir le public tout en faisant vibrer sa corde patriotique. Grâce au savoir-faire du réalisateur et de son scénariste, ce cinquième volet est à la hauteur de ses prédécesseurs, avec une tonalité un peu moins martiale cependant : la crise du canal de Suez s’éloigne et la guerre des six jours est encore loin.. « Ismaïl Yassin dans l’aviation » se présente comme une bonne comédie familiale avec en prime la participation exceptionnelle de Youssef Chahine dans son propre rôle (On raconte que lors du tournage, il se serait disputé avec la vedette du film, Ismaïl Yassin, pour une histoire de cigarette.)


Dimanche 20 juillet à 19h30

Jamais je ne pleurerai d'Hassan Al Imam (Ln 'abkaa abdaan,1957)
avec Faten Hamama (Hoda, la fille du Pacha), Imad Hamd (Ahmed Mustafa, l’ingénieur agronome), Zaki Rostom (Abdoul Majid Pacha), Sanaa Jamil (Samiha, la nièce du Pacha), Rushdy Abaza (Ezzat, le neveu du Pacha), Negma Ibrahim (Asmah), Fouad Fahim (le frère du Pacha), Mary Ezz El Din (la belle-sœur du Pacha), Shafik Nour El Din (Cheikh Morsi), Wedad Hamdy (la servante Aziza), Nemat Mokhtar (la danseuse), Samira Ahmed (la fille de Morsi), Kawthar Ramzi (la fille de Morsi), Fakher Fakher (Abou Auf), Awatef Ramadan (la femme d’Abou Auf), Abdel Moneim Ibrahim (le secrétaire), Hala Fakher (une petite fille)
Scénario : Mohamed Mustafa Sami
Musique : Sayed Mustafa
Production : Hassan Ramzy


Abdoul Majid Pacha est un personnage très puissant qui veut sans cesse accroître l’immense domaine qu’il possède à la campagne. Il a récemment acquis un terrain revendiqué par une famille de paysans. Ceux-ci lui demandent de le leur restituer mais Abdoul Majid Pacha refuse catégoriquement. Tous les paysans alentour prennent fait et cause pour la pauvre famille mais le seigneur reste intransigeant. La situation se tend et la police finit par intervenir de manière brutale. La famille lésée ne s’avoue pas vaincue. Depuis la mort du chef de famille, c’est sa mère qui dirige le clan et elle a promis de se venger quoi qu’il en coûte. Avec ses hommes, elle fait régner la terreur sur le domaine de son ennemi : elle fait détruire les récoltes et les bâtiments. Tous ceux qui travaillaient pour le Pacha finissent par fuir mais celui-ci parvient à tout reconstruire et le domaine retrouve sa prospérité d’antan.
Abdoul Majid vit au Caire avec sa fille, Hoda. Il est aussi affectueux avec elle qu’il est brutal avec ses employés. Un jour Hoda décide de conduire la voiture paternelle alors qu’elle n’a pas encore obtenu son permis. Evidemment, elle finit par perdre le contrôle de son véhicule et percute une autre voiture qui arrivait en sens inverse. Le conducteur de celle-ci est Ahmed Mustafa, un ingénieur agronome. Bien qu’il ait été blessé, l’homme refuse de porter plainte. De retour chez elle, Hoda est rongée par le remords. Le lendemain, elle tente de recontacter sa « victime ». Elle apprend que l’ingénieur a été admis à l’hôpital. La jeune femme s’y rend avec son père. Une fois rétabli, Ahmed retrouve fréquemment Hoda chez elle ou lors de sorties. Tout naturellement, leur amitié se change en amour passionné. Cette situation déplait très fortement à Ezzat, le neveu du Pacha, qui rêvait d’épouser sa cousine pour profiter de la fortune de son oncle. Ezzat et sa sœur Samiha mettent à exécution un plan diabolique pour séparer Hoda et Ahmed…

Notre avis : en 1957, Faten Hamama et Imad Hamdi jouent les amoureux depuis presque une décennie malgré leur différence d’âge de vingt-deux ans. Le premier film qui les a réunis, c’est la « Dame de la Maison » réalisé par Ahmed Kamel Morsi en 1948. Faten Hamama avait alors à peine dix-huit ans. En règle générale, Imad Hamdi joue un ingénieur (parfois un médecin) d’origine modeste et Faten Hamama une jeune fille de bonne famille. Les proches de la demoiselle s’opposent à leur union mais l’amour finit toujours par triompher. Tous ces éléments se retrouvent dans « Jamais je ne pleurerai ». Pour autant, il ne faudrait pas réduire ce film à un catalogue de lieux communs. C’est une saga familial construite comme un roman-feuilleton (Hassan Al Imam fut un grand lecteur des romans-feuilletons français du XIXe siècle) et le réalisateur y déploie toute sa maîtrise de l’action dramatique. Faten Hamama campe avec conviction une jeune femme qui renonce à son existence oisive pour travailler comme une paysanne afin de sauver le domaine familial (Bien sûr on pense à Vivien Leigh dans « Autant en emporte le Vent ».) et Negma Ibrahim impressionne dans le rôle de la vieille femme assoiffée de vengeance et enlaidie par une haine implacable. « Jamais Je ne pleurerai » se présente comme une vaste fresque dont le souffle romanesque nous emporte.


Samedi 19 juillet à 19h30

Le Secret du Bonnet Invisible de Niazi Mostafa (Ser Taqya el Ekhfa, 1959)
avec Tawfik El Deken (le bijoutier Amin), Berlanti Abdel Hamid (Lola, la maîtresse d’Amin), Abdel Moneim Ibrahim (Asfour), Mohamed Abdel Qodoos (le père d’Asfour), Ahmed Farahat (le frère d’Asfour), Zahrat Al Oula (Amal), Gamalat Zayed (la mère d’Asfour), Adli Kasseb (Salem, le rédacteur en chef), Samia Roshdi (la mère d’Amal)
Scénario : Abdel Hay Adib et Niazi MostafaDialogues : El Sayed El Bedir
Musique : Mounir Mourad et Fathy Qora
Production : Khalil Diab


Comédie fantastique. Asfour est un reporter naïf et maladroit. Son incompétence notoire exaspère son rédacteur en chef. Il est amoureux d’une collègue, Amal. Malheureusement cette dernière doit épouser Amin, un cousin méchant et sournois, bijoutier de son état.
Asfour vit avec son petit frère Fasih et ses parents. Son père est un excentrique qui se consacre à l’alchimie. Il multiplie les expériences dans l’espoir de fabriquer un jour de l’or.
Amin ne supporte pas qu’Amal fréquente Asfour. Il menace son rival afin qu’il s’éloigne de la jeune femme. Le bijoutier a le soutien de la mère de celle-ci et rien ne pourra empêcher leur mariage. Asfour est désespéré.
Un soir, Fasih est resté seul dans le laboratoire de leur père et il entreprend de jouer au petit chimiste. Il provoque une explosion qui libère d’une jarre un génie. L’enfant s’évanouit puis l’être surnaturel prend feu, ne laissant de son passage qu’une fine poussière qui s’est déposée sur un bonnet appartenant à Asfour.
Peu après, on s’aperçoit que le bonnet a le pouvoir de rendre invisible celui qui le porte. Asfour comprend tout de suite le parti qu’il va pouvoir en tirer. Tout d’abord, tourmenter Amin et empêcher son mariage avec Amal…

Notre avis : le seul film où l’éternel second rôle Abdel Moneim Ibrahim obtient le premier rôle. Même s’il peine à convaincre dans certaines scènes qui auraient exigé de sa part un petit grain de folie supplémentaire, reconnaissons qu’il propose un jeu très personnel, tout en retenue, bien loin de l’outrance de ses petits camarades. « Le Secret du Bonnet Invisible » est une comédie inégale : l’invisibilité du héros est prétexte à une accumulation de gags convenus et de farces pour potaches boutonneux. Heureusement, Berlanti Abdel Hamid, la Sza Sza Gabor égyptienne met du piment dans cette potion « magique » un peu fade. Sa danse du Hula Hoop est l’une des scènes les plus savoureuses du film.


Vendredi 18 juillet à 19h30

Rendez-vous à dîner de Mohamed Khan (maowid ala ashaa, 1981)
avec Soad Hosny (Nawal), Hussein Fahmy (Ezzat), Ahmed Zaki (Shoukry), Zouzou Madi (Raïfa, la mère de Nawal), Ragaa Al-Geddawy (Enayat), Eglal Zaki (Soad), Adawy Gheith (Ryad), Amal Ibrahim (Shawya), Sami Sarhan (le gérant de salon de coiffure), Hafez Amin (l’avocat Rafaat), Khairy Beshara (l’acquéreur du tableau à la vente aux enchères), Marwa Al-Khatib (la secrétaire d’Ezzat), Alia Ali‏ (la gynécologue), Hussein Al Sharif (l’inspecteur de police), Haridi Omran (le mathoun)
Scénario : Mohamed Khan et Bashir El Dik
Musique : Kamal Bakir
Production : Al-Jawhara Films


Nawal est mariée depuis plusieurs années avec Ezzat, un riche homme d’affaires. Ils se sont connus alors qu’elle était encore étudiante. Pour lui, elle a abandonné ses études et a endossé le rôle de l’épouse docile. Cette union a fait le bonheur de sa mère : après la mort du père, la vieille femme percevait une maigre pension qui l’obligeait à faire bien des sacrifices. Grâce à son gendre, elle a pu mener l’existence dont elle avait toujours rêvé. Mais voilà : Nawal n’est pas heureuse. Ezzat est constamment accaparé par son travail et ne lui prête aucune attention. Autre sujet de friction entre le mari et la femme : ils n’ont pas d’enfant malgré le désir maintes fois exprimé par Ezzat d’en avoir. Nawal a consulté une gynécologue : sur le plan physiologique rien n’empêche une grossesse mais le médecin explique que cette stérilité a des causes exclusivement psychologiques. Ce constat ne fait que renforcer la détermination de Nawal : elle veut divorcer. Elle ne peut plus attendre, elle se rend au bureau de son mari pour l’en informer. La secrétaire lui dit qu’Ezzat est parti au restaurant. Elle y court. Quand elle entre dans l’établissement, elle découvre que son mari déjeune en galante compagnie. Malgré la situation embarrassante, Nawal informe Ezzat de sa décision. Elle a peu après une discussion avec sa mère. Celle-ci est furieuse et elle exige de sa fille qu’elle renonce à son funeste projet. Le soir, Nawal et Ezzat dînent dans un restaurant espagnol avec des amis. Une fois rentrés chez eux, l’épouse réitère son souhait d’une séparation, le mari s’emporte et gifle à plusieurs reprises sa compagne puis il l’entraîne dans la chambre conjugale et lui impose une relation sexuelle. Mais rien ne fera changer d’avis Nawal. Ezzat finit par accepter le divorce car il est convaincu que cette séparation sera de courte durée. Nawal refuse l’appartement et la pension alimentaire que lui offre son mari. Elle veut être totalement autonome. Elle suit une formation pour devenir secrétaire. Au début, tout semble lui sourire : elle trouve un emploi chez son avocat et elle se réconcilie avec sa mère. Cette dernière ne supporte plus la solitude et a décidé de se remarier avec un ami de son défunt mari. Nawal accueille avec joie cette nouvelle. Malheureusement, sa mère meurt subitement alors qu’elle se trouvait dans le salon de coiffure où sa fille l’avait conduite…

Notre avis : dans ce film, Mohamed Khan dépeint la condition féminine avec des couleurs très sombres. Le constat est sans appel : dans l’Egypte des années 80, une femme ne peut prétendre à l’indépendance et au bonheur. Pour elle, le choix est simple : la soumission ou la mort. Pour illustrer ce point de vue très pessimiste, le réalisateur nous conte l’histoire tragique d’une femme de grand bourgeois qui décide de divorcer pour vivre et aimer comme elle l’entend. Mais son ex-mari aura le dernier mot et détruira impitoyablement son nouveau bonheur. Dans le rôle du mari et de la femme, nous retrouvons Soad Hosny et Hussein Fahmy. Dans les années soixante-dix, ils incarnèrent à plusieurs reprises le couple moderne bien décidé à s’aimer malgré les interdits et les tabous de la société. Je pense notamment aux deux comédies musicales d’Hassan Al Imam, « Méfie-toi de Zouzou » (1972) et « Amira Mon Amour » (1975) qui firent de Soad Hosny et d’Hussein Fahmy, les symboles de la libération des mœurs. Dans « Rendez-vous à dîner », changement radical de registre. Les deux acteurs mettent tout leur talent au service du projet artistique sans concession de Mohamed Khan. Hussein Fahmy est impressionnant en grand bourgeois froid et calculateur. C’est certainement l’un de ses plus grands rôles, loin des play-boys de bonnes familles auxquels on l’a trop souvent cantonné. La force de ce drame réside aussi dans le peu de paroles échangées entre les protagonistes. Tout passe par le regard, et celui de Soad Hosny est souvent d’une intensité déchirante.
 

Jeudi 17 juillet à 15h

Sans un Adieu d'Ahmed Diaa Eddine (Min ghair wadaa, 1951)
avec Aqila Rateb (Samia, la seconde épouse de Magdi), Imad Hamdi (Magdi), Madiha Yousri (Fatima, la première femme de Magdi), Soheir Fakhry (Magda, enfant), Mohamed Fadel (Mounir Bey, le beau-père de Magdi), Awatef Ramadan (Aïcha, la femme de chambre), Ibrahim Hechmat (le premier mari de Samia), Abdel Aziz Al Ahmed (Abdel Aziz), Zinat Sedki (Ghandoura), Mahmoud El Sabaa (Tawfiq), Mohamed El Dib (Salim), Abbas El Daly (le juge), Tawfiq Ismaïl (le médecin)Scénario : Mohamed Kamal Hassan Al Mouhamy
Musique du générique empruntée à la B.O du film américain « Pour Qui Sonne le Glas » (1943), une composition que l’on doit à Victor Young


Drame. L’action se passe durant la seconde guerre mondiale dans la région d’Alexandrie. Magdi Abdel Hamid est un chef d’entreprise à qui tout réussit. Ses affaires sont florissantes, il a épousé la femme qu’il aime et ensemble ils ont eu une adorable petite fille. Malheureusement, la chance tourne soudain. A cause d’irrégularités commises dans le plus grand secret par son ami Tawfiq, Magdi est condamné à plusieurs années de prison pour retard de paiement. Lors de sa détention, il apprend que sa maison a été détruite par un raid allemand. Sa femme serait morte et sa fille a disparu. Quand Magdi sort de prison, il recherche partout sa fille, en vain. Il accepte un emploi dans un grand domaine agricole. La propriétaire est la sœur de Tawfiq. Elle est veuve et souffre de graves problèmes cardiaques. Grâce à l’arrivée de Magdi, elle retrouve goût à la vie et sa santé s’améliore. Ils finissent par tomber amoureux l’un de l’autre et ils se marient…

Notre avis : un mélodrame classique qui respecte les lois du genre mais sans manichéisme ni caricature. La grande force du scénario, c’est d’avoir représenté les deux « rivales » qui se partagent le cœur du héros comme deux femmes aussi « admirables » l’une que l’autre, si bien que le spectateur est jusqu’à la fin ballotté par des sentiments contradictoires. Aqila Rateb est bouleversante dans son rôle de femme qui croit enfin atteindre le bonheur et qui doit brutalement y renoncer. Par son interprétation inspirée, notamment dans le dénouement, elle atteint le sublime de la tragédie. C’est la première fois qu’Imad Hamdi et Madiha Yousri tournent ensemble. Les années suivantes, on les retrouvera à plusieurs reprises dans des drames comme mari et femme ou comme amants. Ils formaient un couple dont l’élégance aristocratique fascinait aussi bien les réalisateurs que le public.


Mercredi 16 juillet à 15h

Ismaïl Yassin et le fantôme d’Hassan El Seifi (Afrita Ismaïl Yassin, 1954)
avec Ismail Yassin (Ismaïl), Kitty (Kitty, le fantôme), Farid Shawki (Hamido), Mohamed Kamal El Masry (le père de Zilabia), Zinat Sedki (Zilabia), Mary Moneib (la mère de Zilabia), Serag Mounir (Adel Kamal), Ferdoos Mohamed (la mère de Mohamed), Khristo Kladakis (le partenaire de Kittie), Liz et Lynn (danseuses)
Scénario : Hassan El Seifi et Abou Al Seoud Al Ebiary , d’après la pièce du dramaturge britannique Noël Coward, L'esprit s'amuse (Blithe Spirit, 1941)
Musique : Munir Murad, Izzat Al Jahili, Mohamed Salman
Production : Films Masr Al Jadidat


Comédie musicale. Kitty travaille comme danseuse dans un nightclub dirigé par Adel Kamal. Celui-ci dépense tout son argent au jeu et cela fait des mois qu’il est incapable de payer ses employés et de régler son loyer. Il est au bord du gouffre. Hamido, son collaborateur, lui souffle une idée : pourquoi ne pas supprimer Kitty et ainsi récupérer son assurance vie ? Adel est prêt à tout pour échapper à la faillite. Il accepte la proposition de son conseiller diabolique. Après plusieurs tentatives infructueuses, Hamido parvient enfin à tuer Kitty mais le fantôme de celle-ci entre en communication avec Ismaïl et lui demande de l’aider à se venger. Ismaïl est un jeune homme un peu naïf que la danseuse avait rencontré dans des circonstances dramatiques : en raison d’un fâcheux concours de circonstances, il avait été la victime de la première tentative de meurtre d’Hamido et avait failli perdre la vie au volant de sa voiture. C’est ainsi qu’ils étaient devenus amis…

Notre avis : l’un des sommets de la comédie des années cinquante. Le titre est un clin d’œil à la comédie musicale d’Henry Barakat « Afrita Hanem » (1949) avec Samia Gamal et Farid Al Atrache, le couple mythique du cinéma égyptien. Dans le film d’Hassan El Seifi, le duo vedette, c’est Ismaïl Yassin et la danseuse Kitty. Ils ont déjà eu l’occasion de jouer ensemble mais c’est leur première véritable collaboration. Leur entente fait plaisir à voir et on doit en grande partie à celle-ci la réussite de cette comédie. Les gags, les chansons et les danses se succèdent à un rythme endiablé. Pour le scénario, Hassan El Seifi a fait appel à Abou Al Seoud Al Ebiary, le scénariste attitré de Fateen Abdel Wahab, qui a su tirer parti de toutes les potentialités comiques de la pièce de Noël Coward. Entourant les deux vedettes, on retrouve des actrices et des acteurs parmi les meilleurs de l’époque. Comme toujours, Zeinat Sedky est désopilante et ici elle se surpasse en grosse fifille à couettes, braillarde et pleurnicharde. Mais le film ravira surtout les admirateurs de Kitty qui enfin se voit offrir un rôle à la mesure de son immense talent, comme danseuse bien sûr mais aussi comme actrice. Dans « Ismaïl Yassin et le Fantôme », c’est elle la star ! Durant les quinze premières minutes du film, elle danse avec toute une troupe de danseuses et de chanteurs. Son énergie peu commune entraîne tout le monde, y compris les spectateurs, dans une folle farandole, sans jamais lasser. Au contraire, on en redemande ! Pour finir, un mot quand même sur Ismaïl Yassin : phénoménal.
En cette même année 1954, Hassan El Seifi sort une autre comédie musicale avec Ismaïl Yassin et Kitty. Elle s'intitule "La Fille de la Campagne" et l'action se déroule en grande partie à Paris.


lundi 14 juillet 2025

Les Trois Amis (Al'asdiqa' althlath, 1966)

الأصدقاء الثلاثة
إخراج : أحمد ضياء الدين


Ahmed Diaa Eddine a réalisé Les Trois Amis en 1966.
Distribution : Hassan Youssef (Galal), Mohamed Awad (Hamouda), Ahmed Ramzy (Essam), Youssef Chaban (Ezzat, l’escroc), Nagwa Fouad (Nana), Nagla Fathy (Zahra, la sœur de Nana), Nabila Ebeid (Soad), Magda El Khatib (Nadia),Abdel Azim Kamal (le père de Nadia et de Soad), Aleya Abdel Moneim (Madame Amina, la mère d’Essam), Anwar Madkor (le directeur de l’école), Abdel Ghany Qamar (un gardien de prison), El Deif Ahmed (El Deif, un complice d’Ezzat), Samir Ghanem (Samir, un complice d’Ezzat)
Scénario : Adly El Moled et Abdel Fattah El Sayed
Production : Les Films Gomhouria

Hassan Youssef, Samir Ghanem, Mohamed Awad



Hassan Youssef et Nagwa Fouad



Magda El Khatib, Ahmed Ramzy, Nabila Ebeid



Nagwa Fouad et Youssef Chaban



Ahmed Ramzy, Abdel Azim Kamal, Aleya Abdel Moneim



Nagla Fathy et Ahmed Ramzy
















Résumé


Avertissement : le texte qui suit est un résumé simplifié du film qui comporte un grand nombre de péripéties inutilement complexes et souvent inracontables.

Galal et Hamouda sont étudiants dans un établissement technique. Ils se conduisent comme de véritables cancres et ils ne cessent d’irriter leurs professeurs parmi lesquels se trouve leur cousin Essam. Ce jour-là, les deux garçons ont dépassé les bornes et ils sont renvoyés de l’établissement pour une semaine, au grand dam d’Essam. Ce dernier vit toujours chez sa mère qui est veuve. Pour gagner sa vie, elle effectue des travaux de couture. Galal et Hamouda ont l’habitude de se rendre chez leur tante pour y réviser. Mais il y a aussi une autre raison. Dans le même immeuble résident avec leur père Soad et Nadia, deux jeunes lycéennes très séduisantes. La première est amoureuse d’Essam et la seconde de Galal. Tandis que les quatre jeunes gens flirtent dans l’escalier, Hamouda sert de guetteur et doit prévenir si le père des deux filles fait son apparition. Quand celui-ci entre enfin dans l’immeuble, il ne rentre pas chez lui mais pénètre d’abord dans l’appartement de la mère d’Essam. Le jeune professeur en est convaincu : sa mère entretient une liaison adultère avec son voisin.

Il quitte l’immeuble précipitamment tandis que Galal et Hamouda ont pris une voiture pour le rejoindre. Essam est accosté par une prostituée. Il prend un air menaçant qui effraie la jeune femme. Cette dernière s’enfuit et traverse la rue sans voir qu’au même moment une voiture surgit. La collision est inévitable. Dans l’automobile, bien évidemment, ce sont les deux cousins d’Essam. La police intervient aussitôt et les trois garçons se retrouvent en détention. Le jour de leur libération, la mère d’Essam, accompagnée des deux sœurs Soad et Nadia, les attend à la porte de la prison. L’ancien professeur refuse de saluer sa mère et se précipite dans un taxi.

Pour gagner leur vie, les trois cousins décident de créer un atelier de décoration mais, à cause de leur condamnation récente, ils ne peuvent gérer une entreprise. Ils ont trouvé un homme qui accepte d’enregistrer la petite société à son nom. Malheureusement, les trois associés vont découvrir que cet individu est un véritable escroc qui non seulement a dilapidé une partie de leur capital mais veut mettre la main sur leur atelier. Pour ce faire, il demande à sa maîtresse, la danseuse Nana, d’embaucher les trois décorateurs et de tenter de séduire Essam. Mais rien ne se passe comme prévu. En fait c’est Nana qui tombe amoureuse d’Essam et qui rompt avec son amant. Celui-ci n’a pas dit son dernier mot : la société est mise aux enchères et il pense pouvoir la racheter grâce à l’argent volé. Mais Galal et Hamouda sont plus malins que lui : non seulement, ils ont récupéré leur argent mais ils ont racheté la société au nom de la mère d’Essam. S’ensuit une très longue course poursuite durant laquelle Nana et son ex-amant trouvent la mort. Happy end : joie des trois garçons et de leurs proches qui peuvent enfin rentrer chez eux..


Critique

Le scénario de ces « Trois Amis » est signé Adly El Moled à qui l’on doit d’autres navets mémorables comme « Une Fille Turbulente » (réalisé par Houssam Al Din Mustafa en 1967) ou « Secrets de Filles » (réalisé par Mahmoud Zulficar en 1969). Grâce à lui, certains cinéastes de renom ont fait l’expérience de la médiocrité et de l’insignifiance. Je ne suis pas sûr qu’il faille l’en remercier. Pour ces « Trois Amis», il s’est surpassé !

L'art d'Adly El Moled, c’est celui du patchwork improbable : il met bout à bout des scènes qu’il a empruntées à d’autres films de genres très différents, sans se soucier de la vraisemblance ni de la cohérence. Ce brillant auteur, sûr de son talent multiforme, a aussi voulu mêler le comique et le dramatique. Pourquoi pas mais il le fait de manière si maladroite que les deux registres s’annulent l’un l’autre. Ahmed Ramzy incarne Essam, un personnage dramatique. Il croit avoir entendu sa mère faire l’amour avec le voisin et depuis, traumatisé, il entretient une haine absolue des femmes. On voudrait bien y croire mais le problème, c’est que le malheureux est entouré par deux « comiques » qui multiplient les gags pas drôles et les plaisanteries puériles, une spécialité du très agité Mohamed Awad. Une des séquences les plus éprouvantes est celle du séjour en prison de nos trois amis. Les gags ratés succèdent aux gags ratés et on a vraiment hâte qu’ils recouvrent la liberté.

Ce film souffre aussi d’un grave problème de rythme : le montage souvent chaotique ne parvient pas à masquer la répétition monotone des mêmes situations et le vide vertigineux de certaines scènes. Trop souvent, on a des personnages qui ne savent pas quoi faire. Ils attendent, les bras ballants, puis passent d’une pièce à une autre. Le plus navrant, c’est pour la toute jeune Naglaa Fathy dont c’est la première apparition au cinéma. On lui a confié un rôle qui n’a strictement aucune fonction dans le récit si bien que durant tout le film, on la voit descendre l’escalier de sa maison pour ouvrir aux visiteurs qui se présentent à la porte. Très gratifiant !

Comme beaucoup de comédies, « Les Trois Amis » se termine par une course poursuite des gentils et des méchants à laquelle vient se mêler la police (On ne comprend pas très bien ce qu’elle vient faire dans cette séquence déjà particulièrement confuse.). En général, c’est long mais ici, la course poursuite bat tous les records : elle ne fait pas moins de quinze minutes, soit pratiquement 1/6eme du film total. Voilà peut-être la seule véritable originalité de l’œuvre !

Pour conclure, nous dirons que « Les trois Amis » est sans doute le plus mauvais film d’un excellent cinéaste.

Appréciation : 1/5
*

Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin

mardi 1 juillet 2025

A la télé : les films du jour (Rotana Classic du 1er au 15 juillet)

روتانا كلاسيك

Quels films peut-on voir sur la chaîne Rotana Classic ? Les horaires donnés sont ceux de l'après-midi ou de la soirée (heure de Paris). La plupart des films sont ensuite rediffusés le lendemain matin.
Rotana Classic a remplacé Rotana Zaman en 2012. Cette chaine fait partie du groupe Rotana basé en Arabie Saoudite et spécialisé dans le divertissement (télévision et musique). Celui-ci a été créé par le prince Al-Walid ben Talal ben Abdelaziz Al Saoud, membre de la dynastie Al Saoud et petit-fils du fondateur de l'Arabie Saoudite. Comme son nom l’indique, Rotana Classic diffuse essentiellement les grands classiques du cinéma égyptien. Disponible en France.


Mardi 15 juillet à 17h

Une Rumeur d'Amour de Fateen Abdel Wahab (Ishayat hub, 1960)
avec Omar Sharif (Hussein), Soad Hosny (Samia), Youssef Wahby (Abdel Kader), Abdel Moneim Ibrahim (Mahrous, un neveu d’Abdel Kader), Ehsan Sherif (la femme d’Abdel Kader), Wedad Hamdy (la femme de chambre), Hussein Ismaïl (le cuisinier), Gamal Ramses (le cousin « rocker »), Zeinat Olwy (la danseuse), Hind Rostom, Ragaa Al Gedawy (Zizi), Oumnia (Lola)
Scénario et dialogues : Mohamed Abou Youssef, Ali El Zorkany
D’après la pièce de John Emerson et Anita Loos, The Whole Town Talking. Aux Etats-Unis, cette pièce avait fait l’objet d’une première adaptation cinématographique en 1926.
Musique : Ahmed Fouad Hassan


Abdel Kader est un riche entrepreneur de Port-Saïd. Il considère son neveu Hussein comme son héritier. Il l’a nommé directeur-adjoint de sa société et le jeune homme réside avec lui dans sa grande maison bourgeoise. Abdel Kader a une fille, Samia, qui termine ses études au Caire. Il aimerait bien qu’elle épouse Hussein. Si ce dernier n’est pas insensible au charme de la jeune fille, en revanche Samia n’est guère intéressée par ce cousin trop sérieux et à l’apparence guère engageante. Elle lui préfère un autre cousin qui ne travaille pas mais qui sait chanter et danser. L'oncle, exaspéré par cette situation, va aider Hussein a conquérir le coeur de sa fille. Il est convaincu que Samia tombera amoureuse de son cousin maladroit si on parvient à la rendre jalouse. Il répand la rumeur que Hussein a une liaison avec l'actrice Hind Rostom...

Notre avis : l’un des meilleurs films de Fateen Abdel Wahab, le génie de la comédie égyptienne. Le casting réunit les actrices et les acteurs les plus talentueux de chaque génération (de Youssef Wahbi, 62 ans, à Soad Hosny, 17 ans). La mise en scène nous épate par son inventivité et son élégance (La séquence d’ouverture est déjà un petit chef d’œuvre !). A voir aussi pour Omar Sharif à contre-emploi, irrésistible en amoureux empoté, même si notre préférence va à Gamal Ramsis, hilarant en jeune "yéyé" effronté et vaniteux. Le soin apporté aux moindres détails fait de cette comédie familiale un classique qui témoigne de ce que fut l'Egypte à l'aube des années soixante, un pays en plein essor se tournant résolument vers l'avenir, quitte à heurter la frange la plus conservatrice de la société. Dans "Une Rumeur d'Amour", Fateen Abdel Wahab observe avec un regard malicieux comment le monde figé de la grande bourgeoisie est ébranlé par ces mutations. En prime, il y a Soad Hosny qui nous gratifie d’une leçon de chacha mémorable. Alors ne boudons pas notre plaisir.


Lundi 14 juillet à 19h30

Les Trois Démons d'Houssam Al Din Mustafa (El Shayateen El Talata, 1964)
avec Rushdy Abaza (Saadawi), Ahmed Ramzy (Ezab), Hassan Youssef (Fatouh), Nasr Seif (Samiha), Samy Tamoum (l’officier de police), Nawal Abou El Fotouh (Zeinab), Berlanti Abdel Hamid (Hamia), Mohamed Sobeih (Madlouly), Hussein Ismaïl (Monsieur Wahdan), Saleh Al Eskandarani (Hanafi Al Sayad), Abdel Alim Khattab (Monsieur Abdel Razaq), Abdel Hamid Nasr (le père de Zeinab)
Scénario : Bahgat Amar, Mohamed Kamel Abdel Salam, Lucien Lambert
Production : Abbas Helmy

Saadawi, Ezab et Samiha sont trois amis qui ont été ensemble détenus pendant plusieurs années dans le centre pénitentiaire d’Abou Zaabal. Leurs conditions de détention étaient éprouvantes : ils passaient toutes leurs journées dans des carrières à casser des pierres sous un soleil accablant. Puis, un jour, ils apprennent qu’ils font l’objet d’une grâce exceptionnelle. En sortant de prison, ils sont bien décidés à reprendre une existence honnête. Ezab retourne à Suez où l’attend Zeinab, sa fiancée. Le père de celle-ci l’accueille comme un fils et l’installe dans un petit appartement sur le toit de leur immeuble. Ezab veut récupérer le camion qu’il a acheté à Monsieur Abdel Razaq, un puissant marchand de poissons de la ville. Durant sa détention, il lui a laissé le véhicule mais maintenant il veut récupérer ce qui lui appartient. Le marchand de poissons ne l’entend pas de cette oreille et refuse de restituer le camion. Pour intimider l’ancien prisonnier, il lui envoie ses hommes de main qui le passent à tabac. Ezab décide d’appeler à son aide ses deux anciens camarades qui se rendent aussitôt à Suez. Le trio réuni est prêt à affronter Abdel Razaq. Dans leur lutte, ils vont trouver un partenaire inattendue : Hamdia, une jeune femme qui possède un bateau de pêche et qui s’est toujours opposée aux méthodes du marchand…

Notre avis : un petit film d’action très sympathique qui exalte le mythe de la camaraderie virile entre hommes soudés par des épreuves communes. L’atmosphère rappelle parfois celle de certains films français de la même époque avec Lino Ventura ou Jean-Paul Belmondo. Comme il se doit, la réalisation est nerveuse, sans fioriture. Toutes les scènes d’affrontement sur le port, au milieu des bateaux et des marins, constituent les moments forts de ces « Trois Démons ». Bref, c’est du Houssam Al Din Mostafa à son meilleur. Dans ce film, les femmes ne brillent guère par leur présence. Il y a tout de même Berlanti Abdel Hamid mais avec un personnage de femme d’action à l‘opposé des séductrices qu’elle a incarné jusqu’alors. On est même étonné de la voir arborer des toilettes si sévères et surtout de la voir adopter une attitude si distante avec son « amoureux » Roshdy Abaza. Cette réserve inattendue sera mieux comprise si on précise que cette même année 1964, Berlanti Abdel Hamid épouse le maréchal Abdel Hakim Amer, vice-président de la République arabe d’Egypte ! (Une idylle qui se terminera tragiquement trois ans plus tard.)


Dans les années 60, on aime particulièrement les trios et tout naturellement l’adjectif numéral « trois » (talata en égyptien) se retrouve dans un certain nombre de titres. En voici la liste :

« Les Trois Voyous » d’Houssam Al Din Mustafa (1962)

« Les Trois Célibataires » de Mahmoud Farid (1964)

« Les Trois Démons » d’Houssam Al Din Mustafa (1964)

« Les Trois Aventuriers » d’Houssam Al Din Mustafa (1965)

« Les Trois Sages » de Mahmoud Farid (1965)

« Les Trois l’adorent » de Mahmoud Zulficar (1965)

« Les Trois Amis » d’Ahmed Dia Eddine (1966)

« Trois Femmes » de Mahmoud Zulficar (1968)

« Les Trois Prisonniers » d’Houssam Al Din Mustafa (1968)

« Les Trois Braves » d’Houssam Al Din Mustafa (1969)

« Les Trois Menteurs » de Monir Al Tony (1970)

« Les Trois Fous » d’Hassan El Seifi (1970)

On notera que quasiment la moitié de ces films a été réalisé par Houssam Al Din Mustafa.


Samedi 12 juillet à 17h

Le Puits de la Trahison d’Ali Abdel Khalek (Bir El-Khyana, 1987)
avec Nour El Sherif (Jaber Abdel Ghaffar), Ezzat Al Alaily (colonel Ahmed Ezzat), Dalal Abdel Aziz (Ghazala, la femme de Jaber), Hoda Ramzi (Bossi, la secrétaire, agent du Mossad), Abdel Aziz Makhyoun (officier du Mossad), Ahmed Loxer (un dirigeant du Mossad), Marwa Al Khatib (employée du Mossad à Rome), Hosny Abdul Jalil (sergent dans l’armée égyptienne), Mohamed Abu Hashish (Maître Anwar), Tamer Ashraf (Khamis, le fils de Jaber), Ibrahim Masoud (directeur du renseignement égyptien), Ahmed Al Adal (le beau-frère de Ghazala)
Scénario : Ibrahim Masoud
Musique : Mohamed Ali Soliman
Production : Saad Chahab


Jaber est un pauvre homme sans emploi qui vit dans une misérable baraque avec son fils et sa femme. Pour nourrir sa famille, il erre sur le port d’Alexandrie à la recherche de quelques sous ou d’un peu de nourriture. La plupart du temps, il vole, ce qui révulse sa femme. La police finit par l’arrêter. C’est ainsi qu’on découvre qu’il n’a jamais accompli son service militaire. Il est aussitôt affecté dans la marine. Jaber n’y reste pas longtemps. Il déserte et part pour l’Italie avec un faux passeport. Il s’installe à Rome dans un petit hôtel mais ne trouve aucun travail. Il erre dans les rues de la capitale italienne et pour gagner un peu d’argent, il organise des parties de bonneteau. Il est rapidement repéré par la police qui tente de l’interpeller. Il fuit et trouve refuge à l’ambassade d’Israël. Il ne se doute pas encore qu’il vient de faire son premier pas sur le chemin de la trahison au profit d’une puissance ennemie…

Notre avis : l’égyptien qui trahit son pays pour devenir un espion à la solde des services secrets israéliens est un thème rebattu du cinéma des années soixante-dix, quatre-vingt. Ali Abdel Kkalek l’avait déjà traité deux ans auparavant avec « L’Exécution d’Un Mort ». Si ce précédent opus présentait des qualités indéniables, il n’en est pas de même pour ce "Puits de la Trahison". Le sujet est exploité de manière très conventionnelle, il s’agit avant tout de faire oeuvre patriotique pour l'édification des foules. Aucun suspens, un dénouement hautement prévisible et une esthétique de téléfilm bâclé. En 1987, Ali Abdel Khalek sort quatre films sur les écrans de cinéma : c'est beaucoup et c'est sans doute trop.


Vendredi 11 juillet à 19h30

La Femme d'un Homme Important de Mohamed Khan (Zawgat Ragol Mohim, 1988)
avec Ahmed Zaki (Hisham), Mervat Amin (Mona), Ali Ghandour (le père de Mona), Alyah Ali (la mère de Mona), Zizi Mustapha (Samiha), Hassan Hosni (le brigadier Yousri), Thuraya Ezzelddin (la femme du brigadier Yousri), Nazim Sharawi (le directeur de la sécurité de l’état), Nahed Samir (la tante d’Isham), Othman Abdel Moneim (le directeur de la sécurité de la ville), Abdel Ghany Nasser (le député), Khairy Beshara (le mari de Samiha), Mohamed Dardiry (l’écrivain Magdy Ezz Al-Arab), Tarek Mandour (le chauffeur d’Hisham)
Scénario : Raouf Tawfiq
Musique : Georges Kazazian
figure dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps


Dans l'Egypte des années soixante-dix. Mona Ismaïl est une jeune fille romantique qui adore le chanteur Abdel Halim Hafez. Son père est ingénieur et pour des raisons professionnelles, il a dû s’installer avec toute sa petite famille à Minieh, une ville de Haute-Egypte. C’est là que Mona rencontre Hisham, un officier de police ambitieux et autoritaire. Elle est séduite par sa personnalité et elle accepte de l’épouser. Peu après le mariage, le jeune couple s’installe au Caire. Mona découvre très vite que son mari est un jeune homme brutal et arrogant qui exige d’elle une soumission totale. Parallèlement, Hisham comprend peu à peu les règles impitoyables de l'ascension sociale et il compte bien en user sans état d’âme. Les 18 et 19 janvier 1977 des émeutes éclatent dans tout le pays à cause de la hausse subite des prix d’un grand nombre de produits de première nécessité. Hisham veut exploiter ces troubles au profit de sa carrière personnelle...

Notre avis : l’un des meilleurs films de Mohamed Khan. Bien qu’il soit question des émeutes qui ébranlèrent le régime d’Anwar El Sadate en 1977 et que le personnage principal soit un officier de police cynique et violent, «La Femme d’un Homme Important » est davantage un drame psychologique qu’un film politique. Le réalisateur s’est surtout intéressé à la lente décomposition d’un couple, la situation sociale et politique du pays n’est évoquée que pour montrer comment elle influe sur la vie personnelle des deux héros. Ahmed Zaki et Mervat Amine sont impressionnants de justesse et de vérité dans des rôles particulièrement difficiles. On pourra regretter le caractère excessivement mélodramatique du dénouement.


Jeudi 10 juillet à 15h

Le Soleil de Minuit de Hussein Helmy El Mohandes (Shams La Tgheeb, 1959)
avec Zubaida Tharwat (Soha), Kamal El Shennawi (Salah, l’ophtalmologue), Hussein Riad (Ahmed, le père de Soha), Youssef Fakhr El Din (Essam), Aida Helal (Kawthar, la fiancée d’Ahmed), Nazim Shaarawy (le directeur de l’institut pour aveugle), Thuraya Fakhry (la nourrice), Mary Ezz El Din (la mère d’Essam), Ahmed Loxer (le premier médecin), Ahmed Farahat (Mohamed, le petit bédouin)
Scénario : Hussein Helmy El Mohandes
Production : Youssef Obaid


Soha est une jeune fille qui mène une existence heureuse auprès de son père et de son petit frère. Depuis la disparition de la mère, une nourrice affectueuse et dévouée veille sur toute la petite famille. Pour parfaire son bonheur, Sohah est amoureuse d’un jeune garçon avec qui elle projette de se marier. Ce sont les vacances et Ahmed, le père, a décidé de séjourner au Fayoum avec ses deux enfants. Il en profite pour leur présenter Kawthar, la jeune femme qu’il compte épouser. A l’hôtel, Soha fait la connaissance de Mohamed, un petit bédouin qui vit dans le désert avec sa famille. Ensemble, ils se promènent dans la nature environnante. Soha s’est prise d’affection pour son petit compagnon et quand celui-ci tombe malade, elle passe ses journées à son chevet pour lui apporter soin et réconfort. Malheureusement, l’état de l’enfant s’aggrave et il meurt subitement. Soha est effondrée. Elle quitte précipitamment la tente de la famille bédouine et se perd dans le désert. Soudain, elle aperçoit au loin son père qui était parti à sa recherche. En voulant le rejoindre, elle chute et sa tête heurte violemment une grosse pierre. Elle perd connaissance. Quand Soha revient à elle, elle est à l’hôpital entourée de son père, de son frère et de son fiancé. Mais elle découvre en même temps qu’elle a perdu la vue. Toute la famille est bouleversée. Quand elle retourne chez elle, son père et sa nourrice lui manifestent toute l’affection dont ils sont capables. Mais elle aimerait avoir aussi auprès d’elle son fiancé Essam. Elle téléphone chez ses parents mais elle comprend qu’il a décidé de rompre…

Notre avis : « Le Soleil de Minuit » est le premier film que réalise Hussein Helmy El Mohandes. Il a déjà 39 ans et une longue carrière de scénariste derrière lui. On dit qu’il fut le découvreur de Zubaïda Tharwat, l‘actrice principale de ce film. Celle-ci apparaît pour la première fois à l’écran en 1956 mais sa carrière débute vraiment en 1957, alors qu’elle a 17 ans. Les quatre films dans lesquels elle joue avant « Le Soleil de Minuit » ont tous été écrits par Hussein Helmy El Mohandes. Ce dernier serait-il passé à la réalisation pour sa petite protégée ? On peut légitimement se poser la question. Ce premier film est un mélodrame lacrymal qui accumule dans sa première partie tous les poncifs du genre. On constatera quelques similitudes avec « Le Petit Ange », écrit aussi par Hussein Helmy El Mohandes et réalisé par Kamal El Sheikh en 1957. Zubaïda Tharwat y joue déjà une jeune adolescente que le destin accable et qui bouleverse son entourage par son courage et sa générosité. Hussein Riad joue exactement le même rôle dans les deux films : dans celui de 1957, il est le grand-papa qui pleure et dans celui de 1959, il est le papa qui pleure (Hussein Riad a toujours eu la larme facile. Pourtant ce n’est pas dans ce registre qu’il est le meilleur, tant s’en faut.*). Si « Le Petit Ange » était d’une insupportable mièvrerie, ce « Soleil de Minuit » nous semble nettement plus réussi, notamment la seconde partie qui narre l’affrontement entre l’ancien fiancé de l’héroïne, violent et sans scrupule, et le jeune médecin qui veut tout tenter pour qu’elle recouvre la vue. Ces deux personnages sont joués par deux grands acteurs terriblement doués, Youssef Fakh El Din et Kamal El Shennawi. A noter qu’en cette même année 1959, Kamal El Shennawi et Zubaïda Tharwat triomphent dans l’excellent « Elle vécut pour l’amour » d’El Sayed Bedeir.

*Dans ce style « larmes et reniflements », Hussein Riad se surpasse dans « Rendez-vous avec la vie » d’Ezzel Dine Zulficar (1953). Il y incarne un médecin dont la fille unique est atteinte d’une maladie incurable.


Mercredi 9 juillet à 19h30

Le Monstre de Salah Abou Seif (El Wahsh, 1954)
avec Anwar Wagdi (l’enquêteur), Samia Gamal (la danseuse), Mahmoud El Meleigy (Abdel Sabour), Abbas Fares (Radwan Pacha), Samiha Ayoub (la femme de l’enquêteur), Mohamed Tawfik (le mari de la danseuse), Omar El Gizawi (le domestique de l’enquêteur), Tousoun Motamad (homme de main du monstre), Ibrahim Moheb (le maire), Ahmed El-Hamaky (Hindawi), Fifi Sayed (la femme d’Hindawi), Ibrahim Hechmat (le chef de la police locale), Soleiman El Gendy (le fils de l’enquêteur)
Scénario : Naguib Mahfouz, Salah Abu Seif, El Sayed Bedeir
Musique et chansons : Fouad El Zahry, Ahmed Sedqi, Abdel Halim Nawira, Abdel Fattah Mustafa
Production : Pierre Zerbanelli
Le Monstre faisait partie des films en compétition au Festival de Cannes de 1954 (Président du jury : Jean Cocteau)


Thriller rural. Abdel Sabour est à la tête d’un gang qui fait régner la terreur dans un petit village de Haute-Egypte. Il force les paysans à lui vendre leurs terres à vil prix. Si ceux-ci résistent, il fait enlever leurs enfants et réclame une rançon. Abdel Sabour jouit d’une totale impunité car il est protégé par Radwan Pacha à qui il rend de précieux services lors des élections. Les autorités finissent par s’émouvoir d’une telle situation. Un officier de police s’installe avec femme et enfant dans le village. Sa mission : démanteler le gang et rétablir l’ordre…

Notre avis : Un très grand film. L’année précédente, Salah Abou Seif et son scénariste, l’écrivain Naguib Mahfouz, avaient réalisé un thriller sur Raya et Sakina, les célèbres tueuses en série d’Alexandrie. Cette fois-ci, ils s’intéressent à un criminel qui terrorisa paysans et villageois en Haute-Egypte dans les années quarante. Pour ce second opus rural, les références sont clairement du côté du western américain avec cet officier de police qui va devoir affronter pratiquement seul le truand et ses sbires. Le film prend une dimension politique dans sa dénonciation de la complicité qui unit le criminel et le notable, chacun trouvant dans l’autre un allié de poids pour affermir sa puissance et accroître sa fortune. Dans le rôle de l’officier de police, on retrouve Anwar Wagdi dont le choix nous laisse perplexe comme pour le film précèdent. En revanche, Mahmoud El Meleigy et Samia Gamal sont remarquables en amants diaboliques.
C’est à propos de ce film que le critique français Georges Sadoul utilise pour la première fois l’expression « thriller social » pour en souligner le réalisme et le caractère quasi documentaire.


Mardi 8 juillet à 17h

Nos plus beaux jours d'Helmy Halim (Ayyamine el helwa, 1955)
avec Omar Sharif (Ahmed), Faten Hamama (Houda), Abdel Halim Hafez (Ali), Ahmed Ramzy (Ramzy), Zahrat Al Oula (Salwa, la cousine d’Ahmed), Zinat Sedky (Zenobia), Serag Mounir (Oncle d’Ahmed), Aziza Helmy (la folle), Saïd Khalil (le médecin), Ibrahim Hechmat (le chirurgien), Ahmed Saïd (docteur Shouqi Yassin), Fifi Sayed (la tante d’Houda), Abel Moneim Ismaël (Monsieur Gomah), Ali Rushdy (le frère de la folle)
Scénario et dialogues : Ali El Zorkani
Musique : Morsi Gamil Aziz, Kamal Al Tawil, Mohamed Al Mogi
Production : Helmy Halim
C‘est la deuxième fois qu’Omar Sharif et Faten Hamama se retrouvent dans un même film. Ils se sont rencontrés l’année précédente sur le tournage de Ciel d’Enfer de Youssef Chahine.


Houda est une jeune fille qui vient de sortir de l’orphelinat. Elle a trouvé un emploi de garde-malade et elle loue une chambre dans une grande maison tenue par madame Zenobia. Elle a comme voisins trois étudiants, Ahmed, Ramzy et Ali. Ils sont immédiatement conquis par la beauté et la gentillesse de la jeune femme et elle devient aussitôt le quatrième membre de la petite bande. Progressivement, Houda et Ahmed vont être attirés l’un par l’autre, ce qui va provoquer la jalousie de Ramzy. Mais la jeune femme tombe gravement malade : elle a la tuberculose. Son état nécessite une opération chirurgicale qu’elle est incapable de payer. Les trois garçons vont tout entreprendre pour réunir la somme exigée par l’hôpital…

Notre avis : malgré une intrigue un peu mièvre, un film qui n'est pas sans charme. L’une des raisons à cela, c’est qu’on assiste à l’apparition d’une nouvelle génération d’acteurs particulièrement talentueuse : les cinq rôles principaux sont tenus par des garçons et des filles qui sont nés autour de 1930*. Ils ont donc une vingtaine d’années et ils ne sont pas encore les monstres sacrés qu’ils ne tarderont pas à devenir. On ne peut non plus rester insensible au duo formé par Faten Hamama et Omar Sharif (qui dans la vraie vie sont tombés amoureux l’un de l’autre quelques mois auparavant). L’une des plus belles scènes du film est celle de leur « colloque sentimental » au pied des pyramides.

*Omar Sharif est né en 1932 , Faten Hamama en 1931, Abdel Halim Hafez en 1929, Ahmed Ramzy en 1930, Zahrat Al Oula en 1934


Lundi 7 juillet à 15h

Le Chant de l’Espoir d'Ahmed Badrakhan (Nasheed Al-Amal, 1937)
avec Oum Kalthoum (Amal), Salwa (Salwa, la fille d’Amal), Hassan Fayek (l’assistant du réalisateur), Stephan Rosti (l’acteur Mourad), Fouad Shafik (le réalisateur, Mary Moneib (la mère d’Amal), Zaki Toleimat (Docteur Assem), Abbas Fares (Ismaïl, l’ex-mari d’Amal), Abdel Aziz Khalil (le chef de gang), Abdel Meguid Choukry (le professeur de musique), Mahmoud Reda (Docteur Mahboub)
D’après un roman d’Edmond Tuema
Scénario et dialogues : Ahmed Badrakhan et Ahmed Rami
Musique : Aziz Sadek, Mohamed El Qasabji et Riad El Sonbati
Production : les Studios Misr
figure dans la liste des 100 films les plus importants de l'histoire du cinéma égyptien


C’est le premier film réalisé par Ahmed Badrakhan et c’est le second interprété par la chanteuse Oum Kalthoum.
Amal a été abandonnée par son mari. Elle vit pauvrement avec sa mère et sa fille, Salwa. Cette dernière tombe malade et Amal consulte le docteur Assem . Tout en soignant la fille, le médecin découvre le talent de chanteuse de la mère. Il décide de l’aider à se lancer dans la carrière artistique. Les premières prestations publiques de la jeune femme provoquent l’enthousiasme des spectateurs. Très vite, un réalisateur des studios Misr lui propose de tourner un premier film. Comble de bonheur : le docteur Assem est tombé amoureux d’Amal et il manifeste une grande affection pour sa fille. C’est à ce moment-là que son ex-mari reparaît…

Notre avis : A l’époque, Ahmed Badrakhan est un tout jeune réalisateur mais il a su fort bien s’entourer. Le scénario et les paroles des chansons sont signés du grand poète Ahmed Rami. Cinq de ces chansons ont été composées par Mohamed Al Qasabji, le joueur de oud virtuose d'Oum Kalthoum et quatre par Riad Al Sunbati, l’un des compositeurs les plus importants du XXe siècle : neuf chefs d’œuvre qui contribuèrent à édifier la légende d’Oum Kalthoum. La mise en scène peut sembler statique mais face à la voix et au visage de la diva n’est-ce pas la meilleure manière de souligner toute la pureté et toute la beauté de l’une comme de l’autre ? En contrepoint, Ahmed Badrakhan se livre à une satire très amusante des réalisateurs qui travaillaient aux studios Misr (Dans plusieurs scènes, on en voit les bâtiments flambant neufs ; lors du tournage, ils ont à peine deux ans.). Fouad Shafik est impayable en cinéaste extravagant et vaniteux.


Dimanche 6 juillet à 19h30

La Maison n°13 de Kamal El Sheikh (Al-Manzel Raqam 13, 1952)

avec Faten Hamama (Nadia, la fiancée de Sharif Kamal), Imad Hamdy (Sharif Kamal), Lola Sedky (Sonia Chahine, la maîtresse du docteur Assim Ibrahim), Mahmoud El Meleigy (le docteur Assim Ibrahim), Tawfik Ismail (Saber Amin), Serag Mounir (l’enquêteur), Ferdoos Mohamed (la mère de Sharif Kamal), Wedad Hamdy (la femme de chambre de Nadia), Zaki Ibrahim (le père de Nadia), Fawzia Mostafa (l’infirmière), Alia Ali (la danseuse), Omar Al Gizawi (le serviteur de la victime)
Une histoire de Kamel Attya et de Kamal El Sheikh
Scénario et dialogues : Ali El Zorkani
Production : les Studios Misr
appréciation : 4/5


Thriller. Un homme arrive en voiture près d’une villa isolée. Il se gare devant le portail et sort de son véhicule. Il gravit les marches qui mène jusqu’à la porte d’entrée. Il sort une clé de sa poche et l’introduit dans la serrure. La porte s’ouvre, il entre. L’individu se retrouve face à un autre homme qui lit son journal. Il l’abat de plusieurs coups de revolver. On retrouve dans son lit le meurtrier qui vient de se réveiller. Il s’appelle Sharif Kamal et il vit avec sa mère dans un grand appartement. On comprend que la scène du meurtre était un rêve. Mais Sharif reste troublé par ce rêve étrange dont les moindres détails lui sont restés en mémoire. Son malaise s’accroît quand il s‘aperçoit qu’il est sérieusement blessé à la main.
Sharif rejoint sa fiancée, la jeune et jolie Nadia et ils se rendent ensemble chez un bijoutier pour acheter un collier. De retour chez la jeune fille, ils retrouvent son vieux père avec qui Sharif échange quelques paroles avant de retourner à son bureau. C’est lors de cette conversation que le futur marié découvre qu’il a dans la poche de sa veste une clé qui ne lui appartient pas. Un peu plus tard, dans un café, il aperçoit une femme dont le portrait ornait l’un des murs de la maison de son rêve. L’inconnue quitte l’établissement et Sharif décide de la suivre. A son grand étonnement, elle se rend dans le cabinet médical de son psychiatre, le docteur Assim Ibrahim. Ce médecin le soigne depuis un certain temps pour une maladie nerveuse et ils sont devenus amis. A l’intérieur du cabinet, Sharif est accueilli par son médecin mais plus trace de la jeune femme. Sharif explique la raison de sa présence puis le docteur Assim Ibrahim lui présente une autre jeune femme qui porte les vêtements de celle que Sharif poursuivait mais le visage n’a rien avoir avec celui du portrait entrevu dans son rêve. En fait, ce que ne sait pas le jeune ingénieur, c’est qu’il est totalement manipulé par son médecin. C’est ce dernier qui par hypnose lui a ordonné de s’introduire chez un homme pour le tuer. Pour quelle raison ? Le docteur Assim Ibrahim entretient une relation amoureuse avec Sonia, une danseuse qui vit en couple avec la victime, un homme très riche qui a souscrit une assurance vie au bénéfice de sa jeune maîtresse. Pour récupérer le magot, le docteur Assim Ibrahim et Sonia ont décidé de supprimer cet homme et c’est ainsi que le psychiatre a eu l’idée d’utiliser son patient.
De retour à son bureau, Sharif tombe sur une revue qui présente en couverture, le visage vu en rêve. Il sait désormais que cette femme existe vraiment et qu’elle est danseuse. Avec son médecin, Sharif se rend dans le cabaret où elle se produit. C’est ainsi qu’il fait sa connaissance tandis que le docteur et Sonia feignent de se rencontrer pour la première fois.
Le lendemain, Sharif et Nadia se marient mais la fête est à peine commencée que le nouveau marié est arrêté et conduit dans la maison où a eu lieu le crime. L’y attend l'enquêteur qui procède au premier interrogatoire et qui l’informe des charges qui pèse contre lui…

Notre avis : un thriller hitchcockien réalisé par un grand styliste, une oeuvre envoûtante servie par des acteurs exceptionnels. En s’inspirant du film noir américain, Kamal Et Sheikh rompt avec une certaine tradition du cinéma égyptien dont les genres de prédilection étaient jusque alors le mélodrame, la comédie et la comédie musicale. Dès ce premier film, le jeune cinéaste s’affirme comme un artiste singulier, prodigieusement doué, ce que ses œuvres suivantes confirmeront avec éclat.


Samedi 5 juillet à 17h

Amira mon Amour d'Hassan Al Imam (Amira Houbi Ana, 1975)
avec Soad Hosny (Amira Salem), Hussein Fahmy (Adel Naguib), Soheir Al Babli (la femme d’Adel), Imad Hamdi (le directeur de l’administration et beau-père d’Adel), Karima Mokhtar (la mère d’Amira), Samir Ghanem (Taher Hamouda, un collègue d’Amira), Hassan Mostafa (le supérieur hiérarchique d’Amira), Hesham El Ashry (le frère d’Amira), Nabil Badr (Fathi), Mahmoud Shoukoko (Oncle Saqr), Helmy Hilaly (l’inspecteur de police)
Scénario : Hassan Al Imam, Mamdouh El Leithy, Salah Gahin
Adaptation d'un passage du roman de Naguib Mahfouz, Miroirs (1972). Ce roman est constitué de courts chapitres indépendants, chacun évoquant la vie d’un personnage que le narrateur a rencontré à un moment ou à un autre de son existence. Le chapitre qui est à la base du scénario de ce film est intitulé « Abda Souleimane » (en français, éditions Babel, trad. de Najet Belhatem)
Musique : Fouad El Zahry, Mohamed Al Mogi, Sayed Darwich


Comédie musicale. Depuis la mort de son père, Amira doit subvenir aux besoins de sa mère ainsi qu’à ceux de ses frères et sœurs. Elle a trouvé un emploi dans une grande administration, au département traduction. Elle a peu de travail car le service compte un trop grand nombre d’employés mais sa gaieté, son charme et son dynamisme ont transformé agréablement l’atmosphère du bureau. Même son chef n’est pas insensible à son charme. Elle fait la connaissance d’Adel Naguib, l’un des cadres supérieurs de l’établissement. Le jeune homme a épousé Amina, la fille du directeur mais lui et sa femme ne s’entendent pas. En fait, Adel ne s’est marié que par ambition professionnelle et il n’éprouve aucun sentiment pour son épouse. Au fil des rencontres, Adel et Amira tombent amoureux l’un de l’autre. Ils se marient en secret…

Notre avis : trois ans après « Méfie-toi de Zouzou », Hassan Al Imam réunit à nouveau Soad Hosny et Hussein Fahmy dans une comédie musicale mais cette fois-ci, le résultat est beaucoup moins convaincant. La mièvrerie imprègne tous les composants de ce second opus : les chansons ressemblent souvent à des comptines enfantines, les danses avec leur chorégraphie sommaire réunissent des « danseurs » dont le seul point commun est un amateurisme appliqué, l’intrigue sentimentale accumule les scènes de déclarations enamourées avec sourires timides et regards extatiques, et pour finir les robes de couleurs acidulées que porte Soad Hosny semblent empruntées à la garde-robes d’une poupée autrichienne. Inutile de préciser qu’il ne reste pas grand-chose de l’univers de Naguib Mahfouz dans cette romance sirupeuse.


Vendredi 4 juillet à 19h30

Monsieur Karaté de Mohamed Khan (Mister Karate, 1993)
avec Ahmed Zaki (Salah), Nahla Salama (Nadia), Ibrahim Nasr (Hassan, l’entraineur), Mamdouh Wafi (l’ingénieur Sherif), Othman Abdel Moneim (Omar, l’ancien collègue du père de Salah), Nader Nour Alddin (Samir), Amr Mohammed Ali (Fathi), Zouzou Nabil (la vieille dame), Azza Kamel (la fille de la vieille dame), Wagih Agamy (Mahmoud), Hassan El Adl (un policier corrompu), Adawy Gheith (Monsieur Aziz), Moustafa Darwish (un mari jaloux), Fouad Farghaly (le fonctionnaire)
Scénario : Raouf Tawfik
Musique : Yasser Abdul Rahman
Production : les films El Sobky


Salah quitte son village natal pour travailler au Caire. Il trouve un emploi dans le garage où son défunt père avait lui aussi travaillé. Près du garage, il y a un vidéo club tenu par Nadia, une jeune femme très jolie. Salah sympathise rapidement avec elle. Le matin, il l’aide à ouvrir sa boutique tout en conversant. Nadia lui fait découvrir les films de karaté. Salah est subjugué par les exploits des héros de ces films et il rêve de devenir lui aussi un champion de karaté comme Bruce Lee. Il fait alors la connaissance d’un ancien entraineur qui l’initie à cet art martial. C’est lui qui donne à Salah le surnom de «Mister Karaté». Malheureusement, un terrible accident va mettre un coup d’arrêt aux rêves et aux projets du jeune homme. En essayant d’arrêter un véhicule conduit par un adolescent, il fait une chute et une roue de la voiture lui broie l’une de ses jambes. Il est hospitalisé. La convalescence sera longue, il pourra à nouveau marcher sans béquilles mais en boîtant...

Notre avis : une réflexion intéressante sur le caractère aliénant d’un certain cinéma commercial véhiculant des mythes trompeurs et des modèles illusoires. Après son accident, le héros du film devra abandonner ses rêves de gloire et affronter la misère et la corruption qui gangrènent la société. Le réalisateur nous invite à suivre son personnage dans ses pérégrinations à travers une capitale dont les rues et les bâtiments ne sont que décrépitude et délabrement, une capitale qui est devenue le terrain de jeu des trafiquants et des corrompus. En fait, Mohamed Khan dans ce film nous raconte l’histoire d’un homme simple qui s’est libéré de ses chimères pour se convertir au réel et à l’action.


Jeudi 3 juillet à 15h

Le coeur a ses raisons d'Helmy Halim  (al-'alb lu ahkam, 1956)
avec Zinat Sedki (Zenobia), Abdel Salam Al Nabulsi (Anwar), Ahmed Ramzy (Hamdy), Faten Hamama (Karima), Soleiman El Gendy (l’enfant hospitalisé), Stephan Rosti (Wasif), Mimi Chakib (la femme de Wasif), Serag Mounir (le père d’Hamdy), Samia Ayoub (la fille de Wasif), Samia Mohamed (une danseuse), Lotfy El Hakim (un supporter), Mokhtar El Sayed (un camarade d’Hamdy), Zeinab Sedki (la grand-mère), Abdel Azim Kamal (le médecin), Fathia Ali (la femme de chambre), Ibrahim Khan (l’ami d’Hamdy), Ibrahim Hechmat (le directeur de l’hôpital), Abd El Fatah El Quossary (Al Hanouti), Soad Ahmed (la femme d’Al Hanouti)
Scénario : El Sayed Bedeir, Hassan Tawfik, Ali El Zorkani
Production : Helmi Halim
appréciation : 2/5


Karima est une jeune orpheline pauvre qui étudie à la faculté de médecine. Elle aime Hamdi, l’un de ses condisciples qui appartient à la classe aisée. Il est en outre un footballeur de renom. Toutes les tentatives de la jeune femme pour entrer en relation avec lui échouent lamentablement. Elle se confie à une vieille amie qui tient une boulangerie. Celle-ci lui donne des conseils pour attirer l’attention de celui qu’elle aime. Karima les met en pratique aussitôt et ça marche ! Hamdi lui propose un rendez-vous. Mais très vite, l’étudiante comprend qu’elle a fait l’objet d’un pari entre l’élu de son coeur et ses camarades. Elle est désespérée et refuse désormais de lui adresser la parole. Progressivement, les sentiments du jeune homme changent.

Notre avis : "Le Cœur a ses raisons" est un film mineur dans la filmographie de Faten Hamama. Certes, le jeu sobre et naturel de celle-ci permet de supporter les conventions d’un scénario réunissant tous les ingrédients dont se délecte le public de l’époque. On peut aussi apprécier l'évocation du petit peuple de Boulaq qui n'est pas sans rappeler le réalisme d'un Salah Abou Seif. Et puis, il y a quand même Zinat Sedky magistrale en boulangère qui enseigne à sa petite protégée les techniques de la séduction. Mais cela ne suffit pas à corser le goût insipide de ce roman-photo pour midinettes.
A noter que lors de la scène de la soirée estudiantine à laquelle participe l'héroïne, on entend le thème composé par Franz Waxman pour le film "A Place in the Sun" de Geroge Stevens (1951).


Mercredi 2 juillet à 19h30

Vie ou Mort de Kamal El Sheikh (Hayat Aw Mowt, 1954)
avec Imad Hamdi (Ahmed Ibrahim), Youssef Wahby (le chef de la police), Madiha Yousri (la femme d’Ahmed), Abdel Kader Al Maseri (le directeur de l’entreprise), Hussein Riad (le pharmacien), Rushdy Abaza (un policier), Doha Amir (Samira), Abdel Moneim Basioni (l’assistant du pharmacien), Tawfik Sadek (l’agent de police), Youssef Wahby (le gouverneur de la capitale), Rashwan Mustafa (un policier), Soad Fawzy (la femme infidèle), Abdel Moneim Ismaïl (le mari trompé), Adli Kasseb (un officier de police), Rafeaa El Shal (la belle-mère d’Ahmed), Abdel Badie El Arabi (le beau-père d’Ahmed), Hassan Abou Zeid (un ivrogne), Mohsen Hassanein (l’amant), Shaladimo (le voleur)
Scénario : Ali El Zorkani et Kamal El Sheikh
Production : Assia Dagher


Apparaît à la onzième place dans la liste des quinze meilleurs films égyptiens de tous les temps. Présenté au festival de Cannes en 1955.

Ahmed est au chômage depuis deux mois. L’aïd approche et il a besoin d’argent pour faire plaisir à sa femme et à sa petite fille Samira. Il se rend dans son ancienne entreprise pour obtenir sa prime de départ mais le patron reporte une nouvelle fois son versement. Pour offrir à sa fille Samira une nouvelle robe, Ahmed est contraint de vendre sa montre. Quand il rentre chez lui, il ne cache pas son profond désarroi. Sa femme lui propose de passer l’aïd chez ses parents mais Ahmed ne veut pas en entendre parler. Il s’emporte et il devient même blessant à l’égard de sa femme. Celle-ci décide de quitter immédiatement le domicile conjugal pour retourner avec sa fille chez ses parents. Mais quelques instants plus tard, quelqu’un frappe à la porte de l’appartement. C’est Samira qui n’a pas voulu laisser seul son père. Ahmed ne cache pas son bonheur mais il est soudain terrassé par un malaise cardiaque. Il demande à sa fille de se rendre à la pharmacie la plus proche pour s’y procurer le médicament dont il a besoin. Malheureusement, l’officine est fermée et Samira doit se rendre en tramway dans un autre quartier de la capitale pour trouver une pharmacie ouverte. La petite fille est reçue par un vieux pharmacien qui lui prépare la potion dont a besoin son père. C’est quand elle est déjà repartie que l’homme s’aperçoit qu’il a commis une grave erreur dans le dosage, faisant du médicament un poison mortel. Il faut retrouver l’enfant et son père au plus vite…

Notre avis : le troisième film du jeune prodige du cinéma égyptien des années cinquante, et c’est à nouveau un coup de maître. Kamal El Sheikh a parfaitement assimilé les codes du film noir américain et il les adapte de manière très intelligente pour réaliser une œuvre d’une grande originalité solidement ancrée dans la société de son temps. Le cinéaste tourne le dos aux conventions du cinéma égyptien des années cinquante : pas d’intrigues secondaires, pas de longs dialogues explicatifs, pas d’explorations laborieuses de la psychologie des personnages, et pas de danse orientale. « Vie ou Mort » est un film bref, nerveux, où seuls comptent l’action et le mouvement. Kamal El Sheikh rompt même avec les règles du star-system qui impose une hiérarchie entre rôle principaux et rôles secondaires. Dans son film, tous les personnages, joués par les plus célèbres acteurs et actrices de l’époque, ont la même importance. On a l’impression d’assister à une course de relais : le père de famille malade qui passe le témoin à sa petite fille qui le passe au pharmacien qui à son tour le passe au gouverneur de la capitale etc. Mais en fait, l’héroïne du film, c’est la ville elle-même. Kamal El Sheikh arpente avec sa caméra les rues du Caire et nous offre l’un des plus émouvants portraits de la capitale égyptienne. Et ce qui intéresse le cinéaste, ce sont avant tout les habitants de cette prodigieuse cité, les passants qui arpentent en tous sens les trottoirs, ceux qui attendent leurs tramways ou qui rêvent devant les devantures des boutiques. Il ne cache pas non plus sa fascination pour la horde des berlines rutilantes qui envahit les belles avenues du Caire et qui semble entraîner la foule dans sa ronde infernale. Rien que pour cette dimension « documentaire », il faut absolument voir ce film.


Mardi 1er juillet à 15h

L’Amour de mon Cœur d'Anwar Wagdi (Habib El Rouh, 1951)
avec Layla Mourad (Layla), Youssef Wahby (Youssef Fahmy), Anwar Wagdi (Wahid), Wedad Hamdy (Fatima), Ibrahim Omara (Cheikh Saber), Mimi Chakib (Sawsan Hanem), Samira Ahmed (Zouzou), Salah Mansour (un invité de la fête), Abdel Monem Basioni (un invité de la fête), Ferdoos Mohamed (la servante), Abdul Nabi Mohamed (le cuisinier), Abdelbadie El Arabi (le journaliste)
Scénario et dialogues : Abou Al Seoud Al Ibiary, Anwar Wagdi
Musique : Ahmed Sedky, Riad El Sonbati, Abdel Aziz Mahmoud
Production : Anwar Wagdi


Comédie sentimentale. Layla est une jolie femme, très élégante. Elle mène une existence heureuse et sans souci avec son mari, Wahid, qui est propriétaire d’un grand garage automobile en ville. Elle a aussi un talent qui fait l’admiration de tout son entourage : elle chante merveilleusement bien. Un jour, l’une de ses amies organise une réception chez elle. Evidemment, elle a demandé à Layla de chanter. Ce que cette dernière ne sait pas, c’est que parmi les invités, se trouve Youssef Fahmy, un musicien célèbre et quand celui-ci entend sa voix, il est tout de suite conquis.
Il est certain que la jeune femme peut devenir une grande chanteuse et il lui propose une collaboration artistique afin de réaliser ce projet. Layla est flattée mais son mari ne goûte guère cette proposition. Il invite néanmoins le musicien à venir dîner chez eux le lendemain. Quand Youssef se présente au domicile de Layla, elle est seule. Wahid a été retenu à son travail. Le musicien en profite pour tenter de convaincre à nouveau son hôtesse de se lancer dans la chanson. Celle-ci n’est pas insensible à ses arguments…

Notre avis : un drame sentimental dans lequel Youssef Wahbi joue un rôle qu’il affectionne tout particulièrement, celui du dandy tentateur portant smoking avec coupe de champagne à la main et gros cigare à la bouche. Face à lui, Anwar Wagdi qui se laisse aller à son penchant pour le jeu outré avec force grimaces et yeux exorbités. Heureusement, il y a Layla Mourad qui chante (Mais il y a aussi Youssef Wahbi qui massacre au piano la « Danse du Sabre » de Khatchaturian !). A noter le caractère légèrement autobiographique de cette histoire : dans la vraie vie, Anwar Wagdi et Layla Mourad furent mariés et leur union fut détruite par la jalousie excessive du premier. Il ne supportait pas que d’autres réalisateurs s’approchent de sa femme et la pauvre Layla devait endurer des scènes épouvantables. Dans le film, le mari finit par « récupérer » sa femme ; dans la vraie vie, après trois divorces, la rupture sera définitive.