lundi 20 juin 2016

Crime d'Amour (Gharimet hub, 1955)

جريمة حب
إخراج : عاطف سالم


Crime d' Amour a été réalisé par Atef Salem en 1955.
Distribution : Hind Rostom (Lola), Imad Hamdi (Maître Galal), Abdel Aziz Ahmed (l’assistant de maître Galal), Mariam Fakhr Eddine (Thuraya, la femme de Maître Galal), Zaki Ibrahim (le père de Thuraya), Salah Mansour (ex-mari de Lola), Ali Al Gandour (le procureur général), Layla Hamdy (Rose), Adli Kasseb (le juge), Mona (la petite fille du client de maître Galal), Ahmed Shawki (le client de maître Galal), Fatheia Shahin (l’épouse du client de maître Galal), Abdel Halim El Qalawy (le père du client de maître Galal), Hassan El Baroudi (Omar, le portier de Lola) 
Scénario : Mahmoud Sohby 
Histoire originale : Amin Youssef Ghorab Musique : Otto Cesana (Ecstasy)


Hind Rostom et Imad Hamdi
















Abdel Aziz Ahmed et Imad Hamdi
















Imad Hamdi et Mariam Fakhr Eddine
















Hind Rostom et Imad Hamdi
















Mariam Fakhr Eddine et Zaki Ibrahim






Salah Mansour


















Résumé 

Maître Galal est un avocat expérimenté. Pourtant, à cause d’une négligence, il perd un procès important. Il a égaré un document qui devait prouver l’innocence de son client. Il est traumatisé par cet échec et depuis, il n’arrive plus à plaider. C’est dans cette période difficile qu’il fait la connaissance d’une jeune divorcée, Lola. Ils deviennent amants. Maître Galal délaisse son épouse et passe des nuits entières chez sa jeune maîtresse. Mais cette liaison n’est pas du gout de l’ex-mari. Un jour celui-ci trafique la voiture des deux amoureux qui échappent de peu à la mort. 
Peu après, l’avocat apprend que Thuraya, sa femme, est enceinte. Il est fou de joie et il décide de reprendre sa vie d’autrefois. Il retourne au tribunal mais il y rencontre l’un des proches de son ancien client condamné par sa faute. Il fuit aussitôt et rejoint sa maîtresse. L’ex mari contacte alors Thuraya pour lui révéler la liaison que son mari entretient avec son ex-femme. 
L’épouse veut en avoir le cœur net. Elle se rend au domicile de Lola. Quand elle arrive chez sa rivale, elle est intriguée par la porte qui est restée entrouverte. Son mari n’est pas dans l’appartement mais elle découvre le corps sans vie de Lola étendue sur le sol : la jeune femme a été poignardée. Thuraya hurle. Les voisins accourent, la police est prévenue. Naturellement, l’épouse est accusée du meurtre car le mobile est évident. Au procès, c’est son mari qui assure sa défense. Grâce à une bande magnétique qui a tout enregistré le soir du crime, Galal parvient à obtenir l’acquittement pour sa femme. Le coupable, c’est Omar Shehata, le vieux portier de Lola. Celui-ci avoue qu’il a agi pour le compte de l’ex-mari de celle-ci. 


Critique

Nous sommes en terrain connu.  Ce Crime d’amour qui mêle une intrigue policière et un drame psychologique multiplie les références au film noir hollywoodien. Nous avons un avocat célèbre qui arbore tous les signes de la réussite sociale mais dont l’existence va être bouleversée par un échec professionnel. Nous avons une vamp, maîtresse de l’avocat, qui connaîtra un destin tragique à cause d’un ex mari jaloux et vindicatif. Nous avons des scènes de prétoire avec un public composé de citoyens sages et attentifs, des scènes de bar avec serveur en  veste blanche et nœud papillon, des scènes d’intérieur dans des appartements luxueux.  Et on retrouve tous les « accessoires » du cinéma américain de l’époque : grosses voitures aux formes arrondies, robes moulantes de la vamp à la démarche chaloupée, alcool et cigarettes à volonté (manque le chapeau trilby pour les hommes mais le climat du Caire n’est pas celui de New-York !). Enfin la musique (Ecstasy du compositeur américain Otto Cesana) a  l’emphase et les accents nostalgiques des B.O. composées par Max Steiner, Alfred Newman  ou Franz Waxman.
Au-delà de cette adaptation d’un genre, c’est à un réalisateur bien précis qu’Atef Salem emprunte bon nombre de thèmes ou de procédés. Une analyse minutieuse du film pourrait relever bien des similitudes avec l’œuvre d’Alfred Hitchcock. En voici quelques-unes :
Comme dans un certain nombre d’histoires contées par le grand réalisateur anglo-américain, l’intrigue de Crime d’Amour comporte une dimension psychanalytique mettant en évidence le caractère sexuel du drame vécu par le héros : le procès qu’il perd à cause de sa propre négligence provoque en lui un véritable traumatisme. Il devient impuissant, d’abord sur le plan professionnel (il fuit les tribunaux) et sur le plan sexuel (il se détourne de sa femme). C’est grâce à sa maîtresse qu’il retrouvera confiance en lui et pourra à nouveau se conduire en « homme ».
Autre thème cher à Hitchcock,  celui de l’innocent accusé d’un crime qu’il n’a pas commis. Atef Salem en propose une version corsée : le héros doit défendre sa femme accusée à tort d’avoir tué sa maîtresse (On connaît situation plus confortable !). Mais ainsi le réalisateur égyptien reste fidèle à l’esprit cynique de son modèle : l’avocat retrouve son prestige d ’avocat et l’amour de sa femme sur le cadavre de sa maîtresse.
Parlons maintenant du fameux MacGuffin. On appelle ainsi l’objet matériel (bijoux, documents secrets) après quoi courent tous les personnages d’une fiction. C’est l’élément moteur de l’intrigue. On le retrouve dans un grand nombre des films d’Alfred Hitchcock. Il est présent aussi dans Crime d’Amour. C’est le document qui innocentait le client du héros et que celui-ci égare au café. Ce MacGuffin  passe de main en main tout au long du film.  


1) Le père de l’inculpé le remet à Maître Galal.



2) Maître Galal perd le document dans un bar 



3) Il est récupéré par l’homme chargé du ménage qui le confie au serveur.

     


4) Le serveur le restitue à l'assistant de Maître Galal.



5) Celui-ci le confie à Lola.




6) La jeune femme en prend connaissance



7) et décide de le rendre à l'avocat. La boucle est bouclée !



Pour finir, ce Crime d’Amour ne serait qu’un brillant pastiche sans la présence électrisante d’Hind Rostom.  Elle est sans doute l’élément le moins hitchcockien du film. L’autre actrice, Mariam Fakhr Eddin a la blondeur et la froideur des héroïnes du maître anglo-saxon (Rappelons que sa mère était autrichienne). En revanche, Hind Rostom fait partie de ces actrices « charnelles » qui ont « le sexe affiché sur la figure » et que ce dernier détestait. Manifestement Atef Salem ne partage pas cette répulsion. On le sent même fasciné par la beauté de l’actrice. Avec ce personnage de Lilia, il lui offre l’un de ses plus beaux rôles et l’un des plus singuliers. Elle n’incarne pas la femme fatale agressive et égoïste comme à l’ordinaire mais une vamp au grand cœur, généreuse et sentimentale. Une héroïne donc plutôt positive pourtant sa mort brutale  arrangera tout le monde et au premier chef Maître Galal qui  pourra ainsi reprendre sa douce existence auprès de son épouse si douce et si compréhensive. Lilia est une femme doublement victime, et de son ex-mari et de son amant.

Hind Rostom
Appréciation : 4/5
****


Texte : © Ciné Le Caire/Philippe Bardin


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