إخراج : توجو مزراحي
Togo Mizrahi a réalisé 7 Heures en 1937.
Distribution :Ali Al Kassar (Othman), Bahiga El Mahdy (la femme d’Othman), Zakia Ibrahim (la belle-mère d’Othman), Ibrahim Arafa (le muet de la banque), Ali Abd El Al (le voisin d’Othman), Hassan Rashid (Hassan Bey)
Scénario : Togo Mizrahi et Ali Al Kassar
Hassan Rashid |
Ali El Kassar et Ali Abd El Al |
Bahiga El Madhi et Zakia Ibrahim |
Résumé
Ce jour-là commence comme tous les autres jours : il trie le courrier reçu, aide une jeune domestique muet à effectuer une démarche à l’un des guichets de l’établissement puis enfourche son vélo pour faire ses premières courses. Hélas ! à peine est-il entré dans une banque où il avait affaire qu’un voleur s’empare de sa bicyclette et disparaît. Quand Othman s’en aperçoit, il court à travers la ville pour la retrouver. Il finira par la récupérer grâce à l’imprudence de son voleur.
A la fin de sa journée, il rentre chez lui où il retrouve son épouse et son insupportable belle-mère. Il décide de sortir avec son voisin. Ils se rendent dans un café pour boire de la bière. Ils rentrent chez eux au milieu de la nuit totalement ivres. Tandis qu’Othman erre encore dans la rue, son voisin s’est installé dans sa chambre. Il faudra s’y reprendre plusieurs fois pour que celui-ci regagne son domicile et qu’Othman retrouve son lit. Avant de s’endormir, l’employé modèle cache en lieu sûr l’argent de la banque qu’il n’avait pas encore livré et met la sonnerie de son réveil à sept heures. Othman s’endort profondément. Dans la nuit deux voleurs s’introduisent dans sa chambre et lui dérobent l’argent de la banque. Quand le lendemain, il découvre le vol, Othman en informe aussitôt la banque. Le directeur refuse quelque arrangement que ce soit et porte plainte.
A la fin de sa journée, il rentre chez lui où il retrouve son épouse et son insupportable belle-mère. Il décide de sortir avec son voisin. Ils se rendent dans un café pour boire de la bière. Ils rentrent chez eux au milieu de la nuit totalement ivres. Tandis qu’Othman erre encore dans la rue, son voisin s’est installé dans sa chambre. Il faudra s’y reprendre plusieurs fois pour que celui-ci regagne son domicile et qu’Othman retrouve son lit. Avant de s’endormir, l’employé modèle cache en lieu sûr l’argent de la banque qu’il n’avait pas encore livré et met la sonnerie de son réveil à sept heures. Othman s’endort profondément. Dans la nuit deux voleurs s’introduisent dans sa chambre et lui dérobent l’argent de la banque. Quand le lendemain, il découvre le vol, Othman en informe aussitôt la banque. Le directeur refuse quelque arrangement que ce soit et porte plainte.
Le pauvre employé s’enfuit à Assouan , sa ville natale car son oncle qui est le maire de la ville lui doit de l’argent. Quand Othman arrive chez son parent, celui-ci est en train de marier sa fille. Il l’approche pour lui demander son dû mais celui-ci affirme ne pas l’avoir. Soudain, la police fait irruption dans la maison. Othman doit fuir. Il prend les habits de sa cousine Zahra et s’en revêt. Ainsi accoutré, il court à la gare et monte dans le train en partance pour Alexandrie. Dans le train, il rencontre Hassan Bey, un veuf retraité impressionné par sa beauté. Othman lui fait croire qu’il s’appelle Farida et qu’il est à la recherche d’un emploi. Hassan Bey l’emmène chez lui pour s’occuper de sa fille. Dans la maison, le domestique est le muet qu’Othman a aidé à la banque quelque temps auparavant. De même, un visiteur se présente chez Hassan Bey et celui-ci est l’agent de la banque à qui il avait annoncé le vol, début de tous ses ennuis. Othman est au supplice. Un peu plus tard, le serviteur muet comprend que Farida est en fait Othman mais il promet de garder le secret. Pourtant, pour celui-ci, les épreuves ne sont pas terminées : sa femme et sa belle-mère font leur apparition. Elles doivent faire une robe pour la fille de la maison. Evidemment, elles découvrent sans peine qui se cache derrière Farida. Le scandale est immense. Othman tente de fuir poursuivi par tout le personnel de la maison. La police arrive et sonne à la porte. En fait, c’est la sonnerie du réveil. Othman est dans son lit. Il a fait un horrible cauchemar et il est toujours en possession de l’argent de la banque.
Critique
7 heures est l’un des films que l’on doit à la collaboration d’Ali Al Kassar et de Togo Mizrahi. Le deux hommes vont travailler ensemble pendant une dizaine d’années.
Togo Mizrahi fut un pionnier à qui le cinéma égyptien doit énormément. Il est né en 1901 à Alexandrie dans une famille juive d’origine italienne. Après des études d’économie, et un voyage en France, il crée sa société de production et installe ses studios dans sa ville natale (Il déménagera au Caire au début de la seconde guerre mondiale.)
Dans les années trente, il produit, écrit, joue et réalise un grand nombre de comédies avec notamment le grand comédien Ali Al Kassar. Celui-ci vient du théâtre. Dès le début du XXe siècle, il acquiert une grande renommée avec sa compagnie grâce à ses comédies et à ses farces. Tout naturellement, quand au début des années trente, le cinéma prend son essor, il décide de participer à cette toute nouvelle aventure. C’est alors qu’il fait la rencontre de Togo Mizrahi.
Ali Al Kassar a créé le personnage d’Othman, un nubien naïf, à l’accent très prononcé. Ce sera le héros principal de la plupart des films des deux partenaires. Dès ses premières apparitions à l’écran, le succès est au rendez-vous.
Chaque opus est confectionné selon la même recette : une intrigue plus ou moins lâche relie une série de sketches dans lesquels on retrouve Othman , pauvre bougre aux prises avec les vicissitudes de la vie quotidienne ; les procédés comiques sont empruntés à la tradition de la farce égyptienne comme le changement d’identité, la confusion rêve/réalité, la caricature des paysans de Haute Egypte ou bien la satire des femmes toujours présentées comme des mégères autoritaires.
Nous retrouvons dans 7 heures toutes ces caractéristiques. Le premier tiers du film est constitué de saynètes évoquant les petits soucis auxquels est confronté Othman, un employé de banque, dans sa vie privée comme dans sa vie professionnelle. L’intrigue principale ne démarre vraiment que dans la deuxième partie: Othman est accusé de vol et pour échapper à la police, il se réfugie dans son village natal. C’est là qu’il a l’idée de se travestir en femme et ce déguisement l’entraînera dans maintes situations délicates : il sera courtisé par des hommes, il partagera l’intimité de femmes qui abandonneront toute pudeur en sa présence, il subira les caresses des uns et des autres .
Ce film comme d’autres de Togo Mizrahi a fait l’objet d’analyses très savantes notamment de la part de deux spécialistes du cinéma égyptien, Viola Shafik et Deborah Starr. Evidemment mon propos n’est nullement de rivaliser avec ces brillantes universitaires dont on peut retrouver une partie des travaux sur le net.
Je dirai seulement que ce qui à mes yeux fait tout l’intérêt de cette comédie, c’est ce mélange unique de tradition et de modernité qu’il nous offre. La tradition avec les emprunts à la farce théâtrale mais aussi avec l’enregistrement sur un mode quasi ethnographique des chants et des danses lors d’un mariage paysan ; et puis la modernité avec le portrait du petit peuple des villes mais surtout avec la multiplication de ces situations immorales que permet le travestissement du héros. En revêtant des habits de femme, Othman rend d’un coup la morale traditionnelle inopérante et tout devient ainsi possible ! On comprend qu’il s’agit pour Togo Mizrahi d’inscrire son travail dans un cadre national tout en adoptant la liberté de ton revendiquée en cette première moitié du XXe siècle par tous les artistes à travers le monde. Il milite pour un cinéma à la fois égyptien et moderne.
L’influence de ce film sera considérable. Il inspirera notamment ceux qui domineront la comédie dans les années cinquante et soixante : l’acteur Ismaïl Yassin et le réalisateur Fateen Abdel Wahab (voir le film Mademoiselle Hanafi en 1954) .
Je ferai juste une réserve : le rythme est un peu lent et les gags parfois laborieux. (On est très loin du tempo débridé du burlesque américain !). Pourtant le générique du début donne lieu à une courte séquence menée allégro vivace. Sur une musique enjouée, on fonce en voiture à travers les rues d’Alexandrie ; l’atmosphère est estivale, les automobiles et les tramways se partagent en bonne intelligence les larges chaussées de la cité ; soudain un jeune homme traverse la rue, fait une grimace dans la direction de la caméra et disparaît. On tourne brusquement dans une voie perpendiculaire qui débouche sur la célèbre corniche de la ville. Petite virée touristique dans ce qui fut l’une des plus belles villes du monde !
Togo Mizrahi meurt en Italie en 1986, oublié de tous. En quittant l’Egypte, quarante ans plus tôt, il a mis un terme à sa carrière de cinéaste.
Qu’une personnalité qui fit tant pour la culture égyptienne ait dû fuir son pays en 1948, chassé par l’antisémitisme grandissant, est un fait navrant qui pourrait nous entraîner à des considérations amères sur l’ingratitude des peuples à l’égard de leurs grands hommes.
Appréciation : 4/5
****
Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin